La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2020 | FRANCE | N°16/13372

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 19 juin 2020, 16/13372


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 19 Juin 2020



(n° , 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/13372 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ25I



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Septembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16/00402



APPELANTE

SA OGF

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Morgane COUR

TOIS D'ARCOLLIERES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0503 substituée par Me Alexandra NICOLAS, avocat au barreau de PARIS,

toque : P0503



INTIMÉE

CPAM 26 - DROME

[Adresse 4]

[Adr...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 19 Juin 2020

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/13372 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ25I

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Septembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16/00402

APPELANTE

SA OGF

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Morgane COURTOIS D'ARCOLLIERES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0503 substituée par Me Alexandra NICOLAS, avocat au barreau de PARIS,

toque : P0503

INTIMÉE

CPAM 26 - DROME

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

non comparante - non représentée

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 2]

[Adresse 2]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Février 2020, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Gilles REVELLES, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre

M. Gilles REVELLES, Conseiller

Mme Bathilde CHEVALIER, Conseillère

Greffier : Mme Typhaine RIQUET, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- délibéré du 15 mai 2020 prorogé au 19 juin 2020, prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la S.A. OGF d'un jugement rendu le 16 septembre 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme (la caisse).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les circonstances de la cause ont été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé.

Il suffit de rappeler que le 12 décembre 2014, M. [G] [B], conseiller funéraire depuis le 1er octobre 1980, a souscrit une déclaration de maladie professionnelle sur la base d'un certificat médical initial du 27 novembre 2014 indiquant un état dépressif chronique'; que la caisse a pris en charge cette pathologie au titre de la législation professionnelle le 24 août 2015 après l'avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelle de Lyon du 11 août 2015'; que le 22 octobre 2015, la société a saisi la commission de recours amiable d'une contestation de cette décision, puis le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris le 15 janvier 2016 sur rejet implicite'; que par jugement avant dire droit du 16 septembre 2016, ce tribunal a fait droit à la demande de saisine d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en désignant le comité de la région Bourgogne-Franche-Comté, et a débouté la société de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge.

Le 18 octobre 2016, la société a interjeté appel de ce jugement, qui lui avait été notifié le 30 septembre 2016, en ce qu'il a rejeté son recours tendant à lui déclarer inopposable le caractère professionnel de la pathologie déclarée par M. [G] [B] le 27 novembre 2014, le caractère professionnel de la maladie n'étant pas établi et les dispositions de l'article R.'441-10, alinéa 1, et R.'441-11, alinéa 3, du code de la sécurité sociale n'ayant pas été respectées.

Par jugement du 18 janvier 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a ordonné un sursis à statuer sur l'ensemble des demandes des parties dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel de Paris.

Représentée par son conseil, la société, qui a confirmé avoir eu connaissance des écritures de la caisse avant l'audience et n'a formé aucune observation sur la dispense de comparution sollicitée par l'appelante, a demandé à la cour de':

À titre principal':

- infirmer le jugement rendu le 16 septembre 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris';

- déclarer que la décision prise par la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme de reconnaître le caractère professionnel de l'état dépressif chronique invoqué par M. [G] [B] le 27 novembre 2014 lui est inopposable, le caractère professionnel de la maladie n'étant pas établi à son égard';

À titre subsidiaire':

- infirmer le jugement rendu le 16 septembre 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris';

- déclarer que la décision prise par la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme de reconnaître le caractère professionnel de l'état dépressif chronique invoqué par M. [G] [B] le 27 novembre 2014 lui est inopposable, les dispositions des articles R.'441-14, alinéa 3, et D.'461-29 du code de la sécurité sociale n'ayant pas été respectées';

À titre infiniment subsidiaire':

- confirmer le jugement rendu le 16 septembre 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en ce qu'il a ordonné la désignation d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles afin de se prononcer sur le lien de causalité direct et essentiel entre la pathologie déclarée par son salarié et le travail effectué.

La société fait essentiellement valoir que':

À titre principal':

- l'affection déclarée n'entrant pas dans un tableau de maladie professionnelle la transmission du dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles était impérativement subordonnée à la condition que le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) résultant de cette affection soit au moins égal à 25%';

- la caisse n'établit pas que son médecin-conseil avait considéré que la pathologie entraînait un taux d'IPP d'au moins 25% lorsqu'elle a saisi le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ;

- au contraire, à la signature du colloque médico-administratif le 2 juin 2015, l'état de santé de l'assuré avait déjà été considéré comme consolidé dès le 30 avril 2015 avec un taux d'IPP limitée à 15%';

- malgré une demande réitérée avec communication des coordonnées d'un médecin conseil habilité, la caisse a refusé de lui communiquer le rapport d'évaluation des séquelles qui a été établi par le service médical pour déterminer le taux d'IPP prévisible';

- dès lors, le taux d'IPP prévisible au moment où la caisse a pris la décision de transmettre le dossier au CRRMP était inférieur à 25% au regard du taux définitif d'ores et déjà fixé à 15%, si bien que la caisse ne pouvait pas transmettre le dossier au comité régional et aurait dû refuser de reconnaître le caractère professionnel de la maladie qui n'était pas établi';

À titre subsidiaire':

- la caisse ne lui a pas communiqué l'entier dossier transmis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ;

- en effet, certaines pièces essentielles ne figuraient pas dans le dossier qu'elle lui a transmis le 3 juin 2015, à savoir': le rapport et les conclusions administratives du médecin du travail, les conclusions administratives du médecin conseil de la caisse primaire, et le rapport d'évaluation du taux d'IPP qui fixe un taux supérieur ou égal à 25% en contradiction avec la décision d'attribution d'un taux définitif de 15% au 30 avril 2015';

- la liste des pièces mentionnées dans la lettre de la caisse du 3 juin 2015 est dépourvue d'ambiguïté à cet égard (déclaration de maladie professionnelle, certificat médical initial, questionnaires assuré et employeur, rapport d'enquête administrative, fiche colloque médico-administratif)';

- la caisse a refusé à deux reprises, et malgré la désignation d'un médecin habilité, de communiquer le rapport d'évaluation des séquelles établi par le service médical de la caisse qui a considéré que la pathologie déclarée entraînait un taux d'IPP égal ou supérieur à 25%';

- la caisse ne justifie d'aucune démarche auprès de l'assuré pour demander la désignation d'un médecin par l'intermédiaire duquel l'ensemble des rapports médicaux auraient pu être communiqués au médecin-conseil de la société alors même que cette obligation lui incombe expressément ;

- ces pièces ont pourtant, de toute évidence, été déterminantes pour caractériser le lien de causalité direct essentiel entre l'affection déclarée et le travail habituel de l'assuré ainsi qu'il en résulte de l'avis du 11 août 2015';

À titre infiniment subsidiaire :

- lorsque le comité a rendu un avis favorable et que la caisse reconnaît le caractère professionnel de l'affection, l'employeur conserve la possibilité de contester le caractère professionnel de cette affection en sollicitant la saisine d'un autre comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles';

- il s'agit d'une obligation qui s'impose à la juridiction dans le cadre d'un recours entre employeur et caisse.

Par ses conclusions écrites, envoyées au greffe le 19 février 2020, dans lesquelles elle a demandé une dispense de comparution en application des dispositions des articles R.'142-10-4 du code de la sécurité sociale et 446-1 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour de confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris du 16 septembre 2016, de déclarer la prise en charge de la maladie professionnelle du salarié opposable à la société et de rejeter la demande de la société de désignation d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

La caisse fait valoir en substance que, sur le caractère professionnel de la pathologie en cause':

- le taux d'IPP prévisible qui conditionne la saisine d'un CRRMP est à distinguer du taux d'IPP définitif fixé lors de la date de consolidation';

- si en l'espèce le taux d'IPP définitif est de 15%, le taux prévisible ayant permis de saisir le CRRMP était de 25%';

- le date de consolidation a été fixée au 30 avril 2015 par avis du 24 septembre 2015, le taux d'IPP prévisible a été fixé le 2 juin 2015, et le taux définitif le 26 novembre 2015';

- de sorte que, même s'il est inférieur au taux requis pour la saisine d'un comité, le taux d'IPP définitif de 15% ayant été évalué postérieurement au colloque médico-administratif du 2 juin 2015 ayant fixé le taux prévisible au moins à 25%, c'est à bon droit qu'elle a saisi le comité régional';

Sur le respect du principe du contradictoire':

- il n'est pas contesté que la société a eu accès aux éléments du dossier, qui lui ont été transmis par lettre du 3 juin 2015';

- la société lui reproche d'avoir manqué aux dispositions de l'article D.'461-29 du code de la sécurité sociale en ne lui transmettant pas l'avis du médecin du travail et le rapport du médecin conseil';

- cependant les éléments en question ne sont communicables à la société que par l'intermédiaire d'un médecin désigné par l'assuré';

- en l'espèce, elle a informé la société le 23 avril 2015 de l'impossibilité de lui communiquer ces pièces au motif que le salarié ne lui avait pas signifié le nom de son praticien';

- si bien qu'elle a respecté la procédure qui s'imposait à elle et ne peut être tenue responsable de la non-communication des deux pièces en cause qui échappent à son pouvoir';

Sur la demande de désignation d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles':

- la pathologie déclarée n'est pas désignée dans un tableau de maladies professionnelles';

- elle a donc procédé aux vérifications médico-administratives requises par les textes';

- le médecin-conseil ayant estimé le taux d'IPP prévisible égal ou supérieur à 25%, le dossier a été transmis à un comité régional';

- le 11 août 2015 le comité régional a conclu à un lien direct et essentiel entre la maladie et l'activité professionnelle de l'assuré';

- cet avis s'impose à elle';

- la société n'apportant aucun élément susceptible de remettre en cause l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de saisine d'un second comité.

Pour un plus ample exposé des moyens et arguments des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures respectives.

SUR CE':

- Sur le taux d'incapacité permanente partielle prévisible et la saisine du CRRMP':

La société conteste l'opposabilité de la prise en charge de la pathologie déclarée au titre des maladies professionnelles par son salarié au motif que, cette pathologie n'entrant pas dans un tableau des maladies professionnelles, la caisse n'aurait pu transmettre le dossier à un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles que si le taux d'IPP de l'intéressé avait été au moins égal à 25%, ce qui n'était pas la cas puisque ce taux avait été fixé à 15% au jour de la consolidation intervenue avant la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

La caisse réplique qu'au jour de la saisine du comité régional, le taux d'IPP prévisible avait été évalué au moins à 25%, et que le taux définitif de 15% au jour de la consolidation n'avait été fixé en réalité qu'après la date de saisine du comité, même si la date de consolidation fixée postérieurement à cette saisine soit de fait antérieure à celle-ci.

L'article L.'461-1, alinéas 2, 4 et 5, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce, dispose que':

« (...)'Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. (...)

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L.'434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L.'315-1.'»

L'article R.'461-8 du code de la sécurité sociale dispose que le taux d'incapacité mentionné au quatrième alinéa de l'article L'461-1 est fixé à 25%.

Il résulte de ces textes qu'avant de prendre position sur la prise en charge d'une maladie hors tableau, la caisse ne peut que demander au service médical d'évaluer le taux d'IPP prévisible, lequel ne peut être que provisoire en l'absence de guérison, de stabilisation ou de consolidation de l'état de santé de l'assuré.

Dans le cas ou le taux d'IPP est supérieur ou égal à 25%, la caisse transmet le dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles pour avis sur le lien de causalité entre le travail habituel et la maladie dont la prise en charge est sollicitée.

En cas de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle, il y a évaluation d'un taux définitif d'IPP au jour de la consolidation, de la guérison ou de la stabilisation de l'état de santé de l'assuré.

Ainsi, il convient de distinguer strictement, d'une part, le taux d'IPP évalué par le médecin-conseil de l'assurance maladie pour la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et, d'autre part, le taux d'IPP fixé par la caisse après consolidation de l'état de la victime afin de déterminer le montant des prestations à attribuer. La fixation de ce second taux en-dessous du seuil de 25% ne saurait donc aboutir à remettre en cause ni la saisine du comité régional ni le caractère professionnel de la lésion établi par celui-ci.

En l'espèce, il ressort des pièces versées au dossier que le colloque médico-administratif du 2 juin 2015 a retenu un taux d'IPP prévisible égal ou supérieur à 25% en vue de la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. Par avis du 24 septembre 2015, le médecin-conseil de la caisse a fixé la date de consolidation au

30 avril 2015. Puis, le taux d'IPP possible à évaluer a été fixé à 10% le 23 octobre 2015 par le même médecin-conseil. Enfin, après avis d'un médecin-psychiatre, le taux définitif a été fixé à 15%. Ce dernier taux d'IPP a été notifié à l'employeur le 26 novembre 2015. De sorte qu'au 2 juin 2015, le taux prévisible était de 25% quand bien même le

26 novembre 2015 le taux définitif sera fixé à 15% avec effet rétroactif au 30 avril 2015.

Il en résulte que le taux provisoire d'IPP de l'assuré avait bien été évalué par le médecin-conseil de la caisse comme étant supérieur ou égal à 25% lorsque le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles a été saisi.

Dans ces conditions, le dossier a été valablement transmis au comité régional pour avis et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- Sur le respect des dispositions des articles R.'441-14, alinéa 3, et D.'461-29 du code de la sécurité sociale':

La société conteste la régularité de la procédure d'instruction de la demande de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie en cause, au motif que le principe du contradictoire n'a pas été respecté puisque la caisse ne lui a pas communiqué l'entier dossier transmis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, en particulier le rapport et les conclusions administratives du médecin du travail, les conclusions administratives du médecin-conseil de la caisse primaire et le rapport d'évaluation du taux d'IPP. La société ajoute que si le rapport d'évaluation du taux d'IPP ne peut être transmis que sous le couvert d'un médecin désigné par l'assuré, les avis du médecin du travail et du médecin-conseil de la caisse relèvent au contraire de conclusions administratives qui pouvaient lui être directement transmises, ce que la caisse, malgré deux demandes et la désignation expresse d'un médecin-conseil par l'employeur, a refusé de faire. Enfin, la société reproche à la caisse de ne justifier aucune démarche auprès de l'assuré pour demander la désignation d'un médecin par l'intermédiaire duquel les rapports médicaux auraient pu être communiqués.

La caisse réplique d'une part qu'il n'est pas contesté que la société a eu accès aux éléments du dossier le 3 juin 2015 et d'autre part que les pièces dont il a été sollicité la communication n'avaient pas pu être communiquées dans la mesure où l'assuré n'avait pas répondu à sa demande de désignation d'un médecin à cette fin.

L'article D.'461-29 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause, dispose que':

«'Le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre':

1° Une demande motivée de reconnaissance signée par la victime ou ses ayants droit et un questionnaire rempli par un médecin choisi par la victime dont les modèles sont fixés par arrêté';

2° Un avis motivé du médecin du travail de la ou des entreprises où la victime a été employée portant notamment sur la maladie et la réalité de l'exposition de celle-ci à un risque professionnel présent dans cette ou ces entreprises';

3° Un rapport circonstancié du ou des employeurs de la victime décrivant notamment chaque poste de travail détenu par celle-ci depuis son entrée dans l'entreprise et permettant d'apprécier les conditions d'exposition de la victime à un risque professionnel';

4° Le cas échéant les conclusions des enquêtes conduites par les caisses compétentes, dans les conditions du présent livre';

5° Le rapport établi par les services du contrôle médical de la caisse primaire d'assurance maladie qui comporte, le cas échéant, le rapport d'évaluation du taux d'incapacité permanente de la victime.

Les pièces demandées par la caisse au deuxième et troisième paragraphes doivent être fournies dans un délai d'un mois.

La communication du dossier s'effectue dans les conditions définies à l'article R.'441-13 en ce qui concerne les pièces mentionnées aux 1°, 3° et 4° du présent article.

L'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par les services du contrôle médical mentionnés aux 2° et 5° du présent article ne sont communicables à la victime, ses ayants droit et son employeur que par l'intermédiaire d'un praticien désigné à cet effet par la victime ou, à défaut, par ses ayants droit. Ce praticien prend connaissance du contenu de ces documents et ne peut en faire état, avec l'accord de la victime ou, à défaut, de ses ayants droit, que dans le respect des règles de déontologie.

Seules les conclusions administratives auxquelles ces documents ont pu aboutir sont communicables de plein droit à la victime, ses ayants droit et son employeur.

La victime, ses ayants droit et son employeur peuvent déposer des observations qui sont annexées au dossier.'»

L'article R.'441-14, 3e alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause, dispose que':

«'Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R.'441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R.'441-13.'»

Il résulte de ces textes qu'en cas de saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont l'avis s'impose à la caisse, l'information du salarié, des ayants droit et de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief s'effectue avant la transmission du dossier audit comité et que la procédure préalable à la saisine de ce comité est soumise à un caractère contradictoire dont le non-respect entraîne l'inopposabilité de la décision de la caisse à l'employeur.

L'avis du médecin du travail et le rapport du médecin-conseil de la caisse, portant sur la reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie, constituent des éléments susceptibles de faire grief à l'employeur et sont donc communicables à l'employeur, mais, s'agissant de pièces médicales, cette communication ne peut se faire que par l'intermédiaire d'un médecin désigné par l'assuré.

En l'espèce, il est constant que le dossier a été communiqué à la société le 3 juin 2015, soit avant la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles intervenue le 26 juin 2015, et comprenait les pièces suivantes':

- la déclaration de maladie professionnelle,

- le certificat médical initial,

- les questionnaires assuré et employeur,

- le rapport d'enquête administrative,

- la fiche du colloque médico-administratif.

Il n'est pas contesté que les avis et rapport du médecin du travail et du médecin-conseil de la caisse primaire, et le rapport d'évaluation du taux d'IPP ne faisaient pas partie des pièces communiquées à la société.

Dans la lettre du 3 juin 2015, la caisse a indiqué à la société que le dossier serait transmis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles le 17 juin 2015 et que jusqu'à cette date elle pouvait «'également formuler des observations qui seront annexés au dossier. Cependant, l'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par le service médical, ne vous seront communicables que par l'intermédiaire d'un praticien désigné à cet effet par la victime (ou ses ayants droit). Ce praticien ne peut faire état du contenu de ces documents, avec l'accord de votre salarié(e) ou de ses ayants droit, que dans le respect des règles de déontologie.'» L'employeur n'a accusé réception du dossier que le 16 juin 2015. La caisse a reçu cet accusé le 22 juin 2015 et a saisi le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles le 26 juin 2015.

Le comité régional a rendu son avis le 11 août 2015 en visant les avis et rapports du médecin du travail et du médecin-conseil de la caisse qui n'ont pas été communiqués à la société sans mentionner pour autant l'existence de conclusions administratives distinctes ou détachables desdits avis et rapport.

Aujourd'hui, la société ne conteste pas que le rapport d'évaluation du taux d'IPP ne pouvait être communiqué qu'au médecin désigné par l'assuré.

En revanche, la société soutient avoir demandé à deux reprises à la caisse la communication des deux autres pièces litigieuses.

Or, il ressort des pièces versées que la première demande a été formulée le 16 juin 2015 en ces termes': «'Nous vous demandons de bien vouloir communiquer à notre médecin conseil, le docteur [L] [S] ([Adresse 1]), le rapport établi par le service médical et ayant permis de considérer que la pathologie déclarée par

M. [G] [B] serait susceptible de gérer générer un taux d'IPP d'au moins 25%.'» La caisse a répondu par lettre datée par erreur du 23 avril 2015 en ces termes': «'En réponse à votre demande de pièces médicales relatives au dossier de monsieur [B], je vous informe que cette communication n'est possible que par l'intermédiaire d'un médecin désigné par la victime. Le nom du praticien ne nous a, à ce jour, pas été signifié. Je ne peux en conséquence accéder à votre demande.'»

Il ne ressort donc pas de ces lettres que, hormis le rapport d'évaluation du taux d'IPP, la société ait sollicité la transmission des conclusions administratives du médecin du travail et du médecin-conseil de la caisse.

Dans la seconde demande du 13 juillet 2015, en réponse à la lettre de la caisse du «'23 avril 2015'», la société a sollicité la communication de pièces en ces termes': «'Si le rapport d'évaluation du taux d'IPP doit être transmis entre médecins, les conclusions administratives des documents médicaux sont, en revanche, communicables de plein droit à l'employeur. Nous vous remercions, en conséquence, de bien vouloir nous adresser lesdites conclusions.'»

Il ne ressort pas des termes imprécis et insuffisants de cette lettre que la société sollicitait expressément les conclusions administratives des avis et rapports du médecin du travail et du médecin-conseil de la caisse, étant rappelé que le colloque médico-administratif a été communiqué à la société. En tout état de cause, à cette date, le dossier avait été transmis au comité régional après que la société a pu disposer d'un délai de dix jours pour prendre connaissance des pièces qui lui avaient été préalablement communiquées et formuler toutes les observations ou demandes utiles avant la saisine du comité.

Dans ces conditions, la caisse a respecté les dispositions légales et réglementaires applicables et le caractère contradictoire de l'instruction avant la transmission du dossier.

En conséquence, le jugement critiqué sera confirmé de ce chef.

- Sur la demande de désignation d'un nouveau comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles':

La caisse sollicite incidemment l'infirmation du jugement et le rejet de la demande de désignation d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles formée par la société qui a été favorablement accueillie par les premiers juges.

La société réplique que la désignation d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, en cas de litige portant sur l'avis d'un premier comité, est de droit.

L'article R.'142-24-2, devenu R.'142-17-2, du code de la sécurité sociale dispose que':

«'Lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L.'461-1, le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L.'461-1.

«'Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches.'»

Ainsi, la demande formée par la société étant de droit, il convient de confirmer le jugement sur ce point.

PAR CES MOTIFS':

La cour,

Déclare l'appel recevable,

Confirme le jugement en toutes ces dispositions';

Condamne la S.A. OGF aux dépens d'appel

La Greffière,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 16/13372
Date de la décision : 19/06/2020

Références :

Cour d'appel de Paris L4, arrêt n°16/13372 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-19;16.13372 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award