Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 6
ORDONNANCE DU 03 SEPTEMBRE 2020
Contestations d'Honoraires d'Avocat
(N° /2020, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00192 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5IEX
NOUS, Sylvie FETIZON, Conseillère, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Benoit PEREZ, Greffier lors des débats et de Vanessa ALCINDOR, Greffière, au prononcé de l'ordonnance.
Vu le recours formé par :
Madame [F] [O]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Morgane GREVELLEC, avocate au barreau de PARIS, toque : E2122,
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/023806 du 07/06/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
Demanderesse au recours,
contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :
Maître [X] [P]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Laurent PAULY, avocat au barreau de PARIS
Défenderesse au recours,
Par décision réputée contradictoire, statuant publiquement, et après avoir appelé les parties à notre audience du 03 Juin 2020 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,
L'affaire a été mise en délibéré au 03 Septembre 2020 :
Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;
Le 26 février 2018, Mme [F] [O] a formé un recours contre la décision rendue de façon réputée contradictoire par M. le Bâtonnier de l'ordre des Avocats de Paris le 2 février 2018 qui a :
- fixé à la somme de 9 900 euros HT le montant total des honoraires dus par Mme [F] [O] à Maître [X] [P] ;
- constaté le règlement intervenu à hauteur de 1 000 euros HT ;
- dit en conséquence que Mme [F] [O] devra verser à Maître [X] [P] la somme de 8 900 euros HT avec intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2017, date de la saisine du Bâtonnier, outre la TVA au taux de 20 % ainsi que les frais d'huissier de justice, en cas de signification de la présente décision ;
- rejeté toutes autres demandes.
À L'AUDIENCE
Mme [F] [O] n'est pas présente mais représentée par un avocat, Maître GREVELLEC laquelle sollicite :
- l'infirmation de la décision critiquée en ce qu'elle a fait application de la convention d'honoraires du 26 novembre 2018 ;
- l'infirmation de la décision en ce qu'elle a fixé à la somme de 9 900 euros HT le montant des honoraires dus ;
- de voir fixer les honoraires dus à la somme de 1 000 euros HT soit 1 200 euros TTC qui ont déjà été réglés par prélèvement sur les fonds détenus par la CARPA par Maître [P] pour son compte ;
- de débouter Maître [P] de l'intégralité de ses demandes ;
- condamner Maître [P] aux entiers dépens de l'instance.
Elle soutient notamment que Maître [P] connaissait l'état de fortune de sa cliente laquelle bénéficiait du RSA et l'avait cependant conviée à signer une convention d'honoraires datée du 26 novembre 2016 ce qui est tout à fait incompatible.
En outre, elle souligne que les honoraires de sa cliente doivent tenir compte des diligences réellement effectuées et que seule, la somme de 1 000 euros HT est due, somme par ailleurs déjà payée par Mme [O].
Maître [X] [P] est représentée par Maître Laurent PAULY.
Il demande à la Cour de :
- fixer les honoraires de Maître [P] à la somme de 11 340 euros HT ;
- de condamner Mme [F] [O] au paiement de la somme de 10 340 euros HT au titre du reliquat des honoraires dus par cette dernière, avec intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2017, date de la saisine du Bâtonnier ;
- condamner Mme [F] [O] à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;
- voir condamner Mme [O] aux entiers dépens.
À l'appui de ses demandes, il fait valoir que :
- une convention d'honoraires a bien été signée le 26 novembre 2016 entre les parties, le taux horaire convenu étant de 360 euros HT ; elle doit donc s'appliquer.
- il est produit un relevé exhaustif des diligences effectuées pour le compte de la cliente qui justifie le montant des honoraires réclamés, s'agissant d'un dossier pénal (enquête de police suite à un accident de la circulation) et une procédure en indemnisation amiable puis contentieuse, nécessitant un important travail de tri et de communication de pièces.
SUR CE
Il est constant que Mme [F] [O] a été victime d'un accident de la circulation en novembre 2015 à [Localité 4] et a saisi Maître [X] [P] pour la défense de ses intérêts.
Une convention d'honoraires a été signée entre les parties le 26 novembre 2016, prévoyant notamment un honoraire forfaitaire s'élevant à 2 500 euros HT pour l'introduction d'une procédure au fond devant le Tribunal de Grande Instance de Paris : 1ers rendez-vous de consultation, préparation du dossier médical pour le médecin conseil, rédaction d'assignation au fond, suivi de la procédure, conclusions d'incidents, et plaidoiries) ; les frais d'assistance à expertise médicale étant fixés à 350 euros par réunion d'expertise.
Un honoraire de résultat de 10% hors taxes sur toute l'indemnité était aussi prévu.
Mme [O] a fait le choix d'opter pour un autre avocat avant le terme du litige.
Sur l'application de la convention d'honoraires :
Le dessaisissement de l'avocat avant que soit intervenu un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable rend inapplicable la convention d'honoraires initialement conclue et les honoraires dus à l'avocat pour la mission effectuée doivent être fixés selon les critères définis à l'article 10 aliéna 2 de la loi du 31 décembre 1971.
En l'espèce, il est constant que Maître [P] a été dessaisi de l'affaire confiée par Mme [O] avant un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable.
Dès lors, la convention d'honoraires sus visée n'a pas à trouver application sans qu'il soit nécessaire d'évoquer l'éventuel défaut de consentement de la cliente lors de la signature de la convention d'honoraires, tirée du défaut d'information relatif à la possibilité de demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur les honoraires dus à Maître [P] :
À défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire dû est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.
Il n'appartient pas à la présente juridiction de statuer sur la responsabilité éventuelle de l'avocat à l'égard de son client résultant, notamment, d'un manquement à son devoir d'information sur les conditions de sa rémunération ou plus généralement, à son obligation de conseil.
Maître [P] produit un relevé des diligences effectuées pour le compte de sa cliente, se décomposant ainsi :
* deux entretiens au cabinet : 4h1440 euros
* 97 courriers et courriels échangés avec les différents interlocuteurs de Mme [O] : 10h3 600 euros
* 25 appels téléphoniques : 2h30900 euros
* pièces : tri classement de bordereaux de communication de pièces : 5h1800 euros
* rédaction d'une assignation au fond : 4h1 440 euros
* rédactions de conclusions incidentes : 1h30540 euros
* deux audiences de mise en état de la 19ème chambre du TGI de Paris : 1h360 euros
* une audience de plaidoirie de l'incident : 1h30540 euros
* préparation du dossier médical du Dr [T] : 1h30540 euros
* préparation dossier médical pour le Dr [Y] : 2h30900 euros
Il convient de relever que le coût de deux entretiens en cabinet apparaît trop élevé au vu de la nature du litige et de l'examen des pièces rendu nécessaire, examen des pièces qui fait d'ailleurs l'objet d'un poste différent, équivalent à plus de 5 heures de travail effectif outre 10 heures comptabilisées pour l'étude des mails et pièces échangées et le temps passé au « tri et classement de bordereau de communication de pièces ». Ce poste est donc ramené à de plus justes proportions ainsi que les postes sus indiqués y compris ceux relatifs à la préparation du dossier destinés aux médecins experts, les Dr [T] et [Y], le nombre d'heures estimés pour réaliser le travail invoqué s'élevant en totalité à 14 heures effectif soit 4 200 euros HT, prenant pour base de calcul le taux horaire de 300 euros HT.
Dès lors, la décision critiquée est infirmée, les honoraires dus par Mme [O] s'élevant à 4 200 euros HT.
Sur l'application de l'article 700 du CPC :
Il n'apparaît pas inéquitable de faire supporter par les parties des sommes non comprises dans les dépens.
Sur les dépens :
Mme [O] supportera les dépens de la présente instance et ceux de la première instance
PAR CES MOTIFS
Statuant par décision rendue en dernier ressort et par décision contradictoire et rendue publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe,
DISONS le recours recevable en la forme ;
DISONS que les honoraires dus à Maître [X] [P] sont fixés à la somme de 4200 euros HT soit 5040 euros TTC ;
RAPPELLONS que Mme [F] [O] a versé à Maître [P] la somme de 1000 euros HT ;
DISONS en conséquence que Mme [O] devra verser à Maître [X] [P] la somme de 4040 TTC ;
REJETONS la demande fondée sur l'article 700 du CPC ;
LAISSONS les dépens à la charge de Mme [F] [O] ;
DISONS qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.
ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour le TROIS SEPTEMBRE DEUX-MILLE VINGT par Sylvie FETIZON, Conseillère, qui en a signé la minute avec Vanessa ALCINDOR, Greffière, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues dans l'article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA CONSEILLÈRE