RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 18 Septembre 2020
(n° ,12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/06837et S N° RG 17/07109 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3JZ7
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Mars 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG n° 15/00296
APPELANT
Monsieur [NI] [G]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Xavier BERJOT, avocat au barreau de PARIS, toque : J063 substitué par Me Alexia TOUCHARD, avocat au barreau de PARIS, toque : J063
INTIMEE
CPAM 91 - ESSONNE
DEPARTEMENT JURIDIQUE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Juin 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre
M. Lionel LAFON, Conseiller
Mme Bathilde CHEVALIER, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : M. Fabrice LOISEAU, lors des débats
En présence de Mme Joëlle COULMANCE, greffière stagiaire.
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Mme Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre et M. Fabrice LOISEAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur les appels interjetés par M. [NI] [G] et par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne d'un jugement rendu le 28 mars 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry dans un litige les opposant.
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les circonstances de la cause ont été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [NI] [G] exerce la profession de masseur kinésithérapeute ; qu'il a fait l'objet d'un contrôle de ses facturations par la caisse pour la période du 19 juillet 2011 au 6 mars 2014 ; qu'à l'issue de l'enquête administrative, un indu de 38 718,06 euros lui a été notifié le 18 juillet 2014; que la commission de recours amiable a rejeté son recours le 5 décembre 2014; que M. [G] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry le 16 février 2015 qui, par jugement du 28 mars 2017 a déclaré son recours recevable, a infirmé la décision de la commission de recours amiable, a condamné M. [G] à payer à la caisse la somme de 18 398,04 euros au titre de l'indu pour la période du 19 juillet 2011 au 6 mars 2014 et a rejeté le surplus des demandes.
M. [G] a relevé appel le 11 mai 2017 et la caisse le 16 mai 2017 de ce jugement qui leur avait été notifié le 18 avril 2017.
Par ses conclusions écrites déposées à l'audience par son conseil qui les a oralement développées, M. [NI] [G] demande à la cour de :
- Confirmer le jugement en ce qu'il a écarté du montant de la créance mise à sa charge la somme de 20 320,02 euros ;
- Infirmer le jugement pour le surplus ;
Et statuant à nouveau de :
- Annuler la décision de notification d'un indu d'un montant de 38 718,06 euros du 18 juillet 2014 portant sur la créance n°1407586206 ;
- Annuler la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne du 18 décembre 2014 ;
- Condamner la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir pour l'essentiel que :
- Il a dû à plusieurs reprises réclamer auprès de la caisse le tableau récapitulatif de l'indu dont il ne disposait plus pour l'avoir annexé à sa saisine de la commission de recours amiable sans en conserver une copie ;
- La caisse n'aurait pas dû lui payer les soins qu'il devait facturer directement à l'établissement dans lequel sa grand-mère Mme [G] résidait ou au moins lui adresser un courrier ;
- La caisse lui a indiqué par téléphone qu'il pouvait continuer à télé-facturer au moyen de la carte vitale de la patiente et se faire rembourser par l'organisme ;
- La caisse n'a subi aucun préjudice puisque ces soins auraient en tout état de cause dû être remboursés que ce soit à l'établissement ou au praticien directement ;
- Les soins ont bien été délivrés car ils étaient nécessaires au regard de l'état de santé de Mme [G], qu'ils étaient prescrits par son médecin traitant et que les ordonnances ont été transmises à la caisse, que la secrétaire administrative et la directrice de l'EHPAD attestent qu'il s'y rendait régulièrement voire quotidiennement de mai 2011 à février 2013 ;
- Les soins de Mmes [E], [U], [C], [H], [A], [P], [CW] et de MM. [T], [V] et [XY] ont tous été délivrés contrairement à ce que soutient la caisse, ils ont tous été prescrits par des ordonnances de différents médecins généralistes, ces ordonnances ont été transmises à la caisse ;
- Il verse aux débats plusieurs attestations de patients qui témoignent avoir suivi des soins réguliers de sa part sur les périodes litigieuses ;
- Il n'a pas pu recueillir d'autres attestations de patients en raison de l'ancienneté des faits ;
- Les soins remboursés ont bien été délivrés à M. [VT] ; le patient bénéficiait de séances de rééducation classique et de balnéothérapie dont les cotations sont différentes ; afin d'optimiser sa prise en charge, il a décidé de prolonger chaque séance d'une heure voire une heure et demie au lieu de 30 minutes et de pratiquer ces différents soins la même journée ;
- Ne pouvant facturer sur la plate-forme informatique deux actes de soins pour la même journée pour le même patient, il a décidé d'attribuer la seconde séance à un autre jour de la semaine ;
- Le fait de délivrer plusieurs actes de soins lors de la même séance l'a empêché de recevoir d'autres patients qu'il aurait pu à chaque fois facturer pour une séance de 30 minutes ;
- Pour d'autres patients présentant des pathologies lourdes et dans un souci de qualité de soins, de fatigabilité, il était convenu avec eux de réaliser des séances d'une heure minimum pour optimiser les soins et réduire les transports ; il répartissait ensuite la seconde séance sur un autre jour de la semaine puisque le logiciel ne lui permettait pas de facturer deux séances le même jour ;
- Il ne s'agit donc pas de facturation de séances fictives puisque les soins ont été réalisés.
Par ses conclusions oralement développées par son conseil à l'audience du 18 juin 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne demande à la cour de :
- La déclarer recevable en son appel ;
- Infirmer le jugement rendu en ce qu'il a annulé une partie de sa créance à hauteur de 20 320,02 euros ;
- Déclarer bien fondée sa créance dans son intégralité ;
- Condamner M. [G] à lui payer la somme de 38 718,06 euros au titre de l'article L.133-4 du Code de la sécurité sociale ;
- Le condamner à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait essentiellement valoir que :
- Il ressort de l'enquête administrative que M. [G] a régulièrement facturé des actes non réalisés entre 2011 et 2013 ; il a notamment facturé des actes le samedi sans les avoir dispensés ;
- M. [G] a facturé 71 séances de balnéothérapie fictives à M. [VT] entre le 20 décembre 2011 et le 5 décembre 2012 ; il reconnaît dans son audition que le patient aurait annulé ces séances ou qu'il a pu commettre des erreurs ;
- Il a facturé plusieurs actes accomplis lors de la même séance mais facturés sur deux jours différents ; il a ainsi contrevenu délibérément à la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) qui impose que ne soit facturé qu'un acte par jour et par patient ;
- Il a indiqué avoir facturé des séances d'une heure incluant 30 mn de balnéothérapie alors que la NGAP prescrit que les séances de balnéothérapie soient facturées comme des suppléments et ne soient pas globalisées avec les actes puisque le praticien ne se trouve pas aux côtés du patient pour les réaliser;
- L'une des patientes, Mme [E] a déclaré que les séances ne duraient que 30 mn alors que M. [G] soutient lui avoir facturé deux séances pour compenser la durée d'une heure des actes effectués ;
- M. [G] a émis des factures en double sous deux numéros distincts pour M. [VT] notamment et a justifié cette erreur par le manque de visibilité des paiements effectués par la caisse, ce qui manifeste sa mauvaise foi ;
- Le procès-verbal d'enquête administrative révèle que le professionnel de santé vendait à certains patients les orthèses qu'il leur prescrivait, en violation des dispositions de l'article R.4321-69 du Code de la santé publique ;
- M. [G] a dispensé des soins à sa grand-mère hébergée en EHPAD et a facturé les actes à la caisse alors qu'il savait devoir les facturer directement à l'établissement car inclus dans son budget global de fonctionnement ; que dans son audition, il a admis être informé de cette règle mais s'en affranchir car en tant que professionnel libéral, il ne souhaitait pas dépendre d'un établissement ;
- Dans son audition du 19 mars 2014, M. [G] a confirmé l'ensemble des griefs qui lui étaient reprochés ; il a pu s'expliquer et apporter les éléments factuels et matériels qu'il estimait nécessaires ;
- Les attestations de patients produites par le praticien font état d'allégations imprécises à la différence des auditions diligentées dans le cadre de l'enquête administrative qui sont précises et circonstanciées ;
- La caisse a satisfait à son obligation d'information durant le contrôle et durant la procédure.
Il est fait référence aux écritures déposées à l'audience du 18 juin 2020 pour plus ample exposé des moyens invoqués.
SUR CE, LA COUR :
Sur la jonction des procédures:
Dans l'intérêt d'une bonne administration de la Justice, les deux affaires enregistrées sous les numéros de répertoire général 17/06837 et 17/07109, issues des appels de M. [G] et de la caisse formés contre un même jugement, seront jointes.
Sur le respect par la caisse de son obligation d'information :
L'article R.133-9-1 du Code de la sécurité sociale alors applicable dispose que la notification de payer prévue à l'article L.133-4 est envoyée par le directeur de l'organisme d'assurance maladie au professionnel, à l'établissement ou au distributeur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.
Cette lettre précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Dans le même délai, l'intéressé peut présenter des observations écrites à l'organisme d'assurance maladie.
En l'espèce, la caisse a notifié le 18 juillet 2014 à M. [G] un indu d'un montant de 38 718,06 euros en indiquant que : 'Lors d'un contrôle de vos facturations, il est apparu des anomalies ayant entraîné le versement de sommes indues. Le tableau récapitulatif, joint en annexe, indique pour chaque prestation concernée, la nature et la date des prestations, le motif et la date du paiement indu, le montant des sommes versées à tort et la somme due au total.' (Pièce caisse n°XVII).
M. [G] dispose de ce tableau récapitulatif qu'il verse aux débats (pièce n°4-2). Il explique cependant avoir initialement joint le tableau à sa saisine de la commission de recours amiable sans en conserver d'exemplaire et reproche à la caisse d'avoir tardé à le lui communiquer à nouveau (pièces n°7, 9, 10).
Un tel grief ne saurait cependant caractériser un manquement de la caisse à son obligation d'information lors de la notification de l'indû dont la mise en oeuvre était conforme au jour de son envoi, aux dispositions susvisées.
Le tableau comporte en effet pour chaque assuré et pour chaque acte contesté: la date de l'acte, la date de prescription, la date de mandatement, la classification et le coefficient de l'acte, son taux et le montant facturé. Pour chaque patient et chaque acte contesté il est également précisé le motif de l'indû, le texte de référence et le montant de l'indû.
M. [G] par ce tableau était ainsi parfaitement informé de la cause, de la nature et du montant des sommes réclamées et de la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement.
M. [G] a répondu à cette notification par un courrier du 30 août 2014 (pièce n°5) par lequel il a saisi la commission de recours amiable et a répondu pour chaque patient, aux reproches qui lui étaient faits. Il a précisé en fin de courrier avoir 'bien entendu et compris les faits qui (lui) sont reprochés et (avoir) ainsi modifié sa pratique.'
Ce grief de M. [G] à l'encontre de la caisse ne pourra en conséquence qu'être écarté.
Sur l'indû notifié au titre des actes de kinésithérapie facturés mais non réalisés à hauteur de 18 398,04 euros:
Les dispositions liminaires du Titre XIV de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) disposent que :
'Sauf exceptions prévues dans le texte, la durée des séances est de l'ordre de trente minutes. Hormis les modalités particulières de traitement prévues par le chapitre III, le masseur-kinésithérapeute se consacre exclusivement à son patient.
Les cotations comprennent les différents actes et techniques utilisés par le masseur-kinésithérapeute pendant la séance à des fins de rééducation que ce soient des manoeuvres de massage, des actes de gymnastique médicale ou des techniques de physiothérapie. Sauf exceptions prévues dans les textes, ces cotations ne sont pas cumulables entre elles.
A chaque séance s'applique donc une seule cotation, correspondant au traitement de la pathologie ou du territoire anatomique en cause.
Il découle de ces dispositions liminaires spécifiques que, sauf exceptions prévues dans le texte, il n'est pas possible d'appliquer une seconde cotation pour une même séance.'
La caisse a notifié à M. [G] des indus au titre de séances facturées le samedi et qui n'ont pas été réalisées.
Il résulte en effet de l'enquête administrative diligentée que les patients concernés, à savoir M. [J] [XY], M. [O] [T], Mme [M] [A], Mme [S] [P], Mme [L] [U], Mme [K] [C] n'ont pas bénéficié de séances de kinésithérapie le samedi alors que de telles séances ont été facturées à la caisse.
Interrogé sur cette pratique, M. [G] a admis lors de son audition que lorsqu'il consacrait une heure à un patient, il facturait deux séances.
La NGAP imposant de facturer un acte par jour et par patient, il facturait des séances sur deux jours, incluant parfois un samedi.
La caisse a notifié d'autres indus au titre de la facturation d'actes fictifs ou de journées de travail fictives, pour les patients suivants : Mme [I] [E], M. [Y] [V] et Mme [W] [H].
Lors de l'enquête, M. [Y] [V] et Mme [W] [H] ont indiqué que la durée des séances variait de trente minutes à une heure.
Mme [E] a indiqué que les séances de rééducation la concernant duraient trente minutes et que pour fixer à une heure la durée des soins de rééducation, M. [G] y a inclus les séances de balnéothérapie.
Ces séances de kiné-balnéothérapie doivent cependant donner lieu à supplément de cotation et non à une globalisation avec l'acte lors de la facturation. Le praticien n'est en effet pas présent lors de ces séances et ne se consacre donc pas exclusivement à son patient.
La caisse a également notifié un indu au titre des soins prodigués à Mme [X] [CW], pour laquelle plusieurs irrégularités ont été soulignées lors de l'enquête administrative.
Mme [X] [CW] a été soignée pour des blessures liées à un accident du travail. Les séances ont été facturées à la société GRAS SAVOYE, assureur de l'employeur, qui a réglé le 12 janvier 2012 la somme de 813,85 euros pour 30 actes et le 5 avril 2012 la somme de 2032,80 euros pour 60 actes.
Il est établi que dans le même temps, M. [G] a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne des demandes de remboursement liées à ce même accident du travail pour des soins prodigués entre le 4 février 2012 et le 30 mars 2012.
Il a également exigé de Mme [CW] le règlement par chèque de la somme de 1732,68 euros, chèque émis le 30 mars 2012. Face au mécontentement de Mme [CW], M. [G] lui aurait restitué ce chèque contre un nouveau règlement de 569,48 euros.
Dans son audition, M. [G] a reconnu avoir demandé le paiement des séances à sa patiente sans être autorisé à le faire, car le règlement tardait selon lui à intervenir.
Il a pu indiquer ne pas se souvenir d'avoir été payé par la caisse pour ces actes.
Mme [CW] reproche à M. [G] dans son audition de lui avoir forcé la main pour lui vendre des produits bien-être pour un montant de 274,70 euros payé en liquide.
Bien qu'agissant en violation des dispositions de l'article R.4321-69 du code de la santé publique qui interdit à un masseur kinésithérapeute de distribuer à des fins lucratives des remèdes, appareils ou produits présentés comme ayant un intérêt pour la santé, M. [G] reconnaît avoir procédé à cette vente, mais sans la contraindre et avoir déjà procuré des produits à d'autres patients.
Mme [CW] a enfin indiqué ne jamais avoir bénéficié de soins le samedi alors que des séances ont été facturées le samedi pour cette patiente.
La caisse a enfin notifié à M. [G] un indû pour des actes facturés au nom de M. [N] [VT].
Lors de son audition dans l'enquête administrative, ce patient a indiqué ne jamais avoir bénéficié de plus de trois séances de balnéothérapie par semaine.
Il ressort ainsi de l'enquête administrative que 71 séances de balnéothérapie fictives ont été facturées. Lors de son audition, M. [G] a imputé des facturations à des séances annulées tardivement par M. [VT] ou à des erreurs possibles.
Comme pour d'autres patients, M. [G] a facturé à la caisse des séances le samedi alors que M. [VT] indique ne jamais avoir bénéficié de séances le samedi.
Il est reproché à M. [G] d'avoir facturé à 177 reprises 2 cotations (massage de deux zones distinctes) au cours d'une même séance pour ce patient de janvier à décembre 2012 ce qui n'est pas autorisé par la NGAP.
Il lui est enfin fait grief d'avoir émis, sur la période de mars à août 2012, 112 factures en double paiement concernant les mêmes actes mais transmis sous deux formes (feuille de soin papier et flux dégradé) et sous deux numéros de factures différents.
M. [G] dans son audition ne peut expliquer avoir émis des factures identiques sous deux numéros de factures distincts. Il impute la double émission de factures au manque de visibilité dans les remboursements de la caisse.
Pour s'opposer à ces indus qu'il estime injustifiés, M. [G] produit les attestations de patients (Mme [L] [U], de Mme [K] [C], de M. [D] [H], de [O] [T], de M. [Z] [R], époux de Mme [P] [S]) qui témoignent s'être présentés de façon régulière au cabinet pour bénéficier des soins prodigués.
Ces attestations ne permettent cependant pas de justifier de la réalité de tous les actes médicaux facturés à la caisse, notamment le samedi, et dont l'enquête a permis d'établir le caractère partiellement fictif ou irrégulier.
M. [G] expose qu'il a mis en oeuvre des séances de soins d'une heure dans l'intérêt de ses patients, afin de leur éviter des trajets et d'améliorer l'efficacité de leur traitement. Il estime ne pas avoir facturé de séances fictives puisque les soins ont bien été réalisés, même s'ils ont été déclarés sur des jours différents.
Ces explications ne sont cependant pas de nature à justifier qu'il se soit affranchi des règles fixées par la NGAP concernant la durée et la cotation des actes, ni qu'il ait facturé des soins sur des journées de travail fictives.
Il en résulte que l'indu notifié est justifié à hauteur de 18 398,04 euros au titre de l'indu pour la période du 19 juillet 2011 au 6 mars 2014, ainsi que l'a retenu le tribunal.
Sur l'indû de 20 320,02 euros notifié au titre des soins prodigués à Mme [MX] [G] :
Il résulte des dispositions de l'article L.133-4 du Code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige qu'en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facturation :
1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L.162-1-7, L.162-17, L.165-1, L.162-22-7 ou relevant des dispositions des articles L.162-22-1 et L.162-22-6 ;
2° Des frais de transport mentionnés à l'article L.321-1, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement.
Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d'assurance maladie, d'un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés.
Lorsque le professionnel ou l'établissement faisant l'objet de la notification d'indu est également débiteur à l'égard de l'assuré ou de son organisme complémentaire, l'organisme de prise en charge peut récupérer la totalité de l'indu. Il restitue à l'assuré et, le cas échéant, à son organisme complémentaire les montants qu'ils ont versés à tort.
L'action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.
L'article L.314-2 du code de l'action sociale et des familles dispose que :
Les établissements et services mentionnés au I de l'article L. 313-12 sont financés par :
1° Un forfait global relatif aux soins prenant en compte le niveau de dépendance moyen et les besoins en soins médico-techniques des résidents, déterminé par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé en application d'un barème et de règles de calcul fixés, d'une part, par un arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et des personnes âgées, en application du II de l'article L.314 et, d'autre part, par un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, pris en application du troisième alinéa de l'article L. 174-6 du code de la sécurité sociale ;
2° Un forfait global relatif à la dépendance, prenant en compte le niveau de dépendance moyen des résidents, fixé par un arrêté du président du conseil général et versé aux établissements par ce dernier au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie mentionnée à l'article L. 232-8 ;
3° Des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement, fixés par le président du conseil général, dans des conditions précisées par décret et opposables aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis dans des établissements habilités totalement ou partiellement à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées. Ce décret détermine le contenu des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement qui ne peuvent comporter des dépenses intégrées dans les tarifs relatifs aux soins et à la dépendance cités respectivement aux 1° et 2°.
Pour les établissements mentionnés à l'article L. 342-1, à l'exception de ceux mentionnés au 4°, les prestations relatives à l'hébergement sont fixées et contrôlées dans les conditions prévues par les articles L. 342-2 à L. 342-6.
Les tarifs correspondant à des prestations complémentaires et librement acceptées et acquittées par les résidents, à la condition qu'elles ne relèvent pas des tarifs cités aux 1°, 2° et 3°, constituent des suppléments aux tarifs journaliers afférents à l'hébergement. Ils doivent être établis par l'organe délibérant de la personne morale gestionnaire pour chaque catégorie homogène de prestation faisant l'objet d'un paiement par les résidents ou leurs représentants au sein de l'établissement. Les tarifs des suppléments aux tarifs journaliers doivent être communiqués aux titulaires d'un contrat de séjour ou à leurs représentants et portés à la connaissance du président du conseil général et du public dans des conditions fixées par décret.
Pour les établissements mentionnés à l'article L. 342-1 et les résidents non admis à l'aide sociale dans les établissements relevant du 6° du I de l'article L. 312-1 du présent code et dans les établissements de santé dispensant des soins de longue durée, les prestations relatives aux suppléments aux tarifs journaliers afférents à l'hébergement sont fixées et contrôlées dans les conditions prévues par les articles L. 342-2 à L. 342-6 du présent code.
L'article R.314-105 du même code dispose que :
I.-Les soins complémentaires, délivrés à titre individuel par un médecin, un auxiliaire médical, un centre de santé, un établissement de santé ou un autre établissement ou service médico-social, sont pris en charge par les organismes d'assurance maladie obligatoire dans les conditions de droit commun, en sus du tarif versé à l'établissement ou au service :
1° Soit lorsque leur objet ne correspond pas aux missions de l'établissement ou du service ;
2° Soit, par dérogation aux dispositions du 2° de l'article R. 314-26, lorsque, bien que ressortissant aux missions de l'établissement ou du service, ces soins ne peuvent, en raison de leur intensité ou de leur technicité, être assurés par l'établissement ou le service de façon suffisamment complète ou suffisamment régulière. Dans ce cas, ces soins doivent faire l'objet d'une prescription par un médecin attaché à l'établissement ou au service.
II.-Lorsque les soins complémentaires mentionnés au I sont liés au handicap ayant motivé l'admission dans l'établissement ou le service, leur remboursement est subordonné à l'accord préalable du service du contrôle médical, dans les conditions prévues à l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale.
Les préconisations de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, lorsqu'elles existent, sont jointes à la demande d'entente préalable.
En l'espèce, la caisse reproche à M. [G] de lui avoir facturé les soins prodigués à Mme [MX] [G] qui se trouvait hébergée au sein de l'EHPAD de [Localité 7], alors que ces soins auraient dû être facturés directement à l'établissement car inclus dans son budget global de fonctionnement.
Lors de l'enquête administrative, la caisse a procédé à l'audition de Mme [F] [B], directrice de l'EHPAD de [Localité 7] (pièce n°10 de la caisse) laquelle indique que l'établissement est passé en budget global le 1er janvier 2011. Ce changement de situation a été expliqué à tous les professionnels de santé intervenant à l'EHPAD. Elle l'a personnellement expliqué à M. [G] au plus tard fin février 2011 en lui montrant les documents et la procédure applicable. Elle ajoute qu'une note d'information était affichée en salle de soins et qu'elle lui a rappelé le 14 janvier 2013 qu'il ne devait plus facturer ses actes à la sécurité sociale. Elle a déclaré qu'il se souvenait alors des termes de l'entretien de février 2011 et qu'elle l'a informé à cette occasion que la caisse avait notifié un rattrapage à l'établissement. Elle ajoute enfin qu'il continue, au jour de son audition, à ne pas respecter la procédure et à facturer ses soins directement à la caisse.
Lors de son audition le 21 mars 2014, (pièces caisse n°3), M. [G] a indiqué à l'agent assermenté:
'Je reconnais avoir été informé personnellement par Mme [B] en 2011 et elle m'a relancé peut-être en 2013, mais je ne me souviens pas qu'elle m'ait parlé d'un rattrapage par la Caisse primaire d'assurance maladie 91. Je n'ai pas fait le choix du libéral pour dépendre d'un établissement. J'ai d'ailleurs contacté la Caisse primaire d'assurance maladie 91 à cette époque pour confirmation de ce fait (via la plate-forme PS) et on m'a clairement dit de continuer à facturer en direct à la Caisse primaire d'assurance maladie 91.'
Les sommes réclamées portent sur la période du 27 mai 2011 au 16 février 2013 et visent tant les actes médicaux pratiqués par le masseur-kinésithérapeute (AMK) que les indemnités forfaitaires de déplacement (IFN).
Il résulte du tableau récapitulatif annexé à la notification de l'indu que les soins ont été prescrits le 27 mai 2011, le 13 septembre 2011, le 19 décembre 2011, le 26 mars 2012, le 26 juin 2012, le 1er octobre 2012 et le 11 janvier 2013.
La caisse a notifié des remboursements indus au titre de ces soins pour le motif ' facturation d'actes non réalisés' sur le fondement de l'article R.147-8 du Code de la sécurité sociale.
Mme [B] indique dans son audition que si elle n'a pas personnellement assisté aux soins prodigués, elle a pu constater que M. [G] se rendait chaque jour à l'EHPAD pour y rencontrer sa grand-mère Mme [G].
Il ne résulte pas des éléments du dossier que les soins remboursés n'ont pas été prescrits puis prodigués à Mme [G].
La caisse ne conteste d'ailleurs pas la réalité des actes médicaux mais elle fait grief à M. [G] d'en avoir sollicité le paiement auprès d'elle au lieu d'en faire la demande directement auprès de l'établissement.
Il résulte du courrier de contestation de M. [G] du 30 août 2014, dans lequel il s'explique sur la facturation à la caisse, que celui-ci a parfaitement compris le grief qui lui est fait.
Il résulte des auditions de la directrice de l'EHPAD et de M. [G] que ce dernier était parfaitement informé des règles de facturation s'appliquant à ses actes médicaux.
Dans son audition, il indique lui-même s'être délibérément affranchi de ces règles pour ne pas dépendre d'un établissement.
Il ne se prévaut pas des conditions dérogatoires visées à l'article R.314-105 susvisé.
L'inobservation des règles de tarification ou de facturation est ainsi établie et permet à la caisse de recouvrir l'indu correspondant auprès du professionnel à l'origine du non-respect de ces règles.
Il en résulte que les sommes qui ont été versées à M. [G] en violation des règles de facturation des actes médicaux prodigués peuvent être recouvrées par la caisse.
L'indû sollicité à hauteur de 20 320,02 euros et notifié au titre des soins prodigués à Mme [MX] [G] n'est pas contesté dans son montant.
Il apparaît au surplus justifié au regard des pièces produites, notamment du tableau récapitulatif annexé à la notification de l'indu.
M. [G] sera donc condamné au paiement de l'indu de 20 320,02 euros notifié au titre des soins prodigués à Mme [MX] [G] et le jugement sera infirmé de ce chef .
Sur les frais irrépétibles:
M. [G] qui succombe en son appel, sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sera condamné à verser à la caisse la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Ordonne la jonction des procédures n°17/06837 et 17/07109 ;
Déclare l'appel recevable ;
Infirme le jugement déféré ;
Et statuant à nouveau :
Condamne M. [NI] [G] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine la somme de 38 718,06 euros au titre de l'indû pour la période du 19 juillet 2011 au 6 mars 2014 ;
Déboute M. [NI] [G] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [NI] [G] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Condamne M. [NI] [G] aux dépens d'appel.
Le greffier La présidente