Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2020
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/03355 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5BDO
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Janvier 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/13190
APPELANTE
SARL THIERY ET FILS prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 353 907 660
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant
assistée de Me Emmanuel DE VITTON DE PEYRUIS de la SELEURL CABINET E DE VITTON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0922, avocat plaidant
INTIMES
Madame [F] [K] [P] épouse [L]
née le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Marc MANCIET de la SELARL MBS Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : W02
Madame [Z] [O] [P] épouse [R]
née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Marc MANCIET de la SELARL MBS Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : W02
Monsieur [C] [Y] [P] majeur incapable, représenté par [E] [P], son tuteur
né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 7]
[Adresse 7]
[Localité 1]
représenté par Me Marc MANCIET de la SELARL MBS Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : W02
Madame [E] [P] tuteur de M. [C] [Y] [P]
née le [Date naissance 5] 1964 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Marc MANCIET de la SELARL MBS Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : W02
Monsieur [A] [X] [P]
né le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 7]
[Adresse 5]
[Localité 4]
représenté par Me Marc MANCIET de la SELARL MBS Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : W02
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Elisabeth GOURY, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre
Madame Sandrine GIL, conseillère
Madame Elisabeth GOURY, conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
*****
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 13 juin 2000, Mme [K] [N] aux droits de laquelle est venue M. [Y] [P] a donné à bail en renouvellement à la société THIERY ET FILS, divers locaux à usage d'hôtel dépendant d'un immeuble situé [Adresse 1] pour une durée de neuf ans à compter du 1er septembre 1999 moyennant un loyer annuel en principal de 150.000 francs (22.867,38 euros).
Par acte d'huissier de justice du 16 mai 2008, la société THIERY ET FILS a demandé le renouvellement du bail pour une durée de 9 ans à compter du 1er septembre 2008 sans que Mme [N] ne réponde dans le délai de 3 mois.
Après le décès de M. [Y] [P], ses héritiers, Mme [F] [P] épouse [L], Mme [Z] [P] épouse [R], M. [A] [P], M. [C] [P], Mme [E] [P], ont, par acte d'huissier de justice du 20 janvier 2017, signifié à la société THIERY ET FILS un congé avec offre de renouvellement pour une période de 9 ans à compter du 1er septembre 2017 moyennant un loyer de 162.000 euros annuels en principal.
Par courrier recommandé du 6 février 2017, la société THIERY ET FILS a accepté le principe de renouvellement mais a refusé le loyer proposé.
Par un mémoire notifié le 20 juillet 2017, les consorts [P] ont sollicité la fixation du prix du loyer du bail renouvelé à la somme annuelle de 168.000 euros en principal selon la méthode hôtelière.
Par acte du 10 août 2017, les consorts [P] ont assigné la société THIERY ET FILS devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris.
Par jugement en date du 16 janvier 2018, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris a :
- Constaté, par l'effet de la demande de renouvellement délivrée le 20 janvier 2017 par les consorts [P] et accepté par la société THIERY ET FILS, le principe du renouvellement du bail à effet du 1er septembre 2017 ;
- Dit que la règle du plafonnement ne s'applique pas au loyer du bail renouvelé, en application des dispositions de l'article R145-10 du code de commerce ;
- Pour le surplus, avant dire droit au fond, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, désigné en qualité d'expert :
[I] [D]
[Adresse 4]
[Localité 3]
[Courriel 1]
Avec mission :
* de convoquer les parties, et, dans le respect du principe du contradictoire,
* de se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission,
* de visiter les locaux litigieux situés [Adresse 1], et de les décrire,
* d'entendre les parties en leurs dires et explications,
* de procéder à l'examen des faits qu'allèguent les parties,
* de rechercher la valeur locative des lieux loués à la date du renouvellement,
au regard des usages observés dans la branche d'activité considérée en application des dispositions de l'article 145-10 du code de commerce notamment selon la nouvelle méthode hôtelière,
* de rendre compte du tout et donner son avis motivé,
* de dresser un rapport de ses constatations et conclusions,
- Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe de la juridiction avant le 18 septembre 2018,
- Fixé à la somme de 3.500 (TROIS MILLE CINQ CENTS) euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, somme qui devra être consignée par les consorts [P] à la régie du tribunal de grande instance de Paris jusqu'au 15 mars 2018 inclus, avec une copie de la présente décision,
- Dit que 1'affaire sera rappelée le 27 mars 2018 pour vérification du versement de la consignation,
- Dit que, faute de consignation de la provision dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet,
- Désigné le juge des loyers commerciaux aux fins de contrôler le suivi des opérations d'expertise,
- Fixé le loyer provisionnel pour 1a durée de l'instance au montant du loyer contractuel en principal, outre les charges,
- Ordonné 1'exécution provisoire,
- Réservé les dépens.
Par déclaration en date du 9 février 2018 , la société THIERY ET FILS a interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance d'incident en date du 1er avril 2019, le juge de la mise en état a :
- Rejeté les demandes de nouvelle expertise ou de complément d'expertise formées par la société THIERY & FILS,
- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Dit que les dépens de l'incident suivront le sort de ceux de l'instance au fond.
Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 17 janvier 2020, la société THIERY ET FILS demande à la Cour de :
d'infirmer le jugement entrepris sur les points suivants :
1) de constater qu'il n'est pas établi que les locaux situés [Adresse 1], soient monovalents
- de diligenter, si elle l'estime utile et nécessaire pour apporter la preuve du caractère ni coûteux ni important d'une transformation des locaux en locaux ayant une autre destination, une expertise pour évaluer le coût des travaux éventuels de transformation,
- soit en élargissant la mission de Monsieur [D], expert désigné par le jugement du 16 janvier 2018,
- soit en désignant tout autre expert qu'il lui plaira à cet effet,
- de juger en conséquence si les locaux ne sont pas monovalents qu'il y a lieu d'appliquer le plafonnement du loyer,
- de fixer le loyer annuel en fonction de la simple évolution de l'indice des loyers commerciaux publiée par l'INSEE, soit 29.682,80 euros HT,
2) de condamner le bailleur aux dépens dont distraction, pour ceux la concernant, au profit de Maître Patricia HARDOUIN ' SELARL 2H AVOCATS et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC et à verser au locataire 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC, et 5.000 euros au titre de dommage et intérêt pour procédure abusive.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 6 février 2020, les consorts [P] demandent à la Cour de :
Vu l'article L 145-36 du code de commerce,
Vu les articles 908, 564 et 146 du code de procédure civile ,
Déclarer la société Thierry & fils irrecevable et en tous les cas mal fondée en sa demande
d'expertise ;
Dire et juger que l'immeuble à usage d'hôtel, sis [Adresse 1] et loué à la société THIERRY ET FILS est monovalent ;
En conséquence déclarer la société Thierry et Fils irrecevable et en tous les cas mal fondée en son appel et l'en débouter à toutes fins qu'il comporte ;
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y rajoutant, condamner la société THIERRY ET FILS à payer au consorts [P] la somme de 3.000 € pour procédure abusive et 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La condamner également en tous les dépens dont distraction au profit de la SELARL MBS
Avocats, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 février 2020.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande d'expertise :
La société THIERY ET FILS conteste le caractère monovalent des locaux retenu par le premier juge, sollicitant à titre subsidiaire une expertise pour déterminer le coût des travaux éventuels de transformation. Les consorts [P] invoquent l'irrecevabilité de cette demande formée pour la première fois dans les conclusions d'incident du 8 octobre 2018 au motif qu'elle a été formulée après l'expiration du délai de l'article 908 du code de procédure civile ; qu'elle constitue en outre une demande nouvelle irrecevable sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile et qu'en tout état de cause elle méconnaît les dispositions de l'article 146 du code de procédure civile.
Les conclusions d'appelant de la société THIERY ET FILS ont été notifiées dans le délai de trois mois de l'article 908 du code de procédure civile mais les consorts [P] n'invoquent aucun fondement en vertu duquel la demande d'expertise devrait être formée dans le délai prescrit par ledit article. Ce moyen d'irrecevabilité sera dès lors écarté.
Si aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, elles peuvent en application des dispositions de l'article 563 invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. La demande d'expertise tend seulement à étayer la contestation de la monovalence soulevée devant le juge du fond et ne constitue dès lors pas une demande nouvelle de sorte que ce moyen d'irrecevabilité sera également rejeté.
Enfin les dispositions de l'article 146 du code de procédure civile selon lesquelles une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve ne sont pas prescrites à peine d'irrecevabilité, leur appréciation relevant du bien-fondé de la demande. Ce moyen sera donc écarté.
La demande subsidiaire d'expertise sera en conséquence déclarée recevable.
Sur la monovalence des locaux :
Pour contester le caractère monovalent des locaux loués et solliciter l'application du plafonnement, la société THIERY ET FILS fait valoir que les locaux ont été successivement un magasin de tissus puis une imprimerie avant d'être transformés en hôtel ; qu'ils peuvent faire l'objet d'une transformation aisée et peu coûteuse pour d'autres destinations, se prévalant à cet effet de l'avis de M. [S], architecte ; que la preuve de la monovalence des locaux incombe au bailleur qui non seulement ne rapporte pas cette preuve mais également fait obstacle à l'expertise qu'elle sollicite ; qu'il n'a pas même étudié les destinations qui pourraient être données au bâtiment, pas plus que le jugement entrepris.
Les consorts [P] soutiennent que la transformation des lieux en hôtel de 18 chambres avec salles de bains a consisté en une véritable reconstruction de l'immeuble ; que cette transformation leur donne la nature de locaux monovalents ; que l'objet du bail étant l'hôtellerie, il y a monovalence et qu'en outre l'évaluation du loyer de renouvellement doit se faire selon les usages de la profession et qu'en matière d'hôtel, il est d'usage d'appliquer la méthode hôtelière sans s'arrêter au caractère monovalent ; qu'il appartient à la société locataire de rapporter la preuve qu'un changement de destination est possible à moindre coût et qu'elle ne rapporte pas cette preuve dès lors que la transformation de l'hôtel en centre médical et la mise aux normes ERP qu'elle implique nécessiterait de restructurer totalement l'immeuble et entraînerait de très lourds travaux caractéristiques d'une monovalence, critiquant à cet effet l'attestation de l'architecte dont se prévaut la société locataire ; qu'enfin, l'objet du bail ne permet pas d'autre destination.
La cour rappelle qu'en vertu de l'article R. 145-10 du code de commerce, le prix du bail des locaux construits en vue d'une seule utilisation peut, par dérogation aux articles L. 145-33 et R. 145-3 et suivants, être déterminé selon les usages observés dans la branche d'activité considérée et que dès lors en cas de monovalence avérée, le loyer n'est pas soumis à la règle du plafonnement et doit en cas de désaccord être fixé en fonction des usages de la branche d'activité considérée.
Il est constant que sont monovalents les locaux construits ou aménagés en vue d'une seule affectation ne pouvant être transformés en vue d'une autre activité sans des travaux importants et coûteux. S'agissant de deux conditions cumulatives, la transformation des locaux en vue d'une seule utilisation ne suffit pas à en établir la monovalence contrairement aux affirmations des consorts [P].
En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats et notamment du relevé des autorisations d'urbanisme produit par le bailleur que les locaux loués étaient précédemment à usage d'imprimerie ; que le bail initial conclu le 3 mai 1990 a autorisé le preneur 'à effectuer un ensemble de travaux d'aménagement et d'agencement intérieurs, pour affecter l'immeuble à usage d'hôtel' ; qu'une autorisation lui a été donnée 'pour déposer un permis de construire prévoyant la démolition sur cour des bâtiments existants ainsi que la surélévation et la rénovation fondamentale de l'immeuble existant', l'ensemble des travaux réalisés devenant en fin de bail la propriété exclusive du bailleur sans qu'il soit pour autant demandé une quelconque indemnité. Les autorisations d'urbanisme ont permis la démolition d'un appentis d'un étage et de la toiture du bâtiment de quatre étages à usage d'imprimerie et la transformation du bâtiment de quatre étages sur un niveau de sous-sol en hôtel de tourisme de 18 chambres avec création d'une mezzanine, surélévation d'un étage et modification des façades. Les locaux ont ainsi été aménagés en vue d'une seule utilisation, le renouvellement de bail du 13 juin 2000 mentionnant que les lieux loués sont destinés à l'activité d'hôtel de tourisme à l'exclusion de toute autre.
Contrairement aux affirmations des consorts [P], il appartient au bailleur qui entend se prévaloir des dispositions de l'article R. 145-10 faisant échapper le loyer au principe du plafonnement de prouver que les locaux loués ne peuvent être affectés à une autre destination sans des travaux importants et des transformations profondes et coûteuses.
La cour relève que les consorts [P] sur lesquels pèse la charge de la preuve ne fournissent aux débats aucun document permettant de définir la nature et l'importance des travaux qui seraient nécessaires pour permettre l'exercice d'une activité différente. Ils se bornent en effet à critiquer l'objectivité de 'l'attestation de polyvalence' établie le 2 mai 2018 par M. [Q] [S], architecte, envisageant la possibilité d'une transformation en centre médical, et à prétendre que ce changement d'affectation impliquerait une demande d'autorisation devant s'accompagner d'une attestation de conformité pour un établissement recevant du public sans possibilité de dérogation et impliquerait de très lourds travaux de restructuration.
M. [S] dans son attestation indique notamment 'Pour l'aménagement d'un centre médical, la salle de réception actuelle pourrait accueillir un comptoir d'accueil avec une salle d'attente. L'ensemble des chambres disposent, de part et d'autre des circulations verticales, de descentes d'eaux usées et vannes, un aménagement est alors aisé pour des bureaux médicaux de types généraliste, psychologue, orthophoniste, orthoptiste, ergothérapeute, psychomotricien, etc. Les cloisons de séparation des chambres sont facilement déposables puisqu'elles ne participent pas à la stabilité de la structure de l'immeuble. Pour ce type de transformation et à ce stade de réfection, il ne nous semble pas nécessaire d'entreprendre de travaux importants...L'établissement étant un établissement recevant du public, les règles liées à la sécurité incendie et à l'accessibilité pour tous sont respectées et, dans le cas d'un changement d'affectation, les règles seraient bien moins draconiennes'.
Cette attestation est suffisamment précise tant en ce qui concerne son auteur que son contenu pour qu'il ne puisse être tiré argument de sa non conformité aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile. Elle contredit les allégations des consorts [P] selon lesquelles le changement d'affectation ne pourrait être réalisé qu'au prix de travaux très importants et la seule nécessité de recourir à une demande d'autorisation s'agissant d'un établissement recevant du public ne suffit pas à établir la nécessité de travaux très lourds et coûteux.
En définitive les consorts [P] ne rapportent pas la preuve du caractère monovalent des locaux. La charge de la preuve leur incombant, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire d'expertise formée par la société locataire, étant d'ailleurs observé qu'ils s'opposent à cette expertise et qu'une expertise ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe conformément aux dispositions de l'article 146 du code de procédure civile.
Le caractère monovalent des locaux n'étant pas établi, les conditions du déplafonnement ne sont pas réunies et le loyer doit être fixé selon la variation de l'indice des loyers commerciaux, conformément à l'article L145-34 du code de commerce. A cet égard, il sera rappelé que l'application de la méthode hôtelière découle de la mise en oeuvre de l'article R. 145-10 du code de commerce et implique en conséquence que la monovalence de locaux soit reconnue, ce qui n'est pas le cas en l'espèce de sorte que ce moyen du bailleur sera écarté.
Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 29.682,80 euros HT/HC à la date du 1er septembre 2017 selon détail non contesté figurant dans les conclusions de la société THIERY ET FILS.
Sur la demande de dommages-intérêts :
La mauvaise foi du bailleur n'étant pas établie, la société THIERY ET FILS sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.
Sur les demandes accessoires :
Les consorts [P] qui succombent supporteront les dépens de première instance et d'appel.
Il convient d'autoriser la distraction des dépens au profit des avocats postulants qui en ont fait la demande en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Il n'y a pas lieu en cause d'appel de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a constaté, par l'effet de la demande de renouvellement délivrée le 20 janvier 2017 par les consorts [P] et acceptée par la société THIERY ET FILS, le principe du renouvellement du bail à effet du 1er septembre 2017,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande subsidiaire d'expertise formée par la société THIERY ET FILS,
Dit que la monovalence des locaux n'est pas établie,
Fixe le loyer annuel à la somme de 29.682,80 euros HT/HC à la date du 1er septembre 2017,
Déboute la société THIERY ET FILS de sa demande de dommages-intérêts,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne les consorts [P] aux dépens de première instance et d'appel incluant ceux de l'incident,
Autorise la distraction des dépens au profit des avocats postulants qui en ont fait la demande en application de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE