Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRET DU 14 OCTOBRE 2020
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05192 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5PLA
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Février 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 09/11826
APPELANTE
SARL SOCIETE DE RECHERCHE ET DE PRODUCTION DES MELANGES INDUSTRIELS
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Xavier DE RYCK, avocat au barreau de PARIS, toque : R018
INTIME
Monsieur [K] [L]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Paul-antoine DEMANGE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne ROUGE, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Fabienne ROUGE, Président de Chambre
Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de Chambre
Madame Laurence SINQUIN, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Nasra SAMSOUDINE
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- Signé par Fabienne ROUGE, Présidente de chambre et par Nasra SAMSOUDINE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [S] , gérant de la société SRPMI vendait et distribuait un produit nommé ASTA 3000 sous la forme d'un additif pour les moteurs des véhicules militaires, souhaitant le vendre dans d'autres pays , il rencontrait Monsieur [L].
Monsieur [L] était alors salarié d'une société spécialisée dans la vente d'équipement militaire sur les zones de l'Afrique et de l'Amérique du Sud et de l'Asie.
Monsieur [L] crée la société SILVER BIRD LIMITED pour faire de la prospection pour vendre ce produit avec les contacts qu'il avait de son ancien emploi.
Par arrêt en date du 9 février 2017 , la cour d'appel de Paris a dit que les parties étaient liées par un contrat de travail.
Par jugement rendu le 6 février 2018, le Conseil de Prud'hommes de Paris a :
- fixé le salaire net mensuel de Monsieur [L] à 5000 €,
- dit que la résiliation judiciaire s'analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne la société ASTA TECHNOLOGIES France devenue SRPMI à verser à M. [K] [L] les sommes suivantes avec intérêts :
- 175.000 € à titre de rappel de salaire du 1 er novembre 2008 à fin février 2012, période fixée par le conseil comme étant la période du contrat de travail .
- 17.500 € au titre des congés pays afférents,
- 15.000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 1.500 € au titre des congés payés afférents,
- 6.666,66 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 30.000 €à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 30.000 €au titre du travail dissimulé
- 800 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile
La sarl Société de RECHERCHE ET DE PRODUCTIONDES MELANGES INDUSTRIELS en a interjeté appel.
Par conclusions récapitulatives du 28 décembre 2018 , auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société SRPMI demande à la cour de dire son appel régulier, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de dire et juger que la relation salariale entre la société SRPMI et Monsieur [L] a existé du 1 er mai 2009 au 30 septembre 2009, que Monsieur [L] a démissionné à compter du 1 er octobre 2009, que son salaire ne saurait excéder la somme de 3.960 € de le débouté de son appel incident et de l'intégralité de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par conclusions récapitulatives du 3 octobre 2018, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [L] demande à la cour de dire et juger que la déclaration d'appel est nulle, de dire que la relation de travail s'est étendue du mois de mars 2007 au mois de février 2018 date du prononcé du jugement de première instance, de condamner la société SRPMI au paiement de la somme de -621000 € augmentée de 61200 € de congés payés y afférent, à titre subsidiaire de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la société SRPMI au paiement de la somme de 175000 € de rappel de salaire augmentée de celle de 17500 € de congés payés y afférent, en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail, et en ce qu'il a condamné la SARL SRPMI au paiement des sommes de 15000 € au titre du préavis et 1500 € de congés payés y afférent.
Il demande de fixer à 120 000 € les dommages et intérêts du chef du licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, et subsidiairement à 30000 € Et de condamner la société au paiement de la somme de 22500 € d'indemnité de licenciement et à titre subsidiaire à la somme de 6666,66 €.
Il demande la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société SRPMI au paiement des sommes de 30000 € pour travail dissimulé,et de condamner la société au paiement de 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de Maître Paul-Antoine DEMANGE en application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture était rendue le 30 juin 2020.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
Sur la déclaration d'appel
Monsieur [L] soutient que la déclaration d'appel a été faite sans respecter les dispositions de l'article 901 du code de procédure civile qui précise que celle-ci doit préciser les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
La déclaration d'appel contient la mention « appel total » Cependant celle-ci est complétée d'une annexe qui précise les critiques faites au jugement et les demandes de la société.
L'appel est donc recevable .
Sur la date d'effet du contrat de travail
La société SRPMI conteste les dates retenues par le conseil de prud'hommes qui a considéré que le contrat de travail avait débuté le le 1er novembre 2008 alors qu' elle avait réglè les factures de la société SILVER BIRD créée par Monsieur [L] jusqu'en décembre 2008 .
Elle soutient que le contrat de travail a débuté ses effets au 1er mai 2009 , le premier paiement fait à Monsieur [L] date du 25 mai 2009 .
Monsieur [L] soutient qu'il était sous la subordination de la société depuis avril 2007.
Il est versé aux débats une facture de la société SILVER BIRD LIMITED à la SRPMI reprenant des notes d'honoraires jusqu'au mois d'octobre 2008, un mail en date du 6 février 2009 dans lequel Monsieur [L] se plaint de ne pas avoir perçu ses salaires .
Ces éléments démontrent que la relation commerciale a évoluée en relation salariale à compter du 1er novembre 2008 fin de la relation commerciale comme l'a justement constaté le conseil de Prud'hommes .
Sur le montant du salaire
Monsieur [L] soutient qe son salaire s'élevait à la somme de 5000€ alors que la société soutient que cette somme correspond au salaire brut .
Cependant aucune justification d'une déclaration préalable à l'embauche n'est fournie pas plus que des bulletins de salaire , en revanche les chèques libéllés au nom de Monsieur [L] sont produits d'un montant de 5000€ datés des 25/05/2009, 09/07/2009 ,16/07/2009 et un de 10000 € daté du 02/07/2009 . Ces montants correspondent nécessairement au salaire net
La société ne revendique d'ailleurs aucun paiement d'un montant de 3.960 €, ni ne justifie du paiement des charges sociale .
Au vu de ces versements il est établi que le salaire net de Monsieur [L] est de 5000€. Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point .
Sur la rupture du contrat de travail
Monsieur [L] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire en date du 15 septembre 2009
Sur la résiliation judiciaire
Les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être d'une gravité suffisante. La résiliation judiciaire aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse .
En matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant, dès lors qu'à cette date le salarié est toujours au service de son employeur.
En l'espèce la société SRPMI qui prétend que Monsieur [L] a démissionné n'apporte aucun élément démontrant la volonté non équivoque de celui-ci avant mars 2012 de mettre fin au contrat de travail .
Elle verse aux débats l'immatriculation de Monsieur [L] sous forme d' affaire personnelle commerçant, pour une activité de commerce de détail de' produit à base de tabac en magasin spécialisé ' exercée à [Localité 5], dans le sud de la France , en date du 27 mars 2012 . Le lieu d'exploitation et la nature de celle-ci permet de considérer qu'il ne travaillait plus pour la SRPMI.
Il ne résulte pas des éléments versés aux débats que Monsieur [L] ait exercé une activité pour le compte de la société ou se soit tenu à la disposition de la société SRPMI, à compter de cette date , en sa qualité de directeur Asie et Amérique du Sud .
Ainsi au 1er avril 2012 Monsieur n'est plus au service de la société SRPMI .
Il est démontré l'absence de paiement régulier du salaire , puisque sur l'ensemble de la période de travail qui a duré plus de 3 ans , Monsieur [L] n'a perçu que 5 mois de salaire
Ce manquement à l'obligation principale de la société SRPMI constitue un manquement grave justifiant que la résiliation judiciaire soit prononcé à ses torts. Celle-ci produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse .
Evaluation du montant des condamnations
Aux termes de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable en l'espèce, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Au vu des pièces et des explications fournies, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Monsieur [L] , de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice subi en application de l'article L.1235-3 du code du travail, en lui allouant la somme de 30 000€.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné la société à verser à Monsieur [L] les sommes de 15000€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1500€ au titre des congés payés afférents et 6666,66€ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.
Sur la demande de rappel de salaire
Monsieur [L] a travaillé du 1er novembre 2008 au 31 mars 2012 , il lui est donc dû la somme de 180 000€ et 18 000€ au titre des congés payés afférents, celle de 25000€ lui ayant été payée .
Sur le travail dissimulé
En vertu de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Selon l'article L. 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus par l'article L. 8221-5, a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ; au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, ces dispositions ne font pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire qu'elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail et notamment l'indemnité légale de licenciement;
Il est démontré que l'employeur de Monsieur [L] en ne lui établissant aucun contrat de travail et en lui fournissant aucun bulletin de salaire s'est soustrait délibérément à ses obligations
Le jugement du conseil de prud'hommes qui lui a alloué la somme de 30 000€ à ce titre sera confirmé
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf sur le montant du rappel de salaire
Statuant à nouveau
Condamne la société DE RECHERCHE ET DE PRODUCTION DES MELANGES INDUSTRIELS à payer à Monsieur [L] les sommes de
180 000€ à titre de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2008 au 31 mars 2012
18000€ au titre des congés payés afférents
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société DE RECHERCHE ET DE PRODUCTION DES MELANGES INDUSTRIELS à payer à Monsieur [L] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties du surplus des demandes ,
LAISSE les dépens à la charge de la société DE RECHERCHE ET DE PRODUCTION DES MELANGES INDUSTRIELS dont distraction au profit de Maître DEMANGE.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE