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16/12/2020 | FRANCE | N°18/02647

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 16 décembre 2020, 18/02647


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2020



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02647 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B46YH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Décembre 2017 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/13582





APPELANT



Monsieur [O] [H] [Y] [B]

né le [Date naissance 5] 1948 à [Localité 9]
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représenté par Me Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0593





INTIMES



Maître [A] [M], Notaire retiré

né le [Date naissance 6] 1959 à [Localité 8]

[Adresse 1]...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2020

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02647 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B46YH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Décembre 2017 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/13582

APPELANT

Monsieur [O] [H] [Y] [B]

né le [Date naissance 5] 1948 à [Localité 9]

[Adresse 4]

représenté par Me Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0593

INTIMES

Maître [A] [M], Notaire retiré

né le [Date naissance 6] 1959 à [Localité 8]

[Adresse 1]

SCP [M] - BAUM - LAMBERT représentée par son gérant domicilie en cette qualite audit siege

[Adresse 1]

représentés par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Dorothée DARD, Président

Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller

Mme Catherine GONZALEZ, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme [J] [D] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dorothée DARD, Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

Le 9 janvier 1987, [C] [B] est décédé, en laissant pour lui succéder son épouse [V] [P], et leurs cinq enfants, [N], [T], [O], [RK] et [I] [B].

[I] [B] est décédée le [Date décès 3] 2010, en laissant pour lui succéder M. [L] [X], son conjoint survivant qui a opté pour l'usufruit sur l'universalité des biens dépendant de la succession, et ses enfants [WD], [W], [U] et [R] [X].

[V] [P] est décédée le [Date décès 2] 2012.

Par acte authentique en date du 29 novembre 2011, reçu par Maître [A] [M], notaire associé de la SCP [M]-Baum-Lambert, [V] [P], ses enfants et petits-enfants avaient procédé à un partage partiel de la succession de [C] [B].

Par actes d'huissier en date des 16, 20 et 30 juin 2016, Monsieur [O] [B] a assigné Maître [M], la SCP [M]-Baum-Lambert, Monsieur [N] [B], Monsieur [T] [B], Madame [RK] [B] épouse [K], Madame [U] [X] épouse [F], Madame [R] [X], Monsieur [WD] [X], Monsieur [W] [X] et Monsieur [L] [X] devant le tribunal de grande instance de Paris, aux fins d'obtenir la nullité de l'acte authentique de partage en date du 29 novembre 2011 et la mise en oeuvre d'un partage judiciaire, ainsi que la mise en jeu de la responsabilité des notaires.

Par jugement rendu le 22 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a statué en ces termes :

- rejette les demandes de nullité de l'acte de partage judiciaire et dommages et intérêts présentées par Monsieur [O] [B],

- rejette le surplus des demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamne Monsieur [O] [B] à payer à la SCP [M]-Baum-Lambert et Monsieur [A] [M] la somme de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne Monsieur [O] [B] aux dépens dont distraction au profit de Maître Lacan.

Monsieur [O] [B] a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 29 janvier 2018.

Comme en première instance, seuls la SCP [M]-Baum-Lambert et Monsieur [A] [M] ont constitué avocat devant la cour.

Par ordonnance en date du 11 juin 2019, le conseiller de la mise en état a :

- constaté la caducité partielle de la déclaration d'appel, formée le 29 janvier 2018 par Monsieur [O] [B], cette caducité étant limitée aux prétentions d'appel formées contre Monsieur [N] [B], Monsieur [T] [B], Madame [RK] [B] épouse [K], Madame [U] [X] épouse [F], Madame [R] [X], Monsieur [WD] [X], Monsieur [W] [X] et Monsieur [L] [X], co-partageants, à qui les conclusions de l'appelant n'avaient pas été signifiées dans les 4 mois suivant la date de la déclaration d'appel,

- dit que l'instance n°18/02647 se poursuivait uniquement entre Monsieur [O] [B], appelant, et Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum- Lambert, intimés,

- condamné Monsieur [O] [B] aux dépens de l'incident et de la procédure d'appel déclarée caduque à l'égard de Monsieur [N] [B], Monsieur [T] [B], Madame [RK] [B] épouse [K], Madame [U] [X] épouse [F], Madame [R] [X], Monsieur [WD] [X], Monsieur [W] [X] et Monsieur [L] [X], co-partageants.

Cette ordonnance, déférée à la cour par Monsieur [O] [B] suivant requête du 24 juin 2019, a été confirmée en toutes ses dispositions par arrêt rendu le 23 octobre 2019, qui a également déclaré irrecevable la demande de Monsieur [O] [B] tendant à ce qu'il soit statué sur la recevabilité de son appel formé à l'encontre de Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert.

Par conclusions remises par RPVA le 12 octobre 2020, Monsieur [O] [B] demande à la cour :

Vu les articles 825, 860, 887, 922 du code civil,

Vu les articles 1109 et suivants, 1116 et 1382 anciens du code civil,

Vu l'article 16 de la Loi n°66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles,

Vu l'article 17.1 du Règlement national du Conseil supérieur du Notariat approuvé par arrêté du 21 juillet 2011,

Vu l'acte de donation du 10 mars 1982 consenti par Monsieur [C] [SA] [B] au profit de Monsieur [O] [B],

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu l'ordonnance de caducité partielle confirmée par arrêt du 23 octobre 2019,

- Le Déclarer recevable en son appel et bien-fondé en ses demandes,

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris dans toutes ses dispositions, c'est-à-dire en ce qu'il a :

- Rejeté les demandes de nullité de l'acte de partage, de partage judiciaire et dommages et intérêts qu'il a présentées,

- Rejeté le surplus de ses demandes,

- Condamné le concluant à payer à la SCP [M]-Baum-Lambert et Maître [A] [M] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné le concluant aux dépens dont distraction au profit de Maître Lacan,

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

- Prononcer la nullité de l'acte authentique de partage partiel de la succession de [C] [SA] [B], reçu par Maître [A] [M] à [Localité 9] le 29 novembre 2011,

- Ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision résultant de la succession de [C] [SA] [B],

- Désigner tel notaire qu'il lui plaira, mais indépendant de la famille des intimés et exerçant en dehors du ressort des cours d'appel de Paris et de Versailles, dont Messieurs [A] [M], [T] [B] et [O] [B] dépendaient en tant qu'officiers publics, pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage en tenant compte de l'ensemble des éléments composant réellement la succession de [C] [SA] [B],

- Condamner solidairement Maître [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert à lui verser la somme de 30.000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par les fautes commises par le notaire rédacteur, Maître [A] [M] avec intérêt au taux légal à compter du [Date décès 2] 2012, date de décès de Madame [V] [P], veuve de [H] [SA] [B], usufruitière des droits et biens compris dans la masse à partager,

A titre subsidiaire,

- Condamner solidairement Maître [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert à lui verser la somme de 1.788.066,15 euros au titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par les fautes commises par le notaire rédacteur, Maître [A] [M] avec intérêt au taux légal à compter du [Date décès 2] 2012, date de décès de [V] [P], veuve de [H] [SA] [B], usufruitière des droits et biens compris dans la masse à partager,

En tout état de cause,

- Condamner solidairement Maître [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert à lui verser la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner solidairement Maître [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert aux entiers dépens.

Par leurs conclusions remises par RPVA le 27 juillet 2018, Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert demandent à la cour de :

Confirmant le jugement entrepris,

- Débouter Monsieur [O] [B] de toutes ses demandes,

Y ajoutant,

- Condamner Monsieur [O] [B] à payer aux concluants la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Monsieur [O] [B] aux entiers dépens, de première instance et d'appel, et dire que Maître Lacan, avocat, pourra en application de l'article 699 du code de procédure civile, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont il déclarera avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.

A l'audience du 28 octobre 2020, la cour a mis aux débats la question de la recevabilité de la demande de l'appelant tendant à voir prononcer la nullité de l'acte authentique de partage partiel de la succession de [C] [SA] [B], reçu par Maître [A] [M] à [Localité 9] le 29 novembre 2011, les copartageants n'étant plus dans la cause à la suite de la caducité partielle de l'appel à leur égard et a par la suite invité les parties par message RPVA à présenter leurs observations écrites sur ce point.

Par écrit du 26 novembre 2020, remis à la même date par RPVA, Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert ont indiqué que l'action en nullité du partage et l'action en partage judiciaire diligentée consécutivement à l'annulation s'exerçant contre les copartageants qui ne sont plus parties à la procédure à la suite de l'arrêt du 23 octobre 2019, l'action est nécessairement irrecevable en ce qu'elle est poursuivie hors la présence des parties à l'acte, et en conséquence, intéressées, qui seules ont qualité pour y défendre.

Par écrits des 19 novembre 2020 et 1er décembre 2020, remis par RPVA les 23 novembre 2020 et 1er décembre 2020, Monsieur [O] [B] fait valoir en particulier que les consorts [B] à l'égard desquels la caducité a été prononcée, ne seront pas dénués de recours puisque la tierce opposition leur sera ouverte et que, par conséquent, ses demandes formulées aux termes de ses conclusions d'appelant n°3 (soit celles remises par RPVA le 12 octobre 2020) sont recevables, ajoutant qu'à supposer même que sa demande tendant à voir constater la nullité de l'acte de partage notarié n'était pas recevable, il n'en résulterait aucune conséquence sur l'engagement de la responsabilité civile de Maître [M] et de la SCP [M] Baum Lambert. Il ajoute, subsidiairement, que si la cour devait néanmoins considérer comme non recevable cette demande, elle rouvrirait les débats afin de permettre aux parties de conclure à nouveau sur le fond et que le prononcé d'une caducité partielle n'empêche pas la cour de réformer le jugement en totalité.

SUR CE, LA COUR :

1°) Sur la recevabilité de la demande de nullité de l'acte authentique de partage partiel de la succession de [C] [SA] [B] reçu par Maître [A] [M] à [Localité 9] le 29 novembre 2011 :

Par arrêt du 23 octobre 2019, la cour a confirmé l'ordonnance rendue le 11 juin 2019 par le conseiller de la mise en état qui a constaté la caducité partielle de la déclaration d'appel, formée le 29 janvier 2018 par Monsieur [O] [B], cette caducité étant limitée aux prétentions d'appel formées contre Monsieur [N] [B], Monsieur [T] [B], Madame [RK] [B] épouse [K], Madame [U] [X] épouse [F], Madame [R] [X], Monsieur [WD] [X], Monsieur [W] [X] et Monsieur [L] [X], co-partageants, à qui les conclusions de l'appelant n'avaient pas été signifiées dans les 4 mois suivant la date de la déclaration d'appel, et a dit que l'instance n°18/02647 se poursuivait uniquement entre Monsieur [O] [B], appelant, et Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert, intimés.

Il s'ensuit que la cour n'est plus saisie de l'action entre Monsieur [O] [B] et Monsieur [N] [B], Monsieur [T] [B], Madame [RK] [B] épouse [K], Madame [U] [X] épouse [F], Madame [R] [X], Monsieur [WD] [X], Monsieur [W] [X] et Monsieur [L] [X], co-partageants, lesquels comme le soulignent à juste titre Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert dans leurs observations écrites du 26 novembre 2020, ne sont plus présents à la procédure, de sorte que l'argument exposé par Monsieur [O] [B] dans ses observations écrites des 19 novembre 2020 et 1er décembre 2020, selon lequel « Les consorts [B] à l'égard desquels la caducité a été prononcée, ne seront pas dénués de recours puisque la tierce opposition leur sera ouverte », est dépourvu de toute portée.

La caducité de l'appel à l'égard des copartageants entraîne par voie de conséquence le caractère définitif de cette disposition et donc l'irrecevabilité de la demande.

Les parties ayant déjà abondamment conclu au fond, il n'y a aucunement lieu de rouvrir les débats pour leur permettre de le faire à nouveau, comme l'a envisagé Monsieur [O] [B] dans ses observations écrites précitées.

2°) Sur la demande tendant à voir ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision résultant de la succession de [C] [SA] [B] :

Monsieur [O] [B] estime simplement être en droit de demander qu'il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [C] [SA] [B].

Les intimés, qui ne répondent pas sur ce point, n'ont cependant pas qualité à défendre à une telle demande.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de partage judiciaire présentée par Monsieur [O] [B].

3°) Sur la demande de dommages et intérêts :

Monsieur [O] [B] sollicite la condamnation solidaire de Maître [A] [M] et de la SCP [M]-Baum-Lambert à lui verser :

- la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par les fautes commises, selon lui, par le notaire rédacteur, soit Maître [A] [M], avec intérêts au taux légal à compter du [Date décès 2] 2012, date du décès de [V] [P], veuve de [C] [SA] [B] et usufruitière des droits et biens compris dans la masse à partager,

- subsidiairement, la somme de 1.788.066,15 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par les fautes commises par le notaire rédacteur, Maître [A] [M] avec intérêt au taux légal à compter du [Date décès 2] 2012, date de décès de [V] [P], veuve de [H] [SA] [B] et usufruitière des droits et biens compris dans la masse à partager.

Comme l'a justement rappelé le jugement entrepris, le notaire est le garant de la validité de l'acte authentique et de sa conformité à la volonté des parties. Monsieur [O] [B] qui met en cause la responsabilité civile du notaire sur le fondement des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil, en réalité l'article 1147 ancien du même code s'agissant de la responsabilité contractuelle du notaire, doit caractériser une faute, un préjudice et un lien de causalité entre ces derniers.

En premier lieu, il reproche au notaire des manquements au devoir d'assurer l'efficacité et l'authenticité de l'acte.

A ce titre, il soutient d'abord comme étant d'après lui à l'origine du déséquilibre intrinsèque de l'acte de partage du 29 novembre 2011 les éléments suivants :

Selon Monsieur [O] [B], « il appartenait au notaire rédacteur de procéder aux vérifications d'usage lui permettant de découvrir les éventuelles omissions ou erreur et ainsi d'assurer à l'acte de partage son efficacité » et « Maître [A] [M] a fait montre d'une légèreté blâmable dans l'instruction de ce dossier à [son] préjudice ». Il soutient ainsi que Maître [A] [M] n'a jamais consulté un tableau de répartition établi par Monsieur [T] [B] par acte sous-seing privé du 22 avril 2000 (pièce 22 de l'appelant), ni annexé cet acte à l'acte de partage du 29 novembre 2001, dont l'appelant prétend qu'il lui impute à tort une somme de 550.000 francs qu'il dit ne jamais avoir reçue et être affectée en réalité au paiement des impôts de Madame [P], soulignant qu'il n'a ainsi été établi aucun acte rectificatif consécutivement à l'imputation de cette somme et qu'« il en est résulté un déséquilibre inhérent à l'acte de partage du 29 novembre 2011 ».

Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert ne font aucunes observations en réponse sur ce point.

Monsieur [O] [B] affirme en page 15 de ses écritures que

- « Monsieur [T] [B] a récemment précisé à son frère [O] [B] avoir établi huit projets de répartition et qu'il avait remis son entier dossier à la Chambre interdépartementale des notaires de [Localité 9] »,

- « En réalité, Monsieur [T] [B] a donc été l'initiateur du projet d'acte de partage, reçu ensuite par Maître [A] [M], avait parfaitement connaissance de la valeur des biens à partager, pour avoir pressé la signature de l'acte au double motif fiscal et pécuniaire, à savoir l'augmentation des droits de mutation et le partage de biens grevés d'usufruit, donc d'une valeur moindre »,

- et que « Monsieur [T] [B] a sous-évalué les lots présents dans la masse partageable de la succession de Monsieur [C] [SA] [B] et ce, afin d'augmenter la quotité des droits héréditaires de certains copartageants récalcitrants, au détriment de Monsieur [O] [B] ».

Cependant, il ne résulte de ces allégations que des critiques à l'encontre de Monsieur [T] [B], sans démontrer, ni même justifier que Maître [A] [M] ait été informé du tableau de répartition du 22 avril 2000 et/ou d'autres projets de répartition avant d'établir l'acte de partage du 29 novembre 2011.

Monsieur [O] [B] indique également en page 17 de ses écritures que « Monsieur [N] [B] a également dissimulé (volontairement ou involontairement, Me [A] [M] ne rapportant pas la preuve de le lui avoir demandé) une donation reçue de Monsieur [C] [SA] [B] », renvoyant à sa pièce 2, laquelle correspond à un prêt de 400.000 francs entre [C] [SA] [B] et [N] [B] selon acte sous-seing privé en date du 31 janvier 1980, qui n'établit dès lors aucune intervention de Maître [A] [M] et de la SCP [M]-Baum-Lambert dans cet acte, ni ne démontre qu'il ait été informé de ce prêt.

Monsieur [O] [B] ajoute en page 18 de ses écritures que « le contrat de mariage de Madame [RK] [B] et de son époux, Monsieur [MH] [K], en date du 8 octobre 1976, prévoit une dot accordée par Monsieur [C] [SA] [B] au profit de Madame [RK] [B] ». S'il souligne que « L'enfant doté qui accepte la succession doit le rapport de la dot à la succession du donateur », l'appelant ne justifie pas de l'existence de la stipulation qu'il invoque. C'est donc à juste titre que Monsieur [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert font observer que Monsieur [O] [B] se borne à une affirmation dépourvue du moindre élément de preuve.

Monsieur [O] [B] précise d'ailleurs, à la suite des éléments dénoncés plus avant,

- en pages 16 et 18 de ses écritures, qu'« il résulte de cette dissimulation une erreur dans la quotité des droits des copartageants »,

- en page 18 de ses écritures, que « La dissimulation par Monsieur [T] [B], cocontractant à l'acte de partage, de la valeur des lots présents dans la masse partageable de la succession de Monsieur [C] [SA] [B], et la dissimulation par Monsieur [N] [B] de l'importante donation dont il avait bénéficié ont déterminé le consentement donné par Monsieur [O] [B], qui a contracté en vue de l'attribution à chaque copartageant des biens d'une valeur égale à ses droits dans la masse partageable »,

- en page 19 de ses écritures, que « Ces tromperie ont conduit Monsieur [O] [B] à signer l'acte authentique de partage du 29 novembre 2011 »,

soit de prétendus manquements de copartageants et ne relevant d'aucune intervention abstention ou action fautive du notaire.

Quoique la demande en nullité ait été déclarée irrecevable, les griefs formulés par M. [O] [B] à l'encontre de l'acte doivent être examinés au regard de la demande de dommages et intérêts qu'il forme à l'encontre du notaire.

En premier lieu, il fait état d'erreurs sur la quotité des droits des copartageants aux motifs de :

- l'absence de prise en considération de la donation précitée du 31 janvier 1980, déjà évoquée plus avant, dont il indique simplement en page 20 de ses écritures qu'elle « a été dissimulée par son bénéficiaire » et non par le notaire ;

- l'absence de communication du contrat de mariage du 8 octobre 1976 susvisé, ajoutant en page 20 de ses écritures qu'« il est impossible de quantifier la valeur de rapport de la dot accordée par Monsieur [C] [SA] [B] » et que « la cour devra prendre acte du refus de communiquer la copie dudit contrat de mariage opposé par Madame [RK] [B] et Maître [A] [M], son rédacteur », ce qui est une observation dépourvue de portée, dès lors que Maître [A] [M], tenu au secret professionnel, n'a pas à communiquer la teneur d'un acte auquel Monsieur [C] [B] n'était pas partie, ni de manière générale, à verser aux débats une pièce pour réfuter un moyen de fait avancé sans aucun élément de preuve par la partie adverse,

- l'absence de prise en compte de dépenses d'amélioration qu'il prétend avoir effectuées au profit de l'indivision successorale, alors qu'il ne justifie pas avoir porté ces dépenses à la connaissance du notaire dans le cadre des opérations de partage ayant conduit à l'acte de partage du 29 novembre 2011,

- le fait que le partage réalisé ignore la clause dérogatoire insérée dans les deux actes de donation du 10 mars 1982 par [C] [SA] [B] à Monsieur [O] [B] reçus par Maître [A] [M] (pièces 3 et 4 de l'appelant), laquelle figure dans les termes suivants :

« CARACTERE DE LA PRESENTE DONATION

Le DONATEUR déclare que l'immeuble sera rapportable en moins prenant :

Toutefois :

1°- Le montant du rapport sera de la valeur de l'immeuble au décès du donateur si à ce moment là le donataire est en possession dudit bien.

2°- Si l'immeuble a été aliéné avant le décès du donateur, le rapport sera de la valeur au décès du donateur des biens formant la contrepartie de l'aliénation.

3° - Dans tous les cas où du fait de la présente donation, la part recueillie par le donataire dans la succession du donateur excéderait sa part de réserve, il serait redevable à la succession d'une soulte représentant la différence. » (pièces 3 et 4 de l'appelant).

Sur ce point, Monsieur [O] [B] reproche au notaire d'avoir fait application dans l'acte de partage du 29 novembre 2011 des dispositions de l'article 860 alinéa 1er du code civil indiquant prendre en considération la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation. Il estime que « Me [A] [M] aurait dû s'assurer que l'acte de partage qu'il a dressé n'était pas de nature à paralyser l'efficacité d'actes antérieurs de son ministère, et, en l'espèce, le bénéfice pour deux héritiers de la clause dérogatoire de rapport grevant les donations reçues » et que ce faisant le notaire « commet une faute en relation causale avec le dommage subi par cet héritier, à savoir une diminution de ses droits sur la succession en raison de l'application des modalités de rapport de droit commun entraînant une surévaluation du lot donné ».

L'acte de partage du 29 novembre 2011 indique en pages 5 et 6 que dans les deux actes de donation des 10 mars 1982 « il a été expressément stipulé que cette donation serait rapportable en moins prenant à la succession du donateur et que le montant du rapport serait de la valeur de l'immeuble au décès du donateur si à ce moment le donataire était en possession du bien », puis mentionne à la suite que « Monsieur [O] [B], donataire, est toujours en possession desdits biens et droits immobiliers dont la valeur à ce jour, compte tenu de leur état à l'époque de la donation, est de UN MILLION TROIS CENT MILLE EUROS (1.300.000,00 EUR) » s'agissant des lots 9 et 23 dépendant de l'ensemble immobilier sis [Adresse 7] et que « Madame [RK] [K], donataire, est toujours en possession desdits biens et droits immobiliers dont la valeur à ce jour, compte tenu de leur état à l'époque de la donation, est de UN MILLION DEUX CENT SOIXANTE DIX MILLE EUROS (1.270.000,00 EUR) » s'agissant des lots 5 et 21 dépendant de l'ensemble immobilier sis [Adresse 7] », et enfin que Monsieur [O] [B] et Madame [RK] [K] effectueront, en conséquence, le rapport au moins prenant de ces sommes.

Monsieur [O] [B] qui affirme en page 23 de ses écritures qu'il « n'a jamais consenti à renoncer au bénéfice de cette clause dérogatoire pour valoriser le rapport de la donation reçue le 10 mars 20182 », n'a pourtant émis aux termes de l'acte de partage précité, tout comme les autres co-partageants, aucune opposition, observation ou réserve à ce titre, cet acte étant ainsi signé de tous. Le fait que le rappel de la clause dérogatoire par le notaire soit immédiatement suivi de l'application de la règle légale de calcul du montant du rapport montre l'accord des parties sur ce point lors de la signature de l'acte de partage partiel, une telle mention ne pouvant échapper à Monsieur [O] [B], notaire de profession comme indiqué en page 2 de cet acte de partage et qui ne pouvait donc ignorer le sens et la portée de ce choix.

En second lieu, Monsieur [O] [B] évoque une erreur sur la propriété des biens compris dans la masse partageable, reprochant à Maître [A] [M] l'absence de vérification de la propriété des biens énoncés dans l'acte de partage du 29 novembre 2011 pour y avoir mentionné qu'il était toujours en possession des biens immobiliers sis [Adresse 7] (lots n°9 et n°23), dont [C] [SA] [B] lui avait fait donation par acte du 10 mars 1982, alors qu'il affirme avoir cédé ces deux lots à Monsieur [Z] [S] suivant acte reçu par Maître [G], notaire à [Localité 8], le 15 octobre 2010. Il estime que ce faisant le notaire « a manqué à son devoir d'authentification en omettant de vérifier [ses] droits» sur ces lots.

En réponse, Maître [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert font valoir qu'il ne leur revenait pas d'opérer des recherches hypothécaires pour contredire les affirmations de l'appelant lui-même dont ils n'avaient pas de raison de douter concernant ce bien que le de cujus lui avait donné, soulignant en particulier que le notaire doit ses conseils au vu des déclarations de ses clients et des éléments que ceux-ci mettent entre ses mains. Ils font ainsi grief au jugement entrepris d'avoir retenu la faute de Maître [A] [M] pour n'avoir pas décelé le fait de cette vente, publiée au service de publicité foncière. Ils ajoutent qu'il n'en ressort aucun préjudice pour l'appelant qui par la dissimulation de la vente qu'il a consentie et du prix qu'il en a retiré, a minoré le montant du rapport auquel il a été tenu.

Il est vrai que l'appelant justifie avoir cédé selon acte reçu le 20 octobre 2010 par Maître [E] [G], notaire à [Localité 8] (Hauts-de-Seine), les lots n°9 et n°23 du [Adresse 7] (pièce 6 de l'appelant), de sorte que ces lots ont bien été cédés antérieurement à l'acte de partage du 29 novembre 2011.

L'acte de partage mentionne en page 5 que Monsieur [O] [B] « est toujours en possession de ces biens et droits immobiliers », sans qu'il ne résulte des termes de cet acte, ni d'aucune des pièces produites par Monsieur [O] [B], que celui-ci ait mentionné au notaire cette vente du 20 octobre 2010.

Monsieur [O] [B] ajoute en page 13 de ses écritures qu'« Il est constant qu'à ce titre, il incombe au notaire une vérification du droit de propriété au moyen d'actes et de documents (Civ. 1ère, 7 févr. 1990, JCP N 1990. 11. 125, note J-F. Pillebout). Pour vérifier les droits de propriété, le notaire doit se renseigner auprès des services du cadastre et consulter le fichier immobilier », ce qui n'est nullement énoncé par l'arrêt cité par l'appelant, dont il ressort seulement que le notaire n'est pas tenu de procéder sur place à une vérification de la consistance des locaux objet d'une vente et ne peut être condamné à réparer le préjudice résultant de l'incorporation irrégulière de parties communes à un lot de copropriété vendu dans la mesure où il n'avait aucune raison de penser que la désignation était inexacte.

Au demeurant, Monsieur [O] [B] ne rapporte pas la preuve du préjudice que lui cause l'absence de mention de la vente des biens donnés susvisés, qu'il ne pouvait pourtant ignorer et qu'il s'est ainsi délibérément abstenu de révéler.

Comme le soulignent en outre justement les intimés, la considération de la propriété du bien dans le patrimoine du copartageant ne commandait pas la validité de l'acte, affectant seulement le montant de la valeur à rapporter par le copartageant qui avait bénéficié d'une donation, ce dont ne saurait être tenu responsable le notaire rédacteur de l'acte de partage.

En troisième lieu, Monsieur [O] [B] dénonce « l'absence de vérification de la valeur des biens dépendant de la succession, des contrats de mariage des copartageants et l'omission de l'annexion des plans des biens immobiliers », exposant que le notaire s'est abstenu d'effectuer toute recherche sur la consistance des biens dépendant de la succession, et d'interroger les copartageants sur l'existence de donations antérieures, ce qui entraînerait selon lui l'omission de certains biens dans le partage, alors qu'il indique que Maître [A] [M] était le rédacteur du contrat de mariage de Madame [RK] [B] épouse [K] reçu le 8 octobre 1976 et avait donc parfaite connaissance de l'existence d'une dot attribuée par [C] [SA] [B] au profit de celle-ci, dont rapport devait être fait, et qu'« aucune vérification n'a été opérée par le notaire qui au demeurant s'est refusé à communiquer copie du contrat de mariage». (pièce 13 de l'appelant).

Il souligne l'estimation erronée des biens composant la masse partageable, reprochant au notaire de ne pas avoir mentionné dans l'acte de partage que les évaluations des lots ont été préalablement établies d'un commun accord par les copartageants, et d'avoir retenu unilatéralement l'usufruit fiscal de l'article 669 du code général des impôts, sans s'interroger sur un éventuel différentiel avec un calcul économique ; que l'intimé ne justifie jamais avoir conseillé ni même informé les parties sur l'opportunité du choix du mode de calcul de l'usufruit ; qu'« en raison de la mission de liquidation partage de la succession de [C] [SA] [B] qui lui était confiée Me [A] [M] était débiteur envers les héritiers d'une obligation de conseil » et qu'« il lui appartenait de procéder à une évaluation voire une réactualisation de l'estimation des biens reposant sur des éléments objectifs et sérieux et d'informer les héritiers des conséquences d'une sous-évaluation d'un bien » et « le cas échéant, le notaire avait pour obligation d'orienter ses clients vers une expertise immobilière pour remplir son devoir d'information et aboutir à la perfection de l'acte qu'il a rédigé » ; il estime que « Maître [A] [M] ne justifie pas avoir rempli son obligation d'information et a failli à son obligation d'assurer l'égalité du partage de la succession de [C] [SA] [B] » et qu'« il en résulte que la responsabilité du notaire est engagée sur le fondement de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction ancienne applicable au litige ». Il affirme ainsi que « L'absence de vérification de la consistance de la masse à partager et la non-inclusion de biens dans cette masse constituent des fautes engageant la responsabilité du notaire rédacteur » et que « les manquements aux devoirs d'authentification et de conseil de Me [A] [M] ont conduit à une diminution manifeste des droits de Monsieur [O] [B] sur la succession et un déséquilibre flagrant dans le partage ».

Comme l'a justement relevé le jugement entrepris, l'acte de partage objet du litige décrit précisément les biens objets du partage, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a dit qu'il ne peut être reproché au notaire de ne pas avoir annexé les plans desdits biens, dont il n'est au demeurant justifié d'aucune obligation légale en la matière.

Etant rappelé que le devoir de conseil qui pèse sur les notaires n'a pas de caractère absolu et dépend des circonstances de la cause, il n'est par ailleurs démontré aucun désaccord des copartageants sur la valeur des biens à partager lors des opérations de partage et, comme l'indiquent opportunément les intimés, il revenait seulement au notaire, en l'absence d'autre mandat que celui de dresser partage, de prendre acte des valeurs concernées et de désigner d'une manière claire et non équivoque la consistance des biens, ce qui résulte au cas présent des termes de l'acte de partage comme indiqué plus avant.

Enfin, il n'est pas démontré que le notaire n'ait pas vérifié les contrats de mariage des copartageants précisément mentionnés à l'acte de partage, étant établi qu'il était bien en possession de ces actes comme cela ressort de l'échange de courriels des 12 et 14 mars 2016 par lequel Monsieur [O] [B] demandait à Maître [A] [M] « As tu les contrats de mariage de [T], moi même [RK] et [I] ' Si oui est il possible d'en avoir une simple copie, éventuellement par courriel ' », lequel lui répondait « Comme tu le sais en tant qu'ancien Notaire, je suis tenu au secret professionnel et ne peux donc te délivrer les copies demandées sauf si tu obtiens l'autorisation de tes frères et soeurs » (pièce 13 de l'appelant).

Il résulte de l'ensemble des éléments précités qu'il n'est caractérisé aucune faute à l'encontre de Maître [A] [M].

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par Monsieur [O] [B].

PAR CES MOTIFS :

Déclare la demande de nullité de l'acte authentique de partage partiel de la succession de [C] [SA] [B], reçu par Maître [A] [M] à [Localité 9] le 29 novembre 2011 irrecevable ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Monsieur [O] [B] et le condamne à payer à Maître [A] [M] et la SCP [M]-Baum-Lambert la somme de 3.000 euros ;

Condamne Monsieur [O] [B] aux dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/02647
Date de la décision : 16/12/2020

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°18/02647 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-12-16;18.02647 ?
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