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08/01/2021 | FRANCE | N°18/15254

France | France, Cour d'appel de Paris, 08 janvier 2021, 18/15254


Copies exécutoires délivrées aux parties le REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 4 - Chambre 1


ARRET DU 08 JANVIER 2021


(no , pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/15254 - No Portalis 35L7-V-B7C-B5326


Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 15/16276




APPELANT


Monsieur [L] [P] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1]


Représenté par Me Karine ALTMANN, avocat au b

arreau de PARIS, toque : E2070 et par Me Eric Charlery de Coblence Associés, avocat au Barreau de PARIS toque : P53


INTIMES


Monsieur [D] [M] [V]
[Adresse...

Copies exécutoires délivrées aux parties le REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRET DU 08 JANVIER 2021

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/15254 - No Portalis 35L7-V-B7C-B5326

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 15/16276

APPELANT

Monsieur [L] [P] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Représenté par Me Karine ALTMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070 et par Me Eric Charlery de Coblence Associés, avocat au Barreau de PARIS toque : P53

INTIMES

Monsieur [D] [M] [V]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Représenté par Me Erick MULAND DE LIK, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, toque : 91

Madame [Y] [L] [I]
[Adresse 2]
[Adresse 3]

n'a pas constitué avocat

SELARL AMPERE NOTAIRES
représentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège, ayant anciennement pour forme celle d'une société civile professionnelle et pour dénomination celle de « SCP GASTALDI -GOZLAN-ARAV-DOURNEAU »
[Adresse 4]
[Adresse 4]

Représentée par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435
substitué par Me Maxime BUSSIERE du même cabinet

SASU CITYA URBANIA ETOILE
[Adresse 5]
[Adresse 5]

Représentée par Me Stéphane CHOISEZ de la SELARL CHOISEZ & ASSOCIES Société d'avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C2308

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 novembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Claude Creton, président, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Claude Creton, président
Mme Christine Barberot, conseillère
Mme Monique Chaulet, conseillère

Greffier, lors des débats : M. Grégoire Grospellier

Arrêt :
-défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Claude Creton, président et par Grégoire Grospellier, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****
Par acte du 19 octobre 2010, reçu par la société civile professionnelle de notaires Gastaldi-Gozlan-Arav-Dourneau, M. et Mme [M] [V] ont vendu à M. [E] au prix de 105 000 euros un appartement situé à [Adresse 6]. Il était stipulé que "le vendeur déclare : SUR L'ETAT : - Que les biens vendus ne font l'objet d'aucune injonction de travaux...". Une copie du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 19 juillet 2010, annexée à l'acte de vente, fait état de travaux imposés par la préfecture de police [Établissement 1].

Le 24 novembre 2010, le préfet de police a notifié au cabinet Urbania, syndic de la copropriété, un arrêté d'insalubrité du 17 novembre 2010 prévoyant la suspension à compter du 1er décembre 2010 des contrats de bail à usage d'habitation, les locaux vacants ne pouvant être ni loués ni mis à disposition pour quelque usage que ce soit.

Le 15 février 2011, le préfet a informé M. [M] [V] que le logement du 3ème étage porte gauche faisait l'objet d'un arrêté préfectoral à titre remédiable.

Le 22 mars 2013, M. [E] était informé de la levée de l'arrêté d'insalubrité du 17 novembre 2010 et de la levée de l'arrêté ayant pour objet le studio.

Par actes des 14, 16 et 29 octobre 2015, M. [E] a assigné en paiement de la somme de 59 708 euros à titre de dommages-intérêts M. et Mme [M] [V] sur le fondement du dol, la SCP Gozlan-Arav-de Berthamon-Lena-Laganne-Bigot pour manquement à son obligation de conseil et la société Citya Urbania étoile (la société Urbania) pour avoir délivré une information inexacte sur la situation de l'immeuble.

Par jugement du 30 mars 2018, le tribunal de grande instance de Paris, après avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription, a débouté M. [E] de sa demande en l'absence de lien de causalité entre les fautes et le préjudice qu'il invoque dès lors que ces préjudices consistent en une perte de chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses et que sa demande ne fait pas état d'un tel préjudice.

M. [E] a interjeté appel de ce jugement et s'est ensuite désisté de son appel à l'encontre de la société Urbania.

Sur le dol reproché à M. et Mme [M] [V], il fait valoir qu'avant la signature de la promesse de vente du 28 juin 2010, l'autorité administrative avait notifié le 31 mars 2010 à la copropriété et aux vendeurs une liste de manquements aux normes de salubrité relativement aux parties communes et à l'appartement objet de la vente ; que le 7 juin 2010 une réunion avec les services de l'urbanisme de la commune avait porté sur les mesures à prendre afin d'éviter une déclaration d'insalubrité de l'immeuble ; qu'en conséquence, M. et Mme [M] [V] ont commis un dol pour ne pas avoir informé M. [E] du risque d'une déclaration d'insalubrité dès lors qu'aucuns des travaux n'avaient été réalisés en dépit des avertissements de l'autorité administrative.

Ensuite, compte tenu de l'incohérence entre les mentions portées au procès-verbal de l'assemblée générale du 19 juillet 2010 qui fait état de travaux "imposés" par l'autorité administrative et celles figurant dans la description de l'immeuble par le syndic qui ne fait état d'aucune mesure d'injonction administrative de travaux, M. [E] soutient que le notaire a manqué à ses obligations pour ne pas s'être renseigné sur la nature des travaux imposés par l'administration et sur l'existence d'une injonction administrative de travaux.

M. [E] conclut à la condamnation in solidum de M. et Mme [M] [V] et de la SCP Gastaldi-Gozlan-Arav-Dourneau à lui payer :
- la somme de 22 806 euros au titre de l'indemnisation de la perte de chance d'obtenir une réduction du prix de vente de l'appartement ;
- la somme de 14 648 euros au titre de l'indemnisation de la perte de chance de disposer librement de son bien et de le donner en location pendant la durée de son indisponibilité ;
- la somme de 7 500 euros en réparation de son préjudice moral ;
- la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [M] [V] conclut à la confirmation du jugement.

Il conteste avoir commis un dol et fait valoir que M. [E] avait été informé avant la signature de l'acte de vente de la situation de l'immeuble et des travaux à réaliser ainsi qu'il résulte de l'état daté établi par le syndic et du procès-verbal de l'assemblée générale du 19 juillet 2010 qui fait état des "travaux imposés par la préfecture [Établissement 1]", les parties ayant d'ailleurs convenu que la charge du coût de ces travaux seraient partagée entre elles. Il ajoute qu'au jour de la signature de l'acte de vente, il n'était pas établi qu'un arrêté d'insalubrité serait délivré quelques mois plus tard.

A titre subsidiaire, M. [M] [V] fait valoir que le prix de vente a été fixé compte tenu de l'état de l'immeuble et qu'ainsi M. [E] ne justifie pas avoir perdu la chance d'avoir pu acquérir le bien à un prix moindre. Il conteste également l'existence d'un préjudice constitué par la perte de chance de pouvoir disposer librement de son bien et de le donner en location pendant la période où il a été indisponible puisque cette indisponibilité n'est pas seulement due aux travaux imposés par l'administration mais également à ceux que M. [E] a fait réaliser pour améliorer l'état du bien.

Plus subsidiairement, M. [M] [V] demande à être garanti par la société Gasgtaldi-Gozlan-Arav-Dourneau, devenue la société Ampère notaires et par la société Urbania en cas de condamnation prononcée à son encontre.

Il réclame enfin la condamnation de M. [E] ou de toute partie succombante à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Ampères notaires conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société Urbania, d'une part, de M. [M] [V] et de Mme [W] [I] d'autre part, à lui payer une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle conteste d'abord avoir manqué à ses obligations envers M. [E] à qui il a transmis toutes les informations dont il avait connaissance en attirant son attention sur la décision de l'assemblée générale des copropriétaires qui s'était tenue le 19 juillet 2010 et avait décidé, à la demande de l'administration, de réaliser des "travaux prioritaires de réfection du bâtiment 1" et des "travaux urgents de réfection du bâtiment A" d'un montant total de 15 529,16 euros, dont le détail figure en annexe du procès-verbal de l'assemblée générale, et que les parties, en toute connaissance de cause, avaient accepté de prendre en charge chacune à concurrence de la moitié. Il ajoute que la nature de ces travaux ne pouvait suspecter la délivrance prochaine d'un arrêté d'insalubrité alors que l'état daté établi par le syndic ne fait état d'aucune mesure d'injonction de travaux.

Elle conteste ensuite l'existence d'un préjudice en lien de causalité avec la faute alléguée aux motifs d'une part que l'impossibilité de louer le studio a pour cause l'arrêté d'insalubrité qui a été délivré postérieurement à la vente, d'autre part que le coût des travaux à la charge de M. [E] est dû à l'état de l'immeuble dont celui-ci a pu se rendre compte avant la vente lors de la visite des lieux.

A titre subsidiaire, la société Ampère notaires demande à être garantie par la société Urbania et par les vendeurs de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.

SUR CE,

Attendu qu'il convient de constater le désistement d'instance et d'action de M. [E] contre la société Urbania ; qu'aucun appel provoqué n'ayant été formé contre la société Urbania, les appels en garantie formés contre cette dernière sont irrecevables ;

1 - Sur les demandes de M. [E]

- Contre M. et Mme [M] [V]

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que la copropriété et M. et Mme [M] [V] avait reçu le 31 mars 2010 avant la vente notification par l'administration d'une liste de manquements aux normes de salubrité affectant à la fois les parties communes et l'appartement qui sera vendu à M. [E] ; que le 7 juin 2010 s'est tenue une réunion avec le service de l'urbanisme de la commune qui a porté sur les travaux à effectuer afin d'éviter une déclaration d'insalubrité de l'immeuble ; que si M. [E] a été informé par le procès-verbal de l'assemblée générale du 19 juillet 2010 des travaux qui seraient réalisés et si celui-ci a pu se rendre compte de l'état de l'immeuble et de l'appartement lors de la visite des lieux, l'existence d'une procédure susceptible de déboucher sur une déclaration d'insalubrité, avec des conséquences sur la jouissance de l'immeuble et de l'appartement litigieux, constituait une information essentielle qu'il appartenait à M. et Mme [M] [V] de transmettre à l'acquéreur ; que faute de lui avoir transmis cette information qui, si M. [E] en avait eu connaissance, n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions différentes, M. et Mme [M] [V] ont commis une réticence dolosive engageant leur responsabilité délictuelle envers l'acquéreur ; que le préjudice subi par celui-ci consiste en une perte de chance de ne pas conclure la vente ou de la conclure à d'autres conditions ; que compte tenu du prix auquel a été vendu l'immeuble, des informations dont disposait par ailleurs M. [E], notamment celles relatives aux travaux décidés par l'assemblée générale du 19 juillet 2010 pour assurer la remise du bien aux normes, de l'état de l'appartement nécessitant des travaux de remise en état, il convient de fixer l'indemnité compensatrice de ce préjudice à la somme de 3 000 euros ; que l'existence du préjudice moral allégué n'est pas justifiée en l'absence d'éléments établissant l'état de stress qu'il allègue pour avoir été dans l'incertitude quant à la date à laquelle son appartement pourrait être mis en location alors que la perspective de travaux à réaliser indépendamment de la procédure d'insalubrité était une donnée qu'il ne pouvait ignorer ;

- Contre le notaire

Attendu que le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique ;

Attendu que le notaire ayant été informé par le procès-verbal de l'assemblée générale du 19 juillet 2010 de la décision des copropriétaires de réaliser des travaux imposés par l'administration, sans autre précision, alors que l'état daté établi par le syndic ne faisait état d'aucune mesure d'injonction de travaux, il lui appartenait en présence de cette contradiction de réclamer au syndic toutes précisions sur les motifs qui ont conduit l'administration à imposer ces travaux afin de renseigner l'acquéreur sur la situation administrative de l'immeuble, le cas échéant de consulter les documents d'urbanisme ; que le notaire ayant manqué à cette obligation engage sa responsabilité envers M. [E] à concurrence du préjudice causé par la perte de chance de conclure la vente à un moindre prix ;

2 - Sur les appels en garantie

- De M. et Mme [M] [V] contre le notaire et le syndic

Attendu qu'en dépit de leur faute, le notaire et le syndic n'engagent pas leur responsabilité à l'égard de M. et Mme [M] [V] qui se sont rendus coupables d'un dol en ne délivrant pas une information sur l'existence d'une procédure de déclaration d'insalubrité, cette faute absorbant celle du notaire et du syndic ;

- Du notaire contre M. et Mme [M] [V]

Attendu que M. et Mme [M] [V] ont commis une faute en raison de la réticence dolosive dont ils se sont rendus coupables ; que la faute de la société Urbania consiste à avoir délivré un état daté qui ne faisait pas état de travaux imposés par l'administration ; que compte tenu de la gravité de ces fautes, il convient de condamner M. et Mme [M] [V] à garantir, la société Ampère notaires des condamnations prononcées à son encontre à proportion de la moitié.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Constate le désistement d'instance et d'action de M. [E] contre la société Citya Urbania étoile et le désistement d'instance et d'action de la société Citya Urbania étoile contre M. [E] ;

Déclare M. et Mme [M] [V] et la société Ampères notaires responsables des préjudices causés à M. [E] ;

Les condamne in solidum à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Condamne M. et Mme [M] [V] à garantir la société Ampères notaires, à concurrence de la moitié, des condamnations prononcées à son encontre ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme [M] [V] et de la société Ampère notaires et les condamne in solidum à payer à M. [E] la somme de 2 500 euros ;

Les condamne aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 18/15254
Date de la décision : 08/01/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-08;18.15254 ?
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