REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRET DU 27 JANVIER 2021
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/14572 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CALXP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/14864
APPELANTE
SASU PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 508 321 155
[Adresse 6]
[Adresse 6]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant
Assistée par Me Philippe RIGLET de la SELAFA CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, avocat plaidant substitué par Me Géraldine MACHINET de la SELAFA CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, avocat plaidant
INTIMES
Monsieur [Y] [J]
né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 5]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Marion CHARBONNIER de la SELARL ALEXANDRE BRESDIN CHARBONNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0947, avocat postulant
Assisté de Me Frédéric SCHNEIDER de la SELEURL CLB Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1851, avocat plaidant
Madame [H] [N] épouse [J]
née le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 4]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Marion CHARBONNIER de la SELARL ALEXANDRE BRESDIN CHARBONNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0947, avocat postulant
Assistée de Me Frédéric SCHNEIDER de la SELEURL CLB Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1851, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 20 Octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre
Madame Sandrine GIL, conseillère
Madame Elisabeth GOURY, conseillère
qui en ont délibéré,
un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
*****
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant un acte sous seing privé du 15 décembre 2000, M. et Mme [Y] [J] ont donné à bail commercial à la SAS PIERRE & VACANCES TOURISME FRANCE, un appartement n°22, dépendant de 1'immeuble dit LA FREGATE situé au sein de la résidence PORT BOURGENAY à [Localité 7] prenant effet le lendemain de la régularisation de l'acte authetique [en l'espèce le 24 février 2001] pour s'achever sauf résiliation anticipée, le 30 septembre 2010.
Cet acte stipulait que le bail : 'pourra prendre fin par anticipation:
- à l'initative du preneur pour la première fois le 30 septembe 2004, puis à la fin de chaque période triennale, en application de l'article 3 du décret du 30 septembre 1953",
- à l'initiative du bailleur, pour la première fois le 30 septembre 2004 puis à la fin de chaque période triennale, sous un préavis minimum de six mois".
Par acte du 13 octobre 2010, M. et Mme [Y] [J] ont donné à bail à la SAS PIERRE & VACANCES MAEVA TOURISME EXPLOITATION, aux droits de laquelle vient la SAS PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE, un appartement n°22, lot n°0006-11, dépendant de 1'immeuble dit LA FREGATE situé au sein de la résidence PORT BOURGENAY à [Localité 7] à compter du 1er octobre 2010 pour s'achever sauf sauf résiliation anticipée, le 30 septembre 2021 moyennant un loyer annuel en numéraire de 4.240 euros hors taxes et un loyer en nature correspondant à un droit de séjour d'une semaine par an pour une activité commerciale "d'exploitation d'une résidence de tourisme ou para hôtelière de résidence de loisirs, consistant en la sous location dudit local meublé et équipé pour des périodes de temps déterminées avec la fourniture de différents services ou prestations à la clientèle".
Cet acte stipulait que le bail 'pourra prendre fin par anticipation sous un préavis de six mois :
- à l'initiative du bailleur, pour la première fois le 30 septembre 2012, puis à la fin de chaque période triennale, sous un préavis minimum de six mois ;
-[que] dans le cas où le bailleur souhaiterait mettre en vente son bien ci-dessous référencé, il pourra le faire en utilisant la faculté de résiliation annuelle pour cause de vente, (30 septembre de chaque année). Il devra prélablement à la réalisation de la vente avoir demandé la résiliation de son bail, par courrier recommandé avec accusé de reception dans le respect d'un préavis de trois mois, soit avant le 1er juillet de chaque année. Cette demande sera acompagnée de la copie du compromis signé.'
Par acte d'huissier de justice du 23 mars 2015, la SAS PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE 'anciennement dénommée SAS PV-PC RESISDENCES EXPLOITATION(RCS 508 321 155) venant aux droit de la société PIERRE ET VACANCES MAEVA TOURIME EXPLOITATION SAS, venant aux droits de la SOCIETE D'EXPLOITATION TOURISTIQUES PIERRE ET VACANCES MAEVA SAS, venant aux droits de SOCIETE PIERRE ET VACANCES TOURISME EXPLOITATION SAS' a fait délivrer à M. et Mme [Y] [J] au visa des article L145-4 et L145-9 du code de commerce, un congé pour le 30 septembre 2015.
Par acte d'huissier de justice en date du 24 septembre 2015, M. [Y] [J] et Mme [H] [N] épouse [J] ont fait assigner la SAS PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE devant la 18ème chambre du tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir :
- dire nul et de nul effet le congé délivré le 23 mars 2015 par la SCP NOQUET, huissier de justice,
- dire et juger que le bail continue à produire ses effets jusqu'à 1'expiration de sa durée initiale,
- condamner la société PIERRE ET VACANCES au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de dommages et intérêts,
- condamner la société PIERRE ET VACANCES au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de 1`ai"ric1e 700 du code de procédure civile,
- condamner la société PIERRE ET VACANCES en tous les dépens.
Saisi par conclusions d'incident de la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE, par ordonnances du 14 décembre 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a transmis à la cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'artic1e L145-7-1 du code de commerce.
Par arrêt du 16 mars 2017, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rejeté la question prioritaire de constitutionnalité au motif que "la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que la différence de traitement existant entre les preneurs de logements situés dans une résidence de tourisme classée, qui seuls ne peuvent user de la faculté de résiliation triennale, et les autres locataires commerciaux, est justifiée par un motif d'intérêt général d`ordre économique tenant à la nécessité de garantir la pérennité de l`exploitation des résidences de tourisme classées, lequel est en rapport avec l'objet de la loi qui est de protéger les propriétaires du risque de désengagement, en cours de bail, des exploitants".
Par jugement en date du 11 juin 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :
Constaté que la clause de résiliation anticipée prévue à l'article 2 du contrat en cause ne bénéficie qu'au bailleur,
Déclaré sans objet la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en contestation de la clause offrant une faculté de résiliation anticipée au bailleur,
Dit et jugé que le congé délivré par la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE le 23 mars 2015 prendra effet le 30 septembre 2021,
Dit n'y avoir lieu à déclarer nul le congé délivré le 23 mars 2015,
Condamné la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à payer a M. et Mme
[J] les loyers contractuels échus depuis le 30 septembre 2015 jusqu'à la date du présent jugement ainsi qu'au paiement des loyers contractuels à échoir jusqu'au 30 septembre 2021 au fur et à mesure de leurs dates d'échéance, étant précisé que la somme totale payée ne peut excéder 25.440€ ,
Débouté M. et Mme [J] de leur demande en paiement de la somme de 3.913€ au titre de la contrepartie financière du loyer payable en nature prévue au bail,
Débouté M. et Mme [J] de leur demande en paiement de la somme de 25.440€ à titre de dommages et intérêts,
Condamné la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à payer à M. et Mme [J] la somme de 1.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Débouté la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Rejeté les autres demandes,
Condamné la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE aux entiers dépens avec distraction au profit de Maitre JD MEYNARD, avocat en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 15 juillet 2019, la SASU PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 20 novembre 2019, la SASU PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE, appelante, demande à la Cour de :
Vu les dispositions du bail commercial,
Vu l'article L. 145-7-1 du Code de commerce,
Vu l'article L. 145-60 du Code de commerce,
- INFIRMER le jugement rendu le 11 juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a :
- Constaté que la clause de résiliation anticipée prévue à l'article 2 du contrat en cours ne bénéficiait qu'aux Bailleurs ;
- Déclaré sans objet la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en contestation de la clause offrant une faculté de résiliation anticipée à la preneuse ;
- Jugé que le congé délivré par la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE le 23 mars 2015 prendra effet le 30 septembre 2021,
- Condamné la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à payer à Mme et M. [J] les loyers contractuels échus depuis le 30 septembre 2015 jusqu'à la date du jugement dont appel ainsi qu'au paiement des loyers contractuels à échoir jusqu'au 30 septembre 2021 au fur et à mesure de leurs dates d'échéance, étant précisé que la somme totale payée ne peut excéder 25.440€ ;
- Condamné la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à payer à Mme et M. [J] la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
- Condamné la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE aux entiers dépens avec distraction au profit de M. JD MEYNARD, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
- CONFIRMER le jugement rendu le 11 juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a :
- Débouté Mme et M. [J] de leur demande en paiement de la somme de 3.913€ au titre de la contrepartie financière du loyer payable en nature prévu au bail,
- Débouté Mme et M. [J] de leur demande en paiement de la somme de 25.440€ à titre de dommages et intérêts,
En conséquence et statuant à nouveau,
- JUGER que la demande de M. [Y] [J] et Mme [H] [N] épouse [J] est irrecevable et prescrite depuis le 14 octobre 2012,
- JUGER que la validité du congé de la PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE délivré en application de la faculté de résiliation triennale prévue contractuellement ne peut aucunement être remise en cause depuis le 13 octobre 2012,
- JUGER que le congé signifié par la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à M. [Y] [J] et Mme [H] [N] épouse [J] est valable
- DEBOUTER M. [Y] [J] et Mme [H] [N] épouse [J] de l'ensemble de leurs demandes
- CONDAMNER M. [Y] [J] et Mme [H] [N] épouse [J] à payer à la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- CONDAMNER M. [Y] [J] et Mme [H] [N] épouse [J] aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions, notifiées par le RVPA le 20 janvier 2020, M. [Y] [J] et Mme [H] [J] intimés, demandent à la Cour de :
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de PARIS le 11 juin 2019,
En conséquence, Débouter la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE de l'ensemble de ses demandes,
Condamner la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à verser à M. et Mme [J] la somme de 3.500€ sur le fondement de l'article 700 CPC,
Condamner la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 septembre 2020.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la prescription
Le preneur soutient que l'action de les bailleurs serait prescrite depuis le 14 octobre 2012 aux motifs que le bail liant les parties contient une clause octroyant au preneur une faculté de résiliation triennale légale, qu'en assignant le preneur en nullité du congé délivré en violation de l'article L145-7-1 du code de commerce, les bailleurs ont entendu remettre en question la clause sur laquelle le preneur s'est fondé pour délivrer ledit congé ; qu'en conséquence la validité du congé ne peut être appréciée qu'au regard de la validité de la faculté de résiliation triennale stipulée aux termes du bail commercial, or en application
de l'article L145-60 du code de commerce l'action en nullité de cette clause est prescrite étant, en outre soutenu que la loi 18 juin 2014, dite loi PINEL en ce qu'elle a transformé la sanction applicable aux clauses contraires aux dispositions d'ordre public énoncées aux articles L145-15 et L145-16 du code de commerce, en substituant le "non écrit" à la nullité, est inapplicable en l'espèce ; ce à quoi, s'opposent les bailleurs, qui concluent à la confirmation du jugement sur ce point.
En l'espèce, les bailleurs ont introduit une action en nullité du congé qui leur avait été délivré au visa des articles L145-4 et L145-9 du code de commerce. Ce congé ne vise aucune clause du contrat liant les parties. Dans ces conditions, l'examen de la validité de la clause litigieuse est sans objet, à ce stade, puisqu'elle ne fonde pas l'action.
L'action en nullité d'un congé est soumise à la prescription biennale de l'article L145-60 du code de commerce. Le congé ayant été délivré le 14 décembre 2015 pour le 30 septembre 2015, l'action en nullité du congé, introduite par acte d'huissier de justice en date du 24 septembre 2015, enrôlée auprès du greffe du tribunal de grande instance de Paris sous le n°RG15/14864, c'est à dire dans le délai de deux ans, n'est pas prescrite.
Sur l'application des dispositions de l'article L145-7-1 du code de commerce au bail litigieux
Le preneur conclut sur ce point à l'infirmation du jugement entrepris. Il soutient principalement qu'il ne convient pas de retenir une application littérale de l'article L145-7-1 du code de commerce, car tous le baux renouvelés ne sont pas signés et qu'une application littérale du texte conduirait à créer des différences entre bailleurs, parfois au sein de la même résidence, qu'ils aient ou non signé un bail commercial ; que compte tenu de la rédaction du texte sujet à interprétation, il y a lieu pour en déterminer la portée de se référer aux travaux parlementaires et au but poursuivi par le législateur; qu'il en résulte que ce texte n'est applicable qu'aux baux commerciaux initialement conclus entre un bailleur et un preneur, et non aux baux renouvelés, même dans l'hypothèse où ces derniers feraient l'objet d'un avenant signé par les parties.
Les bailleurs concluent sur ce point à la confirmation du jugement entrepris, l'article L145-7-1 du code de commerce, interdisant au preneur de donner congé à l'issue de chaque période triennale étant applicable en l'espèce et son non-respect entraînant la nullité du congé délivré en application de l'article L145-4 du code de commerce. Ils soutiennent en outre que les développements du preneur sur le sort des baux renouvelés est sans objet en l'espèce puisque le bail litigieux 29 septembre 2011 n'est pas le renouvellement du bail non daté mais un bail « initial » conclu par la société PV-CP RESIDENCES TOURISME (RCS PARIS 508 321 155), laquelle ne venait en aucune façon aux droits de la société PIERRE ET VACANCES TOURISME FRANCE (RCS NANTERRE puis PARIS 417 582 301).
La cour rappelle que l'article L145-7-1 du code de commerce dispose que :
"Les baux commerciaux signés entre les propriétaires et les exploitants de résidence de tourisme mentionnées à l'article L321-1 du code du tourisme sont d'une durée de neuf ans minimum, sans possibilité de résiliation à l'expiration d'une période triennale."
L'article L145-4 du code de commerce dans sa rédaction modifiée par la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006, en vigueur à l'époque de la rédaction de l'article L145-7-1 susvisé, dispose que :
"La durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans.
Toutefois, à défaut de convention contraire, le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale, dans les formes et délai de l'article L. 145-9.
Le bailleur a la même faculté s'il entend invoquer les dispositions des articles L. 145-18, L. 145-21, L. 145-23-1 et L. 145-24 afin de construire, de reconstruire ou de surélever l'immeuble existant, de réaffecter le local d'habitation accessoire à cet usage ou d'exécuter des travaux prescrits ou autorisés dans le cadre d'une opération de restauration immobilière et en cas de démolition de l'immeuble dans le cadre d'un projet de renouvellement urbain. [...]"
La notion de "baux commerciaux signés" retenue par la rédaction de l'article L145-7-1 introduit dans le code de commerce par la loi n°2009-888, 22 juillet 2009, n'est pas courante en la matière des baux commerciaux, puisque ceux-ci peuvent être verbaux, qu'il en est fréquemment ainsi s'agissant des baux renouvelés, l'article L145-57 du code de commerce prévoyant expressément ce cas lorsque le bailleur refuse de soumettre à la signature du preneur un nouveau bail, l'ordonnance ou l'arrêt fixant le prix ou les conditions du nouveau bail, valant bail.
Dans ces conditions, ce texte qui n'a que l'apparence de la clarté, doit en conséquence être interprété.
Il résulte des débats parlementaires que ce texte a été introduit dans la loi par l'amendement d'un sénateur, afin de lutter contre le désengagement du preneur lors du bail initial et parfois même lors de la première période triennale du bail initial, ce qui avait notamment pour effet de priver les bailleurs du bénéfice fiscal qu'ils pensaient obtenir en concluant ce type de baux commerciaux. Cet article avait pour but de remédier à l'inégalité existant entre propriétaires et exploitants de résidences de tourisme, seuls les seconds pouvant à l'époque en tant que preneurs, faire usage de l'article L145-4 du code de commerce, alors que cette résiliation anticipée entraînait pour les bailleurs la suppression et le remboursement d'un avantage fiscal et visait selon le rapporteur du texte à l'assemblée nationale "à mettre un terme à l'instrumentalisation du dispositif des résidences de tourisme aux profits d'opérations de pure spéculation immobilière".
L'avantage fiscal consenti prenant fin avec le bail initial, l'article L145-7-1 du code de commerce qui institue un régime dérogatoire au régime légal de droit commun qui permet au preneur de mettre fin au bail à l'issue de chaque période triennale en application de l'article L145-4 du code de commerce, et protège ainsi le bailleur pendant la durée initiale de neuf ans de toute perte de l'avantage fiscal, n'a plus de justification en ce qui concerne les baux ultérieurement renouvelés ou consentis, or, il est de principe que la loi cesse, là où cesse ses motifs.
En outre, l'application littérale du texte, en ce qu'il se réfère à la notion de "signature", aurait pour effet d'établir une différence entre les bailleurs qui auraient signé un contrat de bail renouvelé et ceux auxquels un tel document n'aurait pas été proposé à la signature, mais qui seraient néanmoins tenus envers le preneur par un bail renouvelé non signé, ce qui serait dépourvu de sens.
De même, aucun avantage fiscal n'étant lié à la conclusion des baux successifs pour un même bien, quand bien même ne s'agirait-il pas à proprement parler de baux renouvelés, faute pour le preneur d'établir qu'il vient aux droits du preneur initial, alors que cette preuve lui incombe si elle est contesociétée par l'autre partie, l'article L145-7-1 du code de commerce, en ce qu'il établit une exception au principe de droit commun ouvrant droit au preneur d'exercer un droit de résiliation triennale, ne peut trouver à s'appliquer à ces baux.
En conséquence, il convient d'interpréter l'article L145-7-1 du code de commerce, en ce que le terme "baux signés" renvoie à la notion de "baux initiaux conclus lors de l'édification de la résidence ou lors de sa réhabilitation".
Dans ces conditions, s'agissant en l'espèce d'un bail qui n'est pas le bail initial conclu après la construction de l'immeuble ou sa réhabilitation dans des conditions permettant aux propriétaires d'obtenir des avantages fiscaux, le preneur pouvait délivrer un congé aux bailleurs afin d'y mettre un terme en fin de période triennale, en application de l'article L145-4 du code civil.
Sur la validité du congé
Le bail dont s'agit, a pris effet au 1er octobre 2010. En conséquence, la première période triennale prenait fin au 30 septembre 2013 et la seconde période triennale au 30 septembre 2016.
Le congé litigieux a été délivré par acte d'huissier de justice en date du 23 mars 2015 pour le 30 septembre 2015.
Certes, le bail contenait une clause de résiliation à laquelle se réfère actuellement la société preneuse, stipulant que le bail pouvait être résilié ' à l'initiative du bailleur, pour la première fois le 30 septembre 2015, puis à la fin de chaque période triennale, sous un préavis minimum de six mois'. Cependant, cette clause n'ouvrait un droit à résiliation pour la première fois au 30 septembre 2015, date qui ne correspond pas à la fin de la première période triennale, qu'au seul bailleur et non pas au preneur. En toute hypothèse, il convient d'observer que le congé n'a pas été délivré au visa de cette clause du bail, mais au visa des articles L145-4 et L145-9 du code civil, qui établissent les conditions de la résiliation triennale du bail au profit du preneur.
Il est constant qu'un congé délivré pour une date erronée n'est pas nul, mais voit ses effets reportés jusqu'à la date pour laquelle il aurait dû être délivré. En l'espèce, le congé a été délivré pour le 30 septembre 2015, alors qu'il aurait dû être délivré pour le 30 septembre 2016. En conséquence, le bail dont s'agit a pris fin au 30 septembre 2016.
Sur la demande en paiement des loyers
Les bailleurs sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a prononcé la condamnation du preneur à leur payer les loyers jusqu'au terme du bail. Le preneur indique dans ses conclusions, sans être contredit sur ce point en cause d'appel, avoir restitués les clés le 2 novembre 2016.
Le bail liant les parties ayant régulièrement pris fin le 30 septembre 2016 de par l'effet du congé régulièrement délivré pour la fin de la deuxième période triennale. Dès lors, le preneur reste redevable envers les bailleurs des loyers échus jusqu'à cette date. A compter de la fin du bail, le preneur n'est plus tenu qu'au paiement d'une indemnité d'occupation de droit commun, mais il convient d'observer que les bailleurs ne forment aucune demande à ce titre et sauf à statuer ultra petita, aucune somme ne peut être accordée de ce chef.
Selon le bail liant les parties le loyer annuel s'élevait à la somme de 4.240 euros HT augmenté de la TVA. Le preneur n'établissant pas qu'il se soit acquitté des loyers contractuels pour la période écoulée entre le 1er octobre 2015 et le 30 septembre 2016, alors que c'est celui qui se prétend libéré du paiement d'une somme qui doit en apporter la preuve, il sera condamné à son paiement en deniers ou quittances ainsi qu'il sera précisé au dispositif.
Sur les demandes accessoires
Les intérêts de retard sur les sommes dues seront calculés conformément à l'article 1155 du code civil.
Le jugement entrepris étant partiellement confirmé, il le sera en ce qui concerne le sort des dépens de première instance, ainsi que celui de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
En cause d'appel, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile et le preneur, qui succombe dans ses prétentions, sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- Dit et jugé que le congé délivré par la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE le 23 mars 2015 prendra effet le 30 septembre 2021,
- Condamné la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à payer à M. et Mme [Y] [J] les loyers contractuels échus depuis le 30 septembre 2015 jusqu'à la date du présent jugement ainsi qu'au paiement des loyers contractuels à échoir jusqu'au 30 septembre 2021 au fur et à mesure de leurs dates d'échéance, étant précisé que la somme totale payée ne peut excéder 28.010€,
l'infirme sur ces points et statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit et juge que le congé délivré par la société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE le 23 mars 2015 prendra effet le 30 septembre 2016 ;
Condamne la Société PV RESIDENCES & RESORTS FRANCE à payer, en deniers ou quittances, à M. et Mme [Y] [J] la somme de 4.602 euros HT augmentée de la TVA au taux en vigueur conformément au bail, au titre des loyers contractuels échus entre le 30 septembre 2015 et le 30 septembre 2016, outre les intérêts au taux légal au fur et à mesure de leurs dates d'échéance, en application de l'article 1155 (ancien) du code civil,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société PV RESIDENCES et RESORTS FRANCE aux entiers dépens.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE