Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 17 MAI 2022
(n° / 2022, 21 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/05561 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B23W2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS 01 - RG n° 13/07976
APPELANT ET INTIMÉ INCIDENT
Monsieur [H] [M]
Demeurant [Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,
Assisté de Me Françoise GENOT-DELBECQUE, avocate au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : 352,
INTIMÉE ET APPELANTE INCIDENTE
SA SPIE BATIGNOLLES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au reistre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 478 711 161,
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050,
Assistée de Me Eric LAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2570,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispoistions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Octobre 2021, en audience publique, devant la Cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre,
Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame [V] [S] dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
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* *
FAITS ET PROCÉDURE:
Le 27 juillet 2007, la société SPIE Batignolles, opérateur dans le bâtiment et les travaux publics, a acquis de M.[M] la totalité des actions de la société Groupe SPR, moyennant le prix de 36.500.000 euros.
Le contrat de cession prévoit en son article 8 une garantie d'actif et de passif instituant une procédure d'indemnisation de SPIE Batignolles dans la limite d'un plafond de 12.000.000 euros, porté à hauteur de 16.000.000 euros pour couvrir les éventuels risques liés à des pratiques anti-concurrentielles. En garantie, de cette garantie d'actif et de passif , il a été souscrit le 23 novembre 2007 le nantissement d'un compte d'instrument financier à hauteur de 6.000.000 euros.
Suite à la mise en oeuvre de la garantie de passif par SPIE Batignolles à divers titres ayant donné lieu à des règlements de la part de M.[M], mais aussi à des contestations, de nombreux échanges sont intervenus entre les parties.
Estimant ne pas avoir été remplie des droits à indemnisation qu'elle tient de la garantie de passif, SPIE Batignolles a, par actes des 3 juin et 13 septembre 2013, fait assigner M. [M] devant le tribunal de grande instance de Paris pour voir ordonner la compensation entre les sommes dues par M.[M] au titre de la garantie d'actif et de passif et celles dues à M.[M] au titre du dossier de M.[I].
Par jugement du 3 février 2017, le tribunal de grande instance de Paris a condamné M.[M] à payer à SPIE Batignolles la somme de 1.315.316,73 euros avec intérêts légaux à compter du jugement, condamné la société SPIE Batignolles à payer à M.[M] la somme de 2.650.093,46 euros avec intérêts légaux à compter du 13 décembre 2010, ordonné la compensation entre ces condamnations réciproques, condamné la société SPIE Batignolles à payer à M. [M] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, ordonné la mainlevée du nantissement consenti par M [M] au profit de SPIE Batignolles et débouté les parties du surplus de leurs demandes.
M. [M] a relevé appel de cette décision, selon déclaration du 15 mars 2017 et SPIE Batignolles le 5 avril 2017. Les deux appels ont été joints par ordonnance du 28 juin 2017.
Vu les conclusions n°3 notifiées par M.[M] par voie électronique le 1er juillet 2019 , avant réouverture des débats.
Vu les conclusions n°2 notifiées par la SA SPIE Batignolles le 30 octobre 2017, avant réouverture des débats.
Par arrêt du 16 mars 2021, la présente cour a:
Infirmé le jugement en ce qu'il a condamné M.[H][M] à payer à la société SPIE Batignolles la somme de 1.315.316.73 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement, en ce qu'il a condamné la société SPIE Batignolles à payer à M.[H] [M] la somme de 2.650.093,46 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2010,
Confirmé le jugement en ce qu'il ordonné la mainlevée du nantissement,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
I- Sur la garantie au titre des réclamations des tiers
Dit que la garantie est due par M.[M] au titre des réclamations des tiers ci-dessous, pour les montants suivants avant déductions:
- SPR Industrie/RB Pim: 34.870,61 euros
- Maison Leclaire/Bernheim:4.501,21 euros
- CGPG/Toit et Joie :3.210 euros
- DBS/Tams: 44.809 euros
- SPR Bâtiment/Hôpital de [Localité 12]: 153.815,71 euros
- Verre et Métal/Sialf 1 et 3 : 3.588 euros
- SPR Bâtiment /Inha :32.424,51 euros
- [Localité 13] Diamant Emeraude: 56.406,14 euros
- Sedib/ [Adresse 10]: 1.200 euros
- France Sols/Magic Marini : 22.676,12 euros
- DBS/ Lourimi : 76.373,70 euros
- Sedib/ Home Industries 13.308,13 euros
- Sedib/ La Louvière 2.130,51 euros
- Sedib/ Sialf 1 : 2.800 euros
- Maison Leclaire/ Urssaf :7.781,50 euros
- Verre et Métal/Urssaf : 44.438 euros
- France Sols/Direction générale des impôts: 27.636 euros
- Maison Leclaire/Douanes suisses: 1.712,37 euros
- SPR Rénovation/atteinte à la sécurité des salariés: 12.258,10 euros
- Trouve/[Localité 4] Hôtel Majestic :13.018,75 euros
- SPR Rénovation/ ministère public: 2.305 euros
- Trouve Leclaire / ministère public/Léon de Bruxelles: 23.346 euros
- SPR Industrie/ Viaduc de [Localité 9] : 200.000 euros
- DBS/Cogedim (Les Invalides): 8.536 euros
Débouté SPIE Batignolles de ses demandes de garantie au titre des dossiers suivants:
- DBS/Procap
- DBS/DGA Victor
- DBS/ SMD
- SPR Industrie /Decap Eco
- CGPG/Immeuble Philippe Girard
- CGPG/ SDC.Albert Camus
- France Sols/ Papso III
- SCI Les enfants du paradis
- SPR Liban
- Etablissement public [Adresse 7]
- Bourdan Investissements
- DBS/ Table de Cana
- DBS / IBS
- France Sols/ ADP
- Verre et Métal/Alstom
- Verre et Métal/ CRAM
- CGPG/ ministère public
Sursis à statuer sur les demandes de garantie relatives aux réclamations suivantes:
- dans l'affaire Verre et Métal/ Cabrol (stade de [Localité 6]) jusqu'à ce que la cour d'appel ait statué sur l'appel du jugement du tribunal de commerce de Paris du 8 mars 2016,
- dans l'affaire France Sols/ Centre hospitalier d'Annecy jusqu'à ce que la cour administrative d'appel ait statué sur l'appel du jugement du tribunal administratif de [Localité 6] du 12 novembre 2014,
- dans l'affaire France Sol/ société Dumez (le stadium) jusqu'à ce que la cour d'appel ait statué sur les appels du jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 25 juin 2013 et du tribunal de grande instance de Paris du 13 septembre 2013,
Débouté M.[M] de ses demandes de remboursement au titre des sommes versées au titre des réclamations de SPR industrie/RB Pim et Maison Leclaire/Berheim et Maison Leclaire/Urssaf,
Dit M.[M] fondé en sa demande de remboursement de la somme de 423,21 euros au titre de la réclamation DBS/Procap.
II- Sur la garantie au titre des créances clients non recouvrées
Dit que M.[M] doit garantie des créances clients non recouvrées pour un montant de 575.278,30 euros,
Débouté SPIE Batignolles de sa demande de garantie au titre des affaires suivantes:
- DBS/Cogedim ( boulevard des invalides)
- DBS/ Région d'Ile de France ( lycée Gabriel Péri)
III- Sur les déductions
- Sur la demande de compensation avec les créances clients visées à l'annexe 8.6 (c), avant dire droit, ordonné la réouverture des débats et invité SPIE Batignolles à produire les décomptes généraux définitifs correspondant aux marchés ayant donné lieu aux créances clients visées à l'annexe 8.6(c), ainsi que la balance âgée clients correspondant aux créances listées,
- Sur les déductions au titre des provisions:
- dit qu'au titre des demandes de garantie examinées et retenues dans le présent arrêt aucune nouvelle déduction de provision n'est à opérer,
- avant dire droit sur la plus ample demande de déduction invité les parties dans le cadre de la réouverture des débats, à expliquer dans quelle mesure il y aurait lieu de déduire d'autres provisions que celles ayant trait aux garanties admises par le présent arrêt,
- Sur les déductions au titre de l'économie d'impôt:
1) Dit qu'en l'état des demandes de garantie au titre des réclamations clients acceptées dans le présent arrêt M.[M] est fondé à invoquer une déduction d'un tiers soit 220.216,54 euros.
2) avant dire droit sur la déduction applicable à la somme de 575.278,30 euros pour laquelle la garantie de M.[M] a été retenue au titre des créances clients, invité les parties à s'expliquer sur le caractère déductible des créances nettes de provision, non recouvrées,
3) avant dire droit sur la déduction concernant la garantie due au titre des dossiers suivants:
- Maison Leclaire/ Urssaf
- Verre et Métal/Urssaf
- France Sols/Direction générale des impôts
- Maison Leclaire/Douanes suisses
- SPR Rénovation/atteinte à la sécurité des salariés
- Trouve/[Localité 4] Hôtel Majestic
- SPR Rénovation/ ministère
- Trouve Leclaire / ministère public/Léon de Bruxelles
invité les parties à s'expliquer sur l'incidence de la règle fiscale selon laquelle les pénalités et amendes de toute nature payées par une entreprise au cours d'un exercice considéré ne sont pas déductibles du résultat fiscal et à préciser dans chacun de ces dossiers les montants des amendes et pénalités,
IV- Sur le dossier de M.[I]
Dit que SPIE Batignolles reste devoir au titre de ce dossier une somme de 2.393.787,96 euros (2.606.593,46 euros - 212.805,50 euros).
V- Sur le compte global définitif entre les parties, avant dire droit, invité SPIE Batignolles dans le cadre de la réouverture des débats à produire:
- un nouveau décompte faisant application des dispositions du présent arrêt
et précisant les sommes réglées par M.[M] au titre de la garantie, en sus des montants déjà pris en compte dans le cadre du présent arrêt.
Fixé la réouverture des débats à l'audience du 15 juin 2021 à 14H
Réservé les plus amples demandes, notamment celles relatives aux demandes réciproques de dommages et intérêts et aux indemnités de procédure,
Réservé les dépens.
L'audience de plaidoirie a été reportée au 12 octobre 2021.
Dans ses conclusions n°3 sur réouverture des débats notifiées par RPVA le 8 octobre 2021, M.[M] demande à la cour de :
- prendre acte de la non communication par SPIE Batignolles des DGD et de la balance âgée pour la réouverture des débats,
- constater le non respect par SPIE Batignolles de ses obligations contractuelles en matière de conservation des informations relatives aux documents détenus par des filiales comme prévu à l'article 9-2 du contrat de cession,
- dire que les pièces versées aux débats par SPIE Batignolles ne peuvent en aucun cas être retenues comme des éléments de preuve,
- dire que toute mesure d'expertise ou de recherches de pièces auprès de tiers, dans le seul but de compenser la carence de SPIE Batignolles, aurait peu de chances de permettre de rassembler des informations exploitables et exhaustives plus de 10 ans après les faits et qu'il n'y a pas lieu d'envisager de telles mesures,
- dire qu'au titre des dossiers d'ores et déjà tranchés par la cour dans son arrêt du 16 mars 2021, il doit garantie de 917.190,12 euros après déduction des économies d'impôts,
- dire que la garantie n'est pas due au titre des affaires Verre et Métal/Cabrol, France Sols/Centre hospitalier d'[Localité 3], France Sols/Dumez, subsidiairement calculer le montant dû hors TVA et déduire de ce montant les économies d'impôts afférentes ( 33,33%) conformément à l'article 8-4 du contrat,
- dire qu'en application de l'article 8.6(c) de la convention, du fait de l'inexécution par SPIE Batignolles de ses obligations contractuelles et subsidiairement au titre dela responsabilité contractuelle de SPIE Batignolles, la somme de 2.006.916 euros doit être déduite avant toute compensation des sommes qu'il doit au titre de la garantie,
- condamner SPIE Batignolles à lui payer la somme de 2.393.787, 96 euros assortie des intérêts à compter du 13 décembre 2020 au taux légal applicable lorsque le créancier est une personne physique n'agissant pas pour des besoins professionnels, soit pour la période du 13 décembre 2010 au 31 décembre 2021 640.495,02 euros,
- ordonner la compensation entre les sommes qu'il doit au titre de la garantie de passif et le montant dont il est créancier, principal et intérêts courus à la date de l'arrêt à intervenir, au titre de la restitution de la somme de 2.393.787,96 euros,
-débouter SPIE Batignolles de sa demande d'intérêt légal sur les sommes lui revenant dans la mesure où avant l'arrêt à intervenir les montants des sommes réclamées n'avaient pas été fixés,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné SPIE Batignolles sur le fondement de la résistance abusive, sauf en ce qui concerne le montant alloué, et statuant à nouveau, condamner SPIE Batignolles à lui verser 100.000 euros au titre de la résistance abusive,
- condamner SPIE Batignolles à lui payer 100.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner SPIE Batignolles aux dépens avec recouvrement direct au profit de Maître Boccon-Gibod,
-faire droit pour le surplus aux demandes telles que formulées dans ses conclusions récapitulatives n°3 pour l'audience du 7 octobre 2019.
Dans ses conclusions additionnelles récapitulatives en vue de la réouverture des débats notifiées par RPVA le 4 octobre 2021, la SA SPIE Batignolles demande à la cour de:
- s'agissant des dossiers pour lesquels un sursis à statuer a été prononcé le 16 mars 2021, condamner M.[M] à lui payer la somme de 1.397.092,83 euros,
-condamner M.[M] au règlement des intérêts au taux légal attachés à sa demande au titre de la mise en jeu de la garantie de passif à compter de la mise en demeure du 15 février 2011, pour les montants visés et à compter du ' jugement' à intervenir pour les montants réclamés postérieurement à cette date,
-débouter M.[M] de son appel incident et de toutes ses demandes reconventionnelles, plus amples et contraires,
- condamner M.[M] à lui payer 80.000 euros au titre de sa résistance abusive,
- ordonner la compensation entre les créances réciproques des parties à l'issue de la présente instance,
- condamner M.[M] à lui payer 100.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Régnier Bequet Moisan.
Il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample rappel de leurs demandes et moyens, ainsi qu'à l'arrêt du 16 mars 2021 pour un plus exposé de la procédure antérieure.
SUR CE
A- Sur les déductions au titre des économies d'impôts
L'article 8-4 stipule que :
(a) L'indemnisation due par le Vendeur à l'Acquéreur, hors déductions prévues ci-après sera égale à l'intégralité du Préjudice subi par l'Acquéreur ou les Sociétés.
(b) Viendront en déduction de l'assiette de l'indemnisation:
(i) toute somme payée à l'Acquéreur ou à l'une quelconque des Sociétés(et pouvant être conservée par eux), par un tiers au titre du Préjudice, ou toute somme qu'ils auraient eu le droit de percevoir à ce titre mais qu'ils ont perdu par leur faute ou leur négligence;
(ii) si le Préjudice est déductible de l'impôt sur les sociétés, l'économie d'impôt sur les sociétés y afférentes, et ce que le Bénéficiaire ait ou non de l'impôt sur les sociétés à acquitter lors de l'exercice fiscal considéré (mis en gras par la cour).
[....]
Il est précisé que si le montant de déduction applicable en vertu du présent Article 8.4 n'est déterminé qu'après paiement du montant par le Vendeur requis en vertu du présent Article 8[....] l'Acquéreur remboursera au Vendeur sans délai après ladite détermination, tout montant que le Vendeur n'aurait pas eu à payer en vertu du présent Article 8 si cette détermination avait été faite à la date dudit paiement ou avant celle-ci' .
Le terme 'Préjudice' désigne selon le sens donné par la convention des parties 'toute augmentation de passif ou toute réduction d'actif, tout préjudice, dommage, perte, manque à gagner, dépense, frais, débours, honoraires d'avocats (raisonnables et dûment justifiés), subis par l'Acquéreur ou l'une des Sociétés, et (ii) répondant aux critères du préjudice indemnisable tels que définis par le droit de la responsabilité contractuelle français.'.
L'arrêt du 16 mars 2021 a jugé que M.[M] était fondé à appliquer une déduction de 220.216,54 euros au titre de l'économie d'impôt sur la somme de 660.649,64 euros correspondant aux demandes de garantie d'ores et déjà admises par la cour au titre des 'réclamations clients'.
Restent à trancher le principe et le montant des déductions au titre des économies d'impôt sur les sommes dues par M.[M] au titre de la garantie des 'créances clients' (575.278,30 euros), ainsi que sur la garantie due au titre des sanctions pécuniaires et amendes infligées aux sociétés du groupe.
1) sur la déduction applicable à la somme de 575.278,30 euros
En application de l'article 8.1(f) de l'acte de cession, M.[M] s'est engagé à indemniser l'acquéreur 'du montant total des créances clients figurant dans les Etats financiers consolidés ( i.e comptes sociaux de la Société GROUPE SPR et de ses filiales arrêtés au 31 décembre 2006 et non recouvrés par les Sociétés (i.e la Société GROUPE SPR et ses filiales) au 31 décembre 2008, net:
-(i) des provisions pour dépréciation de ces créances, enregistrées dans lesdits Etats financiers consolidés et,
-(ii) du montant des créances dont les Sociétés ont, avant la date du Contrat, demandé le paiement par voie judiciaire , y compris à titre reconventionnel.
[....]'
Il a été jugé que M.[M] devait garantie au titre de ces créances non recouvrées, à hauteur de 575.278,30 euros, les parties étant par ailleurs invitées à s'expliquer sur le caractère fiscalement déductible des créances ainsi garanties.
M.[M] se prévalant des dispositions de l'article 8-4 du contrat et d'une consultation d'un avocat fiscaliste, soutient qu'il doit être appliqué sur la somme de 575.278,30 euros correspondant au montant des créances clients non recouvrées au 31 décembre 2008, qui n'étaient pas provisionnées, une économie d'impôt de 33, 1/3% (impôt sur les sociétés ) soit 191.759,43 euros. Il fait valoir que contrairement à ce que soutient SPIE Batignolles la notion contractuelle de 'préjudice' ne se limite pas à une réduction de l'actif mais couvre aussi le manque à gagner, que peu importe que ces créances n'aient pas été déclarées irrécouvrables puisqu'il suffit que la somme soit déductible de l'impôt sur les sociétés, et ce , que le bénéficiaire ait ou non un impôt sur les sociétés à acquitter sur l'exercice considéré. Il ajoute que les parties étaient convenues d'assimiler le non recouvrement des créances au 31 décembre 2008 à un non-recouvrement définitif, qu'au demeurant les créances qui restaient à l'actif au 31 décembre 2008 sont très vraisemblablement devenues irrécouvrables au cours des exercices suivants et que si elles avaient été recouvrées l'indemnisation de l'acquéreur devrait donner lieu à restitution au titre de l'enrichissement sans cause. Il argue qu'en tout état de cause, SPIE Batignolles n'ayant pas respecté son engagement de recouvrer les créances ( 8.1) a manqué à ses obligations et ne peut se retrancher derrière l'absence d'économie d'impôt.
SPIE Batignolles, s'appuyant sur la note qu'elle a fait établir par le cabinet Arsene Taxand, réplique que l'indemnisation des créances figurant à l'actif et non recouvrées au 31 décembre 2008, ne peut être réduite d'une quelconque économie d'impôts sur les sociétés, dès lors que cette indemnisation se situe hors du champs de la réduction de l'économie d'impôt sur les sociétés prévue par l'article 8.4 (b) (ii) du contrat de cession et que par essence aucune économie d'impôts sur les sociétés n'a pu être constatée sur ces créances du seul fait de leur non recouvrement, puisqu'elles demeuraient à l'actif des différentes sociétés au 31 décembre 2008, seule date à prendre en compte.
A l'article 8-1(f) de la convention, les parties ont entendu indemniser l'absence de recouvrement au 31 décembre 2008 des créances figurant dans les Etats financiers consolidés du 31 décembre 2006, soit le manque à gagner pour l'acquéreur tel qu'il existait à cette date butoir, et ce, indépendamment des éventuels événements postérieurs à cette date.
Il ne ressort pas de la convention, que les parties ont assimilé cette absence de recouvrement à la date du 31 décembre 2008, à une irrecouvrabilité définitive des créances d'un point de vue fiscal, mais quand bien même tel serait le cas, la volonté des parties ne suffit pas à rendre ces créances éligibles à une déduction- fiscale, dès lors que l'application de déductions fiscales répond à des régles fiscales rigoureuses dont les parties n'ont pas la disposition.
La disposition de la convention, qui permet au vendeur de se faire rembourser par l'acquéreur, postérieurement au paiement de la somme garantie, le montant d'une déduction fiscale tend seulement à ne pas faire perdre au vendeur le bénéfice d'une économie d'impôt dont le montant n'a pu être arrêté préalablement à son règlement, mais n'a pas d'incidence sur la date à laquelle s'apprécie l'existence du caractère déductible de la créance, en l'espèce le 31 décembre 2008.
Il n'est pas établi qu'à cette date de référence, contractuellement arrêtée par les parties, les créances garanties étaient fiscalement déductibles dès lors qu'elles demeuraient à l'actif des sociétés au 31 décembre 2008 et que seule une irrecouvrabilité certaine permettait d'un point de vue fiscal d'opérer une déduction au titre de l'impôt sur les sociétés.
C'est par ailleurs vainement que M.[M] allègue subsidiairement que SPIE Batignolles ne peut se prévaloir de l'absence d'économie d'impôt, en ce que cette dernière n'aurait pas fait diligence pour recouvrer les créances en cause, dès lors que l'arrêt de 16 mars 2021 a jugé que la garantie était bien due par le vendeur à hauteur de 575.278,30 euros et que seule restait en suspens la question de la déduction d'une économie d'impôt. L'absence de diligences au 31 décembre 2008 pour procéder au recouvrement des créances à la supposer avérée, ce qui ne ressort pas du dossier, ne détermine pas le caractère fiscalement déductible des créances au 31 décembre 2008.
En conséquence, la cour déboutera M.[M] de sa demande de déduction d'une économie d'impôt sur la somme de 575.278,30 euros et condamnera M.[M], en deniers ou quittances au paiement de la somme de 575.278,30 euros.
2) sur la déduction applicable aux huit dossiers mentionnés au point III,3 de l'arrêt du 16 mars 2021.
Dans huit dossiers donnant lieu à garantie de M.[M] au titre des réclamations des tiers non listées dans l'annexe 8.1(c), la cour a invité les parties à s'expliquer sur l'incidence de la règle fiscale selon laquelle les pénalités et amendes de toute nature payées par une entreprise au cours d'un exercice considéré ne sont pas déductibles du résultat fiscal et à préciser dans chacun de ces dossiers les montants des amendes et pénalités.
L'article 39-2 du code général des impôts dispose que 'Les sanctions pécuniaires et pénalités de toute nature mises à la charge des contrevenants à des obligations légales ne sont pas admises en déduction des bénéfices soumis à l'impôt.' Sont visées à ce titre les sanctions pécuniaires et pénalités résultant de manquements à des obligations légales de toute nature, notamment en matière fiscale, douanière, sociale, du travail.
- Maison Leclaire/ Urssaf
L'arrêt du 16 mars 2021 ( page 24) a jugé que M.[M] devait sa garantie à hauteur de 7.781,50 euros au titre du contrôle URSSAF subi par la société Maison Leclaire.
Les parties s'accordent sur le fait que cette somme n'est pas fiscalement déductible, dès lors qu'elle correspond à une sanction pécuniaire.
Il n'y a donc pas lieu à déduction et M.[M] doit sa garantie à hauteur de 7.781,50 euros.
- Verre et Métal/Urssaf
Il n'est pas contesté que la somme de 44.438 euros mise à la charge de M.[M] au titre de la garantie (page 25 de l'arrêt) correspond à un rappel de cotisations et non à une sanction et qu'elle est fiscalement déductible. Elle ouvre donc droit à déduction au titre de l'impôt sur les sociétés ( 33,1/3%), soit une économie de 14.811,18 euros.
En conséquence, la garantie due par M.[M] s'élève à 29.626,82 euros (44.438 euros - 14.811,18 euros).
- France Sols/Direction générale des impôts
L'arrêt du 16 mars 2021 ( page 25) a condamné M.[M] à garantir SPIE Batignolles à hauteur de 27.636 euros à la suite du contrôle fiscal subi par France Sols.
M.[M] argue que le montant de 27.636 euros est fiscalement déductible dès lors qu'il correspond à des rappels de taxe professionnelle (26.123 euros en principal ) et à 1.513 euros d'intérêts de retard.
SPIE Batignolles objecte que les intérêts de retard ne sont pas déductibles, seule l'étant la somme en principal de 26.123 euros.
Les intérêts de retard doivent suivre le sort fiscal du principal auquel ils se rattachent. S'appliquant en l'espèce à un rappel de taxe professionnelle, qui n'a pas la nature de sanction pécuniaire ou de pénalité, les intérêts de retard en cause seront considérés comme fiscalement déductibles.
C'est donc une somme totale de 27.626 euros qui est fiscalement déductible au titre de ce chef de garantie, entrainant une économie d'impôt de 9207,74 euros.
En conséquence, la garantie due par M.[M] s'élève à 18.418,26 euros (27.626 euros - 9207,74 euros )
- Maison Leclaire/Douanes suisses
Les parties conviennent que la somme de 1.712,37 euros que M.[M] a été condamné à garantir ( page 26 de l'arrêt) correspond à une amende douanière et n'est donc pas fiscalement déductible.
En l'absence d'économie d'impôt, M.[M] doit garantie à hauteur de 1.712,37 euros.
- SPR Rénovation/atteinte à la sécurité des salariés
Par jugement du 13 septembre 2010, le tribunal correctionnel de Paris a condamné SPR Rénovation a une amende de 6.400 euros + 90 euros de droit fixe. La demande de garantie formée par SPIE Batignolles portait sur un total de 18.830,13 euros incluant les honoraires et frais de conseil. La cour a jugé que SPIE Batignolles ayant fait perdre à M.[M] une chance d'obtenir une décision plus favorable, il y avait lieu de réduire de 30% le montant de la somme due au titre de la garantie et a en conséquence limité la condamnation de ce dernier au paiement de la somme de 18.258,10 euros, faisant en outre bénéficier le garant de la déduction forfaitaire de 20% obtenue par SPIE Batignolles lors du paiement de l'amende ( page 27 de l'arrêt du 16 mars 2021).
M.[M] soutient que sur cette somme, un montant de 12.258,10 euros, correspondant aux honoraires et frais de conseil, est fiscalement déductible, tandis que SPIE Batignolles considère que seul est déductible le montant de 5.768 euros.
Si l'amende n'ouvre pas droit à déduction fiscale, en revanche les frais de conseil exposés par SPIE Batignolles, dont M.[M] doit garantie, y sont éligibles.
Déduction faite du montant de l'amende et après prise en compte du fait que M.[M] n'a été condamné qu'à garantir 70% des coûts exposés, il convient, conformément à la demande de M.[M] de retenir que la somme de 12.258,10 euros est fiscalement déductible, ce qui représente une économie d'impôt de 4.085,62 euros
En conséquence après déduction, la garantie due par M.[M] s'élève à 8.172,48 euros (12.258,10 euros - 4.085,62 euros).
- Trouve/[Localité 4] Hôtel Majestic
La société Trouve a été condamnée pour travail dissimulé au paiement d'une amende de 13.000 euros. Les honoraires de conseil à l'occasion de cette procédure se sont élevés à 13.037,50 euros.
La demande de garantie s'élevait à un total de 26.037,50 euros. L'arrêt du 16 mars 2021 ( page 28) a retenu la garantie due par M.[M] à hauteur de la moitié de ce total, soit 13.018,75 euros, considérant que cette infraction avait débuté avant la cession et s'était poursuivie après.
M.[M] soutient que cette somme est fiscalement déductible pour moitié, tandis que SPIE Batignolles considère que seule une somme de 18,75 euros peut donner lieu à déduction, le montant de 13.000 euros correspondant à une amende.
La somme de 13.018,75 euros mise à la charge de M.[M] correspond à la moitié de l'amende (6.500 euros) non déductible, le surplus étant constitué des frais de conseil, soit un montant de 6.518,75 euros fiscalement déductible ce qui représente une économie d'impôt de 2.172,69 euros.
Après déduction, la garantie due par M.[M] s'élève à 10.846,06 euros ( 13.018,75 euros - 2.172,69 euros).
- SPR Rénovation/ ministère public
Il n'est pas contesté qu'une somme de 2.305 euros correspondant aux honoraires d'avocat pour ce litige peut ouvrir droit à déduction fiscale.Il en résulte une économie d'impôt de 768, 25 euros.
En conséquence, la garantie due par M.[M] s'élève à 1.536,75 euros (2.305 euros - 768,25 euros).
- Trouve Leclaire / ministère public/Léon de Bruxelles
Il est admis qu'une somme de 23.346 euros correspondant aux honoraires d'avocat pour ce litige peut ouvrir droit à déduction fiscale.Il en résulte une économie d'impôt de 7.781,22 euros.
En conséquence, la garantie due par M.[M] s'élève à 15.564,78 euros ( 23.346 euros- 7.781,22 euros ).
B- Sur les demandes de garantie au titre des dossiers ayant fait l'objet d'un sursis à statuer par l'arrêt du 16 mars 2021
1) Dossier Verre et Métal/ Cabrol (stade de [Localité 6])
L'arrêt du 16 mars 2021 a sursis à statuer jusqu'à ce que la cour d'appel ait statué sur l'appel du jugement du tribunal de commerce de Paris du 8 mars 2016.
Se fondant sur l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 27 septembre 2018, SPIE Batignolles reprend sa demande de garantie à hauteur de 712.995,49 euros, soit 561.031,50 euros montant que Verre& Métal a été condamnée à payer, et 151.963,99 euros au titre des frais d'avocat pour assurer sa défense.
M.[M] soutient que la garantie n'est pas due, dès lors que SPIE Batignolles n'a pas respecté les dispositions de l'article 8-10 (b) (i) en ce que la mise en cause de la garantie est intervenue tardivement avec trois ans de retard, l'empêchant ainsi de concourir utilement à la procédure. Il conteste en tout état de cause le montant sollicité, au titre des honoraires d'avocat en l'absence de production des factures acquittées et en ce qu'ils incluent la TVA, de sorte que le préjudice ne saurait excéder 688.019,80 euros, montant à minorer de l'économie d'impôt réalisée.
SPIE Batignolles produit l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 27 septembre 2018 qui a condamné la société Verre&Metal à payer au titre de ce chantier 546.031,50 euros en principal, outre 15.000 euros d'indemnités procédurales soit 561.031,50 euros, ainsi que le détail des honoraires versés à la SELARL Cabouche & Marquet du 17 avril 2008 au 7 mai 2018 au titre du dossier '16392 VERRE ET METAL/CHANTIER STADE DE [Localité 6]'.
ll ressort du jugement et de l'arrêt versés aux débats, que la réception de l'ouvrage est intervenue le 21 décembre 2007 avec de nombreuses réserves, qu'un expert judiciaire a été désigné en référé à la demande de la société CCM pour examiner les désordres, que sur saisine de la ville de [Localité 6], le tribunal administratif de [Localité 6] a également ordonné une expertise, qu'à la suite des rapports d'expertise la société Verre & Métal a été assignée devant le tribunal de commerce de Paris le 12 novembre 2012. Cette procédure a donné lieu au jugement du 8 mars 2016, puis à l'arrêt du 27 septembre 2018.
S'il n'est pas établi que SPIE Batignolles a informé M.[M] de ce litige dans le délai de 15 jours prévu par l'article 8-10(b), le manquement de l'acquéreur à cette obligation d'information n'est pas sanctionné par la perte du droit à indemnisation, mais conformément à l'article 8.10 (b) (ii) par une réduction de cette indemnité à due concurrence de l'aggravation du préjudice découlant de la tardiveté de l'information, à charge pour M.[M] de caractériser cette aggravation.
En l'occurrence, il ressort des conclusions des parties que M.[M] a reçu notification d'une assignation de la société Cabrol le 16 novembre 2010, soit bien avant que n'interviennent le jugement et l'arrêt d'appel, de sorte qu'il n'est pas établi qu'il a été empêché de participer au traitement de ce litige à compter de cette date. M.[M] ne justifie d'ailleurs pas des points sur lesquels il aurait été susceptible d'obtenir une décision différente de celles intervenues.
Dès lors qu'il n'établit pas que le préjudice s'est trouvé aggravé du fait de la tardiveté de l'information, il n'y a pas lieu de rejeter la demande de garantie, ni d'en diminuer le montant.
Il est produit un relevé très précis des honoraires réglés au cabinet Cabouche & Marquet, spécifiquement pour ce litige. Ces honoraires sont en lien avec les prestations accomplies durant la longue période au cours de laquelle Verre& Metal a dû faire assurer sa défense. Les honoraires d'avocat seront pris en compte hors TVA, soit à hauteur de 126.988,30 euros .
La garantie due par M.[M], avant économie d'impôt, s'élève pour ce dossier à 688.019,80 euros. Le montant réglé par Verre&Métal au titre de ce contentieux étant éligible à déduction fiscale, il en résulte une économie d'impôt de 229.316,99 euros.
En conséquence, la garantie due par M.[M] s'élève à 458.702,81 euros (688.019,80 euros-229.316,99 euros).
2) Dossier France Sols/ Centre hospitalier d'[Localité 3] ( 543.187,26 euros )
L'arrêt du 16 mars 2021 a sursis à statuer jusqu'à ce que la cour administrative d'appel se prononce sur l'appel du jugement du tribunal administratif de [Localité 6] du 12 (25) novembre 2014.
SPIE Batignolles a produit l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 19 novembre 2015 et sollicite la garantie de M.[M] à hauteur d'un total de 543.187,26 euros, correspondant au montant de sa condamnation définitive et aux frais d'avocat exposés à hauteur de 15.402 euros.
Il ressort des explications de SPIE Batignolles et de l'arrêt du 19 novembre 2015, que France Sols et la société Ets Bailly avaient demandé au tribunal administratif de [Localité 6] de condamner le centre hospitalier d'Annecy au paiement d'une somme de 787.742,09 euros au titre du solde du marché de travaux passé pour la contruction du nouvel hôpital ou subsidiairement de fixer le solde créditeur de leur marché à 504.304,86 euros, que ces demandes ont été rejetées par le tribunal administratif le 25 novembre 2014. Il résulte de l'arrêt de la cour administrative d'appel qu'après application de retenues cumulées, il subsiste un solde négatif du marché à la charge de l'entreprise France Sols, d'un montant de 441.292,04 euros HT, soit 527.785,26 euros TTC.
M.[M] refuse toute garantie de ce chef, faisant valoir liminairement que la production tardive de l'arrêt du 19 novembre 2015 laisse suspecter qu'un recours est pendant de sorte que cette pièce n'est pas suffisante pour fixer sa créance, que SPIE Batignolles a refusé de l'associer à la procédure, alors qu'il avait donné des instructions dans ce litige en temps voulu, et l'a ainsi placé devant le fait accompli. Il ajoute que si la cour devait retenir sa garantie, il conviendrait de retenir uniquement un montant HT soit 441.292,04 euros, et d'écarter la réclamation au titre des honoraires d'avocat qui n'est pas suffisamment étayée.
Le montant supporté par France Sols est suffisamment établi par les décisions communiquées, rien ne démontrant que l'arrêt de la cour administrative d'appel qui remonte à plus de six ans aurait été annulé.
Il est constant qu'au mois de janvier 2010, SPIE Batignolles a notifié à M.[M] le DGD adressé par le centre hospitalier d'[Localité 3] faisant ressortir un solde négatif à la charge de France Sols pour un montant de 591.864,40 euros après application de retenues pour un montant de 1.248.116,91 euros. Il a par la suite été avisé des décisions rendues. Si les parties ne s'accordent pas sur le point de savoir si M.[M] a été correctement associé à la procédure, ce dernier soutenant qu'il avait donné des instructions écrites pour s'opposer au DGD, auxquelles SPIE Batignolles n'a pas donné suite, force est cependant de constater que France Sols a engagé une procédure pour tenter d'obtenir le paiement de la somme de 787.742,09 euros qu'elle considérait lui être due au titre du solde du marché et qu'elle a formé un recours contre le jugement qui avait rejeté ses demandes, qu'à l'occasion de ce contentieux, elle a contesté les différentes moins-values dont se prévalait le maitre de l'ouvrage. En développant ces contestations France Sols a dans les faits rejoint celles de M.[M], de sorte que ce dernier manque à établir que la manière dont s'est déroulé ce contentieux avec le centre hospitalier lui a occasionné un préjudice en lui faisant perdre une chance d'obtenir une décision favorable.
La garantie est en conséquence due par M.[M] à hauteur de 441.292,04 euros. En l'absence de justificatif concernant les frais d'avocat, ce poste de réclamation ne sera pas retenu. La somme de 441.292,04 euros étant éligible à une déduction fiscale au titre de l'impôt sur les sociétés, il en résulte une économie d'impôt de 147.082,63 euros.
M.[M] doit en conséquence régler à la société SPIE Batignolles la somme de 294.209,41 euros (441.292,04 euros- 147.082,63 euros).
3) Dossier France Sol/ société Dumez (le stadium)
L'arrêt du 16 mars 2021 a sursis à statuer jusqu'à ce que la cour d'appel ait statué sur les appels du jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 25 juin 2013 et du tribunal de grande instance de Paris du 13 septembre 2013.
SPIE Batignolles indique qu'aucune garantie n'est due à ce titre par M.[M], dès lors que la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 24 juin 2016, statuant sur l'appel du jugement du 25 juin 2013 n'a prononcé aucune condamnation à l'encontre de France Sols et que par arrêt du 24 juin 2016, la cour d'appel de Paris, statuant sur l'appel relevé à l'encontre du jugement du 13 septembre 2013 a rejeté toutes les réclamations qui avaient été formulées à l'encontre de France Sols.
Il n'y a donc pas lieu à garantie de ce chef.
C-Sur la déduction au titre des provisions
SPIE Batignolles soutenait que dans son décompte le tribunal avait déduit à tort 491.615 euros de la somme due par M.[M], alors que son décompte intégrait déjà les déductions au titre des provisions.
Dans son arrêt du 16 mars 2021, la cour a relevé qu'aucune nouvelle déduction au titre des provisions n'était à opérer s'agissant des demandes de garantie qu'elle a tranchées, dès lors que, dans les dossiers dans lesquels une provision avait été constituée, celle-ci a été prise en compte par la cour dans le calcul du montant de la garantie.
Dans le cadre de la réouverture des débats, il a été laissé la possibilité aux parties d'expliquer s'il y avait lieu de déduire d'autres provisions que celles ayant trait aux garanties admises par l'arrêt du 16 mars 2021.
SPIE Batignolles indique qu'il n'y a pas d'autres provisions à déduire que celles déjà prises en compte par l'arrêt du 16 mars 2021.
M.[M] fait état dans ses conclusions d'une déduction supplémentaire de 40.000 euros, mais il ne ressort pas des pièces aux débats qu'il y ait matière à nouvelle déduction dans les affaires qui restaient à juger.
D- Sur la demande de compensation avec les réclamations visées à l'annexe 8.6 (c)
L'article 8.6 intitulé ''Compensation des montants dus à titre d'indemnisation' stipule que 'Les sommes dues par le Vendeur au titre du présent Article 8 après application des dispositions de l'article 8.4 (b) et de la franchise stipulée à l'article 8.5 seront également déduites à hauteur et jusqu'à épuisement des montants suivants :
[....]
(c) les sommes encaissées par les Sociétés au titre des réclamations listées en Annexe 8.6(c),
(i)entre le 1er janvier et la Date de Réalisation pour 100% de leur montant,
(ii)entre la date de Réalisation et le troisième anniversaire de la date de Réalisation pour 30% de leur montant et, (') ;
L'annexe 8.6 (c) liste 26 'réclamations' des Sociétés pour un montant global de 6.707.000 euros.
Pour écarter cette demande de compensation, le tribunal a jugé que M. [M] ne versait aux débats aucun élément de nature à établir que les sociétés du groupe SPR avaient effectivement perçu les sommes qu'il invoque au titre de l'annexe 8.6(c) et précisé que ce dernier n'avait formé aucune demande de production de pièces dans le cadre de la mise en état de l'affaire. Il a conclu que M. [M] n'apportait pas la preuve du recouvrement des sommes visées, ni de la carence qu'il invoque.
L'arrêt du 16 mars 2021 a constaté que si le principe de la compensation au titre de l'article 8.6 (c) n'était pas en lui-même discuté, en revanche les parties ne s'entendaient pas sur les montants à déduire. SPIE Batignolles contestait toute déduction, hors la somme de 17.280,80 euros encaissée par SPR Bâtiment et devant être déduite à hauteur de 30%, tandis que M.[M] considérait que SPIE Batignolles ne pouvait s'en tenir à son seul décompte pour établir le sort des réclamations précisément listées à l'annexe 8.6(c). C'est dans ce contexte que la cour a ordonné la réouverture des débats et invité SPIE Batignolles à produire les décomptes généraux définitifs (DGD) correspondant aux marchés ayant donné lieu aux créances clients visées à l'annexe 8.6(c), ainsi que la balance âgées clients correspondant aux créances listées.
Sur réouverture des débats, SPIE Batignolles expose liminairement que les sommes mentionnées à l'annexe 8.6 (c) n'ont pas la nature de créance, qu'il s'agit en réalité de réclamations élevées par les sociétés contre leurs clients, généralement en cours ou fin de chantier, les sociétés considérant que les montants initialement convenus au titre des travaux s'avéraient en définitive insuffisants pour diverses raisons, de sorte que ces 'créances' ne présentaient aucun caractère certain, ces sommes ne figurant d'ailleurs pas au bilan des sociétés cédées, ce qui aurait dû être le cas s'il s'était agi véritablement de créances. Elle précise qu'en dépit d'efforts considérables, elle n'a pas été en mesure d'obtenir les documents demandés par la cour compte tenu de l'ancienneté des chantiers, qu'elle ne possède plus de documentation concernant la société Verre &Métal, cette société ayant été vendue depuis 10 ans, que pour les autres dossiers, à défaut d'avoir retrouvé les DGD, elle soumet à la cour, afin de s'approcher de la preuve du fait négatif de ce que les sommes n'ont pas été recouvrées dans le délai contractuel, un état des facturations/encaissements/décaissements, qui doit être lu avec l'attestation du responsable comptable du groupe SPR auquel appartiennent les sociétés vendues par M.[M]. Elle s'oppose à la demande de M.[M] visant à voir déduire la totalité des sommes visées à cette annexe du fait de l'absence de production des DGD, ainsi qu'à sa demande subsidiaire visant à retenir 30% de cette somme, dès lors que cela reviendrait à lui appliquer une clause pénale qui n'existe pas.
M.[M] réplique, que si les 'mémoires de réclamation' figurant à l'annexe 8-6 (c) matérialisent des créances qui n'étaient ni certaines, ni exigibles, tant que leurs montants étaient susceptibles de contestation, ce qui explique qu'elles n'aient pas été enregistrées en comptabilité avant l'établissement du DGD, celles-ci n'en ont pas moins le caractère de créance, que si ces montants n'avaient eu aucune vraisemblance, SPIE Batignolles n'aurait pas exigé de pouvoir en réclamer 70%, de sorte que ces sommes avaient bien vocation pour l'essentiel à être encaissées, qu'il appartenait à SPIE Batignolles d'une part de produire les DGD fixant définitivement les montants dus au titre des réclamations, d'autre part de justifier du non-recouvrement des créances visées à l'annexe 8-6 (c) en dépit des poursuites engagées. Il relève que SPIE Batignolles n'a pas satisfait à la demande de communication des pièces, qu'elle ne peut se retrancher derrière le temps écoulé et le fait qu'elle ne dispose plus des DGD, seules pièces probantes, alors qu'il lui appartenait en vertu de l'article 9-2 du contrat de cession de veiller à conserver les informations permettant de déterminer le montant des sommes à compenser, et que depuis 10 ans il n'a cessé de réclamer ces DGD. Il en déduit que SPIE Batignolles a commis une faute dans l'exécution du contrat, l'empêchant de connaître le sort des réclamations. Il ajoute que si les sociétés ont effectué un suivi sérieux il n'est pas imaginable que seule une somme de 17.280 euros ait été encaissée sur un total de 6.707.000 euros. Déniant toute pertinence aux pièces produites par SPIE Batignolles dans le cadre de la réouverture des débats, M.[M] oppose une exception d'inexécution contractuelle, en conséquence de laquelle doivent venir en déduction les 'Réclamations' pour les montants figurant à l'annexe 8.6 (c), ajoutant que l'absence de bonne foi de SPIE Batignolles dans l'exécution du contrat justifie également cette demande et que la référence à une clause pénale est dénuée de portée.
Subsidiairement, M.[M] demande à la cour de retenir que l'absence de production des DGD se rapportant aux réclamations constitue une faute dans l'exécution de la garantie de passif , engageant la responsabilité contractuelle de SPIE Batignolles, et d'évaluer le préjudice en résultant à la somme de 2.006.916 euros ( soit 6.689.720 euros x 30%), indemnisation qui viendra en déduction des sommes qu'il doit à SPIE Batignolles et cela avant toute compensation.
Les 'réclamations' visées à l'article 8.6 (c) sont des réclamations formulées par les Sociétés cédées à SPIE Batignolles au titre des travaux qu'elles considérent avoir exécutés. Elles se distinguent des 'créances clients non recouvrées' visées à l'article 8.1 (f) du contrat, dont le montant est certain, qui figurent dans les Etats financiers consolidés et dont l'aléa ne porte que sur le caractère effectif du recouvrement. Si les ' réclamations' peuvent in fine donner lieu à des créance sur les clients des sociétés, c'est à la condition qu'elles soient préalablement purgées de contestation, puis ensuite recouvrées.
A l'article 8.6 (c) les parties étaient convenues que les sommes qui seraient encaissées au titre des 'réclamations' par les Sociétés cédées entre le 1er janvier et la Date de Réalisation soit le 23 novembre 2007 ( date de transfert de la propriété des actions)viendraient intégralement en déduction des sommes dues par M.[M] dues au titre de la garantie, puis à hauteur de 30% seulement des sommes encaissées à compter du 23 novembre 2007 et jusqu'au troisième anniversaire de cette date. Aucune déduction n'était donc prévue pour les encaissements qui interviendraient après le 23 novembre 2010.
Ainsi, jusqu'au 23 novembre 2007, ces réclamations pouvaient donner lieu à une compensation maximale de 6.707.000 euros ( 100%).
Puis du 23 novembre 2007 au 23 novembre 2010 à une compensation maximale de 2.012.100 euros (30%).
Il convient d'examiner successivement les réclamations pour lesquelles aucune pièce n'est produite et les réclamations pour lesquelles SPIE Batignolles a communiqué des documents après réouverture des débats.
- sur les réclamations qui avaient été formées par Verre&Métal;
Les réclamations de Verre&Metal, listées dans l'annexe 8.6(c) au titre des affaires Segece Laubeuf/ Ship [Localité 11] 829/ [Localité 8]/ code civil 4 Temps/ [Localité 5] d'architecture/ADP DSO/ ADP CPF 3/ Château de [Localité 14], représentent près de la moitié du total des 'réclamations', soit environ 3.045.000 euros.
La société Verre&Metal a été cédée par la société Groupe SPR le 28 octobre 2011 à la société VMF, soit postérieurement à la période utile pour la prise en compte des encaissements. Pour les besoins de la réouverture des débats, SPIE Batignolles a par courrier du 12 mai 2021, demandé à l'acquéreur, compte tenu du transfert de la comptabilité intervenue lors de la cession, de bien vouloir lui attester qu'aucune somme n'avait été reçue depuis 2007 au titre des affaires ci-dessus. Aucune attestation en ce sens n'a été produite et SPIE Batignolles ne communique pas d'élément permettant de connaître l'issue des réclamations formées par Verre &Métal sur la période courant jusqu'au 23 novembre 2010.
Elle suggère vainement à la cour, pour le cas où celle-ci l'estimerait utile, de solliciter ces informations auprès de Verre &Métal ou de recourir à une mesure d'expertise. En effet, ainsi que le soutient M.[M], d'une part, des vérifications comptables antérieures à novembre 2010 auprès d'un tiers, qui n'avait pas encore acquis la société lors de la période d'encaissements, ont peu de chance d'aboutir, d'autre part parce qu'il appartenait à SPIE Batignolles de conserver les éléments d'informations utiles, qui font aujourd'hui défaut, afin d'être en mesure de les fournir à M.[M], en vertu de l'article 9-2 du contrat de cession selon lequel
' Si l'une des filiales cessaient d'être Contrôlée par la Société, cet événement serait sans incidence sur la détermination des sommes susceptibles de venir en déduction de celles dues par le Vendeur en vertu de la garantie. Il appartiendra à l'acquéreur de faire en sorte de conserver l'accès aux informations permettant de déterminer la montant de ces sommes.'
Il est établi que M.[M] a, à plusieurs reprises après la mise en oeuvre de la garantie de passif, réclamé des informations sur les encaissements à déduire.
Il appartenait à SPIE Batignolles, au plus tard en 2011 lors de la cession de Verre&Métal (les éventuels encaissements postérieurs étant indifférents) de préserver les éléments d'informations relatifs au sort de ces affaires, notamment les DGD soldant les chantiers s'ils étaient intervenus, ou un état par affaire des réclamations demeurant en cours lors de la cession à la société VMF, ce qui ne revient pas à exiger une preuve négative.
En s'abstenant de conserver toutes informations utiles à l'appréciation des réclamations de Verre & Métal, SPIE Batignolles n'a pas respecté les dispositions contractuelles et ne permet pas à M.[M] de disposer d'élément sur le sort de ces réclamations au 23 novembre 2010, ce dernier soutenant pertinemment que le décompte établi par SPIE Batignolles ne saurait être considéré comme suffisamment probant à cet égard. C'est à tort que le tribunal a rejeté toute demande de M.[M] de ce chef au motif qu'il n'apportait aucune preuve des sommes à déduire, alors qu'après la cession à SPIE Batignolles, seule cette dernière était à même de disposer d'informations sur les encaissements ou l'absence d'encaissements après la vente, étant rappelé que la période utile d'encaissement pour opérer une compensation était expirée à la date de la nouvelle cession à VMF.
Ce manquement contractuel de la SPIE Batignolles engage sa responsabilité à l'égard de M.[M].
- sur les réclamations formées par les autres sociétés:
S'agissant des réclamations, formulées par des sociétés dépendant de GroupeSPR, autres que Verre&Métal, qui n'ont pas été cédées, SPIE Batignolles indique que les DGD, lorsqu'ils ont pu exister, n'ont pas été conservés s'agissant de dossiers remontant pour l'essentiel à plus de 10 ans, et communique des éléments destinés à pallier l'absence de production des DGD.
En pièce R8, SPIE Batignolles produit pour différentes affaires un état des facturations, accompagné d'un extrait de comptabilité 'Iris' faisant apparaître les comptes affectés par ces mouvements comptables ainsi qu'en pièce R9 une attestation établie le 30 juin 2021 par M.[R], responsable comptable au sein de Groupe SPR / SPIE Batignolles, précisant que 'les protocoles transactionnels ou encore les indemnités à la suite d'une décision de justice, sont à comptabiliser dans le compte 658000 ' autres charges diverses de gestion' ou 758000 ' autres produits divers de gestion' lorsqu'il s'agit de la gestion courante d'un chantier'. SPIE Batignolles précise que c'est sur ces comptes qu'auraient été comptabilisés les règlements qui seraient intervenus au titre des réclamations s'il y en avait eus.
M.[M] conteste la pertinence de ces documents qu'il a soumis pour analyse au cabinet d'expertise comptable AD Welsen (M.[D]) ( pièce 86).
L'expert-comptable indique que les pièces R8 et R9 ne permettent pas de s'assurer de l'existence ou de l'absence de règlement des montants listés dans l'annexe 8-6 (c), en ce que les extraits (R8) ne sont pas extraits de la comptabilité, mais seulement un outil interne de gestion, que les flux ne sont pas compréhensibles, qu'aucun indice ne permet d'acquérir un début de réponse quant aux objectifs permettant d'identifier une réclamation et son règlement. Il ajoute s'agissant de la pièce R9 que les réclamations et ajustements sur un chantier ne relèvent pas forcément de la catégorie protocole transactionnel mais peuvent aussi relever de la catégorie chiffre d'affaires.
Ces documents font apparaître le montant du devis initial et le cas échéant celui du devis complémentaire pour le chantier considéré et le numéro de l'ordre de service (OS) correspondant. Est jointe à ces informations une ' Impression détail du déboursé' pour l'OS considéré qui mentionne des écritures en débit et crédit, avec pour origine 'ANOU' ( à nouveau), mais qui ne permettent pas de faire le lien avec les montants des réclamations figurant à l'annexe 6-1 (c).
Alors que le nombre de réclamations formées par les sociétés autres que Verre&Métal n'est pas important, SPIE Batignolles ne commente pas de façon détaillée dans ses conclusions les documents listés en pièce R8 traitant de différents chantiers et ne s'explique pas non plus sur les observations critiques émises par le cabinet d'expertise comptable AD Welsen quant au caractère inexploitable de ces documents pour répondre à la question posée.
Ainsi, il sera retenu, que comme pour les réclamations formées par Verre &Métal, SPIE Batignolles ne fournit pas les éléments nécessaires à l'appréciation du sort des réclamations des sociétés contre leurs clients au 23 novembre 2010, cette carence engageant sa responsabilité à l'égard de M.[M].
S'agissant des conséquences financières de ces carences, il sera relevé que pour valoir compensation les réclamations devaient avoir été purgées de contestation, mais aussi encaissées dans les délais prévus par la convention, soit un premier délai très court, expirant dès le 23 novembre 2007. La briéveté de ce délai ne permet pas à défaut d'éléments contraires, de considérer que des réclamations ont pu utilement être encaissées à cette date. C'est davantage sur la seconde période expirant le 23 novembre 2010, au cours de laquelle la compensation n'intervenait que pour 30%, que des réclamations étaient susceptibles de se dénouer. Toutefois, contrairement à ce que soutient M.[M], il n'est nullement établi que ces réclamations avaient dans leur grande majorité vocation à aboutir. L'admission du bienfondé des réclamations en leurs principes et montants, puis l'encaissement à date utile présentaient au contraire un caractère doublement aléatoire, qui explique que leurs montants n'aient pas intégrés en comptabilité.
Au vu de ces éléments, SPIE Batignolles sera condamnée à verser à M.[M] 150.000 euros de dommages et intérêts.
Il convient par ailleurs de constater l'existence d'une compensation de 5.184 euros ( 17.280 euros x 30%) admise par SPIE Batignolles.
E-Sur la franchise
L'article 8.5 (a) de la convention ' franchise' stipule que le Vendeur ne sera tenu à indemnisation que si le montant cumulé de tous les Préjudices indemnisables excède la somme de deux cent soixante mille (260.000) euros.
Le montant cumulé des préjudices excède bien cette somme.
F- Sur les intérêts
SPIE Batignolles demande à la cour de condamner M.[M] à lui régler des intérêts au taux légal attachés à la mise en jeu de la garantie d'actif et de passif à compter de sa mise en demeure du 15 février 2011 pour les montants visés et à compter du jugement intervenir pour les montants réclamés postérieurement à cette date.
M.[M] s'y oppose dans la mesure où avant l'arrêt à intervenir les montants des sommes réclamées n'avaient pas été fixés. Il demande par ailleurs à la cour d'assortir la condamnation de SPIE Batignolles au remboursement du solde dans le dossier [I] des intérêts au taux légal applicable lorsque le créancier est une personne physique n'agissant pas pour des besoins professionnels, à compter du 13 décembre 2010, soit pour la période du 13 décembre 2010 au 31 décembre 2021 un montant de 640.495,02 euros.
S'agissant des suites du dossier [I], il n'est pas contesté, après arrêt du 21 février 2012, qu'aucune garantie n'est finalement due par M.[M] au titre de ce litige, de sorte que SPIE Batignolles doit restituer à M.[M] les sommes versées en décembre 2010 par ce dernier au titre de cette affaire.
L'arrêt du 16 mars 2021 a jugé (page 41) que le solde à restituer à ce titre par SPIE Batignolles s'élevait à 2.393.787,96 euros, montant que SPIE Batignolles sera condamnée à payer, et qui viendra en compensation à due concurrence des sommes dues au titre de la garantie par M.[M]. SPIE Batignolles attire l'attention de la cour sur le fait que le solde de 2.393.787,96 euros ne tient pas compte des honoraires d'avocat qu'elle a supportés dans le cadre de ladite procédure. Toutefois, aucune garantie n'étant due, M.[M] n'a pas à prendre en charge les frais d'avocat exposés par SPIE Batignolles à l'occasion du contentieux [I].
Le montant des condamnations mises à la charge de M.[M] au titre de la garantie de passif est inférieur au solde devant être restitué par SPIE Batignolles à M.[M] au titre du dossier [I], de sorte qu'in fine, après application des diverses compensations, SPIE Batignolles reste devoir un solde à M.[M]. Ce dernier est fondé à solliciter la condamnation de SPIE Batignolles au paiement des intérêts au taux légal à compter du 23 avril 2013, date de sa demande de restitution des fonds indûment versés dans le dossier [I], non pas sur la somme de 2.393.787,96 euros, mais sur le solde que SPIE Batignolles restera in fine lui devoir après compensation entre les créances réciproques.
SPIE Batignolles sera déboutée de sa demande d'intérêts au taux légal sur les montants dus au titre de la garantie de passif, dès lors qu'elle dispose depuis 2010 des fonds excédant son droit à garantie.
G- Sur les demandes de dommages et intérêts
Les parties sollicitent respectivement l'octroi de dommages et intérêts pour résistance abusive de leur contradicteur, la demande de SPIE Batignolles étant de 80.000 euros, celle de M.[M] de 100.000 euros.
Il n'est toutefois pas justifié d'une résistance abusive de M.[M], le nombre d'affaires à traiter au titre de la garantie rendant particulièrement complexe la résolution du litige et nécessitant le recours au juge.
L'absence de restitution des fonds versés par M.[M] dans le dossier [I] s'inscrit également dans cette incertitude quant au montant de la garantie finalement due à SPIE Batignolles. Dans ce contexte, sachant que le retard de restitution des fonds à M.[M] conduira au paiement d'intérêts, il n'y a pas lieu d'y ajouter des dommages et intérêts pour résistance abusive, le jugement étant infirmé de ce chef.
H- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et au rejet des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
La cour déboutera les parties de leurs demandes d'indemnités procédurales au titre des frais exposés en appel. Par ailleurs, chacune des parties conservera à sa charge les dépens qu'elle a exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt du 16 mars 2021 et y ajoutant,
Condamne M.[M] à payer à la société SPIE Batignolles, en deniers ou quittances les sommes suivantes
- 440.432,46 euros au titre des réclamations des tiers admises par l'arrêt du 16 mars 2021, déduction faite de l'économie d'impôt ( soit 660.649 euros - 220.216,54 euros) dont la garantie et la déduction ont été admises par l'arrêt du 16 mars 2021,
- 7.781,50 euros au titre du dossier Maison Leclaire/ Urssaf :
- 29.626,82 euros au titre du dossier Verre et Métal/Urssaf ,
- 18.418,26 euros au titre du dossier France Sols/Direction générale des impôts ,
- 1.712,37 euros au titre du dossier Maison Leclaire/Douanes suisses,
- 8.172,48 euros au titre du dossier SPR Rénovation/atteinte à la sécurité des salariés,
- 10.846,06 euros et titre du dossier Trouve/[Localité 4] Hôtel Majestic,
- 1.536,75 euros au titre du dossier SPR Rénovation/ ministère public,
- 15.564,78 euros au titre du dossier Trouve Leclaire / ministère public/Léon de Bruxelles,
- 458.702,81 euros au titre du dossierVerre et Métal/ Cabrol (stade de [Localité 6]),
- 294.209,41 euros au titre du dossier France Sols/ Centre hospitalier d'[Localité 3],
- Déboute M.[M] de sa demande de déduction d'une économie d'impôt sur la somme de 575.278,30 euros, condamne en conséquence M.[M] à payer à SPIE Batignolles la somme de 575.278,30 euros au titre des créances clients non recouvrées au 31 décembre 2008 ( montant fixé par l'arrêt du 16 mars 2021),
- Dit que la somme de 5.184 euros ( annexe 8.6 c) viendra en compensation du montant des garanties dues par M.[M],
- Condamne la société SPIE Batignolles à payer à M.[M] 150.000 euros en réparation de ses manquements à l'exécution de la convention relativement à l'application de l'article 8.6 (c),
Condamne la société SPIE Batignolles à payer à M.[M] la somme de 2.393.787,96 euros en remboursement du solde dû à M.[M] au titre du solde de l'indemnisation indûment versée dans le dossier [I] ( cf. Point IV de l'arrêt du 16 mars 2021),
Condamne la société SPIE Batignolles à rembourser à M.[M] la somme de 423,21 euros au titre de la réclamation DBS/Procap ( arrêt du 16 mars 2021),
Ordonne à due concurrence, la compensation entre les condamnations réciproques des parties,
Infirme le jugement en ce qu'il a condamné M.[M] à payer à la société SPIE Batignolles des intérêts au taux légal sur la somme de 1.315.316,73 euros à compter de sa date et en ce qu'il a condamné la société SPIE Batignolles à verser à M.[M] des intérêts au taux légal sur la somme de 2.650.093,46 euros à compter du 13 décembre 2010, statuant à nouveau de ces chefs, déboute la société SPIE Batignolles de sa demande de condamnation à des intérêts au taux légal, et condamne la société SPIE Batignolles à verser à M.[M] les intérêts au taux légal sur le solde à lui revenir, après compensation entre les créances réciproques, à compter du 23 avril 2013,
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société SPIE Batignolles de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, mais l'infirme en ce qu'il a condamné la société SPIE Batignolles à verser à M.[M] 10.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive, statuant à nouveau, déboute M.[M] de sa demande de ce chef,
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et y ajoutant déboute M.[M] et la société SPIE Batignolles de leurs demandes respectives d'indemnités procédurales en appel,
Confirme le jugement en ce qu'il a laissé à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés et y ajoutant, dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens exposés en appel.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
La Présidente,
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT