Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRET DU 25 MAI 2022
(n° , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/03387 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5GPJ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 14/07016
APPELANTE
SARL EIGEN FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Alexis NGOUNOU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1615
INTIMES
Monsieur [K] [Z] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Thomas FORMOND, avocat au barreau de PARIS, toque : C2615
Syndicat SYNDICAT CNT DU NETTOYAGE
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Thomas FORMOND, avocat au barreau de PARIS, toque : C2615
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre
Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre
Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021
Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE
ARRET :
- contradictoire
- mis à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [K] [Z] [H] a été engagé par la société EIGEN FRANCE selon contrat à durée indéterminée le 1er janvier 2007 avec reprise d'ancienneté à janvier 2006 en qualité d'agent de service de propreté.
La convention collective applicable est celle des entreprises de propreté.
M. [Z] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris aux fins d'obtenir le paiement de différents éléments de salaire.
Par jugement de départage du 30 janvier 2018, notifié à la société EIGEN FRANCE le 1er février 2018, le conseil de prud'hommes de Paris a :
- condamné la SARL EIGEN FRANCE à verser à Monsieur [Z] [H] les sommes suivantes:
* 15 221 euros à titre de rappel de salaire pour l'heure de mise à disposition de juin 2011
à septembre 2015,
* 1 521 euros au titre des congés payés afférents,
* 2 254 euros au titre de la majoration des heures de nuit de juin 2011 à septembre 2015,
* 225 euros au titre des congés payés afférents,
* 256 euros au titre de la majoration des heures de dimanche de juin 2011 à septembre
2015,
* 25 euros au titre des congés payés afférents,
* 8 083,64 euros au titre des rappels de la prime de panier,
* 1 352 euros au titre des frais d'entretien de la tenue de travail,
* 5 000 euros au titre de dommages et intérêts pour le préjudice né de l'abattement
forfaitaire
avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2014,
- ordonné la remise de fiches de paie rectifiées,
- ordonné la production du règlement de la somme de 144 euros saisie sur salaire à l'administration fiscale sous astreinte de 10 euros par jour de retard qui courra dix jours à compter de la notification du jugement pour une durée de six mois,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- condamné la société EIGEN FRANCE à payer à la Confédération nationale des travailleurs solidarité ouvrière CNT les sommes suivantes :
* 500 euros au titre de l'intervention volontaire,
* 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- mis les dépens à la charge de la partie défenderesse.
La société EIGEN FRANCE a interjeté appel de ce jugement selon déclaration d'appel du 22 février 2018.
Par ordonnance du 12 décembre 2018, le conseiller de la mise en état a rejeté l'incident visant à voir prononcer la caducité de la déclaration d'appel.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 18 février 2020, la société EIGEN FRANCE demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- réformer le jugement de la formation du départage du conseil de prud'homme de Paris du 30 janvier 2018,
Et statuant à nouveau
- dire et juger que Monsieur [Z] a une classification d'AS1,
- dire et juger que Monsieur [Z] n'était pas à la disposition de son employeur pendant sa pause et qu'il pouvait vaquer à ses occupations personnelles,
- dire et juger qu'elle fournissait des repas à Monsieur [Z] en remplacement de la prime de panier,
- dire et juger que Monsieur [Z] a été rétribué avec majoration de 20% pour ses heures de nuit et de dimanche,
- dire et juger que Monsieur [Z] avait une machine à laver le linge à sa disposition pour ses tenues de travail,
- dire et juger qu'elle avait le droit de pratiquer l'abattement forfaitaire,
En conséquence
- rejeter les demandes liées au rappel de salaire,
- rejeter les demandes liées à la rémunération des pauses,
- rejeter les demandes portant sur la prime de panier,
- rejeter les frais de tenue de travail,
- faire droit à la pratique de l'abattement forfaitaire et rejeter les demandes de dommages et intérêts faites par le salarié et le syndical à ce titre,
- rejeter les demandes au titre de l'article 700 du CNT et de Monsieur [Z],
- condamner solidairement Monsieur [Z] et le syndicat CNT à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700,
- les condamner aux dépens.
Elle expose que :
- elle ne donnait aucune instruction au salarié pendant son temps de pause,
- le salarié a bénéficié de repas en lieu et place de la prime de panier,
- le salarié avait à disposition un lave-linge,
- le salarié a été rémunéré de ses heures de nuit,
- le salarié travaillait sur plusieurs sites.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 29 octobre 2019, Monsieur [Z] [H] demande à la cour de:
- confirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions,
- condamner la société EIGEN FRANCE à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,
- la condamner aux entiers dépens de l'instance.
Il expose que:
- l'employeur ne démontre pas que les salariés avaient à disposition une salle de repos,
- aucun avantage en nature ne figure sur les bulletins de paie,
- l'employeur ne démontre pas qu'il avait effectivement accès à une machine à laver sur son site d'affectation,
- il était affecté sur un site unique et les conditions de l'abattement forfaitaire ne sont pas remplies.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 29 octobre 2019, le syndicat CNT du nettoyage demande à la cour de:
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté l'existence d'un préjudice causé à l'ensemble de la profession du nettoyage et condamné la SARL EIGEN FRANCE à verser au syndicat CNT-SO la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement en ce qu'il a limité à la somme de 500 euros les dommages et intérêts au titre de l'atteinte portée aux intérêts de la profession,
Par suite, statuant à nouveau,
- dire et juger le syndicat CNT-SO du nettoyage et des activités annexes recevable et bien fondé en son appel incident,
- condamner la SARL EIGEN FRANCE à régler au syndicat CNT-SO du nettoyage et des activités annexes les sommes suivantes :
* dommages et intérêts pour atteinte aux intérêts de la profession : 5 000 euros
* article 700 du code du procédure civile : 2 000 euros
- ordonner l'intérêt légal à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes,
- condamner également aux entiers dépens.
Il expose que:
- son intervention volontaire est recevable,
- la pratique illicite par la société EIGEN FRANCE de l'abattement forfaitaire cause une préjudice direct aux intérêts de la profession.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er avril 2020.
L'audience de plaidoiries était fixée au 27 avril 2020. Les parties ayant refusé la procédure sans audience, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 23 février 2022.
La cour a sollicité des parties une note en délibéré sur l'effet dévolutif de l'appel au regard des termes de la déclaration d'appel.
Aux termes de sa note en délibéré notifiée par RPVA le 31 mars 2022, la société EIGEN FRANCE expose que dans la déclaration d'appel, elle a employé le terme de réformation alors qu'elle sollicitait l'annulation du jugement et que son appel visait l'annulation du jugement, la mention des chefs de jugement n'était pas nécessaire. Elle ajoute que l'objet du litige est indivisible.
MOTIFS
Sur l'effet dévolutif de l'appel
Aux termes de l'article 901 du code de procédure civile dans sa rédaction ici applicable, la déclaration d'appel doit préciser les chefs du jugement expressément critiqués, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. Cette précision est prescrite à peine de nullité de forme de la déclaration d'appel.
La déclaration d'appel affectée de ce vice de forme peut être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.
Cette nullité de forme de la déclaration d'appel est doublée d'une autre sanction puisqu'en cas d'appel général, l'effet dévolutif de l'appel ne joue pas et la cour d'appel n'est pas saisie.
Ainsi, en vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.
Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.
En l'espèce, la déclaration d'appel en date du 22 février 2018 est ainsi rédigée : « REFORMER le jugement rendu par la section de départage du conseil de prud'hommes de Paris, statuant à nouveau REJETER toutes les demandes présentées par Monsieur [Z], REJETER toutes les demandes présentées par le syndicat CNT du Nettoyage CONDAMNER solidairement Monsieur [Z] et le Syndicat CNT du Nettoyage à la somme de 3 000 E au titre de l'article 700 du code de procédure civile ».
La déclaration d'appel ne précise aucun des chefs de jugement critiqués. Cette déclaration d'appel n'a pas fait l'objet d'une régularisation dans le délai de trois mois.
La société EIGEN FRANCE soutient que son appel avait pour objet l'annulation du jugement et non sa réformation.
Elle n'a cependant soulevé aucun moyen tendant à l'annulation du jugement dans ses conclusions. Le litige n'est pas, par ailleurs, indivisible.
Ainsi, il n'est déféré à la cour la connaissance d'aucun chef expressément critiqué du jugement interjeté d'appel.
Il s'en déduit que l'effet dévolutif de l'appel n'a pu jouer à défaut de la limitation prévue à l'article 562 précité, étant rappelé que le dépôt de conclusions ultérieures par la partie appelante n'est pas de nature à suppléer l'absence d'effet dévolutif résultant d'une déclaration d'appel non renseignée.
Il en résulte que la cour ne peut statuer sur les demandes formulées par la société EIGEN FRANCE en l'absence d'effet dévolutif de l'appel.
Sur les frais de procédure
La société EIGEN FRANCE sera condamnée aux dépens.
Elle sera également condamnée à payer à M. [Z] [H] et au syndicat CNT du Nettoyage la somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Dit n'y avoir lieu à statuer en l'absence d'effet dévolutif de l'appel ;
Condamne la société EIGEN FRANCE à verser à M. [K] [Z] [H] et au Syndicat CNT du Nettoyage la somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société EIGEN FRANCE aux dépens.
LA GREFFIERELE PRESIDENT