Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 9
ORDONNANCE DU 07 SEPTEMBRE 2022
Contestations d'Honoraires d'Avocat
(N° /2022, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00057 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7HJM
NOUS, Sylvie FETIZON, Conseillère à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRETZ, Greffière présente lors des débats ainsi que lors de la mise à disposition de l'ordonnance.
Vu le recours formé par :
Madame [F] [X]
[Adresse 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Monsieur [G] [V]
[Adresse 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Non comparants, non représentés
Demandeurs au recours,
contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :
Maître [H] [P]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Comparant en personne,
Défendeur au recours,
Par décision réputée contradictoire, statuant publiquement par mise à disposition au Greffe, après avoir entendu les parties présentes à notre audience du 02 Juin 2022 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,
L'affaire a été mise en délibéré au 07 Septembre 2022 :
Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;
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Statuant en application des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991, Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Paris a rendu une décision réputée contradictoire le 21 janvier 2019 qui a :
- fixé à la somme de 16 275 euros HT le montant total des honoraires dus à Maître [P], avocat, par M [G] [V] et Mme [F] [X]
- condamné en conséquence M [V] et Mme [X] à payer solidairement à Maître [H] [P] la somme de 7 625 € HT, somme majorée de la TVA au taux applicable à la date des diligences accomplies et de l'intérêt au taux légal à compter de la date de saisine du bâtonnier en date du 21 septembre 2018
- dit que M [V] et Mme [X] pourront s'acquitter de leur dette en trois mensualités égales et régulières, pour la première à intervenir dans le mois de signification de la décision
- dit que faute par M [V] et Mme [X] de s'acquitter régulièrement des échéances prévues, l'intégralité de la dette deviendra immédiatement exigible de plein droit, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 septembre 2018
- dit que les frais éventuels de signification de la présente décision seront à la charge des appelants
- débouté les parties de toutes autres demandes, plus amples ou complémentaires
Le 6 février 2019, M [V] ainsi que Mme [X] ont formé un recours contre cette décision.
Par lettre datée du 26 janvier 2022, l'avocat des requérants a demandé à être dispensé de comparaître à l'audience.
Par décision avant dire droit en date du 6 avril 2022, la Cour a ordonné la réouverture des débats afin que les requérants puissent justifier du dépôt de leur demande d'aide juridictionnelle et produire la décision du bureau d'aide juridictionnelle compétent statuant sur leur demande et a renvoyé l'affaire à l'audience du 2 juin.
A L'AUDIENCE du 2 juin :
L'avocat de M [V] et Mme [X] a déposé des conclusions dans lesquelles il sollicite de la cour :
- d'infirmer la décision critiquée
- de fixer le montant des honoraires dus par ses clients à leur avocat à la somme de 9 150 € TTC
- de condamner Maître [P] à leur verser la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du CPC
Il fait notamment valoir que le temps passé ne correspond pas au temps facturé, que les diligences effectuées sont bien moindres que celles prétendues et ne peuvent pas correspondre à l'équivalent au temps passé à hauteur de 54H15, en réalité 51 heures si on se réfère au total des heures détaillées dans la fiche de diligences, un seul jeu de conclusions ne pouvant justifier un tel montant d'honoraires. En outre, il prétend que Maître [P] a repris dans ses écritures les observations faites par le Cabinet de Propriété Industrielle BEAU DE LOMENIE et qu'ainsi, la quantité de son travail réel doit être réduit à de plus justes proportions.
Maître [H] [P] se présente et dépose des conclusions visées par le greffe dans lesquelles il sollicite notamment et auxquelles la cour se réfère :
- la confirmation de la décision en ce qu'elle a fixé à la somme de 16 275 euros HT le montant total des honoraires dus, sous déduction de la somme réglée de 8 650 euros HT soit un solde d'honoraires de 7 625 euros HT
- d'infirmer la décision sur le point de départ des intérêts et dire que les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2018, date de la mise en demeure
- d'infirmer la décision en ce qu'elle a accordé aux appelants des délais de paiement
- de rejeter la demande de M [V] et de Mme [X] au titre de l'article 700 du CPC
- de voir condamner M [V] et Mme [X] à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens lesquels comprendront les frais de signification de la décision à intervenir le cas échéant
SUR CE
Sur les honoraires :
En l'espèce, il est constant que M [G] [V] et Mme [F] [X] ont confié à Maître [H] [P] la défense de leurs intérêts dans le cadre d'une procédure en revendication de brevet et en paiement de diverses sommes, procédure initiée contre eux par M [U] [R] selon acte d'huissier en date du 5 mai 2014.
Les appelants convenaient de faire appel en août 2014 à un avocat, Maître [H] [P] après avoir demandé auparavant l'assistance du Cabinet de Propriété Intellectuelle BEAU DE LOMENIE lequel avait dressé une fiche technique le 16 juin 2014.
Une convention d'honoraires était conclue entre les parties, prévoyant des honoraires fixés au temps passé, le taux horaire de Maître [P] étant fixé à 300 € HT, les diligences étant mentionnées comme étant « l'ensemble des actes nécessaires à l'instruction du dossier et tendant à l'obtention du résultat souhaité et notamment : rendez vous au cabinet ou à l'extérieur, recherches, études, consultations, correspondance et entretiens téléphoniques, rédaction d'actes ou d'écritures judiciaires, déplacement divers ou aux audiences, réunion d'expertises, audiences de procédure et de plaidoiries, réunions de travail ou de négociation ainsi que toutes démarches judiciaires, administratives ou autres. »
Il était en outre précisé que « les honoraires seraient facturés en fonction des diligences accomplies dont la teneur est précisée en fin de mission dans un état récapitulatif établi selon nos régles professionnelles »
A titre de provision, diverses sommes ont été demandées aux appelants selon un relevé de facture établi par Maître [P] le 12 janvier 2018 : les sommes de 2500 € HT le 20 août 2014, ( 3000 € TTC ) puis une provision de 2500 € HT le 29 janvier 2015
( 3000 € TTC) , une troisième provision de 4500 € HT le 28 mai 2015 ( 5400 € TTC) , la somme de 5000 € le 11 février 2016 et le 1er juin 2016, la somme de 1775 € soit un total de 16 275 euros HT ou 19 530 euros TTC.
M [V] et Mme [X] ont payé à Maître E ROUART, selon ce même relevé de factures, les sommes de 1500 € ( 2/9/2014), 1000 € (19/01/2015), 500 €
( 23/5/2015), 3000 € (7/4/2015), 2700 € ( 24 /8/2015), 1500 € le 14/11/2016 et enfin 180 € le 1er juin 2017 soit une somme totale de 10 380 euros .
Toutefois, le montant des sommes versées est minoré dans les écritures mêmes de l'avocat des appelants, ce dernier notant que ses clients se sont acquittés de la somme de 9150 euros TTC.
Les parties ont interrompu leurs liens avant qu'une décision définitive ne soit rendue.
Le dessaisissement de l'avocat avant que soit intervenu un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable rend inapplicable la convention d'honoraires initialement conclue et les honoraires dus à l'avocat pour la mission effectuée doivent alors être fixés selon les critères définis à l'article 10 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971, à savoir la situation de fortune du client, la difficulté de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété et des diligences de celui-ci.
De même, dans le cadre d'un dessaisissement de l'avocat, l'honoraire de résultat n'est dû que si, au jour où le premier président statue, un acte ou une décision irrévocable est intervenu. L'avocat ne peut saisir le prétexte d'un résultat obtenu très satisfaisant pour solliciter des honoraires supplémentaires dans le cadre de la fixation d'honoraires devant le Bâtonnier.
Le taux horaire pratiqué par l'avocat est conforme aux usages de la profession et correspond au taux visé dans la convention d'honoraires. Ce taux horaire n'est d'ailleurs pas contesté par les requérants.
Les diligences qui ont fait l'objet d'une facturation, le taux horaire étant de 300 € HT,se décomposent notamment ainsi :
- rendez vous cabinet: 1H-2H
- entretiens téléphoniques : 11H-3H30
- lettres reçues et adressées : 111 lettres
- examen du dossier, recherches (type, nombre et durée) : 18H
- autres diligences :
- travaux écrits en judiciaire ( assignations et conclusions) : jeu de 2 conclusions : 20H
- 3 audiences : 2H30 X3
soit un total de 54H15.
Maître [P] justifie la rédaction de conclusions dans l'intérêt de ses clients, dans un domaine juridique complexe, nonobstant les écrits du Cabinet BEAU DE LOMENIE lequel avait répondu sur le plan technique du brevet en sa qualité de conseil en propriété industrielle.
Il ressort des éléments du dossier que M [V] et Mme [X] ont versé au cabinet d'avocat, au fur et à mesure des présentations de demandes de provision, la somme totale de 10 380 euros selon les écrits mêmes de l'avocat .
Toutefois, le montant des sommes versées est minoré dans les écritures mêmes de l'avocat des appelants, ce dernier notant que ses clients se sont acquittés de la somme de 9150 € TTC En réalité, cette dernière somme est celle demandée par Maître [P] au titre du restant du ( 19 530 € TTC - 10380 € TTC = 9150 € TTC. )
S'il est constant que le Cabinet BEAU DE LOMENIE a dressé un rapport technique sur le brevet contesté devant le tribunal judiciaire, Maître [H] [P] a été obligé d'en prendre connaissance et de répondre aux arguments juridiques soulevés par l'assignation en justice de M [U] [R], par des conclusions adaptées à la situation des appelants.
Au vu des critères visés par la loi du 31 décembre 1971 sus visée, le reliquat demandé apparaît excessif au vu des diligences effectuées, des jeux de conclusions, et notamment du nombre d'heures passées aux audiences alors qu'il s'agit d'une procédure écrite ainsi que la rubrique « examen du dossier, recherches type, nombre et durée », non détaillées dans la fiche de diligences
Ainsi, les honoraires peuvent être évalués à l'équivalent de 38 heures et non 51 ou 54, au taux horaire de 300 € HT ( 360 € TTC) soit la somme de 13 680 euros TTC, la somme fixée par le Bâtonnier étant en conséquence réduite à de plus justes proportions.
Compte tenu des sommes versées, la cour fixe les honoraires restant dus à Maître [P] à la somme de 3300 euros (13 680 € TTC - 10 380 € TTC) sous réserve du montant acquitté dans le cadre des provisions, la Cour prononçant une condamnation solidaire et en deniers ou quittances au vu des divergences chiffrées sur les sommes déjà versées TTC au titre des provisions sur honoraires.
Sur la demande de délais de paiement des honoraires :
Les appelants ont bénéficié de fait de près de quatre années pour s'acquitter des sommes dues, ils ne justifient par aucun élément rencontrer encore des difficultés financières, le bénéficie de l'aide juridictionnelle n'étant pas un critère suffisant pour étayer leur prétention Dès lors, cette demande sera écartée.
Sur le point de départ des intérêts au taux légal :
Les intérêts au taux légal portant sur le montant des honoraires dus sont fixés à compter de la saisine du bâtonnier et non de la mise en demeure soit à compter du 21 septembre 2018 et non à compter du 11 juin 2018
Sur l'application de l'article 700 du CPC :
Il n'apparaît pas équitable de faire supporter par Maître [P] des sommes non comprises dans les dépens. Une somme de 400 euros est donc mise à la charge des appelants à ce titre.
Sur les dépens :
Les dépens seront supportés par M [V] et Mme [X], dépens qui comprendront les frais de signification de la présente décision, le cas échéant
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par ordonnance rendue en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe de la chambre
Dit les recours recevables en la forme
Fixe le montant des honoraires dus solidairement par Monsieur [V] et Madame [X] à Maître [H] [P] à la somme de 13 380 € TTC
Constate que la somme de 10 380 € TTC aurait d'ores et déjà été versée par les appelants au titre d'honoraires à leur avocat, le reliquat restant dû s'élevant à la somme de 3300 € TTC
Dit que les honoraires dus par Monsieur [V] et Mme [X], soit la somme de 3300 € TTC seront versés solidairement à Maître [H] [P] EN DENIERS OU QUITTANCES avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision rendue par M le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Paris
Condamne M [V] et Mme [X] à verser à Maître [P] la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du CPC
Déboute les parties de toutes les autres demandes
Dit que les appelants conservera la charge des dépens par elles exposés
Dit qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'ordonnance sera notifiée aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE