RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 01 Juillet 2022
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/05648 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5RWJ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Avril 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 16/01406
APPELANTE
SAS [8]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 5]
représentée par Me Pascale THERAULAZ BENEZECH, avocat au barreau de PARIS, toque : D1891
INTIMEE
URSSAF ILE DE FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par M. [P] en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Pascal PEDRON, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Pascal PEDRON, Président de chambre
Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre
M. Raoul CARBONARO, Président de chambre
Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par M. Pascal PEDRON, Président de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par la société SAS [8] (la société) d'un jugement rendu le 12 avril 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil dans un litige l'opposant à l'Urssaf Ile de France (l'Urssaf).
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que la société [8], entreprise générale de bâtiment, a fait appel sur les exercices 2013 et 2014 à la société [6] en qualité de sous-traitant pour réaliser des travaux d'isolation thermique de façades; qu'à la suite d'un contrôle de la société l'Atelier, initialement dans ses relations de sous-traitant avec une société [7], un procès-verbal relevant le délit de travail dissimulé a été dressé le 10 octobre 2014 à l'encontre de la société [6] pour un montant de salaires dissimulés de 2 673 227 €, établissant que cette dernière utilisait de fausses attestations de vigilance, soit l'une étant celle de la SARL [9] domiciliée à la même adresse (et liquidée le 12 mars 2014), soit 11 autres ayant un bon code de sécurité avec des informations modifiées renseignant l'effectif, la masse salariale et la période et l'établissement concerné et un n°SIRET erroné, et dont il ressortait que 84 sociétés donneuses d'ordre, dont la [8], avaient été en relation contractuelle avec la société [6]; que par lettre du 28 août 2014 , l'Urssaf a signalé à la société [8], donneur d'ordre, les faits de travail dissimulé constatés et lui a rappelé ses obligations dans le cadre de l'article L.8222-5 du code du travail, la société répondant qu'elle ne travaillait plus avec cette société [6] depuis le début du mois d'avril 2014 ; que le 10 avril 2015, l'Urssaf a notifié à la société [8] une lettre d'observations concernant la mise en oeuvre de sa solidarité financière avec son sous-traitant la société [6] pour un montant de cotisations mises à sa charge de 72 964 € correspondant à sa quote-part des cotisations non réglées par la société [6] ; qu' à l'issue de la phase contradictoire, l'inspecteur du recouvrement a maintenu le rappel en son entier montant; qu'une mise en demeure de régler la somme de 72 964 euros en principal a été notifiée à la société [8] le 18 juillet 2016 ; qu'après avoir saisi en vain la commission de recours amiable, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil, lequel par jugement du 12 avril 2018 a :
-déclaré le recours de la société recevable en la forme mais mal fondé tant sur le principe de la solidarité financière que sur le calcul des cotisations dues,
-confirmé la décision de la Commission de Recours Amiable de l'Urssaf du 24 avril 2017,
-accueilli la demande reconventionnelle de l'Urssaf,
-dit qu'au titre de la solidarité financière prévue à l'article L 8222-2 du code du travail, la société devra verser à l'Urssaf la somme de 72 964 euros,
-débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
et ce aux motifs essentiels que d'une part la société n'a pas vérifié l'authenticité des attestations de vigilance délivrées par la société l'Atelier alors que ces documents se sont révélés être des faux, d'autre part que la somme réclamée correspond aux cotisations non réglées par la société [6] calculées au prorata du chiffre d'affaires réalisé par cette dernière chez la SAS [8] pour les prestations ayant été effectuées de novembre 2013 à fin mars 2014.
La société a interjeté appel de ce jugement à deux reprises les 24 et 27 avril 2018. Ces appels ont été enregistrés respectivement sous les n° RG 18/05735 et 18/05648 ; ces deux instances ont été jointes par mention au dossier le 24 novembre 2021, la procédure suivant sont cours sous le n° RG 18/05648 .
Par ses conclusions écrites « responsives et récapitulatives n°1 » déposées par son avocat qui s'y est oralement référé à l'audience, la société demande à la cour, au visa des articles L.8222-1 et suivants et D.8222-5 du code du travail, de :
-juger que l'Urssaf ne rapporte pas la preuve que les conditions d'application de l'article L. 8222-2 du code du travail sont réunies pour faire jouer sa solidarité financière,
En conséquence,
-juger que la mise en 'uvre de la solidarité financière n'est pas fondée et infirmer le jugement déféré,
-prononcer l'annulation des redressements prononcés à son encontre par l'Urssaf ainsi que toute majoration subséquente,
-condamner l'Urssaf à lui verser la somme de 4.000 € de frais irrépétibles.
La société fait valoir pour l'essentiel que :
-l'Urssaf se base sur des constats qu'elle aurait effectués le 19 février 2014 et qu'elle aurait consignés dans un procès-verbal ne concernant que les sociétés co-contractantes de [7] qu'elle ne connait pas et L'Atelier , ces constats ne la concernant pas.
-les redressements opérés au titre de la solidarité financière sont fondés sur la seule déduction que si des attestations fournies par le cocontractant de la société [7], la société [6], sont fausses, elles sont également obligatoirement fausses pour les autres donneurs d'ordres de cette dernière.
-le procès-verbal du 10 octobre 2014, qui n'a pour fondement que le contrôle effectué le 19 février 2014 des sous-traitants de la société [7], ne saurait fonder sa solidarité financière, ce procès-verbal finalisant le contrôle ne mentionnant aucun constat à l' encontre de la société [8] qui n'y est à aucun moment, nommée. Or, l'engagement de la solidarité financière d'un donneur d'ordre est subordonné entre autre à l'existence d'un constat par procès-verbal d'une infraction de travail dissimulé ,sous-entendu le concernant, ce qui n'est pas le cas.
-le procès-verbal qui a été transmis au Parquet par l'Urssaf est censé être daté du 29/08/2014, puis est daté et censé être clôturé le 10 octobre 2014, alors que la demande d'observations qui lui a été adressée et fixant ses redressements sera du 10 avril 2015 et que les premières demandes de renseignement de l'Urssaf seront du 28 août 2014 ; de par la confusion de dates qui sont relevées sur le procès-verbal et la transmission du procès-verbal avant d'avoir réceptionné les observations de la société [8], il y a tout lieu de penser que l'Urssaf n'a pas attendu ses éléments de réponse pour se faire son opinion sur les redressements à opérer et que la lettre d'observations qui lui sera adressée le 10 avril 2015, n'aura été que de pure forme sans aucun respect du contradictoire et des droits de la défense ; l'Urssaf n'avait pas l'intention de prendre en compte ses arguments et la décision de lui appliquer la solidarité financière était déjà décidée le 28 août 2014, date à laquelle il était sollicité ses observations et que lui était demandé la communication de pièces.
-elle a respecté les dispositions légales et la liste des documents qu'elle a sollicités dans le cadre de la conclusion du contrat en témoigne ; outre l'obtention de l'attestation de vigilance par rapport aux documents demandés, il ne lui appartenait pas de se renseigner plus avant et d'effectuer des investigations complémentaires.
-rien ne justifiait pour elle d'obtenir de la part de L'Atelier, qui a débuté son activité le 12 septembre 2013, la justification de ses déclarations de salaires pour des périodes postérieures à leurs relations. Elle s'est fait remettre les documents prévus au moment de la conclusion du contrat et les a vérifiés. La prestation ayant durée moins de six mois elle n'avait pas d'obligation d'aller plus loin dans ses investigations et ne saurait être tenue pour responsable et associée aux conséquences des carences de déclaration de la société [6].
-les bases sur lesquelles sont fondés les redressements sont des mouvements bancaires de la société [6] ; si par la mise en demeure dont les redressements sont contestés, elle est informée du montant qui lui est appliqué, de la période concernée, il n'est fait mention d'aucune méthode de calcul qui fait que sur 1 526 289 € de cotisations censées avoir été éludées, elle doit à elle seule 72.964 € sachant que 84 sociétés (toujours selon le procès-verbal) semblent avoir été dupées par la société [6] et devoir être redressées au titre de la solidarité financière.
-le chiffrage qui lui a été communiqué ne lui permet pas de savoir si le montant dû à chaque donneur d'ordre solidaire au prorata des travaux ou des prestations réalisées a été bien réparti, alors que le contrôle a procédé par extrapolation
Par ses conclusions écrites d' « intimé n°2 » déposées par son représentant qui s'y est oralement référé à l'audience, l'Urssaf demande à la cour de :
-débouter la société de son appel et de ses demandes,
-confirmer le jugement déféré,
-condamner la société à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles.
L'Urssaf fait valoir en substance que :
-l'existence du procès verbal de travail dissimulé à l'encontre de la société [6] est suffisant à constituer la première condition nécessaire à la mise en 'uvre de la solidarité financière de la société [8] dont elle découle.
-la procédure de mise en 'uvre de la solidarité financière du donneur d'ordre prévoit l'envoi d'une lettre d'observations à celui-ci, et elle n'est pas tenue d'y joindre, au titre du contradictoire, le PV constatant le délit de travail dissimulé à l'origine du redressement litigieux.
-le procès verbal de travail dissimulé à l'encontre de la société [6] est du 30 octobre 2014 ; il précède la lettre du 28 août 2014 et la lettre d'observations du 10 avril 2015 exclusivement destinées à la société [8].
-les documents devaient être fournis dès la conclusion du contrat, et les attestations fournies à la [8] par la société l'Atelier sont incohérentes et n'ont donc pas été vérifiées par la première.
-la procédure de contrôle de la société l'Atelier est close et définitive sans que quiconque ne puisse revenir sur ses conclusions factuelles et chiffrées.
-l'inspecteur a détaillé son chiffrage proratisé, en précisant le chiffre d'affaires réalisé par l'Atelier, le chiffre d'affaires réalisé par l'Atelier avec [8] et le montant proratisé des cotisations globales éludées.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 11 mai 2022 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
SUR CE, LA COUR
Selon l'article L. 8222-1 du code de la sécurité sociale, « toute personne vérifie lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant minimum en vue de l'exécution d'un travail, de la fourniture d'une prestation de services ou de l'accomplissement d'un acte de commerce, et périodiquement jusqu'à la fin de l'exécution du contrat, que son cocontractant s'acquitte :
1° des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;
2° de l'une seulement des formalités mentionnées au 1°, dans le cas d'un contrat conclu par un particulier pour son usage personnel, celui de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, de ses ascendants ou descendants. »
L'article L 8222-2 du même code énonce que « toute personne qui méconnaît les dispositions de l'article L. 8222-1, ainsi que toute personne condamnée pour avoir recouru directement ou par personne interposée aux services de celui qui exerce un travail dissimulé, est tenue solidairement avec celui qui a fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé :
1° Au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations dus par celui-ci au Trésor ou aux organismes de protection sociale ;
2° Le cas échéant, au remboursement des sommes correspondant au montant des aides publiques dont il a bénéficié ;
3° Au paiement des rémunérations, indemnités et charges dues par lui à raison de l'emploi de salariés n'ayant pas fait l'objet de l'une des formalités prévues aux articles L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche et L. 3243-2, relatif à la délivrance du bulletin de paie ».
En application de ces textes, l'article D. 8222-5 du code de la sécurité sociale précise ainsi que : « La personne qui contracte, lorsqu'elle n'est pas un particulier répondant aux conditions fixées par l'article D. 8222-4, est considérée comme ayant procédé aux vérifications imposées par l'article L. 8222-1 si elle se fait remettre par son cocontractant, lors de la conclusion et tous les six mois jusqu'à la fin de son exécution :
1° Une attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale prévue à l'article L. 243-15 émanant de l'organisme de protection sociale chargé du recouvrement des cotisations et des contributions datant de moins de six mois dont elle s'assure de l'authenticité auprès de l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale.
2° Lorsque l'immatriculation du cocontractant au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers est obligatoire ou lorsqu'il s'agit d'une profession réglementée, l'un des documents suivants :
a) Un extrait de l'inscription au registre du commerce et des sociétés (K ou K bis) ;
b) Une carte d'identification justifiant de l'inscription au répertoire des métiers ;
c) Un devis, un document publicitaire ou une correspondance professionnelle, à condition qu'y soient mentionnés le nom ou la dénomination sociale, l'adresse complète et le numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à une liste ou un tableau d'un ordre professionnel, ou la référence de l'agrément délivré par l'autorité compétente ;
d) Un récépissé du dépôt de déclaration auprès d'un centre de formalités des entreprises pour les personnes en cours d'inscription. »
Les documents énumérés par l'article D. 8222-5 du code du travail sont les seuls dont la remise permet à la personne dont le cocontractant est établi en France, lorsqu'elle n'est pas un particulier répondant aux conditions fixées par l'article D. 8222-4, de s'acquitter de l'obligation de vérification mise à sa charge par l'article L. 8222-1.
Dès lors qu'il est constaté qu'une société ne s'est pas fait remettre par son cocontractant les documents mentionnés par le premier de ces textes ou qu'elle n'a pas procédé aux vérifications qui lui incombaient en vertu du dernier, elle est tenue à la solidarité financière prévue par l'article L. 8222-2.
La mise en oeuvre de la solidarité à laquelle est tenue le donneur d'ordre en application L. 8222-2 du code du travail est subordonnée à l'établissement d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé à l'encontre du sous-traitant cocontractant.
En l'espèce un procès-verbal pour délit de travail dissimulé (PV 280/2014) a été établi le 10 octobre 2014 (date de sa clôture) à l'encontre de la société l'Atelier sous-traitant cocontractant entre autre de la société [8], suite à un contrôle initié dès le 19 février 2014 ; même si dans son courrier adressé à la société [8] le 28 août 2014 (à laquelle il était demandé de fournir les documents de vigilance et de faire cesser la situation de travail dissimulé avec l'Atelier) l'Urssaf indiquait que le PV de travail dissimulé « a été établi et transmis au Parquet », il apparaît que le procès-verbal pour délit de travail dissimulé n° 280/2014, au regard de son contenu faisant référence à des vérifications ou constatations opérées postérieurement au 28 août 2014, a bien été établi et cloturé le 10 octobre 2014.
L'existence d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé établi à l'encontre de la société l'Atelier sous-traitant cocontractant de la société [8], est donc constante, et il importe peu en la matière que le contrôle ait été initié au regard de sous traitants d'une société [7], dès lors qu'il a révélé le travail dissimulé de la société l'Atelier dont toute l'ampleur est précisée au dit procès verbal, et que celui-ci mentionne bien que la société [6] était en relation pour des commandes au moins égales à 3 000 euros avec 84 sociétés donneurs d'ordre s'étant vues remettre des attestations falsifiées, dont la société [8] listée au tableau joint en annexe du procès verbal.
Le 10 avril 2015, l'Urssaf a notifié à la société [8] une lettre d'observations concernant la mise en oeuvre de sa solidarité financière avec son sous-traitant l'Atelier, exposant la situation de travail dissimulé par dissimulation de salariés établie à l'encontre de l'Atelier et le montant des cotisations éludées par celle-ci, constatant le manquement de la société [8] à son devoir de vigilance, et détaillant le montant des cotisations éludées mis à la charge de cette dernière au prorata de sa facturation.
La solidarité financière du donneur d'ordre n'est pas subordonnée à la communication préalable au donneur d'ordre du procès-verbal pour délit de travail dissimulé, établi à l'encontre du cocontractant, lequel procès verbal n'a pas à être joint à la lettre d'observations, étant précisé qu'en l'espèce, l'organisme de recouvrement a produit ce procès-verbal devant la juridiction de sécurité sociale.
Il apparaît ainsi que l'Urssaf a satisfait à ses obligations résultant des dispositions de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale, dans le cadre d'une procédure diligentée de manière régulière, sans violation de celle-ci, aucune atteinte au contradictoire ne pouvant lui être reprochée, ayant :
- informé la société de la situation de travail dissimulé établie à l'encontre de son sous traitant l'Atelier par courrier du 28 août 2014, puis recueilli et analysé les documents transmis par la société au titre de la vigilance,
-notifié à la société par lettre d'observations du 10 avril 2015 le manquement constaté à son devoir de vigilance, et le montant du redressement envisagé,
-répondu par courrier du 16 juin 2015 aux observations de la société formulées le 07 mai 2015.
Les moyens de la société tirés du manquement au contradictoire et de l'irrégularité de la procédure, ou tenant au PV de travail dissimulé ne sauraient donc prospérer.
La société [6] a facturé à la [8] ses prestations de sous traitance pour celle-ci du 24 octobre 2013 au 15 avril 2014.
Il résulte de la lettre d'observations et du courrier de réponse de l'Urssaf du 16 juin 2015 que la société a transmis à l'Urssaf comme documents au titre de son devoir de vigilance un extrait K bis de la SARL [6], ainsi que son attestation du 26 novembre 2013, le n° Siren mentionné sur l'extrait Kbis ([N° SIREN/SIRET 3]) étant différent de celui porté sur l'attestation ([N° SIREN/SIRET 2]).
La simple comparaison sur le site de l'Urssaf du numéro siren mentionné sur l'extrait K bis du sous-traitant avec celui figurant sur l'attestation litigieuse aurait permis à la société de détecter une incohérence et de découvrir que cette attestation correspondait à la société [10] et non à celle de son sous-traitant. Si la société avait ainsi respecté son obligation de vigilance, elle aurait pu découvrir que son sous-traitant lui fournissait une attestation falsifiée à partir d'une attestation d'une autre société afin de pouvoir contracter et aurait pu en conséquence prendre les mesures idoines dès le début de la sous-traitance.
Au surplus, la société a également transmis à l'Urssaf une seconde attestation du 03 février 2014 dont le n° Siren est là encore différent de celui porté sur l'extrait Kbis de l'Atelier, et une simple vérification sur le site de l'Urssaf lui aurait permis là encore de constater que les informations relatives à l'attestation sont différentes de celles inscrites sur le site Urssaf (ce dernier établissant en réalité une masse salariale nettement moins importante).
Il s'ensuit que n'ayant pas procédé aux vérifications préalables qui lui incombaient dès l'origine de la relation contractuellle, la société n'a pas satisfait à son obligation de vigilance, de sorte qu'elle est tenue à la solidarité financière prévue par l'article L.8222-2 du code de la sécurité sociale.
L'article L.8222-3 du code du travail dispose : « Les sommes dont le paiement est exigible en application de l'article L. 8222-2 sont déterminées à due proportion de la valeur des travaux réalisés, des services fournis, du bien vendu et de la rémunération en vigueur dans la profession. »
Il résulte du PV de travail dissimulé que la masse salariale dissimulée par la société [6] représente 2 673 227 euros, correspondant à 1 526 289 euros de cotisations éludées sur 2013 et 2014.
L'Urssaf a comparé le chiffre d'affaires TTC total réalisé par l'Atelier en 2013 et en 2014 au chiffre d'affaires TTC réalisé par l'Atelier chez la [8] à partir des facturations, établissant que ce dernier représentait 5,84 % du CA total 2013 et 4,59 % du CA total 2014.
L'application de ces ratios a permis au service du contrôle de calculer précisément le montant de la quote-part de cotisations à charge de la société [8], à savoir 13 594 € pour 2013 (232 958 X 5,84%) et 59370 € pour 2014 (1 293 341 X 4,59 %) comme détaillé à la lettre d'observations du10 avril 2015, soit un total de 72 964 euros, repris en principal à la mise en demeure du18 juillet 2016 se référant à la lettre d'observations qui permettait à la société de connaître de façon détaillée les modalités de calcul appliquées.
Dès lors, l'Urssaf a parfaitement justifié le calcul effectué par le service du contrôle conformément aux dispositions de l'article L 8222-3 du code du travail conduisant en cas de pluralité de donneurs d'ordre à pouvoir proratiser les cotisations à charge en pourcentage de la masse salariale dissimulée ou du chiffre d'affaires réalisé par les salariés dissimulés.
La critique du chiffrage émise par la société ne peut qu'être rejetée.
Les moyens invoqués par la société [8] ayant tous été rejetés, il convient de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Succombant en appel, la société sera condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à l'Urssaf une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DÉCLARE l'appel recevable;
CONFIRME le jugement déféré;
DEBOUTE la SAS [8] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS [8] à payer à l'Urssaf Ile de France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE la SAS [8] aux dépens d'appel.
La greffière Le président