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30/09/2022 | FRANCE | N°18/00459

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 30 septembre 2022, 18/00459


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 30 Septembre 2022



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00459 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B4YSB



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 17/00469



APPELANTE

SARL [8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Sandra OHA

NA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050 substituée par Me David HONORAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0122



INTIMEES

CPAM 93 - SEINE SAINT DENIS

SERVICE CONTENTIEUX
...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 30 Septembre 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00459 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B4YSB

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 17/00469

APPELANTE

SARL [8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Sandra OHANA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050 substituée par Me David HONORAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0122

INTIMEES

CPAM 93 - SEINE SAINT DENIS

SERVICE CONTENTIEUX

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

CPAM 75

DIRECTION DU CONTENTIEUX ET DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE

[Adresse 7]

[Localité 3]

non comparante et non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRET :

- RENDU PAR DEFAUT

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la S.A.S. [8] d'un jugement rendu le 19 novembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis et à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [C] [E] a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 30 mai 2014 ; que le 7 juillet 2014, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris a informé la S.A.S. [8] de sa décision de prendre en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable, la société a saisi le tribunal.

Par jugement en date du 10 novembre 2017, le tribunal a :

déclaré recevable le recours de la S.A.S. [8] et dit ce dernier mal fondé ;

déclaré bien fondé la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris confirmant la décision du 7 juillet 2014 de prendre en charge l'accident du travail déclaré par M. [C] [E] au titre de la législation sur les risques professionnels ;

déclaré opposable à la S.A.S. [8] la décision du 7 juillet 2014 de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris de prise en charge de l'accident du travail déclaré par M. [C] [E] le 30 mai 2014 au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le tribunal a considéré que l'enquête menée par la caisse à la suite de l'accident avait pu déterminer que la société était l'employeur réel de la victime, notamment au regard du témoignage d'un autre salarié. Il a relevé que la société ne produisait pas le contrat de prestations de service qu'elle aurait conclu avec la victime ni le listing des déclarations préalables d'embauche, ce qui aurait permis de vérifier ses affirmations quand au non recrutement de M. [C] [E]. Il a retenu enfin que la société ne démontrait pas avoir déposé plainte à l'encontre de la victime qu'elle accusée d'avoir emprunté une autre identité. Selon le témoignage qu'il a retenu, il est indiqué que M. [C] [E] se trouvait dans les locaux de la société en situation de travail et que la société ne démontrait pas l'inexistence du lien de subordination.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 8 décembre 2017 à la S.A.S. [8] qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 8 janvier 2018.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la S.A.S. [8] demande à la cour de :

censurer le jugement prononcé par le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale de Bobigny en date du 10 novembre 2017 en ce qu'il a déclaré bien fondée la décision implicite de rejet de la Commission de recours amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris confirmant la décision du 7 juillet 2014 de prendre en charge l'accident du travail déclaré par M. [C] [E] ;

ce faisant,

lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de l'accident du travail effectuée le 30 mai 2014 par M. [C] [E].

Elle expose que son activité est la vente de tous articles et produits, à l'import ou à l'export, en France et à l'étranger, toutes prestations pouvant découler de ces articles et produits, le service audiotel, toutes opérations industrielles, commerciales et financières, mobilières et immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social et à tous objets similaires ou connexes, la participation de la Société, par tous moyens, à toutes entreprises ou sociétés créées ou à créer, pouvant se rattacher à l'objet social, notamment par voie de création de sociétés nouvelles, d'apport, commandite, souscription ou rachat de titres ou droits sociaux, fusion, alliance ou association en participation ou groupement d 'intérêt économique ou de location gérance ; qu'elle conteste avoir été l'employeur de M. [C] [E] ; que ce dernier s 'est présenté sous l'identité de Monsieur [O] [L], pour le compte d'une société dénommée [6], dont il est gérant, et qu'il s 'est proposé d'effectuer, ponctuellement, divers travaux de préparation de commandes ; qu'il s 'agissait d'un contrat de prestations de services entre nos deux sociétés ; que M. [C] [E] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Bobigny afin de voir caractériser l'existence d'un contrat de travail, et, pour ce faire, entend exciper de l'existence d'une procédure pénale qui serait en cours, mais qui n'a toujours pas abouti.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis demande à la cour de :

dire et juger que les faits survenus le 30 mai 2014 à M. [C] [E] constituent un accident du travail opposable à la S.A.S. [8] ;

débouter la S.A.S. [8] de l'ensemble de ses demandes.

Elle expose que M. [C] [E] lui a fait parvenir une déclaration d'accident du travail établie le 5 juin 2014 ; que sur ce document est mentionnée la S.A.S. [8] en qualité d'employeur ; que la société ne démontre pas ses affirmations selon lesquelles elle n'est pas l'employeur de M. [C] [E] ; que les témoignages recueillis pendant l'instruction du dossier démontrent l'existence de ce lien de subordination ; que la déclaration d'accident du travail indique que M. [C] [E] s'est blessé à l''il avec un tournevis en montant une cuve de toilettes à la demande de son employeur ; que le collègue de travail de l'assuré indique avoir été témoin direct des faits déclarés ; que les pompiers sont venus sur place et ont emmené l'assuré aux urgences ophtalmologiques ; que le Docteur [A] précise dans son courrier adressé au médecin traitant de M. [C] [E] que ce dernier a été hospitalisé pendant cinq jours suite à ces événements ; qu'ainsi, la matérialité du fait accidentel ne fait ici aucun doute.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris n'a pas comparu ni conclu.

SUR CE :

- sur l'existence d'un lien de subordination entre M. [C] [E] et la S.A.S. [8]

La preuve d'un contrat de travail est libre. Elle suppose la démonstration par la partie qui l'invoque de la preuve d'un lien de subordination entre une personne physique et une personne morale ou physique. Il se caractérise par la démonstration d'une tâche confiée par l'employeur présumé, d'une rémunération convenue et d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction.

Constituent à cet égard des indices ;

le respect de directives et son corollaire le pouvoir de contrôle de l'employeur ;

les contraintes d'horaires ;

le lieu d'exécution du travail ;

la fourniture du matériel ;

l'intégration à un service organisé ;

la subordination ou dépendance économique.

En l'espèce, pour justifier l'existence d'un contrat de travail, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis dépose :

- une attestation de Mme [F] [G] indiquant que M. [C] [E] se rendait tous les matins à 9 heures au siège social de la S.A.S. [8] et qu'elle allait le rechercher tous les soir à 19 heures ;

- une attestation de M. [Z] [U] indiquant qu'il allait chercher M. [C] [E] à son travail le plus souvent et qu'il avait commencé à s'y rendre plus d'un an avant la date d'établissement de l'attestation le 5 juin 2014 ;

- une attestation de M. [S] [M] précisant que l'intéressé travaillait dans la même société dès avant sa propre entrée dans l'entreprise.

La S.A.S. [8] indique en réponse que M. [C] [E] s'était présenté sous l'identité de M. [L] [O], gérant de la S.A.R.L. [6] et qu'elle avait conclu avec cette dernière un contrat de prestation de services portant sur la préparation de commandes. Elle dépose à cet égard les statuts de la société, son extrait d'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés et la photocopie du titre d'identité présenté.

La cour retient que M. [C] [E] respectait des contraintes horaires rappelées par les témoins, à savoir une présente régulière de 9 heures à 19 heures au sein de la S.A.S. [8]. Le lieu de travail était fixe, au sein de l'entreprise pour une activité de préparation de commande. Il s'ensuit que la S.A.S. [8] fournissait le matériel nécessaire à la réalisation de la tâche confiée.

Les attestations déposées démontrent que M. [C] [E] ne travaillait qu'au profit d'une seule personne morale qui lui versait ainsi l'intégralité de ses revenus. La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis démontre ainsi le lien de dépendance économique.

Ces éléments concordants font présumer l'existence d'un contrat de travail entre la S.A.S. [8] et M. [C] [E],

A cet égard, la S.A.S. [8] ne justifie pas, malgré un an de relations contractuelles, de l'impossibilité de formaliser le contrat de sous-traitance. En outre, elle ne dépose aucune pièce justifiant l'externalisation de l'emploi (absence de savoir-faire spécifique de l'entreprise prêteuse, travail effectué avec son matériel et sous ses ordres, occupation d'un emploi qui revenait normalement à ses salariés), alors que les objets sociaux des deux sociétés étaient proches (vente d'articles notamment en France et prestations pouvant découler de ces articles et produits) (Cass. crim., 19 mars 2013, n° 11-86.552).

En conséquence, la preuve par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis de l'existence d'un contrat de travail entre la S.A.S. [8] et M. [C] [E] est rapportée.

- sur la preuve d'un accident du travail

Il résulte des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci (Soc., 2 avril 2003, n° 00-21.768, Bull. no132). Les juges du fond apprécient souverainement si un accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail (Soc., 20 décembre 2001, Bulletin civil 2001, V, n° 397).

Le salarié doit ainsi établir autrement que par ses propres affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel (Soc., 26 mai 1994, Bull. n°181) ; il importe qu'elles soient corroborées par d'autres éléments (Soc., 11 mars 1999, n° 97-17.149, Civ 2ème 28 mai 2014, n° 13-16.968).

En revanche, dès lors qu'il est établi la survenance d'un événement dont il est résulté une lésion aux temps et lieu de travail, celui-ci est présumé imputable aux travail, sauf pour celui entend la contester de rapporter la preuve qu'elle provient d'une cause totalement étrangère au travail.

En l'espèce, M. [C] [E] a déclaré avoir été victime d'un accident du travail survenu le 30 mai 2014 à 18 heures 30 au siège social de la S.A.S. [8]. Il indique qu'alors qu'il montait une cuve de toilettes avec un tournevis à la demande de l'employeur, il s'était blessé gravement à l'oeil.

Selon les attestations déposées par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis, l'horaire correspond à un horaire habituel de travail de M. [C] [E]. L'accident est survenu au sein de l'entreprise. Ces éléments sont corroborés par le compte-rendu médical du Docteur [H] [A] qui indique avoir reçu aux urgences ophtalmiques le salarié le jour même avec une intervention chirurgicale dans la nuit.

Ces éléments extrinsèques corroborent donc les déclarations du salarié.

La matérialité de l'accident du travail est donc démontrée.

Le jugement déféré sera donc confirmé.

La S.A.S. [8], qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Déclare recevable l'appel de la S.A.S. [8] ;

Confirme le jugement rendu le 19 novembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny en toutes ses dispositions ;

Condamne la S.A.S. [8] aux dépens d'appel.

La greffière,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 18/00459
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;18.00459 ?
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