RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 30 Septembre 2022
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00846 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B42ZO
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 17-00610/B
APPELANT
Monsieur [W] [K]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Guillaume COUSIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0840
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/006509 du 08/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMES
MUTUELLE [3], venant aux droits de la SOCIÉTÉ [5] venant elle-même aux droits de la FONDATION HOSPITALIÈRE [4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Sylvie POUPEE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0058
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'OISE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre
Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre
Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller
Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le vendredi 02 septembre 2022, prorogé le vendredi 30 septembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre et par Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par [W] [K] (l'assuré) d'un jugement rendu le 10 novembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la société [3], venant aux droits de la société [5] venant elle-même aux droits de la Fondation hospitalière [4] (la société), en présence de la CPAM de l'Oise (la caisse).
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les faits de la cause ayant été correctement rapportés par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler qu'après prise en charge par la caisse au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail dont il avait été victime le 18 juin 2012, l'assuré a intenté le 30 octobre 2013 une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ; que par jugement du 10 novembre 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny a dit irrecevable l'assuré en son recours, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires.
L'assuré a interjeté appel de ce jugement le 4 janvier 2018, lequel lui avait été notifié le 15 décembre 2017.
Par ses conclusions récapitulatives écrites déposées à l'audience par son conseil qui s'y est oralement référé, l'assuré demande à la cour de :
- Infirmer le jugement de première instance ;
- Déclarer recevable et bien-fondé le recours qu'il a introduit ;
- Dire et juger que l'accident du travail dont il a été victime le 18 juin 2012 est dû à une faute inexcusable de la société ;
En conséquence,
- Ordonner une mesure d'expertise médicale, avec la mission d'expertise suivante :
* Recueillir les dires et doléances de l'assuré, en lui faisant préciser notamment les conditions d'apparition et l'importance des douleurs et de la gêne fonctionnelle, ainsi que leurs conséquences sur sa vie quotidienne ;
* Rappeler que cette évaluation doit prendre en compte l'ensemble des rechutes et pathologies prises en charge par la caisse au titre de l'accident du 18 juin 2012 ;
* Donner à la cour une appréciation sur le déficit fonctionnel temporaire, à savoir la perte de qualité de vie et celle des joies usuelles de la vie courante, en ce compris le préjudice d'agrément, qu'a rencontré l'assuré avant la consolidation de son état ;
* Indiquer si l'assuré a eu besoin de l'assistance d'une tierce personne avant la consolidation de son état et, dans ce cas, pendant combien de temps et avec quel degré de spécialisation ;
- Dégager, en les spécifiant, les éléments propres à justifier une indemnisation au titre des souffrances physiques et morales de manière globale, c'est-à-dire endurées avant comme après la consolidation, en qualifiant ce préjudice de très léger, léger, modéré, moyen, assez important, important ou très important ;
* Évaluer le préjudice esthétique de manière globale, c'est-à-dire avant et/ou après la consolidation en qualifiant ce préjudice de très léger, léger, modéré, moyen, assez important, important ou très important ;
* Évaluer distinctement le préjudice d'agrément après la consolidation et donner les éléments constitutifs retenus pour ce chef de préjudice ;
* Préciser s'il a existé un préjudice sexuel de manière globale, c'est-à-dire avant et/ou après la consolidation et, dans ce cas, préciser la nature de l'atteinte et sa durée ;
* Dire s'il existe sur le plan médical un préjudice exceptionnel, lequel est défini comme un préjudice atypique directement lié aux séquelles de l'accident et dont reste atteint l'assuré ;
- Lui allouer d'ores et déjà une provision de 5 000 euros à valoir sur son préjudice ;
- Dire que la caisse fera l'avance de cette somme ;
- Condamner la société à lui payer la somme de 3 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamner aux dépens d'exécution ;
- Le renvoyer devant l'organisme compétent pour la liquidation de ses droits.
Par ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, la société demande à la cour, au visa de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, de :
- Confirmer le jugement entrepris ;
Subsidiairement,
- Juger qu'elle n'a commis aucune faute inexcusable ;
- Débouter l'assuré de toutes ses demandes ;
- À titre subsidiaire, débouter l'assuré de sa demande de provision ;
- Condamner l'assuré aux entiers dépens ;
- Dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, maître [I] [Y] pourra recouvrer directement les frais dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision.
Par ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, la caisse s'en rapporte à justice sur la recevabilité et sur l'existence de la faute inexcusable, et demande à la cour, en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur la demande d'expertise dans la limite de la notification de guérison au 14 novembre 2012 qui devra être prise en compte par l'expert pour la réalisation de sa mission, de débouter l'assuré de sa demande de provision et de dire qu'elle pourra récupérer auprès de la société les indemnités susceptibles d'être attribuées à l'assuré en réparation de son préjudice lié à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions qu'elles ont soutenues oralement et déposées à l'audience du 23 mai 2022 .
SUR CE :
Sur la recevabilité du recours :
Le tribunal a déclaré, d'office, l'action de l'assuré irrecevable faute de démontrer qu'il avait saisi la caisse conformément à l'article L. 452-4 du code de la sécurité sociale.
Néanmoins, en droit, la tentative de conciliation prévue à l'article précité n'est pas requise à peine d'irrecevabilité de la demande contentieuse, de sorte que l'action de l'assuré était recevable, aucun autre moyen d'irrecevabilité n'étant soulevé par ailleurs.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé de ce chef.
Sur la faute inexcusable :
Au soutien de son appel, l'assuré fait valoir pour l'essentiel que :
- L'accident a été pris en charge par la caisse sans que la société n'émette aucune réserve ;
- Il est inexact de dire que le centre d'accueil de jour de l'établissement ne recevait que des patients parfaitement autonomes mais au contraire ce centre pouvait accueillir des patients ne pouvant se déplacer seuls, nécessitant un fauteuil roulant ou non autonomes pour la verticalisation ;
- En outre si les patients avaient été parfaitement autonomes l'établissement n'aurait pas rémunéré un brancardier à cette fin ;
- La fiche de fonction de brancardier décrit ses fonctions : il doit notamment soutenir les usagers les moins autonomes, les assister dans leurs déplacements, les transférer d'un lieu de soins à un autre et d'un équipement à un autre, etc. ;
- Le médecin du travail le 20 novembre 2012 a indiqué qu'il devait être aidé pour les manipulations de patients de plus de 90 kilos ;
- Il est donc certain que la lésion au dos apparue au cours du transfert d'un patient est survenue au cours de ses fonctions habituelles ;
- Sur la conscience du danger, il est écrit dans sa fiche de fonction qu'il devait aider et soutenir les patients les moins autonomes dans leurs déplacements mais aussi pour les transferts d'un équipement à un autre ;
- Le document unique d'évaluation des risques de l'établissement pour les brancardiers faisait état du risque lié à la « manutention (problèmes de dos) ;
- Néanmoins la société n'a jamais mis le moindre matériel à sa disposition que ce soit un brancard ou un lève-malade ;
- Le 3 février 2015 l'inspecteur du travail a constaté cette carence ;
- L'attestation de la directrice de l'établissement ne saurait être retenue ;
- L'employeur essaie de se défausser sur le médecin du travail qui n'aurait jamais préconisé l'achat de lève-malade ni émis de recommandations sur un risque lié au transfert de patients par le brancardier, sans l'établir ;
- Le document unique d'évaluation des risques ne prévoit pas que le thérapeute assiste systématiquement le brancardier pour le transfert d'un patient en fauteuil roulant et la société n'établit pas d'avoir donné de telles instructions à ses salariés ;
- Au surplus il n'est pas établi que cette assistance aléatoire par un kinésithérapeute soit une mesure de sécurité satisfaisante pouvant efficacement remplacer le recours à du matériel adéquat ;
- Depuis son embauche en 2008, il n'a reçu aucune formation « gestes et postures » à la manutention de charges lourdes ou même une formation générale à la sécurité ;
- Aucune faute ne peut lui être reproché ;
- C'est donc la faute inexcusable de la société qui est à l'origine unique de l'accident dont il a été victime le 18 juin 2012.
En réplique l'employeur fait valoir en substance que :
- L'assuré était aidé par les thérapeutes, de telle sorte que les préconisations de la médecine du travail indiquant qu'il devait être aidé pour la manipulation des patients de plus de 90 kilos était respectée ;
- L'assuré travaillait au sein de l'hôpital de jour accueillant environ 45 patients par matinée et par après-midi afin de réaliser des soins ou examens sans devoir être hospitalisés plusieurs jours, de sorte que ces patients sont autonomes, vivent à leur domicile et se déplacent par leurs propres moyens ;
- Il ne s'agit donc pas de transfert de personnes invalides nécessitant un brancard ou d'être portées, il n'y a jamais de port complet de patient ;
- Les attributions de l'assuré consistaient à aider au déplacement des patients d'une salle à une autre de l'hôpital de jour, sans toutefois avoir à les porter, le déplacement des patients moins autonomes se réalisant à l'aide d'un fauteuil roulant ;
- Le transfert du fauteuil à la table de soins était effectué par les thérapeutes, le brancardier n'intervenant pas sur cette tâche qui revenait au thérapeute ;
- Les patients pouvaient se déplacer sans être totalement portés ;
- Un patient pouvant être apte ou non à aider à son déplacement, son transfert pouvait être réalisé avec l'assistance d'un tiers brancardier, infirmier ou thérapeute ;
- Le port complet d'un patient à l'aide d'un dispositif mécanique (brancard, lève-personne) n'est nécessaire que si la personne ne peut pas porter son poids sur ses membres inférieurs ;
- Au cas d'espèce il n'y a jamais eu de transport de patients ;
- L'assuré s'est vu confier une tâche sans danger, ne nécessitant aucune expérience professionnelle au-delà de celles requises par la fiche de poste ;
- Il devait assister un patient dans ses déplacements sans que cela ne soit source d'aucune difficulté ou de manipulation particulière ;
- L'assuré a procédé à une déclaration de maladie professionnelle relative à ces lombalgies chroniques sur hernie discale qui a été écartée par la caisse ;
- Le lieu d'accueil est adapté, il y a un ascenseur et aucun obstacle anormal lors des déplacements ;
- Le salarié n'était pas soumis à des températures anormales ni confronté à des risques particuliers ;
- Aucun matériel n'était nécessaire à la tâche de l'assuré dans un établissement qui ne reçoit que des patients valides et autonomes et où l'assuré n'a jamais eu à porter un patient mais simplement à l'aider au transfert ou lui apporter un soutien ;
- Le document unique d'évaluation des risques n'envisage pas le risque lié à la manipulation du patient ;
- Le médecin du travail, présent à chaque CHSCT et ayant connaissance des postes de travail du centre, n'a jamais préconisé l'installation de lève-malade ni émis de recommandations sur un risque lié au transfert des patients par le brancardier ;
- À l'issue des trois visites de contrôle périodique (17 février 2009, 11 février 2010, 27 juillet 2011) l'assuré a toujours été reconnu apte à son emploi et jamais aucune recommandation n'a été émise quant à l'utilisation d'un matériel autre que celui mis à sa disposition ;
- Les préconisations de la médecine du travail émises à la suite de la visite de reprise ne prévoyaient pas le recours à un matériel spécifique comme un lève-personne ;
- Le document unique d'évaluation des risques ne caractérise pas de risques liés à la manipulation et ne répertorie pas ce danger, de sorte que l'employeur ne pouvait pas en avoir conscience ;
- La lettre de l'inspection du travail du 3 février 2015 émet un avis postérieur de 3 ans au fait en cause et ne repose que sur les allégations de l'assuré ;
- L'inspection du travail n'a jamais mis en demeure l'employeur de mettre à la disposition de son salarié du matériel autre que celui existant ;
- L'assuré ne rapporte la preuve d'aucune anomalie détectée tant dans l'organisation du travail que dans son accomplissement ;
- Il ne peut être reproché à la société aucun défaut d'entretien du matériel, aucune mise en danger du salarié, aucune infraction à la réglementation en matière de sécurité.
La caisse s'en rapporte à prudence de justice.
Il résulte de l'application combinée des articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail que le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié ou de la maladie l'affectant. Il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire, même non exclusive ou indirecte, pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, étant précisé que la faute de la victime, dès lors qu'elle ne revêt pas le caractère d'une faute intentionnelle, n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable.
Il incombe néanmoins au salarié de rapporter la preuve de la faute inexcusable de l'employeur dont il se prévaut ; il lui appartient en conséquence de prouver, d'une part que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il exposait ses salariés et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires concernant ce risque, d'autre part que ce manquement tenant au risque connu ou ayant dû être connu de l'employeur est une cause certaine et non simplement possible de l'accident ou de la maladie.
En l'espèce, il est établi que l'assuré a été embauché à durée indéterminée par la société le 7 janvier 2008 en qualité de brancardier (pièce n°1 de l'assuré). Le 11 janvier 2008, l'assuré a été déclaré apte à son poste à la suite de la visite médicale d'embauche. L'assuré a été reconnu apte à son poste sans préconisation de la médecine du travail à l'issue des visites de contrôle périodiques des 17 février 2009, 11 février 2010 et 25 juillet 2011 (pièces n°4 de la société). Il a été licencié le 16 août 2013 (pièce n°5 de l'a société).
Il est constant que l'assuré a été victime le 18 juin 2012 d'un accident du travail, subissant aux temps et lieu du travail une « douleur lombaire » dans les circonstances suivantes : « lors d'un transfert de patient en salle de kinésithérapie, [il] s'est fait mal au dos » (pièce n°1 de la caisse). La lésion a été médicalement constatée par certificat médical initial du 20 juin 2012 diagnostiquant un « lumbago aigu sur lumbago chronique » (pièce n°2 de la caisse). L'état de santé de l'assuré a été déclaré guéri au 14 novembre 2012 (pièce n°5 de la caisse).
L'assuré affirme que l'accident est survenu du fait qu'il devait porter seul des patients sans matériel adapté alors qu'une telle manutention présentait des risques pour le dos, ce que savait parfaitement son employeur.
Cependant, l'assuré n'établit pas par ses pièces les circonstances précises de l'accident dont il se prévaut au soutien de la faute inexcusable de l'employeur. En outre jusqu'à la visite du 20 novembre 2012, le médecin du travail a chaque année déclaré l'assuré apte à son poste sans former la moindre recommandation ou observation. Ce n'est qu'à la suite de l'accident en cause que le médecin du travail a indiqué que l'assuré devait être aidé pour les manipulations de patients de plus de 90 kilos. Aucune préconisation relative à un matériel spécifique tel qu'un brancard ou un lève-personne n'a été émise par la médecine du travail, ni avant ni après l'accident.
Il ressort de la fiche de poste (pièce n'°18 de l'assuré) que son travail consistait, notamment, à « transférer d'un lieu de soins à un autre, transférer d'un équipement à un autre, accompagner les patients lors des promenades à l'extérieur et autour du Centre, aide au déshabillage et habillage, venir en soutien de l'infirmière et de la surveillance balnéo si besoin, accompagner les patients pour les consultations, mettre à jour le planning' », sa mission étant décrite dans ce document comme suit : « le brancardier aide et soutient les usagers les moins autonomes et facilite la prise en charge auprès des thérapeutes ». Ce même document précise également au titre des tâches du brancardier qu'il doit « nettoyer, selon la fréquence définie, les fauteuils roulants' ». Le port des patients n'est donc pas prévu par la fiche de poste et aucun autre document n'est versé aux débats pour attester que l'assuré a pu effectivement devoir porter des patients en entier et non pas seulement les aider ou les accompagner notamment à l'aide de fauteuils roulants.
La société verse au débat le « protocole d'accueil du patient » (sa pièce n°12) duquel il ressort que lorsque le patient arrive au Centre par des transports externes « s'il ne peut se déplacer seul, le brancardier l'accompagne au bureau des coordonnateurs de soins ». Ce même document précise plus loin que « le brancardier assure les déplacements entre les différents secteurs d'activité et les transferts si nécessaire ». Le port des patients par le brancardier n'est donc pas prévu dans le protocole de prise en charge des patients arrivant au centre.
La société verse également des attestations établies par deux salariées (ses pièces n°13 et 14), desquelles il ressort que le transfert d'un patient en fauteuil roulant se fait par le brancardier assisté par un thérapeute lorsque cela est nécessaire (« patient non autonome pour la verticalisation ») et que des fauteuils roulants, des déambulateurs et des cannes étaient mis à la dispositions des patients arrivant au Centre.
Le document unique d'évaluation des risques (pièce n°15 de la société, page 2/5) ne prévoit pas le risque lié au port ou à la manipulation de patients.
En l'absence de risque répertorié, aucune formation n'a été préconisée pour le poste de brancardier par aucune instance (médecine du travail, CHSCT, DUER).
L'assuré était donc chargé d'accomplir des opérations courantes ne présentant aucune difficulté particulière pour un brancardier devant accompagner ou aider des patients relativement autonomes, et ce, le cas échéant, à l'aide de fauteuils roulants ou d'un autre matériel léger adapté et, si nécessaire, avec l'assistance d'un thérapeute.
L'assuré ne prouve donc pas par ses productions, à l'occasion d'une activité faisant partie de ses attributions ordinaires, ne présentant pas de risque particulier, l'existence d'un risque dont la société aurait eu connaissance ou dû avoir conscience. Il n'établit donc pas un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité participant à l'accident du travail.
La demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur à l'origine de l'accident du travail et les demandes subséquentes seront dès lors rejetées.
L'assuré sera condamné aux dépens d'appel. Sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
DÉCLARE l'appel recevable ;
INFIRME le jugement déféré ;
Et statuant à nouveau,
DÉCLARE recevable l'action de [W] [K] ;
DÉBOUTE [W] [K] de l'ensemble de ses demandes, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [W] [K] aux dépens d'appel.
La greffière,La présidente,