RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 21 Octobre 2022
(n° , 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/11667 et N° RG 17/11721 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4DQZ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Juillet 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 15/01103
APPELANTE
URSSAF [Localité 2]
Division des recours amiables et judiciaires
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Mme [E] [V] en vertu d'un pouvoir général
INTIME
Monsieur [J] [P]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Florence BERNIGARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E1599 substituée par Me Pierre NESTOR, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Pascal PEDRON, Président de chambre
M. Raoul CARBONARO, Président de chambre
M. Gilles BUFFET, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par M. Pascal PEDRON, Président de chambre et Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par l'URSSAF [Localité 2] d'un jugement rendu le 5 juillet 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à M. [J] [P] et enrôlé à la cour sous le numéro 17/11667 et sur l'appel interjeté par M. [J] [P] du même jugement, enrôlé à la cour sous le numéro 17/11721.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [J] [P], de nationalité britannique, exerce son activité professionnelle d'avocats en France où il réside ; qu'il est associé du partnership [3], groupement de droit anglais fiscalement immatriculé au Royaume-Uni ; qu'il bénéficie de deux sources de revenus professionnels, ceux dégagés par son activité d'avocat exerçant France et sa part dans des bénéfices du partnership qui lui sont distribués à l'étranger ; que M. [J] [P] s'est acquitté des cotisations sociales et des contributions réclamées par l'URSSAF [Localité 2] pour les années 1999, 2000 et 2001 ; qu'à la suite d'un jugement rendu le 6 mai 2002 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans une instance l'opposant à l'URSSAF, il a procédé à une déclaration de revenus rectificatives et demandé l'exclusion de l'assiette des cotisations et contributions sociales pour l'année 2001 de ses revenus de source étrangère ; que le 14 novembre 2002, il a sollicité expressément le remboursement des cotisations et contributions sociales indûment quittées selon son analyse juridique sur les revenus de sources britanniques pour les années 1999 et 2000 ; que l'URSSAF [Localité 2] a rejeté la demande de remboursement par courrier du 3 décembre 2002 ; que le 27 mai 2014, M. [J] [P] a saisi la commission de recours amiable d'une demande de remboursement des cotisations d'allocations familiales et des contributions CSG CRDS suite à l'exclusion de ses revenus de source étrangère de l'assiette pour les années 1999, 2000 et 2001 ; que le 16 février 2015, il a saisi le tribunal en vue d'obtenir le remboursement des sommes indûment versées selon son analyse juridique pour ces trois années.
Par jugement en date du 5 juillet 2017, le tribunal a :
- déclaré la demande tendant au remboursement des contributions CSG CRDS présentée par M. [J] [P] pour l'année 2001 irrecevable ;
- accueilli la demande de remboursement des contributions CSG CRDS présentée par M. [J] [P] pour les années 1999 et 2000 ;
- condamné l'URSSAF [Localité 2] à rembourser la somme de 75 501 euros à M. [J] [P] au titre des contributions CSG et CRDS calculée sur les revenus étrangers pour les années 1999 et 2000, avec intérêt au taux légal à compter du 14 novembre 2002 ;
- sursis à statuer sur la demande de remboursement des cotisations d'allocations familiales présentées par M. [J] [P] pour les années 1999, 2000 et 2001 ;
- dit que la juridiction sera à nouveau saisie sur ce point à l'initiative de la partie la plus diligente dès que l'arrêt à intervenir sera rendu.
Le tribunal a constaté que les parties s'accordaient sur le principe de l'absence d'intégration dans l'assiette de la contribution CSG ' CRDS des revenus non salariés non agricoles d'origine étrangère. Il a donc considéré qu'il pourrait être fait droit à la demande de remboursement sous réserve d'éventuelles prescriptions.
S'agissant du remboursement pour l'année 2001, le tribunal, analysant le courrier adressé par M. [J] [P] à l'URSSAF [Localité 2] le 9 août 2002 a indiqué qu'il s'agissait d'un simple courrier déclaratif qui ne détaillait pas les éléments permettant à l'URSSAF de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation et qu'il ne constituait pas une interpellation suffisante adressée par un cotisant à un organisme de recouvrement pour venir demander restitution de cotisations indues. Il a donc considéré que l'action était prescrite.
Pour les années 1999 et 2000, le tribunal a considéré que la décision de justice du 6 mai 2002, qui a prononcé l'exclusion des revenus de source étrangère de l'assiette des cotisations d'allocations familiales, a tranché un point de droit autorisant M. [J] [P] à considérer que certaines cotisations et contributions sociales avaient été acquittées sans pour autant être dues. Cette décision est intervenue avant le 1er janvier 2004 et donc moins de deux ans avant l'entrée en vigueur de la loi du 18 décembre 2003. Conformément aux prescriptions de la circulaire du 4 février 2004, le tribunal a considéré que les dispositions de la loi nouvelle du 18 décembre 2003 étaient applicables à la décision du 6 mai 2002 et que la demande de remboursement était ouverte pour les cotisations exigibles durant les trois années précédant la date de la décision du 6 mai 2002, en plus de l'année en cours. Il a donc considéré que l'action remboursement n'était pas atteinte de prescription. S'agissant du paiement des sommes dont le remboursement est demandé, le tribunal a considéré que l'URSSAF n'avait pas adressé de mise en demeure ni de contrainte, ce qui permettait d'établir le paiement.
S'agissant de la demande de remboursement des cotisations d'allocations familiales, le tribunal a indiqué attendre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles qui a été désignée comme cour de renvoi suite à la cassation d'un arrêt dans une affaire identique, prononcée le 3 novembre 2016.
Le jugement a été notifié par lettres recommandées avec demande d'accusé de réception remises respectivement à M. [J] [P] le 16 août 2017 et à l'URSSAF [Localité 2] le 17 août 2017 qui en ont respectivement interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception le 12 septembre 2017 et par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 20 septembre 2017.
L'URSSAF [Localité 2] a interjeté appel complémentaire le 6 novembre 2020 en précisant les deux chefs de jugement critiqués.
Pour une bonne administration de la justice, les deux dossiers, respectivement enrôlés sous les numéros 17/11667 et 17/11721, seront joints sous le premier numéro.
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son représentant, l'URSSAF [Localité 2] demande à la cour de :
concernant l'année 2001 :
- confirmer le jugement rendu le 5 juillet 2017 notifié le 16 août 2017, en ce qu'il a déclaré la demande de M. [J] [P] tendant au remboursement des contributions CSG/CRDS irrecevable ;
concernant les années 1999 et 2000 :
- constater à titre principal que la procédure diligentée par M. [J] [P] n'est pas régulière au sens de l'article R 142-1 du code de la sécurité sociale en l'absence de décision administrative préalable à la saisine de la Commission de Recours Amiable ;
- constater à titre subsidiaire que cette demande est prescrite en application de l'article L243-6 du code de la sécurité sociale applicable au 14 novembre 2002 ;
- débouter M. [J] [P] de sa demande de remboursement faute de justificatif produit ;
en tout état de cause,
- infirmer le jugement du 5 juillet 2017 en ce qu'il l'a condamnée à rembourser la somme de 75 501 euros à M. [J] [P] au titre des contributions CSG/CRDS calculées sur les revenus étrangers pour les années 1999 à 2000 avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2002 ;
- rejeter toutes les autres demandes de M. [J] [P] ;
- condamner M. [J] [P] au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, M. [J] [P] demande à la cour de :
- le déclarer recevable et bien fondé en son appel limité ;
y faisant droit,
- dire que ses réclamations sont interruptives de prescription et non atteintes de forclusion ;
- juger que les revenus britanniques conventionnés sont exclus de l'assiette de la CSG et de la CRDS ;
- infirmer le jugement attaqué en ce qu'il l'a débouté de sa demande de remboursement de CSG et de CRDS indues afférentes aux revenus de l'année 2001 ;
- confirmer le jugement attaqué en ses autres dispositions ;
- débouter l'URSSAF [Localité 2] de son appel limité sur la demande de remboursement de la CSG et de la CRDS indues afférentes aux revenus des années 1999 et 2000 ;
- condamner l'URSSAF [Localité 2] à lui payer la somme de 29 015 euros au titre de CSG et de CRDS indues 2001 ;
- assortir cette condamnation de l'intérêt légal à compter du 13 novembre 2002 ;
- condamner l'URSSAF [Localité 2] à lui payer la somme de 46 486 euros au titre de la CSG et la CRDS afférentes aux revenus de l'année 1999 ;
- assortir cette condamnation de l'intérêt légal à compter du 13 novembre 2002 ;
- condamner l'URSSAF [Localité 2] à lui payer la somme de 46 043 euros au titre de la CSG et de la CRDS afférentes aux revenus de l'année 2000 ;
- assortir cette condamnation de l'intérêt légal à compter du 9 août 2002 ;
- prononcer la capitalisation des intérêts ;
- condamner l'URSSAF [Localité 2] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner l'URSSAF [Localité 2] aux entiers dépens.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 8 septembre 2022 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
SUR CE,
Sur la recevabilité de l'appel principal de M. [J] [P]
M. [J] [P] s'est domicilié chez son avocat en première instance et a ainsi demandé que la notification du jugement lui soit adressée en France. Il n'a déclaré d'adresse au Royaume-Uni que dans ses conclusions d'appel, de telle sorte que le délai pour interjeter appel était d'un mois. En l'espèce, le jugement lui a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception reçue le 16 août 2017. Il en a interjeté appel par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 20 septembre 2017. Son appel principal n'est donc pas recevable.
L'appel principal de l'URSSAF [Localité 2] ayant été formé dans le délai d'un mois de la notification est recevable, de telle sorte que l'appel incident de M. [J] [P], formé par ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience est recevable.
Sur la recevabilité de la réclamation formée au titre de l'année 2001
L'URSSAF [Localité 2] expose que pour interrompre le délai de prescription dans lequel est enfermée l'action en répétition de cotisations indues, le cotisant doit adresser à l'organisme une invitation à lui restituer les sommes qu'il a indûment acquittées. En effet, pour constituer une interpellation suffisante à cette fin, le courrier par lequel le cotisant réclame la restitution des sommes qu'il prétend indues doit lui permettre d'avoir connaissance de la nature de la cause et de l'étendue de son obligation et donc préciser notamment le montant des cotisations dont le remboursement est réclamé. Aucune demande de remboursement n'est formulée dans le courrier du 9 août 2002. Depuis un arrêt Société [4] du 28 mai 2014 (n°1317758), la Cour de cassation a remis en cause la nécessité de chiffrage de l'indu dans la demande de remboursement et exige en matière de prescription de la demande de remboursement que celle-ci revête le caractère d'une interpellation suffisante de nature à interrompre le délai de prescription. Ainsi, en matière de remboursement de cotisations indûment versées, est susceptible d'arrêter le cours de la prescription et de permettre le remboursement d'un indu, la demande qui répond aux exigences cumulatives suivantes : une demande de remboursement non prescrite (relative à des cotisations versées depuis moins de trois ans à la réception de la demande) ; une demande portant sur un paiement indu préalable et non contesté (la créance devant être certaine, liquide et exigible) ; une demande de remboursement complète c'est-à-dire explicite, motivée et déterminable à partir des éléments communiqués par le cotisant. Or. en l'espèce, le courrier d'une page du 09 août 2002 ne comportait ni pièce justificative, ni fondement juridique et encore moins de demande expresse de remboursement. En outre, les revenus de 2001 ne pouvaient légalement servir au calcul des cotisations de cette année-là, assises sur ceux de l'année 2000.
M. [J] [P] réplique avoir d'une part notifié à l'URSSAF [Localité 2] par courrier en date du 9 août 2002, les nouvelles bases déclaratives devant servir au calcul de ses cotisations et, d'autre part, expressément sollicité le calcul de ses cotisations définitives 2001 sur les nouvelles bases déclarées à la baisse devant aboutir mécaniquement à une restitution d'une partie des cotisations provisionnelles acquittées en 2001 selon le calendrier réglementaire des dates d'exigibilité applicables. Il ajoute que dans un système déclaratif tel que celui prévu à l'article R115-5 du Code de la sécurité sociale s'agissant des travailleurs non salariés, exclusif de toute autoliquidation des cotisations sociales indépendantes par le cotisant, l'administration sociale est obligée de tenir compte des déclarations primitives déposées par les cotisants dans les délais déclaratifs usuels et de traiter les réclamations portant sur l'assiette des cotisations déposées après l'échéance déclarative. Dans un tel système, il lui incombe de calculer les cotisations sur les assiettes déclarées et de rembourser, en cas d'excédent, le cotisant. La demande formelle de prise en compte des assiettes rectificatives déclarées excluant les revenus étrangers sur le fondement d'une décision de justice invoquée à l'appui de la demande du cotisant est une réclamation préalable constituant une invitation formelle à régulariser le compte cotisant et à procéder au remboursement de l'excédent de cotisation. Selon lui, une correspondance comportant, au visa d'une décision de justice postérieure à la date limite de dépôt de la déclaration commune des revenus 2001 fixée au 30 avril 2002, la déclaration rectificative des bases initialement déclarées et demandant le calcul des cotisations définitives sur ces bases rectifiées excluant les revenus de source étrangère selon le calendrier normal d'exigibilité des cotisations devant aboutir mécaniquement à la constatation d'un indu de cotisations constitue nécessairement une réclamation interruptive de prescription devant donner lieu à une décision de la part de l'administration sociale, celle-ci pouvant être explicite (prise en compte de la réclamation avec calcul des cotisations définitives sur les bases rectifiées suivi du remboursement du trop versé ou, le cas échéant, refus motivé de prise en compte de la réclamation) ou implicite (absence de prise en compte de la demande). Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que la demande de remboursement n'a pas à être chiffrée dès lors que la réclamation contient l'ensemble des éléments permettant de déterminer le montant exact des cotisations indûment versées (telle que l'assiette de calcul des cotisations et l'année concernée), sans avoir besoin de recherches extérieures (Cass. 2e Civ. 28 mai 2014 no 13-17.758). Il en conclut que la réclamation du 9 août 2001 comportant les bases déclaratives rectifiées au visa d'une décision de justice révélait suffisamment le caractère indu des cotisations initialement calculées par l'URSSAF [Localité 2] qui, étant partie au jugement invoqué à l'appui de cette réclamation, doit être considérée comme ayant reçu par erreur ou sciemment ce qui ne lui était pas dû. La réclamation en date du 9 août 2002 portant sur l'année 2001 comportant les éléments chiffrés permettant à l'administration de constater l'indu, la prescription a été valablement interrompue dans le délai de deux ans à compter de la date de paiement des cotisations provisionnelles de l'année 2001.
Il ajoute que l'URSSAF n'ayant pas pris la peine de lui répondre ni de lui notifier une décision de refus comportant les voies et délais de recours ouverts, elle ne peut lui opposer la forclusion.
L'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 applicable initialement au litige disposait que :
' La demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées (...).'
Le délai a été porté à trois ans par la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003, sous réserve que la prescription ne soit pas acquise au jour de son entrée en vigueur le 19 décembre 2003.
L'ancien article 2244 du code civil applicable à l'espèce dispose qu'une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie, signifiés à celui qu'il veut empêcher de prescrire interrompent la prescription ainsi que les délais à agir.
Pour constituer une interpellation suffisante, le courrier adressé à l'organisme de sécurité sociale doit l'être en recommandé et contenir l'ensemble des éléments permettant de déterminer le montant de l'indu (2e Civ., 28 mai 2014, pourvoi n° 13-17.758).
En l'espèce, la lettre du 9 août 2002, dont la preuve qu'elle a été adressée en lettre recommandée avec demande d'accusé de réception n'est pas rapportée faute de production de tout avis d'envoi et de tout accusé de réception, porte déclaration rectificative des revenus de l'année 2001 et demande de bien vouloir prendre en considération le montant des revenus 2001 après déduction des cotisations sociales obligatoires (121 004 euros) et des cotisations sociales obligatoires payées en 2001 pour un montant de 138 132 euros. Cette correspondance demande le calcul à nouveau des cotisations. Ce courrier fait référence à un jugement du 6 mai 2002 rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à l'URSSAF [Localité 2].
Cette lettre ne vaut pas interpellation suffisante dès lors qu'elle ne formule aucune demande de remboursement et qu'elle n'est pas adressée en recommandé avec demande d'accusé de réception. Elle ne contient pas les éléments de fait et de droit qui permettent de justifier des modalités de calcul de l'indu, contrairement à la lettre du 14 novembre 2002 dont l'URSSAF [Localité 2] ne conteste pas le caractère de mise en demeure, la simple référence à un jugement non joint, ne suffisant pas à déterminer que l'objet de la contestation portait sur l'assiette de calcul des cotisations, qui incluait originellement les revenus de source britannique du partnership. En outre sa créance n'était pas déterminable, les cotisations de l'année 2001 étant calculées en application de l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale sur les revenus de l'année 2000 et non sur ceux de l'année 2001, M. [J] [P] n'ayant donc pas fourni les bases permettant de calculer la somme dont il s'estimait créancier.
En conséquence, cette correspondance ne présente pas les caractéristiques d'une mise en demeure de nature à interrompre la prescription. La lettre du 14 novembre 2002 portant demande de remboursement porte sur les années 1999 et 2000 à l'exception de l'année 2001. Elle ne valait donc pas mise en demeure pour l'année 2001.
Dès lors, la demande de remboursement des cotisations de l'année 2001 formée lors de la saisine de la commission de recours amiable le 27 mai 2014, à défaut de toute mise en demeure, était atteinte de prescription.
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur l'appel de l'URSSAF [Localité 2] et le caractère recevable des demande de M. [J] [P]
L'URSSAF [Localité 2] expose que par courrier en date du 3 décembre 2002, elle a indiqué qu'elle ne pouvait donner suite à la demande de M. [J] [P] au motif qu'elle avait interjeté appel à l'encontre du jugement du 6 mai 2002. Elle invitait M. [J] [P] à contester la décision en saisissant la Commission de Recours Amiable dans le délai d'un mois à compter de la réception du courrier du 3 décembre 2002. Il précisait qu'en l'absence de décision de cette dernière dans le mois suivant la réception de la contestation, la demande devait être considérée comme rejetée et qu'un nouveau délai de deux mois lui était ouvert pour saisir le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Paris. M. [J] [P] a saisi la Commission de Recours Amiable le 27 mai 2014 soit 12 ans après le courrier de réponse de l'URSSAF du 3 décembre 2002. L'article R142-1 du code de la sécurité sociale applicable en l'espèce prévoit que la Commission de Recours Amiable doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation. En application de ce même texte, M. [J] [P] soutenait qu'en cas d'erreur quant aux voies de recours indiquées au cotisant, la forclusion ne pouvait lui être opposée. Or, le courrier de réponse de l'URSSAF du 3 décembre 2002 ne saurait être considéré comme une décision au sens de l'article R.142-1 du code de la sécurité sociale. En effet, il précise que « dans l'immédiat, nous ne pouvons pas donner suite à votre requête, la Cour d'Appel de Paris étant actuellement saisie du même litige dans les affaires des deux autres associés de votre cabinet ». Il ajoute que « par ailleurs, sur le principe du remboursement, notre organisme pourra, si toutefois l'issue de la procédure en cours dans ces affaires vous est favorable, vous opposer sur l'année 1999 les dispositions de l'article L.243-6 du code de la sécurité sociale en matière de prescription ». Il en ressort clairement que ce courrier n'a pour unique but que d'informer le cotisant que sa requête ne peut être étudiée en l'état. En effet, elle ne pourrait se prononcer qu'à l'issue de la procédure concernant les années 1996 à 1998 et sous réserve que cette dernière aboutisse à l'exclusion des revenus étrangers du calcul des cotisations françaises d'allocations familiales et des contributions CSG/CRDS. Le courrier de réponse, simple courrier d'information, n'avait donc pas à ouvrir des voies de recours au cotisant puisqu'elle n'avait pris aucune décision sur la demande de remboursement formulée. Ce courrier n'était donc soumis à aucun formalisme et est par conséquent parfaitement régulier. Il en résultait qu'il appartenait à M. [J] [P] de saisir à nouveau l'Organisme d'une demande de remboursement portant sur les années 1999 et 2000 à l'issue de la procédure concernant les années 1996 à 1998. L'issue de la procédure relative aux années 1996 à 1998 est intervenue le 30 juin 2011. M. [J] [P] n'a pas cru bon devoir la saisir à nouveau suite à cet arrêt. Ce n'est que trois ans plus tard, le 27 mai 2014, qu'il saisit directement la Commission de Recours Amiable afin de solliciter le remboursement de la somme de 201 051 euros. Or, en application de l'article R 142-1 du code de la sécurité sociale, la Commission ne peut être saisie que si une décision a été rendue préalablement par ses services. En l'absence de décision préalable de l'organisme, le cotisant ne pouvait saisir la Commission de Recours Amiable le 27 mai 2014 et encore moins le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale le 16 février 2015.
Relativement à la prescription, elle ajoute que l'article L243-6 du code de la sécurité sociale modifié par la loi du 18 décembre 2003 s'applique uniquement aux cotisations et contributions acquittées après l'entrée en vigueur de la loi de financement, soit à compter du 1er janvier 2004, sauf à établir que l'obligation de remboursement est née d'une décision juridictionnelle qui a révélé la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure. Dans ce cas, la demande de remboursement peut porter sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue.
Le jugement du 6 mai 2002 rendu par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Paris ne saurait être considéré comme une décision juridictionnelle qui a révélé la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure puisqu'il a été frappé d'appel et n'était donc pas définitif. La Cour d'Appel de Paris, dans son arrêt du 12 mai 2010 a considéré que la mise en demeure était nulle, faute de préciser l'origine de la dette. Elle ajoute que la 2ème chambre civile, saisie dans cette affaire, a confirmé l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris sans se prononcer sur le fond du litige. En l'absence d'une décision juridictionnelle définitive ayant révélé la non conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure rendue dans les deux ans suivant l'entrée en vigueur de la loi du 18 décembre 2003, il y a lieu de faire application de l'article L243-6 du code de la sécurité sociale en vigueur à la date de la demande de remboursement soit le 14 novembre 2002. Dès lors, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées. L'intéressé ayant formulé sa demande de remboursement le 14 novembre 2002, l'URSSAF [Localité 2] invite la Cour à constater que les cotisations de l'année 1999 réglées entre le 8 février 1999 et le 15 novembre 1999 sont prescrites ; que les cotisations de l'année 2000 réglées entre le 15 février 2000 et le 15 août 2000 sont prescrites ; que seul le règlement qui serait intervenu le 14 novembre 2000 ne serait pas prescrit. Toutefois, M. [J] [P] n'apportant aucun justificatif (copie de chèque, relevé bancaire...) permettant de vérifier le bon encaissement par l'organisme de ce règlement, le remboursement de cette somme ne peut être envisagé. Elle ajoute qu'aucune demande n'a été formulée au titre de l'année 2001.
M. [J] [P] expose que sa saisine de la Commission de recours amiable formée le 27 mai 2014 était recevable et non frappée de forclusion, dans la mesure où le délai mentionné dans la décision explicite de rejet du 3 décembre 2002 était erroné au visa de l'article R 142-1 du Code de la sécurité sociale qui prévoyait, dans sa version applicable à l'espèce, que la Commission de Recours Amiable doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation. Or, l'indication de délais de recours erronés vaut, pour la Cour de cassation, absence d'indication du délai de recours. Il ajoute que l'URSSAF ne craint pas de soutenir désormais pour la première fois en appel que le courrier de réponse du 3 décembre 2002 ne saurait être considéré comme une décision au sens de l'article R. 142-1 du Code de la sécurité sociale et n'avait pour autre but que d'informer le cotisant que sa requête ne pouvait être étudiée en l'état. Or, cette décision rejette explicitement sa réclamation et indique des voies de recours erronées. L'argumentation de l'URSSAF [Localité 2] revient à le priver purement et simplement de tous les droits de la défense et de tout accès au juge qui ne peut être saisi sans que la Commission de recours amiable n'ait été saisie au préalable.
Sur la prescription invoquée, il indique faire valoir au visa de l'article L243-6 du code de la sécurité sociale que lorsque l'indu résulte d'une décision juridictionnelle révélant la non-conformité de la règle de droit à une norme supérieure (au cas particulier, le Règlement CE 1408/71 et la convention fiscale franco-britannique alors en vigueur, en application de l'article 55 de la Constitution), le délai de prescription de l'action en restitution en cause ne peut commencer à courir avant la naissance de la date de la décision, ce qui reporte le point de départ de la prescription. En effet, en pareille circonstance, le cotisant a été empêché d'agir directement en répétition de l'indu avant la révélation de la non-conformité de la règle de droit appliquée à une règle de droit supérieure. S'agissant des décisions juridictionnelles antérieures au 1er janvier 2004, il convient de distinguer celles rendues depuis plus de deux ans au jour de l'entrée en vigueur de la loi 2003-1199, pour lesquelles la prescription biennale est applicable et celle rendues depuis moins de deux ans au jour de l'entrée en vigueur de la loi 2003-1199, pour lesquelles le nouveau délai de prescription de trois ans vient se substituer à l'ancien délai de prescription de deux ans non encore expiré (circulaire Acoss 2004-36 du 4 février 2004). Dans ce dernier cas, la nouvelle disposition limitant le remboursement aux trois années civiles précédant la date de la décision, plus l'année en cours, doit trouver à s'appliquer afin d'assurer une application intégrale de l'article L243-6 du Code de la sécurité sociale. Sur l'argument de l'URSSAF selon lequel seule la prescription biennale serait applicable au motif qu'un justiciable ne pourrait invoquer à son profit une décision juridictionnelle révélant la non-conformité de la règle de droit à une norme supérieure que si cette décision juridictionnelle le concerne personnellement, ce qui n'est pas le cas du jugement en date du 6 mai 2002 qu'il invoque, il indique que l'URSSAF ajoute à la loi une condition non prévue et qui en viderait sa substance privant les justiciables de faire valoir leurs droits à interrompre la prescription.
Sur l'argument selon lequel le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris du 6 mai 2002 ne saurait être considéré comme une décision juridictionnelle ayant révélé la non-conformité d'une règle de droit supérieure au motif que le jugement, frappé d'appel, n'est pas définitif, il indique que cette argumentation ajoute là encore à la loi une condition non prévue et qui en viderait sa substance privant les justiciables de faire valoir leurs droits à interrompre la prescription. Au cas particulier, le jugement invoqué du 6 mai 2002 étant intervenu moins de deux ans avant le 1er janvier 2004, la demande de remboursement du 13 novembre 2002 pouvait valablement porter sur les cotisations exigibles durant les trois années civiles précédant la date de la décision de justice, soit les cotisations acquittées durant les années 1999, 2000 et 2001 pour une décision intervenue au cours de l'année 2002, ce qui couvre très exactement et très largement la période couverte par les demandes de remboursement.
Sur la forclusion du recours
L'article R 142-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n° 90-1009 du 14 novembre 1990, applicable au 3 décembre 2002 énonçait que :
« Les réclamations relevant de l'article L. 142-1 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme.
Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation . La forclusion ne peut être opposée aux intéressés que si cette notification porte mention de ce délai.
Toutefois, les contestations formées à l'encontre des décisions prises par les organismes chargés du recouvrement des cotisations, des majorations et des pénalités de retard doivent être présentées à la commission de recours amiable dans un délai d'un mois à compter de la notification de la mise en demeure ».
En l'espèce, le correspondance adressée par l'URSSAF [Localité 2] à M. [J] [P] le 3 décembre 2002 constitue une fin de non recevoir opposée à la demande formée par ce dernier au titre des années 1999 et 2000. En effet, l'URSSAF [Localité 2] indique ne pas pouvoir donner suite à la requête, dans l'attente de l'arrêt qui ferait suite à l'appel interjeté à l'encontre du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris du 6 mai 2002. Elle indique en outre, concernant l'année 1999, que l'URSSAF [Localité 2] opposera la prescription. Si cette correspondance ne précise pas s'il conviendra de déposer une nouvelle requête à l'issue des procédures judiciaires en cours et soulève par anticipation la prescription de l'une des demandes, l'URSSAF [Localité 2] mentionne dans ses conclusions qu'une nouvelle requête était toutefois attendue. Cette correspondance invite, en cas de contestation de la position prise à former un recours en notifiant les modalités de celui-ci.
Elle présente donc les caractéristiques d'une décision de rejet.
La notification de délais de recours erronés est insusceptible de les faire courir. En l'espèce, la décision du 2 décembre 2002 mentionne que le délai de saisine de la commission de recours amiable est de un mois. Or, les dispositions de l'article R 142-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable font référence à un délai de deux mois.
Dès lors, les délais de recours à l'encontre de la décision n'ont pas couru.
En conséquence, la saisine de la commission de recours amiable le 27 mai 2014 n'était pas atteinte de forclusion.
Sur la prescription
L'article L 243-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 dispose que :
« La demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées.
Lorsque l'obligation de remboursement desdites cotisations naît d'une décision juridictionnelle qui révèle la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, la demande de remboursement ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue.
En cas de remboursement, les organismes de sécurité sociale et d'allocations familiales sont en droit de demander le reversement des prestations servies à l'assuré ; ladite demande doit être faite dans un délai maximum de deux ans à compter du remboursement desdites cotisations.
Toutefois, lorsque la demande de remboursement des cotisations indûment versées n'a pas été formulée dans le délai de trois ans prévu au premier alinéa ci-dessus, le bénéfice des prestations servies ainsi que les droits à l'assurance vieillesse restent acquis à l'assuré, sauf cas de fraude ou de fausse déclaration ».
Ce texte a vocation à s'appliquer aux prescriptions non acquises au jour de son entrée en vigueur.
Dans sa version antérieure, cet article disposait que le point de départ de la prescription était de deux ans à compter du paiement des cotisations dont le remboursement était demandé.
Sous l'emprise de ce texte, il a été jugé : que la divergence d'interprétation d'un texte ne fait pas obstacle à ce que les redevables contestent le montant de leurs cotisations devant la juridiction de la sécurité sociale sans attendre que la difficulté d'interprétation soit tranchée ; qu'ainsi, la prescription instituée par l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale n'apporte aucune restriction incompatible avec les stipulations combinées des articles 6 § 1, et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 1er du Protocole additionnel n° 1 à ladite Convention (2e Civ., 12 mars 2009, pourvoi n° 08-11.210, Bull. 2009, II, n° 72). Il a de même été jugé que la prescription prévue par l'article L. 243-6 du Code de la sécurité sociale, seule applicable à l'action en répétition des versements de transport indûment payés, n'ayant pu courir avant la naissance de l'obligation de remboursement découlant d'une décision de justice annulant une décision administrative ayant conditionné l'appel de cotisations, le point de départ doit être fixé à la date de la décision d'annulation définitive (Soc., 7 mars 1996, pourvoi n° 93-18.721, Bulletin 1996 V n° 87).
En l'espèce, M. [J] [P] ne démontre pas qu'une décision de justice opposable ait écarté le texte support des appels de cotisations litigieux. Il ne démontre pas que le Conseil Constitutionnel ait déclaré l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale non-conforme à la constitution ou qu'une juridiction française ou de l'Union Européenne l'ait déclaré non-conforme au règlement européen CEE n°1408/71 du 17 juin 1971.
L'article L 131-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, issue de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, disposait ainsi que :
« Les cotisations d'assurance maladie et maternité et d'allocations familiales des travailleurs non salariés non agricoles et les cotisations d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles ou commerciales sont assises sur le revenu professionnel non salarié ou, le cas échéant, sur des revenus forfaitaires.
Le revenu professionnel pris en compte est celui retenu pour le calcul de l'impôt sur le revenu avant déductions, abattements et exonérations mentionnés aux articles 44 quater, 44 sexies, 44 septies et 44 octies, au sixième alinéa de l'article 62, au deuxième alinéa de l'article 154 bis du code général des impôts, à l'exception des cotisations versées aux régimes facultatifs institués dans les conditions fixées par l'article L. 635-1 du présent code par les assurés ayant adhéré auxdits régimes avant la date d'effet de l'article 24 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, au 4 bis de l'article 158 et aux articles 238 bis HA et 238 bis HC du code général des impôts. Il n'est pas tenu compte des reports déficitaires, des amortissements réputés différés au sens du 2° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et des plus-values et moins-values à long terme.
(...) ».
La question posée par M. [J] [P] dans le litige ayant donné lieu au jugement rendu le 6 mai 2002 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris était celle de l'intégration des revenus du partnership dans l'assiette des cotisations, selon qu'ils étaient ou non considérés comme des revenus professionnels au sens de l'alinéa 2 du texte précité par référence à la loi fiscale applicable.
Le jugement du 6 mai 2002 n'a pas écarté la règle de droit française de l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale. En effet, la demande présentée par M. [J] [P] l'était au visa des articles L 131-6 et L 136-3 du code de la sécurité sociale, du règlement communautaire 1408/71 et de la convention fiscale franco-britannique conclue entre la France et le Royaume-Uni. En défense, l'URSSAF ne demandait pas que le texte interne soit écarté mais que les revenus du partnership soient considérés comme des revenus d'activité professionnelle et considérés comme faisant partie de l'assiette de l'impôt définie à l'alinéa 2 de l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale. Le tribunal a jugé que l'assiette des cotisations devait être calculée, comme l'administration fiscale l'avait fait, uniquement sur les revenus de source française de l'assuré perçus au titre de son activité d'avocat à Paris et que cette assiette correspondait au revenu professionnel pris en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu avant application des déductions, abattements et exonérations, conformément aux prescriptions de ce texte. Il n'a aucunement jugé ni dans ses motifs ni dans son dispositif de la non-conformité de ce texte au droit européen puisqu'il en a fait application, dont seule la portée était contestée.
Dès lors, le point de départ de la prescription sous l'empire des dispositions de l'article L243-6 du code de la sécurité sociale dans sa version antérieure de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 n'a pas été reporté.
En l'espèce, s'agissant des cotisations de l'année 2000, M. [J] [P] ne dépose aucune pièce contestant les assertions de l'URSSAF [Localité 2] relativement aux dates de paiement des appels de cotisations des 15 février et 15 août 2000.
M. [J] [P] démontre que les autres appels de cotisations et de régularisation des cotisations de l'année 2000 ont été adressés mentionnant une date limite de paiement le 15 novembre 2000 et le 15 février 2021. Le montant total des cotisations à l'échéance du 15 novembre 2000 s'est élevé à 329 370 francs payés le 14 novembre 2000. Le montant total des cotisations appelées à l'échéance du 15 février 2001 n'est pas communiqué, sans que l'URSSAF [Localité 2] ne conteste le paiement.
Dès lors que M. [J] [P] avait adressé le 14 novembre 2002 une mise en demeure de rembourser les cotisations de l'année 1999 et 2000 et que les cotisations avaient été payées en intégralité au plus tard le 17 février 2001, la prescription a valablement été interrompue pour les deux derniers appels de cotisations de l'année 2000, faisant courir un nouveau délai de prescription de deux ans, les appels de cotisations du 15 février 2000 et du 15 août 2000 étant prescrits.
La loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 qui s'applique aux prescriptions non acquises au jour de son entrée en vigueur n'a donc prolongé le délai de prescription à trois ans pour les demandes de remboursement des fonds versés qu'au titre des deux derniers appels de cotisations du 15 novembre 2000 et du 15 février 2021.
S'agissant des cotisations pour l'année 2000, les appels de fonds étaient établis sur un calendrier identique de telle sorte que la prescription n'était pas acquise au jour de l'entrée en application de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003.
Les nouvelles dispositions de l'article L 243-6 du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 sont donc applicables en l'espèce pour ces cotisations.
Concernant ce texte, il a été jugé en application du premier alinéa que lorsque l'indu de cotisations sociales résulte d'une décision administrative ou juridictionnelle, le délai de prescription de l'action en restitution des cotisations en cause ne peut commencer à courir avant la naissance de l'obligation de remboursement découlant de cette décision (2e Civ., 12 février 2015, pourvoi n° 13-25.985, Bull. 2015, II, n° 28). Pour autant, la décision dont s'agit doit concerner directement le débiteur des cotisations puisque seule celle-ci fait naître à son profit la créance de remboursement en ce qu'elle a pour effet d'anéantir rétroactivement l'acte fondant juridiquement la cotisation appelée.
En l'espèce, le jugement du 6 mai 2002 rendu entre M. [J] [P] et l'URSSAF [Localité 2] porte sur les cotisations s'étendant des 3ème trimestre 1996 au 2ème trimestre 1998. Dès lors, M. [J] [P] ne peut demander le report du point de départ de la prescription au jour de la décision définitive relative au recours de l'URSSAF [Localité 2] à l'encontre d'un jugement rendu à son égard puisque la créance de répétition qui en découle ne concerne pas les cotisations des années 2000 et 2001.
L'alinéa 2 de ce texte porte sur l'hypothèse d'un conflit de normes et implique que la décision juridictionnelle, soit emporte dans son dispositif mention du caractère non-conforme de la règle juridique appliquée soit articule dans les motifs les moyens par lesquels la juridiction estime que le texte n'est pas compatible avec une norme supérieure et en écarte expressément l'application.
En la présente espèce, comme il a été indiqué dans les motifs qui précèdent , le jugement du 6 mai 2002 n'a aucunement jugé ni dans ses motifs ni dans son dispositif de la non-conformité de l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale au règlement européen CEE n°1408/71 du 17 juin 1971 ou à la convention fiscale franco-britannique.
M. [J] [P] ne démontre par ailleurs aucunement avoir contesté la conventionnalité de l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale ou que des décisions de justice définitives en aient écarté l'application, faute d'une quelconque production de pièces à ce sujet. Au contraire, aucune des décisions concernant les litiges opposant M. [J] [P] à l'URSSAF [Localité 2] et déposées par cette dernière, n'ont jugé les dispositions de l'article L 131-6 du code de la sécurité sociale non-conformes à des règles conventionnelles ou à la Constitution.
En conséquence, M. [J] [P] ne peut utilement invoquer les dispositions de l'alinéa 2 de l'article L 243-6 du code de la sécurité sociale à son profit.
Dès lors, la prescription courant à compter du 14 novembre 2002 était acquise au 14 novembre 2005. En conséquence, au jour de la saisine de la commission de recours amiable le 27 mai 2014, la demande en répétition de l'indu de M. [J] [P] était atteinte de prescription.
Le jugement déféré sera en conséquence infirmé et les demandes de M. [J] [P] seront déclarées irrecevables comme étant prescrites.
M. [J] [P], qui succombe, sera condamné aux dépens et au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
PRONONCE la jonction des dossiers respectivement enrôlés sous les numéros 17/11667 et 17/11721 sous le premier numéro ;
DÉCLARE irrecevable l'appel principal de M. [J] [P] ;
DÉCLARE recevables l'appel principal de l'URSSAF [Localité 2] et l'appel incident de M. [J] [P] ;
CONFIRME le jugement rendu le 5 juillet 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en ce qu'il a déclaré la demande tendant au remboursement des contributions CSG/CRDS présentée par M. [J] [P] pour l'année 2001 irrecevable ;
L'INFIRME pour le surplus ;
STATUANT à nouveau des chefs infirmés ;
DÉCLARE irrecevable la demande de remboursement des contributions CSG/CRDS présentée par M. [J] [P] pour les années 1999 et 2000 ;
DEBOUTE M. [J] [P] de sa demande présentée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNE M. [J] [P] à payer à l'URSSAF [Localité 2] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [J] [P] aux dépens d'appel.
La greffièreLe président