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09/11/2022 | FRANCE | N°17/15150

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 09 novembre 2022, 17/15150


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2022

(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/15150 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4VGA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juin 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F14/129897





APPELANTE



Madame [R] [X]

[Adresse 1]

[Localité 4]>


Représentée par Me Emmanuel PIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R28







INTIMÉE



SAS MAINCARE SOLUTIONS

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par Me Phil...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/15150 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4VGA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juin 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F14/129897

APPELANTE

Madame [R] [X]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuel PIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R28

INTIMÉE

SAS MAINCARE SOLUTIONS

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe PACOTTE de la SELARL DELSOL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice MORILLO, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Philippe MICHEL, président de chambre

Mme Valérie BLANCHET, conseillère

M. Fabrice MORILLO, conseiller

Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe MICHEL, président et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 décembre 2011, Mme [X] a été engagée en qualité de responsable commerciale régionale imagerie médicale, statut cadre, par la société [U] Information Solutions France, aux droits de laquelle vient désormais la société Maincare Solutions, celle-ci employant habituellement au moins 11 salariés et appliquant la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987.

Après avoir été convoquée, suivant courrier remis en main propre du 27 février 2014, à un entretien préalable fixé au 14 mars 2014, Mme [X] a été licenciée pour insuffisance professionnelle suivant courrier recommandé du 26 mars 2014.

Contestant le bien-fondé de son licenciement et s'estimant insuffisamment remplie de ses droits, Mme [X] a saisi la juridiction prud'homale le 13 octobre 2014.

Par jugement du 22 juin 2017, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- débouté Mme [X] de l'ensemble de ses demandes,

- reçu la société Maincare Solutions en sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais l'en a déboutée,

- condamné Mme [X] aux dépens.

Par déclaration du 27 novembre 2017, Mme [X] a interjeté appel du jugement.

Par ordonnance sur incident du 21 janvier 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel a prononcé l'irrecevabilité de la déclaration d'appel.

Par arrêt du 16 février 2022, la cour d'appel, statuant en déféré, a infirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, a dit n'y avoir lieu à prononcer la caducité de la déclaration d'appel et renvoyé le dossier au conseiller de la mise en état pour poursuite de l'instruction de l'affaire.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 27 juin 2022, Mme [X] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- dire que le licenciement ne repose ni sur une cause réelle ni sur une cause sérieuse,

- condamner en conséquence la société Maincare Solutions à lui payer les sommes suivantes :

- 65 760 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Dans ses conclusions transmises par voie électronique le 23 juin 2022, la société Maincare Solutions demande à la cour de :

à titre principal,

- constater que l'insuffisance professionnelle repose sur des éléments matériellement avérés et imputables à l'appelante,

- rejeter les demandes formulées par Mme [X] et confirmer le jugement,

à titre subsidiaire,

- constater l'absence de préjudice démontré et fixer le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au montant minimum prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail,

en tout état de cause,

- condamner Mme [X] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'instruction a été clôturée le 28 juin 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 5 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la rupture du contrat de travail

L'appelante fait valoir qu'elle ne faisait pas preuve d'incompétence mais qu'en réalité, tout a été mis en 'uvre pour obtenir son licenciement, l'intéressée ajoutant qu'elle n'a pas été remplacée. Elle précise que, bien que considérée comme sénior, elle avait besoin d'être soutenue et formée sur les pratiques, les produits et les procédures au sein de l'entreprise et qu'elle a été soumise, dès le mois d'avril 2013, à une pression constante et croissante avec un plan d'amélioration des performances imposé par l'employeur, ledit plan d'amélioration lui ayant pris beaucoup de temps et ne lui ayant pas permis de consacrer toute son énergie à la prospection et au travail sur les appels d'offre. Elle soutient que son secteur d'intervention était anormalement grand pour une seule personne, qu'elle avait besoin de précisions sur l'aspect technique des produits qu'elle ne maîtrisait pas dans son intégralité mais que personne n'a été capable de lui apporter des réponses concrètes et cohérentes et que ses propositions stratégiques étaient systématiquement refusées par sa hiérarchie. Elle souligne que la baisse des résultats ou la non-atteinte des objectifs ne sauraient en aucun cas lui être imputables, celles-ci résultant en réalité d'une coordination d'éléments extérieurs à sa personne ou à ses fonctions. Elle indique enfin avoir toujours informé sa hiérarchie des dossiers en cours dans le détail, soulignant qu'il existe une coïncidence troublante entre le début des reproches particulièrement argumentés lui ayant été faits et la décision de vente de la branche européenne de la société.

L'intimée réplique que l'appelante ne s'est jamais plainte de ne pas avoir bénéficié des ressources nécessaires pour exécuter ses missions et que les actions de formation ont porté sur l'ensemble des aspects de son métier, l'intéressée justifiant en outre d'une expérience importante comprenant la maîtrise des systèmes d'information en imagerie médicale. Elle souligne que la salariée n'a jamais été en capacité de pouvoir, par des questionnements liés à une stratégie commerciale prédéfinie, obtenir des informations nécessaires et pertinentes auprès du client, mettre en avant les éléments différenciants de l'offre portée par la société et procéder, dans le cadre de son reporting, à une remontée d'information résultant de sa propre analyse et montrant les actions à mener pour conquérir les marchés, l'intéressée n'ayant ainsi pas su répondre aux attentes liées aux missions de responsable commercial régional. Elle précise que l'appelante n'a pas atteint les résultats attendus, sur le fondement d'objectifs qui avaient été acceptés, et ce alors qu'elle disposait de l'expérience suffisante et d'une compétence affirmée qui lui permettaient d'évaluer le caractère réaliste de l'objectif fixé. Elle affirme enfin qu'il existait un manque de suivi des processus de vente.

Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instructions qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Si l'insuffisance professionnelle peut constituer une cause légitime de licenciement, l'incompétence alléguée doit cependant reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l'employeur, étant rappelé qu'il suffit à l'employeur d'invoquer le grief d'insuffisance professionnelle, motif matériellement vérifiable, pour que la lettre soit dûment motivée, l'insuffisance de résultats pouvant constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsque le fait de ne pas avoir atteint les objectifs résulte d'une insuffisance professionnelle, lesdits objectifs devant présenter un caractère réaliste et correspondre à des normes sérieuses et raisonnables.

La lettre de licenciement est rédigée de la manière suivante :

« Nous vous avons convoqué à un entretien préalable à votre éventuel licenciement qui s'est tenu le 14 mars 2014.

Lors de cet entretien, nous vous avons exposé les motifs ayant justifié la mise en 'uvre d'une procédure de licenciement à votre encontre et nous avons recueilli vos observations.

Néanmoins, les explications que vous nous avez fournies lors de cet entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits. Dans ces conditions, nous vous informons que nous sommes contraints de vous licencier, cette décision reposant sur les motifs vous ayant été verbalement exposés et que nous vous rappelons ci-après :

Vous avez été embauchée le 12 décembre 2011 au poste de Responsable Commerciale- Imagerie Médicale. Or, depuis votre prise de poste et en dépit de l'accompagnement réalisé par votre responsable hiérarchique, nous avons constaté un certain nombre de manquements et de lacunes.

Nous déplorons notamment :

- L'écart entre le rôle attendu du Responsable Commercial Régional et votre activité réelle:

Ce poste implique de savoir identifier et sélectionner les ventes stratégiques, comprendre les besoins et l'environnement de nos clients, savoir démontrer notre différence et valoriser notre offre, bien préparer et maîtriser la stratégie de négociation pour être à même de lever les objections et d'emporter les marchés sur ces comptes clés, en préservant notre marge.

Au regard de votre expérience dans ce secteur d'activité, nous attendions de votre part une approche proactive et une vision stratégique de la gestion de votre territoire. Or après plus de 18 mois, nous avons constaté que vous ne sélectionniez pas vos cibles en fonction des résultats attendus. C'est uniquement à la demande expresse de votre hiérarchie que vous avez réalisé un plan stratégique.

Ce plan aurait dû être un outil de pilotage et d'échanges avec vos supérieurs hiérarchiques et les services ressources dans votre activité, mais force a été de constater que cela n'a pas été le cas. L'exercice est resté scolaire et n'a pas eu l'efficacité attendue.

Après plus de deux ans dans l'entreprise, vous n'avez toujours pas de stratégie de vente, vous vous contentez de saisir les opportunités. Par ailleurs, vous ne maîtrisez toujours pas l'offre produit et l'argumentaire commercial.

- L'absence d'atteinte des objectifs, en dépit d'une révision à la baisse :

D'une année sur l'autre, votre hiérarchie a revu vos objectifs à la baisse afin de vous permettre de retrouver un succès minimum et de vous encourager. Ces nouveaux objectifs comprenaient notamment une partie « sécurisée » pour FY14, avec le dossier CH de [Localité 16] sur le parc des clients existants.

Ceci s'est traduit par un portefeuille d'affaires, sur le territoire affecté, composé :

- d'affaires potentielles sur le parc des clients existants ayant déjà fait l'acquisition de nos produits d'imagerie (« Clients PACS »), il s'agira pour l'essentiel de migration de version ou de vente de licences et prestations additionnelles (« add on »). Ces affaires nécessitent peu d'activité commerciale pour obtenir les commandes correspondantes.

- d'affaires potentielles sur la base installée de l'entreprise (autres clients de l'Entreprise) ou hors base installée (prospects non clients de l'Entreprise), ne disposant pas encore de nos produits d'imagerie médicale. Il s'agira alors de gagner des affaires dans le cadre des procédures d'appel d'offre. Ces affaires nécessitent un savoir faire commercial fort, les remporter est indispensable pour la pérennité de l'activité Imagerie Médicale de l'Entreprise.

Votre région, l'Est de la France, est celle qui représente le meilleur potentiel de vente sur la base installée et hors base installée, hors d'appels d'offres régionaux. Or, depuis le 1er avril 2012, 100 % des appels d'offres publiés dans votre secteur ont été perdus (6/6 : [Localité 5], [Localité 12], [Localité 6], [Localité 8], [Localité 10], [Localité 19], [Localité 17]).

Sur la même période, 50 % des appels d'offres ont été remportés dans la région ouest (2/4 : [Localité 11] et [Localité 14]).

Pour l'année fiscale 2013 (1er avril 2012 au 31 mars 2013), votre objectif était de 470 000 € de marge vendue, vous avez atteint 26 % de cet objectif, soit 121 342 €.

Ce résultat étant nettement en dessous de la performance moyenne de l'équipe soit 68% pour la même période.

Force est de constater que ce résultat est fait à 100% sur le parc clients existants (clients PACS).

Pour l'année fiscale 2014 (1er avril 2013 au 31 mars 2014), votre objectif a été fixé à 370 000€, soit une baisse de 21 % par rapport à l'année précédente. La moitié de cet objectif pouvant être réalisé par une seule affaire, le CHU de [Localité 16].

A une semaine de la fin de l'année fiscale, vous êtes à 31,47 % de réalisation d'objectifs pour une moyenne à 60,24% de l'équipe.

Force est de constater que ce résultat est fait à 100 % sur le parc clients existants (clients PACS).

Au cours des années pendant lesquelles vous avez été en charge de la région Est, l'Entreprise a perdu des parts de marché au profit de la concurrence. Cette situation hypothèque les ventes  futures et le chiffre d'affaires récurrent sur le parc clients. Cette situation est préjudiciable à l'Entreprise et ne peut perdurer.

- Votre manque de suivi des processus de vente :

La qualité et la fiabilité des données communiquées hebdomadairement et mensuellement (points commerciaux, revues mensuelles, forecast) ne sont pas bonnes, vous mesurez mal nos chances de succès ou d'échec.

L'appel d'offre de [Localité 17], pourtant important pour notre Entreprise et pour vos objectifs personnels, a été perdu en raison d'un vice de forme. Le site nous informe que notre offre a été déclarée irrégulière car nous n'avons pas chiffré l'option reprise des données au-delà de 3 ans.

Cette situation est inacceptable et vous auriez dû détecter l'anomalie. En effet, vous n'ignorez pas qu'en tant que Responsable Commercial vous portez la responsabilité de la réponse aux appels d'offre concernant votre territoire (cf. RACI commerce).

Votre management vous a alerté à plusieurs reprises sur l'impérieuse nécessité d'améliorer ces différents points. Un plan formel a été bâti et suivi pendant plusieurs mois sans résultats probants.

Nous estimons que ces faits sont constitutifs d'une insuffisance professionnelle constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement. »

En l'espèce, au vu des différentes pièces versées aux débats par les parties, il résulte tout d'abord de l'entretien de performance du 14 novembre 2012 que, parmi les domaines à développer, la salariée devait « augmenter la capacité de persuasion en développant un argumentaire plus élaboré notamment sur les composantes fonctionnelles et intégration de notre solution. Prêter plus attention aux autres collaborateurs pour favoriser l'esprit d'équipe, par exemple prendre rdv avec des collaborateurs et venir plus souvent au siège pour travailler les affaires en cours, approfondir les connaissances sur nos solutions, faire le point sur le suivi de certains clients », le manager notant par ailleurs qu'« au niveau de la marge commandée, le résultat à mi-parcours est très loin de l'objectif. Cependant, un bon travail a été accompli au niveau du suivi de comptes prospects qui seront la source des prochaines affaires. Travailler plus étroitement avec les membres de l'équipe PACS. »

Concernant l'entretien de performance du 11 avril 2013, il en ressort que la salariée s'est vue attribuer la note 5 (ne répond pas aux attentes/n'atteint pas l'objectif) au titre du développement des ventes additionnelles, de la marge commerciale (« la marge réalisée à la fin de l'exercice est de 121 342 € soit 26 % de l'objectif. Cette réalisation ne répond pas aux attentes car trop éloignée de l'objectif (470 K€ HT) »), de l'esprit novateur (« les situations clients/ prospects sont décrites dans tes comptes rendus de visite et tu y mentionnes les éventuelles actions futures en termes de visites et planification de démonstration. Tu ne proposes pas de stratégie ou de plan d'actions permettant de prévoir les opportunités ou anticiper les obstacles détectés lors de ces visites et formulés dans tes comptes rendus. Vu ta séniorité dans le poste et tes expériences précédentes, j'attends de ta part la construction de stratégies et plans d'actions permettant de présenter notre activité de manière attractive et compétitive aux clients/prospects »), de l'orientation clients (« nous t'avons formé à la présentation de nos solutions et produits et tu as été accompagnée par plusieurs membres de l'équipe lors de visites clients afin que tu puisses assurer un premier niveau de présentation et orienter les clients par tes conseils. Il ressort de tes visites à [Localité 7] et [Localité 13] que tu prends beaucoup de notes mais n'apportes pas ces conseils et/ou orientations de base que le client attend. Cela porte préjudice à l'image de [U] que tu dois donner aux clients ») et de la capacité de persuasion (« Tu ne soutiens pas assez d'idées et propositions auprès de tes collègues. Lorsque tu as une proposition pour modifier la présentation de nos tableaux de prix et certains points de nos dossiers AO, tu ne le fais pas de manière argumentée afin de susciter l'adhésion mais de manière agressive qui conduit plutôt au conflit »), le manager notant par ailleurs que « ton niveau de performance est loin de mes attentes et n'est pas acceptable cette année. Un plan d'amélioration va être mis en place afin de te donner les moyens d'atteindre un niveau de performance correspondant à mes attentes. Ton objectif de marge sera reconduit sur FY14 ».

La cour relève par ailleurs que, compte tenu des difficultés précitées, un plan d'amélioration de la performance professionnelle a été mis en place à l'initiative de l'intimée et accepté sans réserve par l'appelante le 30 avril 2013, ledit plan d'amélioration portant sur 5 objectifs précisément définis : « 1) établir un plan d'actions pour optimiser nos chances d'être retenu dans la procédure de dialogue compétitif lancée par CH [Localité 18], 2) préparer le salon HIT, 3) établir un plan d'actions pour optimiser nos chances de remporter le dossier [Localité 9], 4) rédiger une présentation argumentée de notre offre, 5) plan stratégique FY14 », et ce avec un calendrier détaillé de mise en oeuvre à respecter. Il ressort de surcroît de l'avenant de rémunération Année fiscale FY14 (période d'avril 2013 à mars 2014) signé le 26 juin 2013 que l'objectif de prise de commande en marge vendue a été abaissé à la somme de 370 000 euros HT.

Or, il résulte du bilan partagé effectué le 24 juillet 2013 que seuls les objectifs n°1 et 3 ont été atteints, le n°4 ayant été partiellement atteint et les deux derniers (n°2 et 5) non atteints, la salariée se voyant notamment indiquer qu'elle s'est limitée de ces deux derniers chefs à un exercice théorique non suivi d'application pratique.

Un nouvel entretien de performance a été réalisé le 13 novembre 2013 dont il résulte notamment:

- s'agissant de la marge de 370 000 euros : « total marge commandée 50.560 € soit 13,7% de l'objectif. L'objectif a été abaissé de 20% par rapport à FY13 et correspond au volume d'affaires présent dans ton forecast en début d'exercice »,

- s'agissant de la veille concurrentielle : « tu ne t'appuies pas suffisamment sur les points de faiblesse des solutions concurrentes pour mettre en avant les points forts de nos produits. La vente consiste à mettre en avant ces avantages sans citer expressément les points faibles des concurrents. Des visites de sites équipés à la concurrence ont eu lieu lors des six derniers mois, mais elles ne servent pas suffisamment ton argumentaire. Il faut que tu aies un questionnaire d'interview fixe pour chaque visite à la concurrence afin de balayer tous les thèmes de manière identique pour faire ensuite ressortir les points de différenciation. »,

- s'agissant de l'identification des projets régionaux auprès des ARS et GCS : « tu ne réponds pas à mes attentes sur cet objectif très important car il conditionne une bonne partie des affaires de l'année prochaine. Il est nécessaire de savoir ce qui va se passer (ou pas) sur ces régions. »,

- s'agissant d'identifier de nouveaux projets PACS : « tu n'as pas identifié de nouveau projet PACS sur les six premiers mois de l'exercice ([Localité 17] était déjà identifié sur l'exercice précédent). Il n'y a pas eu non plus des visites de prospection sur des régions que nous connaissons mal comme la Picardie et la Champagne Ardennes. Une seule visite prospect à la clinique de [15] (demandée par notre partenaire ORANGE). »,

- s'agissant de l'esprit novateur : « tu n'utilises pas les compétences acquises en interne (formation, plan d'amélioration) ou en externe (entretiens prospects, préparation et présentation auditions) pour construire des stratégies et plans d'actions qui rendent notre activité plus compétitive. Lors des auditions ([Localité 17]), tu récites comme une leçon ce qui est inscrit sur les diapos ou notes (présentation [U], références, description fonctionnelle) sans mettre en avant deux ou trois points spécifiques qui répondent au contexte particulier du client.

Sur l'affaire [Localité 19], le client nous a reproché de mauvaises démos mais tu n'as pas, de ton côté, argumenté de manière efficace sur tes points de différenciation avec nos concurrents, nos bonnes références, le fait que les logiciels proposés par [U] sont en production, notre engagement service au résultat, la qualité de notre service support' afin de contre balancer.»,

- s'agissant de l'orientation clients : « dans le suivi de ton portefeuille client, tu t'assures bien que les présentations remontées ou les attentes de tes clients sont suivies par nos services. Par contre dans l'activité de prospection ou de vente, tu ne parviens pas à initier et à construire une offre répondant aux souhaits et attentes exprimés par les prospects. »,

- s'agissant de la capacité de persuasion : « tu ne démontres pas de capacité de persuasion auprès du client. Tu sais remonter les demandes clients mais tu n'argumentes pas auprès du client pour atténuer nos points perçus éventuellement comme des faiblesses afin de mettre en avant nos points forts. Exemple de [Localité 19] qui souhaitait [M] pour la deuxième démo alors que ce n'était pas possible. Tu aurais dû argumenter sur le savoir faire et l'expérience d'[E] auprès du client pour expliquer qu'il maitrise son sujet. »,

- s'agissant de l'assurance : « tu n'arrives pas à faire preuve de crédibilité à l'extérieur de [U] et face aux prospects/clients. Lors des préparations des auditions appels d'offres (auditions région Centre, [Localité 17], [Localité 19]), tu poses des questions sur des sujets de base dont tu connais les réponses. Cela traduit un manque de confiance en toi et entraîne un manque de crédibilité (de ta part) auprès des partenaires extérieurs qui travaillent avec nous. Ce manque de confiance se retrouve aussi pendant l'audition quand tu révises les diapos que tu dois présenter au lieu de suivre la présentation faite par ton collègue. Ta crédibilité fait aussi défaut auprès des équipes internes. Tu n'arrives pas à exposer les affaires de manière synthétique en focalisant sur les objectifs principaux que ce soit à un niveau très général comme les points CO hebdomadaires où à un niveau plus détaillé dans le cadre de présentation d'une démo ou d'une audition. Tu ne prends pas en compte les critiques constructives et ne capitalises pas sur les outils et conseils mentionnés dans ton plan d'amélioration, initié suite à ton évaluation de fin FY13. Ton compte rendu des JFR, par exemple, énumère les prospects/clients rencontrés et les demandes/infos recensées. Il n'y a pas de plan d'action avec les objectifs que tu veux atteindre et les aides éventuelles dont tu as besoin »,

- s'agissant de l'esprit d'équipe : « Le rôle attendu par le responsable commercial régional consiste à fédérer l'équipe sur les missions à réaliser dans le but d'atteindre les objectifs. Pour cela, il est nécessaire de mettre en confiance les collègues lors des interventions, en s'assurant des bonnes conditions d'intervention, en expliquant les objectifs à atteindre et en supportant les collègues si cela est nécessaire pendant l'intervention. Après presque deux ans de présence, tu ne développes pas de relation/action facilitant le travail d'équipe. Pourtant plusieurs membres de l'équipe se sont mobilisés pour t'accompagner sur les démonstrations comme à [Localité 19]. De ton côté, tu as communiqué ton stress au démonstrateur (lors du problème technique de la deuxième démo), au lieu d'essayer de discuter avec le client pour faire tomber la pression et gagner du temps. »,

- s'agissant de l'orientation résultats : « Lors de la perte des projets CHU de [Localité 10] et [Localité 19], tu as remonté les informations données par le client justifiant le choix de la concurrence. En revanche tu n'as pas analysé la part de ta responsabilité dans la perte de ces affaires, ni les renseignements que tu pouvais en tirer pour les prochaines affaires. La perte d'une affaire doit systématiquement te poser question et t'inciter à une remise en cause. »,

- le manager notant en conclusion que : « Tu as été engagée, il y a presque deux ans comme commerciale sénior. Depuis ton arrivée, tu as été formée à nos produits et solutions et participé à plusieurs présentations/démonstrations pour te permettre de comprendre les caractéristiques de notre offre et développer un argumentaire persuasif. [U] a investi dans ta formation à l'utilisation de PowerPoint, au fonctionnement des marchés publics et à la communication orale. Plusieurs membres de ton équipe et de la direction t'ont accompagné, lorsque tu l'as demandé, pour t'assister et t'aider sur les affaires de ton secteur. Lors de ton entretien de fin d'année FY13, j'ai évalué ta performance inacceptable selon la grille d'évaluation en usage au sein de [U] et nous avons alors mis en place un plan d'amélioration.

Les résultats obtenus à mi-parcours sont très loin de tes objectifs (revus nettement à la baisse par rapport à l'année dernière) et ne correspondent pas à mes attentes. La perte du projet majeur ([Localité 19]) de ton secteur sur le premier semestre n'a suscité aucune remise en cause de ton côté au niveau de ta capacité à mettre en avant la valeur de notre offre, à poser les questions nécessaires à la compréhension des attentes du client et à traiter les objections.

Je constate que tu ne tires pas parti des outils et conseils mentionnés dans ton plan d'amélioration pour progresser. Il y a toujours un manque de maîtrise et d'assurance dans ton argumentaire qui impacte ta crédibilité en interne et à l'extérieur de [U].

Globalement tu ne te remets pas en cause ce qui ne te permet pas de progresser et d'atteindre tes objectifs. »

Par ailleurs, au vu des différents échanges de mails entre la salariée et sa hiérarchie, des comptes rendus et notes relatifs aux différents appels d'offre et projets sur lesquels l'appelante a été amenée à intervenir au cours de la période litigieuse ainsi que des justificatifs afférents aux modalités et conditions d'exercice de ses fonctions par l'intéressée, il apparaît que l'appelante a rencontré d'importantes difficultés dans l'exercice de ses fonctions qui se sont poursuivies sur l'ensemble de la période litigieuse, les différents éléments produits par les parties dans le cadre du présent litige permettant de déterminer que son manque d'approche proactive et de stratégie commerciale adaptée (permettant notamment d'améliorer le positionnement de l'offre commerciale selon les souhaits et informations recueillies auprès des clients afin, sans se limiter à la problématique tarifaire, de mettre en avant les points forts ainsi que les points de différenciation de l'offre de la société au regard de celle proposée par ses concurrents), a contribué à la perte de plusieurs appels d'offre, et notamment de celui relatif au centre hospitalier de [Localité 17], au titre duquel l'offre de la société a été déclarée irrégulière et rejetée en ce qu'elle n'était pas correctement complétée (l'option « reprise de données supérieures à 3 ans » n'ayant pas été chiffrée), et ce alors qu'il revenait manifestement à l'appelante, en sa qualité de responsable commerciale régionale, de vérifier, avant de valider l'envoi de l'offre, que l'entreprise avait effectivement répondu à l'intégralité des demandes et critères exigés dans le cadre de l'appel d'offre.

La cour retient ainsi que les pièces versées aux débats font effectivement état de différents éléments précis et concrets d'insuffisance professionnelle constatés dans l'exercice des fonctions confiées à la salariée et lui étant directement et personnellement imputables, ces insuffisances répétées ayant en outre manifestement perturbé le bon fonctionnement de l'entreprise, et ce malgré les différentes remarques et alertes, l'accompagnement ainsi que les actions de formation incontestablement mis en place par l'employeur qui a manifestement laissé à l'intéressée le temps nécessaire pour s'adapter pleinement à ses fonctions. Il sera également relevé que l'appelante ne justifie pour sa part aucunement, mises à part ses propres affirmations et au vu des seules pièces versées aux débats, qu'elle ne disposait pas des moyens nécessaires pour mener à bien ses missions ou qu'elle aurait fait l'objet d'un traitement particulier défavorable de la part de sa direction s'agissant notamment de la taille de son secteur (lequel n'impliquait pas de visiter l'ensemble des établissements de santé y étant situés mais d'opérer une sélection adaptée), des potentialités commerciales dudit secteur ainsi que de la fixation de ses objectifs commerciaux, ceux-ci apparaissant dénués de tout caractère irréaliste et correspondre à des normes sérieuses et raisonnables compte tenu des montants des marchés liés aux appels d'offre sur lesquels elle intervenait, les résultats de l'intéressée se situant, en toute hypothèse, très largement en dessous de la moyenne des autres commerciaux de l'équipe, étant enfin noté qu'il revenait nécessairement à l'appelante, en sa qualité de responsable commerciale régionale, de défendre son projet de présentation d'appel d'offre devant les commissions internes « GO/NO GO » prenant in fine la décision de concourir ou non à l'appel d'offre compte tenu des coûts engendrés. La cour ne peut enfin qu'observer que l'appelante, qui avait fait état lors de son embauche de sa « solide expérience » professionnelle antérieure dans le domaine de la négociation en imagerie médicale, apparaît avoir bénéficié, contrairement à ses affirmations, de différentes actions de formation portant sur les différents aspects de ses fonctions de responsable commerciale régionale (en ce comprises des formations relatives aux produits d'imagerie médicale proposés par l'entreprise) au cours de la relation de travail, les dysfonctionnements pointés dès les premiers mois de la relation de travail ayant toutefois persisté durant l'ensemble de la période litigieuse.

Dès lors, au vu de l'ensemble des développements précédents, le licenciement prononcé à l'encontre de l'appelante pour insuffisance professionnelle apparaissant justifié, la cour confirme le jugement en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté la salariée de ses différentes demandes afférentes à la rupture du contrat de travail.

Sur les autres demandes

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la salariée sera condamnée à payer à l'employeur la somme de 300 euros au titre des frais exposés en cause d'appel non compris dans les dépens.

La salariée, qui succombe, supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [X] à payer à la société Maincare Solutions la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [X] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 17/15150
Date de la décision : 09/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-09;17.15150 ?
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