Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 11
ARRET DU 24 NOVEMBRE 2022
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/13461
N° Portalis 35L7-V-B7B-B3VWD
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Mai 2017 -Tribunal de grande instance de PARIS - RG n° 15/12965
APPELANTS
Madame [K] [V] épouse [P]
[Adresse 1]
[Localité 8]
représentée et assistée par Me Julie THOMAS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1694
Monsieur [Z] [P]
[Adresse 1]
[Localité 8]
représenté et assisté par Me Julie THOMAS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1694
INTIMEES
SA AREAS DOMMAGES
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée et assistée par Me Lisa HAYERE de la SELEURL CABINET SELURL HAYERE, avocat au barreau de PARIS
CPAM DE L'ESSONNE
[Adresse 9]
[Localité 7]
n'a pas constitué avocat
PARTIE INTERVENANTE
CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, représentant la CNRACL
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Fabienne DELECROIX de l'ASSOCIATION DELECROIX GUBLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R229
substituée à l'audience par Me Emma BENMOUSSA, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, et devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre
Mme Nina TOUATI, présidente de chambre
Mme Sophie BARDIAU, conseillère
Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE
ARRÊT :
- Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 9 mai 2011, à [Localité 10], Mme [K] [V] épouse [P] a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule conduit par M. [F] [H] et assuré auprès de la société Areas dommages.
Après la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise judiciaire confiée au Docteur [Y] qui a clos son rapport le 22 juillet 2013, Mme [V] épouse [P], son époux M. [Z] [P] et leurs enfants, M. [E] [P], Mme [A] [P], Mme [D] [P] et M. [J] [P] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris la société Areas dommages en indemnisation de leurs préjudices, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne (la CPAM) et de la mutuelle Avenir santé mutuelle (la mutuelle Avenir).
Par un premier arrêt du 16 décembre 2019 auquel il conviendra de se référer pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, la cour d'appel de ce siège a :
- confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 16 mai 2017, en ce qu'il a :
* ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1231-6 du code civil,
* condamné la société Areas dommages à payer à M. [Z] [P] la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,
* condamné la société Areas dommages à payer à M. [E] [P], Mme [A] [P], Mme [D] [P] et M. [J] [P] la somme de 3 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,
* déclaré le jugement commun à la CPAM et à la mutuelle Avenir,
* condamné la société Areas dommages aux dépens comprenant les frais d'expertise et à payer à Mme [V] épouse [P] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
* dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui les concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du même code,
- confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 11 septembre 2018, en ce qu'il a :
* ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil,
* condamné la société Areas dommages aux dépens et à payer à Mme [V] épouse [P] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,
* déclaré le jugement commun à la CPAM et à la mutuelle Avenir,
- infirmé lesdits jugements pour le surplus, et statuant à nouveau,
- condamné la société Areas dommages à payer à Mme [V] épouse [P] les sommes suivantes à titre de réparation du préjudice corporel causé par l'accident du 9 mai 2011, provisions et sommes versées en exécution provisoire du jugement non déduites, avec intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter du présent arrêt pour le surplus :
* frais divers : 5 378,11 euros
* assistance par tierce personne temporaire : 8 685,71 euros
* perte de gains professionnels : 7 717,86 euros
* dépenses de santé futures : 1 049 091,95 euros
* frais de logement adapté : 9 744,52 euros
* frais de véhicule adapté : 11 256,29 euros
* assistance par tierce personne future : 165 782,59 euros
* perte de gains professionnels futurs : 22 237,81 euros
jusqu'au 31/08/2019
* déficit fonctionnel temporaire : 8 406,25 euros
* souffrances endurées : 25 000 euros
* préjudice esthétique temporaire : 2 000 euros
* déficit fonctionnel permanent : 105 000 euros
* préjudice esthétique permanent : 13 000 euros
* préjudice d'agrément : 15 000 euros
* préjudice sexuel : 7 500 euros,
- sursis à statuer sur les deux postes de préjudice suivants : perte de gains professionnels futurs à compter du 1er septembre 2019 et incidence professionnelle,
- renvoyé l'affaire à la mise en état pour conclusions des parties sur ces deux postes de préjudice,
- condamné la société Areas dommages à payer à M. [Z] [P] la somme de 2 000 euros au titre du préjudice sexuel par ricochet, somme versée en exécution provisoire du jugement non déduite, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- déclaré l'arrêt commun à la CPAM et à la mutuelle Avenir,
- condamné la société Areas dommages aux dépens d'appel, dont recouvrement en application de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamné la société Areas dommages à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, la somme de 6 000 euros à Mme [V] épouse [P] et celle de 1 500 euros à M. [Z] [P].
Par un second arrêt du 30 septembre 2021, la cour d'appel de Paris a :
Avant dire droit sur la liquidation de la perte de gains professionnels futurs de Mme [V] épouse [P] à compter du 1er septembre 2019 et de l'incidence professionnelle,
- ordonné la réouverture des débats,
- invité Mme [V] épouse [P] à attraire en la cause la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de représentant de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (la CNRACL) dans le délai de deux mois à compter de ce jour,
- renvoyé l'affaire à la mise en état,
- réservé les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [V] épouse [P] a fait assigner la Caisse des dépôts et consignations en intervention forcée par acte d'huissier du 30 novembre 2021.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions de Mme [V] épouse [P], notifiées le 12 mai 2021, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en date du 16 mai 2017 en ce qu' il a condamné la société Areas dommages à payer Mme [V] épouse [P] la somme de 56 054,53 euros à titre de pertes de gains professionnels futurs,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en date du 11 septembre 2018 en ce qu'il a en ce qu'il a condamné la société Areas dommages à payer à Mme [V] épouse [P] la somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle,
- condamner la société Areas dommages à payer à Mme [K] [V] épouse [P] les sommes suivantes, en réparation de ses préjudices ci-dessous listés :
- perte de gains professionnels du 1er septembre 2019 au 30 juin 2021 : 17 707,83 euros
- perte de gains professionnels à compter du 1er juillet 2021 : 405 944,01 euros
- incidence professionnelle : 301 725,00 euros,
- condamner la société Areas dommages à payer Mme [V] épouse [P] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Areas dommages aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Maître Julie Thomas dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile,
- juger que les condamnations seront assorties des intérêts calculés au taux légal à compter de la date du jugement de première instance «pour les sommes confirmées», et à compter de la date de la signification des présentes conclusions pour le surplus, et ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à «l'article 1231'6 du code civil».
Vu les dernières conclusions de la société Areas dommages, notifiées les 6 avril et 31 mai 2022, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :
Vu les dispositions de la loi du 5 juillet 1985,
- fixer l'indemnisation des pertes de gains professionnels futurs supportées par Mme [V] épouse [P], dans les suites de l'accident du 9 mai 2011, postérieurs au 31 août 2019 à la somme globale de 102 019,21 euros,
- fixer l'indemnisation de l'incidence professionnelle de Mme [V] épouse [P] résultant [de l'accident] du 9 mai 2011 à la somme de 64 000 euros,
- accueillir le montant de la créance présentée par la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 145 093,59 euros,
- débouter la Caisse des dépôts et consignations de sa demande présentée au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
Vu les conclusions de la Caisse des dépôts et consignations, notifiées le 30 mars 2022, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :
Vu les articles 1 et 3 de l'Ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 «modifiée»par la loi du 5 juillet 1985,
- constater que le capital représentatif de la créance de la Caisse des dépôts et consignations actualisé au 1er décembre 2021 s'élève à la somme de 145 093,59 euros,
- condamner la société Areas dommages à verser à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 145 093,59 euros en remboursement du capital représentatif de sa créance au 1er décembre 2021,
- limiter le remboursement à l'évaluation du préjudice patrimonial soumis au recours de la CNRACL calculé en droit commun, à savoir les pertes de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle,
- assortir la condamnation des intérêts aux taux légal à compter du prononcé du jugement,
- condamner la société Areas dommages à payer à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour d'appel a infirmé par son précédent arrêt du 16 décembre 2019 les jugements déférés en date des 16 mai 2017 et 11 septembre 2018 sur le montant des indemnités allouées à Mme [V] épouse [P] en réparation de son préjudice corporel, de sorte que la demande d'infirmation formulée par cette dernière est devenue sans objet.
Seules demeurent en discussion l'indemnisation des pertes de gains professionnels futurs de Mme [V] épouse [P] à compter du 1er septembre 2019 ainsi que celle du poste de préjudice lié à l'incidence professionnelle sur lesquels il a été sursis à statuer par l'arrêt du 16 décembre 2019.
Sur la perte de gains professionnels futurs à compter du 1er septembre 2019
Mme [V] épouse [P] qui n'a pas déposé de nouvelles conclusions après la réouverture des débats ordonnée par l'arrêt du 30 septembre 2021 l'invitant à attraire en la cause la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de représentante de la CNRACL réclame au titre de ses pertes de gains professionnels futurs incluant son préjudice de retraite une somme totale de 423 651,84 euros se décomposant comme suit :
- pour la période du 1er septembre 2019 au 31 décembre 2019, une somme de 552,42 euros correspondant à la différence, prorata temporis, entre le revenu annuel dont elle a bénéficié au cours de l'année précédant l'accident, soit 20 851 euros et le montant de la rémunération effectivement perçue au cours de cette période,
- pour la période du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020, une somme de 11 778,26 euros correspondant à la différence entre le revenu de référence annuel de 20 851 euros revalorisé en fonction de l'indice du Bofip de 1,102 pour l'année 2010 (20 851 x 1,102 = 22 977,80 euros) afin de tenir compte de la dépréciation monétaire et le montant des sommes perçues au titre de sa pension de retraite pour invalidité,
- pour la période du 1er janvier 2021 au 30 juin 2021, une somme de 5 377,15 euros correspondant à la différence entre le revenu de référence réactualisé en fonction du même indice et les sommes perçues au titre de sa pension de retraite pour invalidité,
- pour la période à échoir à compter du 1er juillet 2021, une somme de 405 944,01 euros calculée sur la base d'une perte annuelle de revenus de 11 251,22 euros, capitalisée en fonction de l' «euro de rente viager jusqu'à 66 ans selon la GP 2020 pour une femme âgé de 50 ans, âge de Mme [P] au 1er janvier 2021».
Il convient d'observer qu'en dépit d'une maladresse d'expression Mme [V] épouse [P] sollicite la capitalisation viagère de sa perte de revenus, l'euro de rente dont elle fait application étant l'euro de rente viagère prévu par le barème de capitalisation publié par la Gazette du palais le 15 septembre 2020 avec un taux d'intérêts à 0 % pour une femme âgée de 50 ans.
Elle fait valoir à l'appui de sa demande de capitalisation viagère que les séquelles de l'accident ont constitué un obstacle insurmontable à sa reconversion professionnelle, qu'elle ne pourra plus jamais retravailler et que l'impact de l'accident est considérable non seulement sur les gains qu'elle aurait dû percevoir mais également sur sa retraite.
Elle précise s'agissant de sa perte de droits à la retraite qu'elle n'est pas parvenue à obtenir de la CNRACL la simulation de la pension de retraite qui aurait été la sienne en l'absence d'accident malgré ses demandées réitérées et celles de son conseil.
Elle fait observer, s'agissant de la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), que celle-ci ne pourra être liquidée que lorsqu'elle aura atteint l'âge de 62 ans en 2032, qu'il ressort du décompte récapitulatif établi par le gestionnaire la RAFP qu'elle n'a acquis au cours de sa carrière que 3 859 points, de sorte qu'elle ne pourra bénéficier du versement d'une rente mensuelle qui suppose que le fonctionnaire ait cumulé à la date de liquidation au moins 5 125 points.
Elle ajoute qu'elle cumulait en moyenne 300 points par an avant l'accident et qu'elle aurait ainsi atteint sans la survenance du fait dommageable le nombre de points requis pour bénéficier d'une retraite additionnelle mensuelle.
Elle précise enfin qu'elle n'a jamais adhéré à un contrat de retraite complémentaire facultative.
La société Areas dommages, tout en admettant l'existence d'une perte de gains professionnels futurs à compter du 1er septembre 2019, s'oppose à l'application du barème de capitalisation de la Gazette du palais 2020 en relevant d'une part que la demande porterait atteinte à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 16 décembre 2019 qui a fait application du barème de la Gazette du palais 2018 pour la liquidation du poste de préjudice lié au besoin d'assistance par une tierce personne et d'autre part, que l'emploi du même barème de capitalisation est justifié par un souci de cohérence.
Elle conteste par ailleurs la demande d'actualisation du revenu de référence antérieur à l'accident d'un montant annuel de 20 851 euros en fonction de l'indice Bofip et soutient que la perte de gains professionnels n'est justifiée que jusqu'à l'âge de 62 ans, date à laquelle Mme [V] épouse [P] atteindra la limite d'âge visée par la Caisse des dépôts et consignations dans le décompte de sa créance.
Elle demande ainsi à la cour d'évaluer la perte de gains professionnels futurs de Mme [V] épouse [P] de la manière suivante :
- 552,42 euros pour la période du 1er septembre 2019 au 31 décembre 2019 conformément à la demande de l'intéressée,
- 20 581 euros pour la période du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020
- 10 290,50 euros pour la période du 1er janvier 2021 au 30 juin 2021
- 215 688,88 euros à compter du 1er juillet 2021 et jusqu'à l'âge de 62 ans,
Soit une somme totale de 247 112,80 euros.
Après imputation de la créance de la Caisse des dépôts et consignations d'un montant de 145 093,59 euros au titre de la pension de retraite anticipée servie à Mme [V] épouse [P], la société Areas dommages offre de verser une indemnité d'un montant de 102 019,21 euros.
S'agissant de la perte de droits à la retraite invoquée, elle objecte qu'elle relève du poste de préjudice lié à l'incidence professionnelle et que son indemnisation ne peut intervenir que sur la base d'une simulation de ce qu'aurait été la situation de la victime sans la survenance du fait dommageable.
Sur ce, le poste de préjudice lié à la perte de gains professionnels futurs est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.
Il peut, contrairement à ce qu'avance la société Areas dommages inclure les pertes de droits à la retraite, notamment lorsqu'il est justifié compte tenu des circonstances particulières de l'espèce de les indemniser par une capitalisation viagère de la perte de revenus, et ce même si celles-ci constituent en principe une composante de l'incidence professionnelle.
Il résulte des pièces versées aux débats et notamment du rapport d'expertise judiciaire établi le 22 juillet 2013 par le Docteur [Y] et des bulletins de salaire versés aux débats que Mme [V] épouse [P] qui avait intégré la fonction publique hospitalière depuis le 1er juin 2002 et travaillait à la date de l''accident comme aide soignante au sein de l'hôpital psychiatrique de [11], a dû être réorientée vers un poste administratif en raison des séquelles de l'accident, incluant notamment l'amputation de plusieurs doigts de la main gauche (auriculaire, annulaire, majeur et index), une raideur douloureuse de l'épaule gauche et une traction cutanée douloureuse en fin d'extension de la hanche gauche.
L'expert, qui a fixé la date de consolidation au 30 avril 2013, a ainsi conclu que la reprise du métier d'aide soignante était impossible en raison d'une préhension déficiente.
Après avoir bénéficié d'un travail à temps partiel à compter du 1er avril 2014 puis en 2017 de congés pour maladie ordinaire puis pour longue maladie plusieurs fois renouvelés, Mme [V] épouse [P] a été déclarée définitivement inapte à ses fonctions et à toutes les fonctions (après épuisement des droits au congé) par le comité médical qui a émis un avis favorable à une mise à la retraite pour invalidité lors de sa séance du 6 février 2019.
Il résulte du brevet de pension, établi par le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations que Mme [K] [V] épouse [P] a été radiée des cadres le 1er janvier 2020 et qu'il lui a été concédé à compter de cette date une pension de retraite anticipée pour invalidité par la CNRACL.
Compte tenu de la nature et de l'importance de ses séquelles lui interdisant de poursuivre son activité d'aide soignante, de l'échec de ses tentatives de reconversion vers un poste sédentaire et de son inaptitude avérée à tout emploi au sein de la fonction publique hospitalière, il est établi que les possibilités de retour à l'emploi de Mme [V] épouse [P] qui était âgée de 43 ans à la date de consolidation comme étant née le [Date naissance 2] 1970 et de 49 ans à la date de sa mise à la retraite anticipée pour invalidité sont totalement illusoires.
Elle subit ainsi une perte de gains professionnels futurs mais également un préjudice de retraite qu'il convient d'indemniser en distinguant les périodes suivantes :
* sur la perte de gains professionnels futurs entre le 1er septembre 2019 et le 31 décembre 2019
Les parties s'accordent pour évaluer la perte de revenus de Mme [V] épouse [P] au cours de cette période à la somme de 552,42 euros qui sera retenue par la cour.
* sur la perte de gains professionnels futurs entre le 1er janvier 2020 et la date du présent arrêt
Comme relevé plus haut, Mme [V] épouse [P] a été placée à compter du 1er janvier 2020 en retraite anticipée pour invalidité.
Ses possibilités de retour à l'emploi étant pour les motifs qui précèdent totalement illusoires, elle a subi au cours de cette période une perte de gains professionnels futurs totale.
Les parties s'accordent sur le montant du revenu de référence correspondant à celui de l'année précédant l'accident, soit un montant annuel de 20 851 euros et ne s'opposent que sur la question de son actualisation pour tenir compte des effets de l'inflation.
Il convient de rappeler sur ce dernier point que les juges doivent procéder lorsqu'elle est demandée à l'actualisation à la date de la décision des pertes de gains subies par la victime en fonction de la dépréciation monétaire.
Après actualisation en application du convertisseur INSEE qui permet de mesurer les effets de l'érosion monétaire, le salaire de référence s'élève à la somme de 23 435,63 euros, ramenée à celle de 22 977,80 euros pour rester dans les limites de la demande.
Après actualisation du salaire de référence, la perte de gains professionnels de la victime s'élève au cours de la période considérée à la somme de 66 635,62 euros (22 977,80 euros x 2,9 ans).
* Sur la perte de gains professionnels futurs à échoir jusqu'à la date prévisible de départ à la retraite de la victime
Il convient de retenir que sans la survenance du fait dommageable Mme [V] épouse [P] serait partie à la retraite à l'âge de 62 ans, le 22 février 2032, date à laquelle elle atteindra la limite d'âge (âge limite d'activité) ainsi qu'il résulte des mentions du décompte de créance établi le 19 décembre 2021 par la Caisse des dépôts et consignations.
S'agissant du barème de capitalisation à appliquer, il convient d'abord de relever qu'il résulte des dispositions de l'article 480 du code de procédure civile que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif.
Les motifs de la décision, seraient-ils le soutien nécessaire du dispositif, sont dépourvus d'autorité de chose jugée.
La cour ayant seulement dans le dispositif de son précédent arrêt an date du 16 décembre 2019 sursis à statuer sur les postes de préjudice liés à la perte de gains professionnels futurs à compter du 1er septembre 2019 et à l'incidence professionnelle, c'est à tort que la société Areas dommages soutient que l'application du barème de capitalisation publié par la Gazette du palais le 15 septembre 2020 porterait atteinte à l'autorité de chose jugée attachée à cet arrêt qui ne fait référence que dans ses motifs au barème de la Gazette du palais 2018 pour évaluer le poste de préjudice lié au besoin d'assistance par une tierce personne de la victime après consolidation.
Par ailleurs, le préjudice doit être évalué à la date à laquelle la cour statue ; le barème de capitalisation utilisé sera, conformément à la demande de la victime, celui publié par la Gazette du palais le 15 septembre 2020 avec un taux d'intérêts de 0 % qui est le plus approprié comme s'appuyant sur les données démographiques et économiques les plus pertinentes.
La perte de gains professionnels futurs de Mme [V] épouse [P] s'établit ainsi pour la période susvisée de la manière suivante :
- 22 977,80 euros x 9,832 (euro de rente temporaire jusqu'à l'âge de 62 ans prévu par le barème de capitalisation de la Gazette du palais 2020 pour une femme âgée de 52 ans à la date de la liquidation) = 225 917,73 euros.
**********
La perte de gains professionnels futurs de Mme [V] [P] jusqu'à la date prévisible de son départ à la retraite s'élève ainsi à la somme de 293 105,77 euros (552,42 euros + 66 635,62 euros + 225 917,73 euros).
Il ressort des dispositions de l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, qu'ouvrent droit à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ou son assureur, les prestations énumérées au II de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques.
Par ailleurs, il résulte des articles 1 et 7 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 que la Caisse des dépôts et consignations, agissant comme gérante de la CNRACL dispose d'un recours subrogatoire pour le recouvrement des «arrérages des pensions de retraite et de réversion prématurées, jusqu'à la date à laquelle la victime aurait pu normalement faire valoir ses droits à pension, ainsi que les allocations et majorations accessoires».
La pension de retraite pour invalidité, incluant la majorations pour enfants, servie par la CNRACL depuis le 1er janvier 2020 ayant vocation à indemniser les pertes de gains professionnels futurs de Mme [V] épouse [P], il convient d'imputer sur ce poste de préjudice, la créance de la CNRACL au titre de cette pension, soit au vu du décompte du 9 décembre 2021 établi par la Caisse des dépôts et consignations, la somme de 145 093,59 euros, calculée en prenant en considération une date de limite d'âge au 22 février 2032 et un prix de l'euro de rente de 9,550019.
Il revient ainsi à Mme [V] épouse [P] la somme de 148 012,18 euros (293 105,77 euros - 145 093,59 euros) et à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 145 093,59 euros.
* Sur le préjudice de retraite
La perte de gains professionnels après consolidation, liée au handicap de Mme [V] épouse [P] qui a été contrainte en raison de l'accident de cesser toute activité professionnelle à l'âge de 49 ans entraîne corrélativement une diminution de ses droits à la retraite.
Ce préjudice porte à la fois sur la retraite de base servie par la CNRCL qui aurait sans l'accident été calculée en fonction de son traitement indiciaire de fin de carrière et sur la RAFP dans la mesure où selon le décompte établi le 11 mai 2021 Mme [V] épouse [P] n'a acquis que 3 859 points entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2019 et qu'ayant été placée en retraite pour invalidité à compter du 1er janvier 2020, elle ne pourra obtenir de points supplémentaires et bénéficier d'une pension de retraite sous forme d'une rente mensuelle qui est réservée selon le document d'information joint à ce décompte aux fonctionnaires ayant acquis au moins 5 125 points à la date de la liquidation.
Mme [V] justifiant avoir sollicité en vain auprès de la CNRACL une simulation de la retraite à laquelle elle aurait pu prétendre sans la survenance de l'accident (pièce n° 208), il convient d'indemniser son préjudice de retraite sur la base de sa perte de revenus annuelle actualisée d'un montant de 22 977,80 euros permettant de tenir compte de la perte de points RAFP, capitalisée en fonction du barème de la Gazette du Palais 2020 dont il convient de déduire sa pension de retraite anticipée d'un montant annuel de 12 673,68 euros (11 304,36 euros + 1 369,32 euros de majorations pour enfants) selon le décompte de créance de la Caisse des dépôts et consignations qui sera capitalisée suivant les mêmes modalités.
Le préjudice de retraite de Mme [V] épouse [P] s'établit ainsi comme suit :
- (22 977,80 euros x 25,268) - (12 673,68 euros x 25,268) = 260 364,50 euros.
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Le préjudice global de Mme [V] épouse [P] au titre de la perte de gains professionnels futurs, incluant le préjudice de retraite, s'élève ainsi, après imputation de la créance de la Caisse des dépôts et consignations à la somme de 486 282,23 euros (225 917,73 euros + 260 364,50 euros) qui sera ramenée à celle de 423 651,84 euros pour rester dans les limites de la demande.
- Incidence professionnelle
Ce poste de préjudice a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap ; il inclut la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.
Mme [V] épouse [P] réclame au titre de ce poste de préjudice une indemnité d'un montant de 301 725 euros se décomposant comme suit :
- 15 000 euros au titre de la pénibilité accrue du travail exercé postérieurement à l'accident et antérieurement à la mise en retraite pour invalidité,
- 150 000 euros au titre de la situation d'anomalie sociale liée au fait qu'elle n'a pas pu travailler durant les trois années d'arrêt maladie suivant l'accident puis définitivement en raison de son inaptitude à tout poste,
- 136 725 euros au titre de la perte de chance d'évolution de carrière «avec haute probabilité de progression professionnelle» évaluée sur la base d'une perte de gains annuelle de 3 000 euros capitalisée selon un euro de rente viagère pour une femme âgée de 40 ans à la date de l'accident.
Elle ajoute qu'à la suite de l'accident elle s'est trouvée dans l'impossibilité définitive d'exercer sa profession d'aide soignante qu'elle appréciait particulièrement et que si son reclassement vers un poste administratif lui a temporairement permis de continuer à travailler, il ne correspondait ni à ses envies ni aux perspectives d'évolution de carrière qu'elle avait auparavant.
Elle expose s'agissant de la perte de chance d'évolution de carrière qu'elle avait avant l'accident le projet de devenir infirmière, que dans sa fiche d'entretien annuel d'évaluation en 2008, il a été mentionné qu'elle devrait réussir ce projet, qu'elle s'est inscrite en 2008 à un cycle de formation préparant aux épreuves d'entrée aux écoles d'infirmière, qu'à la suite d'un premier échec elle a suivi en 2009 une nouvelle formation proposée par le groupe hospitalier [11], que si elle n'a pas été admise au concours d'entrée, ces différentes formations lui auraient très probablement permis de devenir infirmière.
La société Areas dommages propose d'évaluer la composante de l'incidence professionnelle liée à la pénibilité accrue à la somme de 4 000 euros en relevant qu'entre la date de consolidation et celle à laquelle Mme [V] épouse [P] a cessé toute activité, cette dernière a été placée en arrêt de travail à plusieurs reprises.
Elle offre d'indemniser le préjudice lié à l'abandon de la profession et de toute activité professionnelle à hauteur de la somme de 60 000 euros.
Elle conclut, en revanche au rejet de la demande présentée au titre de la perte d'une chance d'évolution de carrière en relevant que Mme [V] épouse [P] a tenté à deux reprises de passer les épreuves d'entrée aux écoles d'infirmières en 2008 et 2009 sans y parvenir et que la perte de chance invoquée est hypothétique.
Sur ce, il convient d'apport de rappeler que les souffrances morales et physiques ressenties par la victime avant la date de consolidation, y compris son éventuel sentiment d'inutilité sociale sont incluses dans le poste de préjudice des souffrances endurées qui a d'ores et déjà été indemnisé par le précédent arrêt du 16 décembre 2016, de sorte que Mme [V] [P] n'est pas fondée à solliciter une indemnisation distincte au titre de l'incidence professionnelle de l'anomalie sociale qui serait résulté de sa période d'arrêt de travail antérieure à la consolidation.
Il ressort des pièces versées aux débats que Mme [V] épouse [P] qui était encore en arrêt de travail à la date de l'expertise ainsi que l'a relevé le Docteur [Y] dans son rapport a été réorientée vers un poste de secrétaire administrative le 24 juin 2013, d'abord à temps plein puis à temps partiel à 80 % à compter du 1er avril 2014.
En 2017, elle a bénéficié de congés pour maladie ordinaire puis pour longue maladie plusieurs fois renouvelés jusqu'à ce qu'elle soit déclarée définitivement inapte a à ses fonctions par le comité médical lors de sa séance du 6 février 2019.
Compte tenu de la nature et de l'importance de ses séquelles incluant notamment une préhension déficitaire liée à l'amputation de plusieurs doigts de la main gauche, une raideur douloureuse de l'épaule gauche, et une traction cutanée douloureuse en fin d'extension de la hanche gauche, Mme [V] épouse [P] a subi une pénibilité accrue pendant les périodes au cours desquelles elle a effectivement travaillé comme secrétaire administrative après la date de consolidation.
Il y a lieu également de tenir compte dans l'évaluation du poste de préjudice lié à l'incidence professionnelle, de ce que Mme [V] épouse [P] a été contrainte en raison de ses difficultés de préhension, constatées par l'expert, de renoncer à sa profession d'aide soignante et plus généralement à toute profession de soignant pour occuper un poste de secrétaire administrative.
Par ailleurs, comme relevé plus haut, les possibilités de retour à l'emploi de Mme [V] épouse [P] étant totalement illusoires, celle-ci se trouve depuis sa mise à la retraite pour invalidité le 1er janvier 2020 définitivement exclue du monde du travail et doit être indemnisée de la dévalorisation sociale ressentie en raison de cette exclusion prématurée, tout en tenant compte de ce qu'elle était alors âgée de presque 50 ans.
Au bénéfice de ces observations, il convient d'évaluer les trois composantes de l'incidence professionnelle liées à la pénibilité accrue, à l'abandon de la profession antérieure et au sentiment d'inutilité sociale consécutif à l'exclusion définitive du monde du travail à la somme de 64 000 euros offerte par la société Areas dommages.
S'agissant de la perte de chance d'évolution de carrière, il convient de rappeler qu'il résulte du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime que toute perte de chance, même faible, ouvre droit à réparation.
En l'espèce, Mme [V] épouse [P] justifie qu'elle avait suivi avant la date de l'accident deux formations préparatoires aux épreuves du concours d'entrée dans les écoles d'infirmière en 2008 et 2009 (pièce n° 58) mais admet avoir échoué à deux reprises à l'examen.
Ses chances de réussite apparaissent ainsi limitées mais ne peuvent être qualifiées d'hypothétiques alors que son supérieur hiérarchique a estimé dans sa fiche d'entretien annuel d'évaluation en 2008 que Mme [V] épouse [P] devrait réussir son projet professionnel d'être infirmière.
Les difficultés de préhension qui ont rendu impossible la poursuite de son activité d'aide soignante lui interdisant de la même manière de devenir infirmière, il est établi que l'éventualité favorable d'accéder à cette profession a disparu à la suite de l'accident.
L'indemnisation d'une perte de chance ne pouvant être égale à l'avantage que cette chance aurait procuré si elle s'était réalisée, Mme [V] épouse [P] ne peut réclamer l'intégralité de l'augmentation de salaire que cette évolution de carrière lui aurait procurée.
En retenant un taux de perte de chance de 10 %, il convient d'évaluer la perte de chance d'évolution de carrière de Mme [V] épouse [P] à la somme de 10 000 euros.
Le préjudice global lié à l'incidence professionnelle du dommage s'élève ainsi à la somme de 74 000 euros (64 000 euros + 10 000 euros).
Sur les intérêts moratoires et la demande capitalisation
Il convient en application de l'article 1153-1, devenu 1231-7 du code civil de dire que les indemnités allouées par le présent arrêt porteront intérêts au taux légal à compter du jugement du 16 mai 2017 sur la somme de 50 000 euros allouée au titre de l'incidence professionnelle, à compter du jugement du 11 septembre 2018 sur la somme de 56 054,53 euros allouée au titre de la perte de gains professionnels futurs et à compter du présent arrêt pour le surplus.
Les intérêts seront capitalisés conformément à la demande dans les conditions prévues à l'article 1154, devenu 1343-2 du code civil.
Sur la demande de la Caisse des dépôts et consignations
Pour les motifs précédemment énoncés relatifs au recours subrogatoire dont dispose la Caisse des dépôts et consignations en application des articles 29-2 de la loi du 5 juillet 1985 et des articles 1 et 7 de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, il revient à cette dernière après imputation sur le poste de préjudice lié à la perte de gains professionnels futurs que ses prestations indemnisent la somme de 145 093,59 euros.
Il convient de rappeler qu'en application de l'article 1-III de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, «le remboursement par le tiers responsable des arrérages de pensions et rentes ayant fait l'objet d'une concession définitive est effectué par le versement d'une somme liquidée en calculant le capital représentatif de la pension ou de la rente», ce qui est le cas de la pension de retraite anticipée pour invalidité concédée définitivement à Mme [V] épouse [P].
Il y a lieu ainsi de condamner la société Areas dommages à payer à la Caisse des dépôts et consignations en sa qualité de gérante de la CNRACL la somme de 145 093,59 euros qui sera majorée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, compte tenu des limites de la demande.
Sur les demandes annexes
La société Areas dommages qui succombe partiellement en ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel exposés depuis l'arrêt du 16 décembre 2019.
L'équité commande d'allouer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à Mme [V] épouse [P] une indemnité de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés depuis l'arrêt du 16 décembre 2019 et à la Caisse des dépôts et consignations, appelée en intervention formée par acte d'huissier du 30 novembre 2021, une indemnité de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, et par mise à disposition au greffe,
Vu les arrêts en date du 16 décembre 2019 et du 30 septembre 2021,
Condamne la société Areas dommages à payer à Mme [K] [V] épouse [P], provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire non déduites, réparation des préjudices ci-après :
- perte de gains professionnels futurs incluant le préjudice de retraite : 423 651,84 euros
- incidence professionnelle : 74 000 euros,
Dit que ces sommes seront majorées des intérêts au taux légal à compter du jugement du 16 mai 2017 sur la somme de 50 000 euros allouée au titre de l'incidence professionnelle, à compter du du jugement du 11 septembre 2018 sur la somme de 56 054,53 euros allouée au titre de la perte de gains professionnels futurs et à compter du présent arrêt pour le surplus,
Dit que les intérêts seront capitalisés dans les conditions prévues à l'article 1154, devenu 1343-2 du code civil.
Condamne la société Areas dommages à payer à la Caisse des dépôts et consignations, en sa qualité de gérante de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la somme de 145 093,59 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Condamne la société Areas dommages, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour et à Mme [K] [V] épouse [P] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés depuis l'arrêt du 16 décembre 2019,
Condamne la société Areas dommages aux dépens d'appel exposés depuis l'arrêt du 16 décembre 2019 qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE