Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - A
ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2022
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08394 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7YXU
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 février 2019 - Tribunal d'Instance de SUCY EN BRIE - RG n° 11-18-001568
APPELANTE
Madame [T] [L] épouse [Z]
née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 5] (TUNISIE)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée et assistée de Me Maude HUPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0625
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/013811 du 15/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMÉE
La société INTRUM DEBT FINANCE AG société de droit étranger, prise en la personne de son représentant légal audit siège domicilié
[Adresse 6]
[Localité 3] (SUISSE)
représentée par Me Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : R231
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Ophanie KERLOC'H
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par acte sous seing privé en date du 6 novembre 1993, Mme [T] [L] épouse [Z] a contracté auprès de la société Franfinance une ouverture de crédit utilisable par fractions et reconstituable d'un montant initial de 20 000 francs. Un avenant de réaménagement a été signé le 11 juillet 1998 pour un montant de 31 603,62 francs remboursables en 120 mensualités de 538,10 francs au TEG de 16,44 %.
À la suite d'impayés, le contrat a été résilié.
Par ordonnance d'injonction de payer du tribunal d'instance de Boissy-Saint-Léger du 29 mars 1999, Mme [Z] a été condamnée à payer à la société Franfinance la somme principale de 33 753,87 francs (5 145,74 euros), outre les frais et intérêts.
L'ordonnance a été signifiée à Mme [Z] le 8 avril 1999 à mairie.
Le 16 octobre 2018, Mme [Z] a formé opposition à cette injonction de payer par déclaration au greffe.
Par jugement contradictoire du 14 février 2019, le tribunal d'instance de Sucy-en-Brie a :
- déclaré recevable la société Intrum debt finance AG en son action à l'encontre de Mme [Z] ;
- déclaré irrecevable l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 29 mars 1999 formée par Mme [Z] ;
- constaté que ladite ordonnance d'injonction de payer est devenue définitive et reprend donc force exécutoire ;
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne Mme [Z] aux entiers dépens comprenant le coût de la procédure d'injonction de payer tel qu'arrêté dans l'ordonnance d'injonction de payer en date du 29 mars 1999.
Le tribunal a retenu que la cession de créance était prouvée et avait été signifiée à Mme [Z] par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé réception signé le 13 mars 20l8 et que si cette dernière déniait la signature, elle n'apportait aucun élément objectif permettant de remettre en cause la signature apposée sur le récépissé.
Il a par ailleurs considéré que dans la mesure où il était produit un acte de saisie-vente effectué le 9 mars 2011, en présence du fils de Mme [Z] emportant indisponibilité des biens qui en étaient l'objet, l'opposition effectuée le 16 octobre 2018 était irrecevable.
Par déclaration réalisée par voie électronique le 16 avril 2019, Mme [Z] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions d'appelante n°2 notifiées par voie électronique le 26 mai 2021, Mme [Z] demande à la cour :
- de juger que la société la société Intrum debt finance AG n'a pas qualité à agir,
de juger irrégulière la signification de l'ordonnance d'injonction de payer effectuée le 29 mars 1999,
- de juger irrégulière la cession de créances effectuée,
- de juger que la société Intrum debt finance AG ne dispose pas d'un titre exécutoire valable,
- de juger que le titre exécutoire invoqué par la société Intrum debt finance AG est prescrit,
- de juger que le taux d'intérêt applicable aux sommes réclamées sera le taux légal,
- de juger que les règlements à intervenir s'imputeront en priorité sur le capital restant dû,
- de lui accorder les plus larges délais de paiement si une condamnation venait à être prononcée,
- de l'autoriser à régler la somme mensuelle de 100 euros par mois et le solde restant dû à la 24ème échéance,
- de condamner la société Intrum debt finance AG à lui payer 2 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle fait valoir que la société Intrum debt finance AG ne justifie pas de sa qualité à agir et que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer est nulle faute d'avoir été faite à personne et en l'absence de mentions justifiant des recherches effectuées et de l'impossibilité de cette remise.
Elle fait en outre état de la faiblesse de ses revenus.
Aux termes de ses conclusions d'intimé n°2 notifiées par voie électronique le 18 octobre 2021, la société Intrum debt finance AG demande à la cour :
- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 février 2019 par le Tribunal d'Instance de Sucy-en-Brie,
- à titre subsidiaire, de déclarer Mme [Z] mal fondée en son appel et de l'en débouter, et de la condamner à lui payer la somme de 3 804,19 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 1999,
- de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande de délais mais s'ils sont accordés, de les assortir d'une clause de déchéance du terme,
- en toute hypothèse, de condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître Elise Ortolland, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile,
Elle fait principalement valoir qu'elle a qualité à agir puisqu'elle agit en vertu d'une cession de créance intervenue le 17 mars 2017 et notifiée à Mme [Z] par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 mars 2018 et distribuée le 13 mars 2018.
Elle soutient que les actes de signification sont réguliers et que Mme [Z] demeurait bien à l'adresse à laquelle s'est rendu l'huissier si bien qu'il n'avait pas d'autre investigation à réaliser et qu'elle pouvait faire opposition ensuite, l'acte n'ayant pas été délivré à personne mais seulement jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la saisie vente réalisée à son domicile le 9 mai 2001 qui a rendu des biens indisponibles et que l'opposition formée le 16 octobre 2018 est donc irrecevable comme tardive.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 novembre 2021 et l'affaire a été appelée à l'audience le 28 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la qualité à agir de la société Intrum debt finance AG
La cession de créance dont se prévaut la société Intrum debt finance AG est intervenue le 17 mars 2017 soit après l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, applicable au 1er octobre 2016.
L'article 1324 du code civil applicable dispose que la cession n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
La société Intrum debt finance AG justifie de la cession de créance opérée par la société Franfinance par la production d'un bordereau de cession signé mentionnant ladite créance et elle dispose en outre de tous les documents afférents à cette créance.
Il a été procédé à la notification à Mme [Z] de cette cession par une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 9 mars 2018 et distribuée le 13 mars 2018 qui présente une signature qui n'est pas la même que celle figurant sur le crédit et venant de réaménagement et a été largement raturé avec de multiples mentions « refusé » barrées.
En tout état de cause, la société Intrum debt finance AG fait justement observer que la cession a également été portée à la connaissance du tiers cédé dans le cadre de l'instance devant le tribunal au moyen des conclusions prises par elle et que l'acte de cession a été versé aux débats devant le premier juge.
La société Intrum debt finance AG justifie donc de sa qualité à agir dans le cadre de cette instance en opposition engagée par Mme [Z].
Sur la recevabilité de l'opposition
Aux termes de l'article 1416 du code de procédure civile, l'opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l'ordonnance. Toutefois, si la signification n'a pas été faite à personne, l'opposition est recevable jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois suivant le premier acte signifié à personne, ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.
L'ordonnance d'injonction de payer a été sollicitée et obtenue par la société Franfinance auprès de laquelle Mme [Z] avait souscrit un contrat de crédit.
Elle a été signifiée à la demande de la société Franfinance le 8 avril 1999 à Mme [Z] au [Adresse 2] à [Localité 4] à domicile, le locataire du rez-de-chaussée ayant confirmé l'adresse.
A défaut d'opposition, elle a été revêtue de la formule exécutoire le 11 mai 1999 selon la procédure alors applicable et a de nouveau été signifiée le 19 mai 1999 à Mme [Z] au [Adresse 2] à [Localité 4] à domicile, le voisin du 1er étage ayant confirmé l'adresse.
Ces significations sont parfaitement régulières et Mme [Z] ne démontre d'ailleurs pas que cette adresse était erronée.
Pour autant la voie de l'opposition était toujours ouverte à Mme [Z], faute d'acte signifié à personne.
Le 9 mai 2001, la société Franfinance a fait procéder à une saisie vente au domicile de Mme [Z] en présence de son fils et a porté sur 1 télévision couleur Leyo, une platine Grundig et un bar d'angle.
Ce procès-verbal a rendu des biens indisponibles.
Dès lors c'est à juste titre que le premier juge a considéré que l'opposition faite le 16 octobre 2018 soit plus de 17 ans après cet acte n'était pas recevable.
Le jugement doit donc être confirmé.
Sur les autres demandes
L'opposition étant irrecevable, la cour est dessaisie et les demandes présentées par Mme [Z] relatives à la prescription du titre et aux délais de paiement ne sont pas recevables.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Mme [Z] qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle et il apparaît en outre équitable de laisser supporter à la société Intrum debt finance AG la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
Dit irrecevables les demandes de Mme [T] [L] épouse [Z] concernant la prescription du titre et les délais de paiement ;
Condamne Mme [T] [L] épouse [Z] aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;
Rejette la demande de la société Intrum debt finance AG sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente