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02/12/2022 | FRANCE | N°17/12867

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 02 décembre 2022, 17/12867


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 02 Décembre 2022

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/12867 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4JRV



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG n° 14-00838





APPELANT

Monsieur [I] [X]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Math

ieu FATREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0572 substitué par Me Lucie MÉFANO, avocat au barreau de PARIS, toque : E1006





INTIMEES

SAS [7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée pa...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 02 Décembre 2022

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/12867 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4JRV

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG n° 14-00838

APPELANT

Monsieur [I] [X]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Mathieu FATREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0572 substitué par Me Lucie MÉFANO, avocat au barreau de PARIS, toque : E1006

INTIMEES

SAS [7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Brigitte BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0372 substituée par Me Audrey BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1815

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ESSONNE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre et Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par M. [I] [X] d'un jugement rendu le 31 août 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [I] [X] (l'assuré), salarié de la société [7] (l'employeur) a établi le 27 juillet 2012 une déclaration de maladie professionnelle, qu'il a adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne (la caisse) accompagnée d'un certificat médical du Docteur [N] daté du 13 juillet 2012 faisant état de « syndrome douloureux radiculaire de type S1 de façon violente prédominante à gauche », précisant qu'il avait été opéré par ses soins le 2 juillet 2012. La caisse, qui a pris en charge cette affection au titre de la législation sur les risques professionnels a informé le 2 août 2013 la victime que son état de santé était considéré comme consolidé le 5 novembre 2012. L'assuré a déclaré une rechute le 31 mai 2013 que la caisse a refusé de prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. L'assuré ayant contesté ce refus, la caisse a mis en oeuvre une expertise technique prévue aux articles L.141-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Au vu des conclusions de cette expertise, l'organisme social a notifié le 17 février 2014 à l'assuré le maintien de sa décision de refus de prise en charge.

Après avoir vainement saisi la commission de recours amiable pour contester cette décision, M. [X] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry.

Par ailleurs, l'assuré a souscrit le 17 janvier 2014 une déclaration de maladie professionnelle, dont la prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels a été refusé par la caisse. Après vaine saisine de la commission de recours amiable, il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry, aux fins de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels et de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance de cette affection.

Le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry par jugement du 31 août 2017 a :

- ordonné la jonction des recours,

- déclaré M. [X] recevable en ses recours,

- débouté M. [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à la rechute déclarée le 31 mai 2013,

Avant dire droit,

- désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Hauts de France afin de recueillir son avis sur l'origine professionnelle de la maladie déclarée par M. [X] le 17 janvier 2014,

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne devra transmettre au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Hauts de Franc la présente décision et le dossier de M. [X],

- dit que M. [X] devra faire parvenir à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne dans les quinze jours de la notification de la présente décision les nouvelles pièces médicales qui seraient en sa possession,

- sursis à statuer sur l'ensemble du surplus des demandes des parties.

Le jugement lui ayant été notifié le 15 septembre 2017, M. [X] en a interjeté appel le 13 octobre 2017, cet appel étant limité aux chefs de dispositif l'ayant débouté de ses demandes de reconnaissance de la rechute déclarée le 13 mai 2013, de voir reconnue la faute inexcusable de son employeur et de sa demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son conseil, M. [X] demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [X] de ses demandes relatives à la rechute déclarée le 31 mai 2013,

- juger que l'action de M. [X] est recevable,

Avant dire droit,

- désigner, en application de l'article L.141-2 et R.141-2 du code de la sécurité sociale, tel comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles qu'il lui plaira aux fins d'apprécier s'il existe un lien de causalité entre la maladie professionnelle de M. [X] déclarée le 13 juillet 2012 et les lésions et les troubles invoqués lors de la rechute déclarée le 31 mai 2013,

A défaut,

- désigner tel expert qu'il lui plaira aux mêmes fins,

En tout état de cause,

- surseoir à statuer dans l'attente de l'avis médical du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ou de l'expert désigné.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son conseil, la caisse demande à la cour de :

- déclarer M. [X] mal fondé en son appel,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son conseil, la société [7] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré qu'il a déclaré irrecevable l'ensemble des demandes relatives à la rechute déclarée le 31 mai 2013

en conséquence, ,

- débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à la rechute déclarée le 31 mai 2013,

- condamner M. [X] à verser à la société [7] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [X] en tous les dépens,

à titre subsidiaire,

- déclarer que les conditions de saisine d'un CRRMP ne sont pas réunies dans le

cadre de la présente instance,

- déclarer irrecevable la demande présentée par M. [X] tendant à la désignation d'un CRRMP,

- déclarer irrecevable la demande présentée par M. [X] tendant à la décision d'un Médecin Expert,

- débouter M. [X] et, en tant que de besoin, toutes parties de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société [7],

- condamner M. [X] à verser à la société [7] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner M. [X] en tous les dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l'audience pour un plus ample exposé des moyens développés et soutenus à l'audience.

SUR CE, LA COUR

1. Sur le refus de prise en charge de la rechute

Aux termes de l'article L.443-1 du code de la sécurité sociale, toute modification dans l'état de la victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure, peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations.

Il résulte de l'article L.443-2 du même code que si l'aggravation de la lésion entraîne pour la victime la nécessité d'un traitement médical, qu'il y ait ou non nouvelle incapacité temporaire, la CPAM statue sur la prise en charge de la rechute.

Il est de principe que seules peuvent être prises en compte l'aggravation de la lésion initiale après consolidation ou les nouvelles lésions en lien de causalité direct et exclusif avec l'accident du travail et non les troubles qui, en l'absence d'aggravation de l'état de la victime retenue par l'expert, ne constituent qu'une manifestation de séquelles.

La victime d'une rechute ne bénéficie pas de la présomption d'imputabilité de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale et doit prouver qu'il existe une relation directe et unique entre les manifestations douloureuses postérieures à la consolidation de son état de santé et le traumatisme initial.

Il résulte des dispositions des articles L.141-1 et L.141-2 du code de la sécurité sociale que les contestations d'ordre médical opposant la caisse à l'assuré relatives notamment à l'état de ce dernier, donnent lieu à une expertise médicale technique dont les conclusions si elles procèdent d'une procédure régulière et sont claires, précises, dénuées d'ambiguïté, s'imposent aux parties ainsi qu'au juge du contentieux général de la sécurité sociale, qui ne dispose pas du pouvoir de régler une difficulté d'ordre médical.

Selon l'article R. 142-24-1 du code de la sécurité sociale, devenu l'article R. 142-17-1, II, du code de la sécurité sociale, lorsque le différend porte sur une décision prise après mise en oeuvre de la procédure d'expertise médicale prévue à l'article L.141-1, le tribunal peut ordonner une nouvelle expertise si une partie en fait la demande. Dans ce cas, les règles prévues aux articles R. 141-1 à R.141-10 s'appliquent sous réserve des dispositions du présent article.

Il en résulte que :

- soit les juges du fond, disposant d'un pouvoir souverain d'appréciation, estiment que les conclusions de l'expert sont claires et précises, ils sont alors tenus de tirer les conséquences légales qui en résultent sans pouvoir les discuter, sans préjudice de la possibilité d'ordonner une nouvelle expertise dont les conclusions s'imposeront dans les mêmes termes,

- soit ce n'est pas le cas et il leur appartient de recourir à un complément d'expertise, ou, sur la demande d'une partie, d'ordonner une nouvelle expertise technique.

Au cas particulier, sollicitant l'article R.141-1 du code de la sécurité sociale, l'assuré conteste la régularité de l'expertise en faisant valoir que le docteur [W] qui l'a réalisé, après avoir été désigné d'un commun accord entre son médecin traitant et le médecin-conseil de la caisse, n'était pas inscrit sur la liste des experts d'une cour d'appel ou la liste des experts de la Cour de cassation.

L'article R.141-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret 2010-344 du décret du 31 mars 2010 applicable au litige, dispose :

« Les contestations mentionnées à l'article L. 141-1 sont soumises à un médecin expert désigné, d'un commun accord, par le médecin traitant et le médecin conseil ou, à défaut d'accord dans le délai d'un mois à compter de la contestation, par le directeur général de l'agence régionale de santé ; celui-ci avise immédiatement la caisse de la désignation de l'expert. Dans le cas où l'expert est désigné par le directeur général de l'agence régionale de santé, il ne peut être choisi que parmi les médecins inscrits, sous la rubrique Experts spécialisés en matière de sécurité sociale, sur les listes dressées en application de l'article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 et de l'article 1er du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatifs aux experts judiciaires. »

Il ressort de la lettre de ce texte que le médecin expert doit être choisi sur une liste d'experts dressée par une cour d'appel par la Cour de cassation, lorsqu'il est désigné par le directeur général de l'agence régional de santé. Or, en l'espèce, l'expert a été désigné d'un commun accord des parties, comme en atteste la réponse du docteur [N] à la caisse (pièce n°7 de la caisse). Dès lors, les dispositions que l'appelant invoque à l'appui de sa demande de nullité de l'expertise ne sont pas applicables en l'espèce et le moyen de droit est inopérant.

Sur le fond, pour critiquer l'avis de l'expert, l'assuré se prévaut uniquement du certificat de médical rédigé par son médecin traitant le 31 mai 2013, qui a effectivement déclaré qu'il s'agissait d'une rechute (pièce n°6 de l'assuré), mais c'est précisément parce que cette seule pièce médicale a été estimée insuffisante à établir cette rechute que le médecin conseil de la caisse en a refusé la prise en charge. Cette seule pièce ne saurait donc justifier qu'il soit ordonné une nouvelle expertise technique. L'autre pièce médicale produite par l'assuré (pièce n°7 de l'assuré) date de 2016, soit une date bien postérieure à celle à laquelle il convient de se placer pour apprécier l'existence ou non d'une rechute et ne peut pas plus justifier le prononcé d'une seconde expertise.

Les éléments produits par l'assurée sont, en conséquence, insuffisants à contredire l'avis du Docteur [W] et ne sont pas davantage de nature à créer un litige d'ordre médical qui emporterait la nécessité d'un recours à un complément d'expertise ou à une nouvelle expertise.

Si l'assuré sollicite la saisine d'un CRRMP pour examiner le caractère professionnel de la rechute déclarée le 30 mai 2013, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale un CRRMP doit être désigné en cas de déclaration de maladie professionnelle ne correspondant pas une affectation visé par un tableau ou ne réunissant pas les conditions prévues par ce tableau. Le refus de prise en charge d'une rechute par la caisse ne correspond donc pas aux cas dans lesquels la juridiction a la possibilité de désigner un CRRMP.

En effet, la question de la prise en charge d'une rechute relève exclusivement d'une mesure d'expertise technique prévue aux articles L.141-1 et suivants du code de la sécurité sociale. La cour a constaté par les motifs précédents que la caisse l'a effectivement mise en oeuvre et que l'assuré échouait à démontrer la nécessité d'ordonner une seconde mesure de ce type, qui est la seule qui pourrait être envisagée. En conséquence, l'assuré sera débouté de l'ensemble de ses demandes.

La décision du premier juge doit être confirmée, précision faite qu'il n'y a évidement pas lieu d'évoquer les points sur lesquels le premier juge a sursis à statuer dans l'attente de l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Hauts de France qu'il a désigné s'agissant de la maladie professionnelle déclaré le 17 janvier 2014.

2. Sur l'article 700 du code de procédure civile

La société [7] sera déboutée de sa demande de frais irrépétibles.

3. Sur les dépens

M. [I] [X] , succombant en cette instance, devra en supporter les dépens engagés depuis le 1er janvier 2019.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry du 31 août 2017 dans ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Déboute la société [7] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

Condamne M. [I] [X] aux dépens de la procédure d'appel engagés depuis le 1er janvier 2019.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 17/12867
Date de la décision : 02/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-02;17.12867 ?
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