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02/12/2022 | FRANCE | N°18/13765

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 02 décembre 2022, 18/13765


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 02 Décembre 2022

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/13765 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B64IF



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Octobre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VAL-DE-MARNE RG n° 17-00874





APPELANTE

Madame [P] [C]

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée

par Me Tamara LOWY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 141

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/016663 du 23/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridicti...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 02 Décembre 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/13765 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B64IF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Octobre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VAL-DE-MARNE RG n° 17-00874

APPELANTE

Madame [P] [C]

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Tamara LOWY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 141

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/016663 du 23/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEES

C.P.A.M. DU VAL DE MARNE

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

SARL [7]

[Adresse 2]

[Localité 4]

non comparante et non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Monsieur Gilles BUFFET,

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRÊT :

- RENDU PAR DEFAUT

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre et Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par Mme [P] [C] d'un jugement rendu le 10 octobre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil dans un litige l'opposant à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne et à la S.A.R.L. [7].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que Mme [P] [C], salariée de la S.A.R.L. [7], a complété le 30 juin 2019 une déclaration d'accident du travail qui serait survenue le 19 avril 2016 à 10 h 15 au sein de l'entreprise ; qu'elle joignait une autre déclaration selon laquelle son employeur avait refusé d'en établir une ; qu'elle joignait un certificat médical ; qu'après enquête, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne refusait la prise en charge au titre de la législation professionnelle ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne formait un recours devant le tribunal.

Par jugement en date du 10 octobre 2018, le tribunal a :

déclaré le recours de Mme [P] [C] recevable en la forme mais mal fondé ;

débouté Mme [P] [C] de son recours tendant à voir prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels l'accident dont elle déclare avoir été victime le 19 avril 2016 ;

confirmé la décision de refus de prise en charge de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne.

Le tribunal a jugé que la matérialité des faits n'était pas établie en raison de l'absence de témoignage et de l'existence de contradictions entre Mme [P] [C] et son employeur sur la version des faits quant à la survenance de l'altercation et le déroulement des faits. Le tribunal a ajouté que l'altercation n'avait aucun lien avec l'activité professionnelle de la salariée et que la seule altercation démontrée ne s'est pas déroulée à l'horaire indiqué par la salariée.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception qui n'a pas été remise à Mme [P] [C] qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 6 décembre 2018.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, Mme [P] [C] demande à la cour de :

infirmer le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité sociale de Créteil du 10 octobre 2018 ;

en conséquence,

dire et juger que l'agression qu'elle a subie par une de ses collègues sur son lieu de travail, le 19 avril 2016 est bien un accident du travail ;

condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne à payer à Me Lowy la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile ;

condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne aux entiers dépens.

Mme [P] [C] expose qu'un faisceau d'indices précis et concordants (dont la reconnaissance des circonstances cet accident par l'employeur lui-même) permet de conclure à la réalité de l'accident du 19 avril 2016 ; qu'en tout état de cause, suivant la Cour de cassation, pour que l'accident du travail soit caractérisé, il suffit que l'altercation se produise alors que les protagonistes sont sous l'autorité de l'employeur ; que la preuve d'une cause totalement étrangère au travail n'est nullement rapportée par les propos qu'elle a tenus lors de sa main courante et de son dépôt de plainte, puisqu'elle indique bien qu'elle a été agressée, après s'être entretenue avec l'une de ses collègues, l'origine de l'animosité de Mme [F] étant indifférente.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne demande à la cour de :

confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

et ce faisant,

sur la demande de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident qui serait survenu le 19 avril 2016 :

dire que c'est à bon droit qu'elle a refusé à Mme [P] [C] la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident dont elle a déclaré avoir été victime le 19 avril 2016 ;

en conséquence,

débouter Mme [P] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

sur l'opposabilité de la décision à venir à l'employeur :

déclarer la décision à venir pleinement opposable à la S.A.R.L. [7] ;

en conséquence,

dire que la S.A.R.L. [7] devra supporter l'ensemble des conséquences financières liées à une éventuelle prise en charge ordonnée par la Juridiction ;

sur la demande de condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile :

condamner Mme [P] [C] au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne expose que la déclaration d'accident du travail a été établie tardivement par Mme [P] [C] dont l'employeur n'a pour sa part jamais complété de déclaration d'accident du travail ; que dans sa déclaration, Mme [P] [C] ne mentionne aucun témoin ni personne pouvant corroborer ses déclarations et confirmer la survenance de l'accident dans les circonstances alléguées ; que dans le cadre de l'instruction, l'employeur n'a pas donné suite à ses sollicitations ; que la version des faits ainsi détaillée par l'employeur présente donc quelques contradictions avec celle livrée par la salariée ; que la même constatation émane d'ailleurs de la main courante et du procès-verbal de dépôt de plainte produits par la salariée devant la Commission de Recours Amiable ; qu'il ne fait aucun doute que l'altercation n'avait pas de lien avec l'activité professionnelle ; que la S.A.R.L. [7], régulièrement appelée en la cause, a été mise en mesure de faire valoir ses moyens de défense pour que le caractère professionnel de l'accident invoqué le 19 avril 2016 par Mme [P] [C] ne soit pas reconnu ; qu'en conséquence, la décision à venir sera déclarée pleinement opposable à la société qui devra seule supporter les conséquences financières d'une éventuelle prise en charge ordonnée par la Juridiction de sécurité sociale.

La S.A.R.L. [7], régulièrement assignée par acte extrajudiciaire en date du 6 juillet 2022 remis en l'étude de l'huissier, n'a pas comparu.

SUR CE :

Il résulte des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci (Soc., 2 avril 2003, n° 00-21.768, Bull. n° 132). Les juges du fond apprécient souverainement si un accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail (Soc., 20 décembre 2001, Bulletin civil 2001, V, n° 397).

Le salarié doit ainsi établir autrement que par ses propres affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel (Soc., 26 mai 1994, Bull. n° 181) ; il importe qu'elles soient corroborées par d'autres éléments (Soc., 11 mars 1999, n° 97-17.149, Civ 2ème 28 mai 2014, n° 13-16.968).

En revanche, dès lors qu'il est établi la survenance d'un événement dont il est résulté une lésion aux temps et lieu de travail, celui-ci est présumé imputable aux travail, sauf pour celui qui entend la contester de rapporter la preuve qu'elle provient d'une cause totalement étrangère au travail.

En l'espèce, Mme [P] [C] a déclaré le 30 juin 2016 avoir été victime d'un accident du travail qui serait survenu le 19 avril 2016 à 10 heures 15. Elle expose avoir été agressée par une collègue, Mme [F], sur son lieu de travail ; cette collègue lui aurait tiré les cheveux très forts, en lui en arrachant quelques-uns et l'aurait giflée au visage ; elle aurait alors chuté et se serait fait mal à la main droite et au cou.

La déclaration ne mentionne aucun témoin.

Le jour des faits, Mme [P] [C] a déposé une main courante au commissariat de police de [Localité 6]. Elle déclare qu'alors qu'elle plaisantait avec une autre collègue, Mme [F] serait venue vers elle, l'aurait prise à partie en lui disant qu'elle se moquait d'elle puis l'aurait attrapée par les cheveux et l'aurait griffée au vissage et à l'oeil. Cette déclaration n'est pas conforme à celle établie pour dénoncer l'accident du travail et ne mentionne pas d'identification de témoin.

Elle a de même consulté le même jour aux urgences de l'hôpital [8] et a fait constater une érosion sous orbitaire droite et de la racine du nez, un traumatisme cervical sans perte de connaissance initiale, une contracture des trapèzes avec limitation des mouvements du cou et une contusion lombaire.

Selon le compte-rendu de l'entretien préalable au licenciement de Mme [P] [C], établi par M. [T] [K], l'employeur reconnaît l'existence d'une altercation avec échanges d'insultes, mais sans coup porté, dans un premier temps, et en présence d'un responsable, M. [H], gérant de la société, avant que Mme [P] [C] repousse sa collègue qui lui aurait sauté dessus en lui arrachant les cheveux et lui occasionnant un oeil au beurre noir.

La lettre de licenciement, rédigée par M. [H], indique que les faits se sont déroulés à 11 h 30. L'employeur expose qu'après avoir été mis au courant d'une première altercation entre les deux salariés, il les avait convoquées. Il relate ensuite la même altercation que celle décrite par M. [K], témoin de l'entretien préalable. Seule cette pièce permet de préciser l'heure d'une altercation et porte témoignage.

Cette dernière pièce relate donc l'existence de deux séries de faits distincts, une première altercation avec Mme [F], sans témoin, et une seconde altercation à la suite de la convocation chez le gérant de la S.A.R.L. [7]. Selon les récits concordants, l'employeur affirme avec constance que les lésions dénoncées par Mme [P] [C] sont la conséquence des faits commis en présence du gérant. La salariée ne dépose aucune pièce susceptible d'apporter la contradiction aux affirmations de son employeur.

Interrogée lors de son dépôt de plainte ultérieure, le 5 juillet 2016, elle reconnaît l'altercation devant le gérant de la S.A.R.L. [7], mais maintient la thèse d'une agression physique préalable.

Les pièces déposées par Mme [P] [C] ne démontrent cependant que l'existence d'un échange verbal tendu avec Mme [F], ce que M. [H] ne conteste pas. La salariée ne prouve pas que ce premier échange lui ait occasionné un choc psychologique

quelconque ou d'autres lésions de nature corporelle, ces allégations ne reposant que sur son témoignage.

Les pièce médicales versées rattachent les lésions aux faits décrits par l'employeur lors de la seconde altercation.

La déclaration d'accident du travail, établie deux mois après, fait part de faits et de lésions corporelles survenus sans témoins, sans constatation immédiate.

En conséquence, la matérialité des faits allégués comme étant survenus à 10h15 ne repose donc que sur les déclarations de la salariée puisque les pièces déposées prouvent un accident du travail survenu le 19 avril 2019 à 11 h 30 et non à l'heure déclarée par la salariée.

Il ne peut s'agir d'une erreur, dès lors qu'interrogée sur la réalité de l'altercation devant le gérant de la S.A.R.L. [7], Mme [P] [C] en a admis la réalité et la violence mais n'est pas revenue sur ses déclarations, maintenant que les blessures avaient été occasionnée antérieurement.

Dès lors, le jugement déféré ne peut qu'être confirmé.

Mme [P] [C], qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour :

DÉCLARE recevable l'appel de Mme [P] [C] ;

CONFIRME le jugement rendu le 10 octobre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil ;

CONDAMNE Mme [P] [C] aux dépens d'appel ;

DIT qu'ils seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 18/13765
Date de la décision : 02/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-02;18.13765 ?
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