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16/12/2022 | FRANCE | N°17/11835

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 16 décembre 2022, 17/11835


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 16 Décembre 2022



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/11835 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3C5



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 16/01391





APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAL DE MARNE

[Adress

e 1]

[Localité 4]

représentée par Me Lucie DEVESA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901





INTIMEE

SAS [5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Bertrand PATRIGEON, avoca...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 16 Décembre 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/11835 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3C5

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 16/01391

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAL DE MARNE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Lucie DEVESA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIMEE

SAS [5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Bertrand PATRIGEON, avocat au barreau de PARIS, toque : K0073 substitué par Me Thibault MERCIER-MAUDUIT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0073

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats, assistée de Madame Méganne MOIRE, greffière stagiaire

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne d'un jugement rendu le 28 août 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la S.A.S [5].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [W] [V], salarié de la S.A.S [5], a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 9 novembre 2015 indiquant qu'au cours d'une manipulation d'une banquette de siège arrière de véhicule, il aurait ressenti une douleur au niveau du dos ; que le 8 février 2016, la caisse prenait en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels ; que la S.A.S [5] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable puis a saisi le 28 juin 2016 le tribunal de son recours.

Par jugement en date du 28 août 2017, le tribunal a :

- déclaré recevable le recours formé par la S.A.S [5] ;

- dit ce dernier bien fondé ;

- déclaré inopposable à la S.A.S [5] la décision du 8 février 2016 de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne acceptant de prendre en charge l'accident du travail en date du 9 novembre 2015 déclaré par M. [W] [V] au titre de la législation professionnelle.

Le tribunal a relevé que même si l'employeur avait bénéficié d'un délai minimum de 10 jours francs pour consulter le dossier, la caisse avait pris sa décision à une date antérieure à celle qu'elle avait notifiée dans le cadre de son instruction, soit le 8 février 2016 au lieu du 9 février 2016. Il en a conclu que la caisse n'avait pas respecté le principe du contradictoire.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 11 septembre 2017 à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 26 septembre 2017.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Bobigny ;

et statuant à nouveau,

- prononcer l'opposabilité à la S.A.S [5] de la décision de prise en charge de l'accident dont a été victime M. [W] [V] le 9 novembre 2015 ;

- débouter la S.A.S [5] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la S.A.S [5] demande à la cour de :

- confirmer purement et simplement en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Bobigny ;

- constater que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne a violé le principe du contradictoire en décidant de prendre en charge l'accident de M. [W] [V] du 9 novembre 2015 au titre de la législation professionnelle avant la date qu'elle avait annoncée ;

- lui déclarer en conséquence la décision de prise en charge de l'accident dont a été victime M. [W] [V] le 9 novembre 2015 inopposable ainsi que les conséquences financières en découlant ;

- condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 24 octobre 2022 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE :

- sur le respect du contradictoire

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne expose que, par lettre du 19 janvier 2016 réceptionnée le 22 janvier 2016, elle a notifié la fin de l'instruction et invité la S.A.S [5] à venir consulter les éléments du dossier susceptibles de lui faire grief avant le 9 février 2016 ; que le 8 février 2016, elle a notifié sa décision de prise en charge ; que compte tenu des délais postaux, ce courrier posté le 10 février 2016 a été réceptionné par la S.A.S [5] après le 9 février 2016 ; qu'ainsi, bien qu'elle ait notifié sa décision de prise en charge un jour avant la date indiquée dans sa lettre de clôture d'instruction, il n'en demeure pas moins que la société a bénéficié de 18 jours francs pour venir consulter les éléments susceptibles de lui faire grief ; que le délai suffisant de dix jours francs a donc largement été respecté ; que la seule obligation mise à la charge des caisses est de laisser au moins dix jours francs à l'employeur pour consulter les éléments susceptibles de lui faire grief ; que la date à laquelle les caisses entendent prendre leur décision n'a même pas besoin d'être communiquée à l'employeur et n'est précisée aux parties que de manière indicative ; que dès lors qu'en l'espèce elle a laissé à l'employeur 18 jours francs pour prendre connaissance du dossier, la société ne saurait se prévaloir valablement du fait que la décision soit intervenue plus tôt pour obtenir son inopposabilité sans démontrer le moindre grief  ; qu'en outre, l'employeur ne s'est jamais manifesté, ni pendant les 18 jours francs, ni postérieurement.

La S.A.S [5] réplique qu'afin d'assurer l'information de l'employeur préalablement à sa décision, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne doit attendre l'expiration du délai imparti à l'employeur pour faire part de ses observations ; qu'elle ne peut prendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident ou la maladie avant la date annoncée, auquel cas cette décision doit être déclarée inopposable à l'employeur ; que dans sa notification de clôture d'instruction, la Caisse a précisé ainsi clairement que sa décision interviendrait le 9 février 2016 ; que conformément aux textes et à la jurisprudence, dès lors que la Caisse Primaire avait indiqué la date à laquelle elle rendrait sa décision, elle ne pouvait rendre une décision avant cette date ; qu'elle s'est prononcé sur le caractère professionnel de l'accident du 9 novembre 2015 déclaré par M. [W] [V] le 8 février 2016, soit avant la date qu'elle avait elle-même fixée.

Selon l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige :

Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

En cas de saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 461-1, le délai imparti à ce comité pour donner son avis s'impute sur les délais prévus à l'alinéa qui précède.

Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief.

Le médecin traitant est informé de cette décision.

En application de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, la caisse primaire d'assurance maladie est tenue, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, d'informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, de la possibilité de consulter le dossier pendant un certain délai et de la date à compter de laquelle elle prévoit de prendre sa décision. Il en résulte que la caisse doit attendre l'expiration du délai qu'elle impartit à l'employeur avant de prendre sa décision. (Civ. 2ème, 16 octobre 2008, Bull.,II, n 214 ; 2e Civ., 8 janvier 2009, pourvoi n° 07-21.420, Bull. 2009, II, n° 7 et Civ 2 ème , 2 mars 2004, n° 02-31.135 et n° 02-30.689, Bull II n° 80).

La faculté pour l'employeur de se prévaloir d'un manquement de la caisse à son obligation d'information n'étant pas subordonnée à l'existence d'un grief, en sorte que le seul manquement de la caisse à son obligation, justifie que la décision prise par la caisse à la suite, soit déclarée inopposable à l'employeur.

En l'espèce, la S.A.S [5] a déclaré l'accident du travail dont a été victime M. [W] [V] le 12 novembre 2015. Le 19 janvier 2016, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne adresse à la S.A.S [5] la lettre l'informant de la possible consultation du dossier avant la prise de décision qui devait intervenir le 9 février 2016, la notification effective intervenant le 22 janvier 2016, selon l'accusé de réception signé. La décision de prise en charge a été prise le 8 février 2016, soit avant l'expiration du délai imparti par la caisse à la société pour consulter le dossier.

Il importe peu que la société ait bénéficié de dix jours francs et que la lettre de notification soit arrivée postérieurement à l'expiration dudit délai.

En conséquence, le jugement doit être approuvé en ce qu'il a déclaré inopposable à la S.A.S [5] la décision du 8 février 2016 de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne acceptant de prendre en charge l'accident du travail en date du 9 novembre 2015 déclaré par M. [W] [V] au titre de la législation professionnelle.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne, qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel et au paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour :

Déclare recevable l'appel de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne ;

Confirme le jugement rendu le 28 août 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny ;

Y ajoutant :

Condamne la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne à payer à la S.A.S [5] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Val-de-Marne aux dépens d'appel.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 17/11835
Date de la décision : 16/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-16;17.11835 ?
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