REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 5
ARRET DU 26 JANVIER 2023
(n°2023/ , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00094 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBGNY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/07229
APPELANT
Monsieur [C] [K]
[Adresse 3]
[Localité 8]
né le 10 Mai 1988 à [Localité 9]
Assisté de Me Anastasia KOMNIDIS, avocat au barreau de PARIS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/058576 du 18/12/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMEES
SARL ACCESS INTERIM
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentée par Me Fabien BARBUDAUX-LE FEUVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R057
SA CAVIAR PETROSSIAN
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Fabien BARBUDAUX-LE FEUVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R057
S.A.S. LOGISTIQUE GALERIES LAFAYETTE
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Jérôme DANIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : G0035
SAS GALERIES LAFAYETTE HAUSSMANN
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Jérôme DANIEL de l'AARPI EUNOMIE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0035
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, Présidente de formation,
Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre,
Madame Séverine MOUSSY, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HERVIER, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,
- signé par Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [C] [K] a été mis à disposition de la société Caviar Petrossian par deux contrats de mission conclus avec la société de travail temporaire Accès interim en date des :
- 6 mars 2017 pour la période du 7 au 19 mars 2017 avec une période de souplesse du 16 au 21 mars 2017 pour une durée de travail hebdomadaire de 35 heures,
- 17 mars 2017 pour la période du 19 mars 2017 au 22 avril 2017 inclus avec une période de souplesse du 13 avril 2017 au 2 mai 2017.
La société Accès interim a mis fin au dernier contrat de mission le 13 avril 2017.
M. [K] a également été mis à la disposition de la société Galeries Lafayette Haussmann par quatre contrats de mission d'une journée conclus avec la société Access interim en date des :
- 19 mars 2017 pour la journée du dimanche 19 mars 2017,
- 26 mars 2017 pour la journée du dimanche 26 mars 2017,
- 2 avril 2017 pour la journée du dimanche 2 avril 2017,
- 9 avril 2017 pour la journée du dimanche 9 avril 2017.
Sollicitant dans le dernier état de ses demandes, la requalification de l'ensemble des contrats de mission en contrat à durée indéterminée à effet au 7 mars 2017 et soutenant que la rupture du dernier contrat de mission devait s'analyser comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris par requête enregistrée le 21 septembre 2018 et dans des conditions qui font litige entre les parties d'abord à l'encontre de la société Access interim puis à l'encontre des sociétés suivantes :
- la société Galeries Lafayette par exploit délivré à personne morale le 8 mars 2019,
- la société Accès interim par exploit délivré le 11 mars 2019,
- la société Caviar Petrossian par exploit délivré à personne morale le 11 mars 2018,
- la société Galeries Lafayette Haussmann par exploit délivré à personne morale le 9 mai 2018.
La société Galeries Lafayette logistique est intervenue volontairement à l'instance sur l'assignation délivrée à la société Galeries Lafayette en indiquant qu'aucune société à ce nom n'existait mais que le numéro de siret cité dans l'assignation était le sien et a sollicité sa mise hors de cause.
Toutes les sociétés défenderesses ont sollicité la nullité de la requête introductive d'instance sur le fondement des articles 58 du code de procédure civile et R. 1452-2 du code du travail.
Par jugement du 10 octobre 2019 auquel la cour renvoie pour l'exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Paris a constaté la nullité de la requête et laissé les dépens à la charge de M. [K].
M. [K] a régulièrement relevé appel du jugement le 27 décembre 2019 à l'encontre des sociétés Accès interim, Caviar Pétrossian, Logistique galeries Lafayette, Galeries Lafayette Haussmann.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le auxquelles la cour renvoie conformément à l'article 455 du code de procédure civile pour plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [K] prie la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a constaté la nullité de la requête introductive d'instance,
- dire n'y avoir lieu à annuler la requête,
- requalifier les contrats de mission en contrat à durée indéterminée à effet au 7 mars 2017,
- condamner solidairement les sociétés intimées à lui verser les sommes de :
* 2 305,90 euros à titre d'indemnité de requalification,
* 6 917,70 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
* 854,17 euros à titre de rappel de salaire outre 85,41 euros au titre des congés payés afférents,
* 2 305,90 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 230,59 euros au titre des congés payés afférents,
* 85,41 euros au titre des congés payés afférents,
* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me Kominis,
- condamner solidairement les parties intimées aux dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions d'intimée n° 3 transmises par voie électronique le 4 octobre 2022 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, les sociétés Logistique galeries Lafayette et Galeries Lafayette Haussmann prient la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la nullité de la requête introductive d'instance,
- constater la nullité de la requête de M. [K] en date du 21 septembre 2018 et les actes subséquents (notamment les interventions forcées),
- juger prescrite l'action de M. [K],
- mettre hors de cause la société Logistique galeries Lafayette,
Subsidiairement,
- débouter M. [K] de l'ensemble de ses demandes,
A titre reconventionnel,
- condamner M. [K] à verser respectivement à chacune d'entre elles la somme de 2 000 euros pour procédure abusive et la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières conclusions d'intimées transmises par voie électronique le 4 octobre 2022 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens confirmément à l'article 455 du code de procédure civile, les sociétés Access interim et Soc Caviar Pétrossian prient la cour de :
- confirmer le jugement,
- juger que la requête introductive d'instance est nulle,
- déclarer M. [K] irrecevable en ses demandes,
Subsidiairement,
- juger l'action de M. [K] prescrite en application de l'article L. 1471-1 du code du travail,
- débouter M. [K] de l'ensemble de ses demandes,
Subsidiairement,
- limiter le montant de l'indemnité de requalification à la somme de 1 363,18 euros, le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 1 805,23 euros outre 180,52 euros au titre des congés payés afférents, le montant du rappel de salaire à la somme de 424,24 euros outre 42,47 euros au titre des congés payés afférents,
- débouter M. [K] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [K] à leur verser la somme de 1 500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2022 et l'affaire est venue pour plaider à l'audience collégiale du 13 octobre 2022 pour décision être rendue le 26 janvier 2023.
MOTIVATION :
Sur la nullité de la requête introductive d'instance :
Aux termes de l'article 53 du code de procédure civile, 'La demande initiale est celle par laquelle un plaideur prend l'initiative d'un procès en soumettant au juge ses prétentions.
Elle introduit l'instance.'
L'article 54 du même code dispose que : 'Sous réserve des cas où l'instance est introduite par la présentation volontaire des parties devant le juge, la demande initiale est formée par assignation, par remise d'une requête conjointe au secrétariat de la juridiction ou par requête ou déclaration au secrétariat de la juridiction.'
L' article 56 du code de procédure civile précise que :
'L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice :
1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier.
Elle comprend en outre l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.
Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, l'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.
Elle vaut conclusions.'
L' article 58 du code de procédure civile prévoit que : 'La requête ou la déclaration est l'acte par lequel le demandeur saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé.
Elle contient à peine de nullité :
1° Pour les personnes physiques : l'indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ;
Pour les personnes morales : l'indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l'organe qui les représente légalement ;
2° L'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée, ou, s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
3° L'objet de la demande.
Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.
Elle est datée et signée.'
S'agissant plus spécifiquement de la requête saisissant le conseil de prud'hommes, l'article R. 1452-3 du code du travail, dans sa version en vigueur du 12 mai 2017 au 1er janvier 2020, applicable au litige dès lors que l'action a été diligentéele 21 septembre 2018 précise que :
" La requête est faite, remise ou adressée au greffe du conseil de prud'hommes.
Elle comporte les mentions prescrites à peine de nullité à l'article 58 du code de procédure civile. En outre, elle contient un exposé sommaire des motifs de la demande et mentionne chacun des chefs de celle-ci. Elle est accompagnée des pièces que le demandeur souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.
La requête et le bordereau sont établis en autant d'exemplaires qu'il existe de défendeurs, outre l'exemplaire destiné à la juridiction. "
L'article 114 du code de procédure civile dispose que ' Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public'.
Enfin, aux termes de l'article 115 du code de procédure civile, 'La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.'
Les sociétés défenderesses soutiennent que la requête introductive d'instance est nulle aux motifs que :
- la requête qui leur a été communiquée dans l'acte d'assignation du 11 mars 2019 ne contient ni exposé sommaire des motifs de la demande, ni pièces justificatives et ne fait pas état des diligences entreprises en vue d'obtenir une résolution amiable du litige ; elle n'est ni datée ni signée,
- la requête communiquée dans les exploits ne correspond pas à celle qui a été enregistrée au greffe du conseil de prud'hommes dés lors que cette dernière requête était signée et datée contrairement à celle qui a été notifiée par exploit d'huissier, laquelle comprend en outre de nombreuses ratures, et mentionne des sommes différentes,
Elle soutiennent que ces éléments sont de nature à leur causer grief, l'auteur de la requête n'étant pas identifié, l'action diligentée à leur encontre étant inintelligible à défaut d'exposé même sommaire des motifs et les nombreuses erreurs de M. [K] ayant conduit à des opérations de recherches et plusieurs renvois.
M. [K] s'oppose à la demande en faisant valoir que :
- il a déposé sa requête sans l'assistance d'un avocat, et a régularisé les maladresses qu'il a pu commettre, étant rappelé qu'il est de nationalité étrangère, dés qu'il a eu un avocat désigné par l'aide juridictionnelle, conformément à l'article 115 du code de procédure civile,
- l'exposé du litige n'est pas presrit à peine de nullité, et il pouvait développer oralement ses motifs jusque devant l'audience dès lors que la procédure est orale,
- il a repris ses prétentions dans ses conclusions de sorte que le conseil de prud'hommes devait statuer au vu de celles-ci et qu'elles ont été soumises à débat contradictoire,
- il ne doit pas être mis à sa charge un formalisme disproportionné de nature à porter atteinte à son droit d'accès au juge, ainsi que cela résulte de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme.
La cour observe en premier lieu qu'aucune des sociétés défenderesses n'a communiqué les pièces annexes qui lui ont été notifiées par exploit d'huissier. En revanche, M. [K] communique quant à lui une partie de cette requête (pièce 9 de son bordereau de communication de pièces) qui fait apparaître que cette requête n'est pas identique à clle qui a été enregistrée au greffe :
- la première page de la requête notifiée ne comprend pas les mentions remplies par le conseil de prud'hommes,
- les pages ne sont pas ordonnées de la même façon,
- les prétentions ne sont pas les mêmes,
- les demandes chiffrées ne sont pas les mêmes.
Il ressort des écritures de M. [K] (page 3) qu'il avait bien un avocat à l'époque, qu'il a " donné l'exemplaire que j'ai faites d'après mes mémoires ".
Il s'ensuit que le document intitulé requête notifiées aux parties adverses n'était pas conforme à l'original.
Cependant, même si ce document tronqué n'est pas conforme à l'original, il n'en demeure pas moins que :
- l'original de la requête figurant au dossier du conseil de prud'hommes est daté, signé, contient un exposé des motifs - peu importe qu'il soit particulièrement sommaire- et y étaient joints les contrats de missions critiqués, de sorte que le conseil de prud'hommes a été valablement saisi de la demande,
- les assignations délivrées à chacune des sociétés défenderesse contenaient un exposé des faits, et des prétentions précises de sorte qu'elles ne peuvent valablement prétendre avoir subi un grief du fait de la modification par M. [K] de la requête initiale jointe en annexe, dès lors qu'elles ont été informées des demandes de celui-ci.
La cour rejette en conséquence la demande de nullité présentée et infime le jugement de ce chef.
Sur la prescription de l'action en requalification :
Aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail, " Toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.
Les deux premiers alinéas ne sont toutefois pas applicables aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7, L. 1237-14 et L. 1237-19-8, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5.'
NOTA :
Conformément à l'article 40-II de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ces dispositions s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de publication de ladite ordonnance, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Lorsqu'une instance a été introduite avant la publication de ladite ordonnance, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne y compris en appel et en cassation.
Les sociétés Logistique galeries Lafayette et Galeries Lafayette Haussmann soulèvent la prescription de l'action de M. [K] à leur encontre, motifs pris que la société Galeries Lafayette Haussmann a été attraite en la cause par exploit du 9 mai 2019, de sorte que le terme du dernier contrat de mission conclu avec M. [K] étant le 9 avril 2017, date du dernier contrat de mission, le délai de prescription de deux ans a expiré et que sa demande est prescrite.
M. [K] est resté taisant sur cette fin de non-recevoir.
Le point de départ du délai de prescription en matière de requalification d'une succession de contrats de travail pour un motif de fond, comme c'est le cas en l'espèce, est le terme du dernier contrat soit le 9 avril 2017. A l'époque, le délai de prescription de l'action, portant sur l'exécution du contrat de travail était de deux ans en application de l'article L. 1471-1 du code du travail dont les dispositions sur ce point n'ont pas été modifiées par l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.
Cependant, M. [K] avait saisi dans des conditions qui ont été reconnues comme valides par la cour le conseil de prud'hommes d'une action à l'encontre de la société de travail temporaire Accès interim le 21 septembre 2018 de sorte que cette saisine à l'encontre de l'entreprise de travail temporaire portant sur l'exécution de la même relation de travail a interrompu la prescription de la demande de M. [K] portant sur la requalification de la relation de travail à l'égard de l'entreprise utilisatrice. La fin de non-revevoir soulevée est rejetée.
Sur la requalification des contrats de mission à l'encontre de la société Logitique galeries Lafayette :
Cette société n'étant intervenue à aucun moment de la relation contractuelle avec M. [K] est mise hors de cause.
Sur la demande de requalification des contrats de mission :
S'agissant des contrats conclus avec l'entreprise utilisatrice Caviar Pétrossian :
Les deux contrats ont été conclus aux motifs d'un accroissement temporaire d'activité lié à l'ouverture des galeries Lafayette 6.
M. [K] soutient que :
- ce motif n'est pas démontré et que les contrats s'inscrivaient dans la pérennité et qu'il participait en conséquence à l'activité permanente et durable de l'entreprise,
- les contrats ont été conclus sans respect du délai de carence,
- la clause de souplesse n'a pas été respectée.
Les sociétés Accès interim et Caviar Pétrossian concluent au débouté.
Sur le motif du recours au contrat de travail temporaire :
Aux termes de l'article L. 1251-5 du code du travail, 'Le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.' Par ailleurs, il est constant que le motif l'accroissement temporaire d'activité est un motif de recours au contrat de travail temporaire en application de l'article L. 1251-5 du code du travail.
La cour considère que dès lors que les sociétés Caviar Pétrossian et Accès interim justifient de l'ouverture d'un nouvel établissement des Galeries Lafayette au 15 mars 2017 'shopping and welcome center' en produisant des extraits de presse faisant état de cette ouverture, du caractère temporaire de la présence du stand Petrossian dans le centre en communiquant un avis de fermeture du corner Pétrossian en date du 26 janvier 2018 par la société Galeries Lafayette Haussmann, elle justifient de la réalité du motif de l'accroissement temporaire d'activité.
Par ailleurs, c'est vainement que M. [K] qui a été mis à disposition de la société Caviar Petrossian pour une durée de travail de 178 heures réparties sur la période du 7 mars 2017 au 13 avril 2017 ainsi que cela ressort de l'attestation employeur qui lui a été communiqué prétend qu'il a participé durablement à l'activité permanente de la société, compte tenu de la brièveté de son intervention et du caractère temporaire de la présence de la société au sein du centre.
Le moyen de requalification invoqué par M. [K] n'est donc pas retenu.
Sur le non respect du délai de carence :
Aux termes de l'article L1251-36 dans sa version en vigueur du 19 août 2015 au 24 septembre 2017 applicable au litige, 'A l'expiration d'un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements. Ce délai de carence est égal :
1° Au tiers de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements, est de quatorze jours ou plus ;
2° A la moitié de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements, est inférieure à quatorze jours.
Les jours pris en compte pour apprécier le délai devant séparer les deux contrats sont les jours d'ouverture de l'entreprise ou de l'établissement utilisateurs.'
Il ressort de l'attestation pour Pôle emploi communiquée par M. [K], de ses bulletins de salaire et des contrats de mission que ceux-ci ont été conclus pour la période du :
- 7 au 18 mars pour le premier avec une période de souplesse du 16 au 21 mars,
- 19 mars au 23 avril 2017 pour le second, portant la mention renouvellement, avec une période de souplesse du 13 avril au 2 mai.
L'article L. 1251-35 du code du travail dans sa version en vigueur du 19 août 2015 au 24 septembre 2017, applicable au litige, dispose :
'Le contrat de mission est renouvelable deux fois pour une durée déterminée qui, ajoutée à la durée du contrat initial, ne peut excéder la durée maximale prévue à l'article L. 1251-12.
Les conditions de renouvellement sont stipulées dans le contrat ou font l'objet d'un avenant soumis au salarié avant le terme initialement prévu.'
L'article L.1251-12 du code du travail dans sa version en vigueur du 19 août 2015 au 24 septembre 2017 précise que 'La durée totale du contrat de mission ne peut excéder dix-huit mois compte tenu, le cas échéant, du ou des deux renouvellements intervenant dans les conditions prévues à l'article L. 1251-35.'
Le contrat initial de mission de M. [K] prévoyait qu'il pouvait être renouvelé selon les dispositions légales. Dés lors que le second contrat conclu n'était que le renouvellement du premier, ainsi que cela ressort de la comparaison des dates des contrats, des mentions portées sur le second contrat et du fait qu'une période d'essai n'était prévue pour le second contrat, aucun délai de carence n'est applicable.
Par ailleurs, M. [K] ne peut se prévaloir des contrats conclus avec une autre entreprise utilisatrice, la société Galerie Lafayette Haussmann pour les dimanches 19 et 26 mars 2017, 2 et 9 avril 2017 dès lors qu'il ne s'agit pas de la même relation de travail et qu'il ne démontre pas qu'il occupait toujours le même emploi.
Sur la clause de souplesse :
M. [K] soutient que la clause de souplesse n'a pas été appliquée correctement par l'employeur puisqu'elle n'aurait due être que de six jours et ne pouvait conduire à la rupture du contrat de mission au 13 avril 2017.
Les sociétés Caviar Petrossian et Access interim concluent au débouté.
L' Article L1251-30 du code du travail prévoit que :
'Le terme de la mission prévu au contrat de mise à disposition ou fixé par avenant à ce dernier peut être avancé ou reporté à raison d'un jour pour cinq jours de travail. Pour les missions inférieures à dix jours de travail, ce terme peut être avancé ou reporté de deux jours.
L'aménagement du terme de la mission ne peut avoir pour effet ni de réduire la durée de la mission initialement prévue de plus de dix jours de travail ni de conduire à un dépassement de la durée maximale du contrat de mission fixée par l'article L. 1251-12.'.
Comme le soutiennent à juste titre les sociétés Caviar Pétrossian et Accès interim, le calcul des jours de souplesse s'effectue au regard de la durée totale de travail, renouvellement compris et elle a été fixée contractuellement au 13 avril 2017 de sorte qu'au vu des bulletins de salaire mentionnant les jours travaillés dont les mentions ne sont pas contredites ni mêmes discutées par M. [K], en mettant un terme au contrat à cette date l'entreprise utilisatrice n'a fait qu'user de son droit dans les conditions légales. Le moyen est donc écarté.
Sur la rupture du contrat de travail :
Eu égard à la solution du litige, la cour n'ayant pas requalifié les contrats de mission de M. [K] en contrat de travail à durée indéterminée, ses demandes au titre de la rupture abusive du contrat de travail sont sans objet.
Sur les demandes reconventionnelles :
Le caractère abusif de la procédure allégué n'étant pas établi, les sociétés intimées sont déboutées de leurs demandes de dommages-intérêts à ce titre.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ,
MET la société Logitique galeries Lafayette hors de cause,
REJETTE la demande aux fins de nullité de la requête initiale,
DÉCLARE irrecevables comme prescrites les demandes présentées par M. [C] [K] à l'encontre de la société Galeries Lafayette Haussmann,
REJETTE la fin de non recevoir tirée de la prescription présentée par la société Caviar Pétrossian et Access interim,
DÉBOUTE M. [C] [K] de l'ensemble de ses demandes,
DÉBOUTE les sociétés Logistique galeries Lafayette et Galeries Lafayette Haussmann de leurs demandes reconventionnelles de dommages-intérêts pour procédure abusive,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties,
CONDAMNE M. [C] [K] aux dépens et dit qu'ils seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE