Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 7
ORDONNANCE DU 06 FEVRIER 2023
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02188 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBMKQ
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 Septembre 2019 Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 19/1363
Nature de la décision : Réputée contradictoire
NOUS, Julien SENEL, Conseiller, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Sonia DAIRAIN, Greffière.
Statuant sur le recours formé par :
DEMANDEURS
Société Diffusion des Ebénistes ROMEO, SAS représentée par Me Catherine POLI
[Adresse 4]
[Localité 9]
Société Espaces ROMEO GUERIN, SAS représentée par Me Catherine POLI
[Adresse 4]
[Localité 9]
Société SOVECA ELYSEES, SARL représentée par Me Catherine POLI
[Adresse 1]
[Localité 9]
Représentées par Me Hervé CABELI de l'AARPI ANTES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W01
Monsieur [U]
[Adresse 6]
[Localité 7]
Représenté par Me Stéphane SERVANT de la SELEURL LSA PARIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0572
contre
DEFENDEUR
Monsieur [Y] [T]
[Adresse 12]
[Localité 10]
Représenté par Me Valerie DUTREUILH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0479, substitué par Me DUBERNET
AUTRES PARTIES :
Maître [Z] [L] - AR de convocation signé
[Adresse 5]
[Localité 8]
Madame [S] [U] épouse [D] - AR de convocation signé
[Adresse 13]
[Localité 14]
57340 SUISSE
Madame [M] [C] - AR de convocation signé
[Adresse 11]
[Localité 2]
57340 SUISSE
défaillants
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 12 Décembre 2022 :
Vu les ordonnances en date du 28 décembre 2017, rendu par le président du tribunal de commerce de Paris, ayant désigné Me [Y] [T] en qualité d'administrateur provisoire des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSÉES (groupe ROMEO) avec pour mission notamment de 'gérer et administrer la société avec les pouvoirs les plus étendus, conformément aux statuts et aux dispositions légales et usages du commerce' ;
Vu l'ordonnance en date du 30 janvier 2018, ayant désigné Me [T] en qualité de mandataire ad'hoc de la société [I] [C], avec pour mission notamment de 'gérer et administrer la société avec les pouvoirs les plus étendus conformément aux statuts et aux dispositions légales et réglementaires en vigueur' ;
Vu l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de MEAUX en date du 6 février 2018 ayant nommé Me [T] en qualité d'administrateur provisoire de la société L'ATELIER [I] [C] avec pour mission notamment de 'gérer et administrer la société avec les pouvoirs les plus étendus conformément aux statuts et aux dispositions légales et réglementaires en vigueur' ;
Vu l'ordonnance en date du 27 mars 2018, rendue par le président du tribunal de commerce de PARIS ayant fixé la rémunération de Me [T], selon les modalités suivantes :
- 450 euros HT pour l'administrateur provisoire,
- 200 euros HT pour le collaborateur,
- 100 euros HT pour le secrétariat ;
Vu les ordonnances rendue par le président du tribunal de commerce de PARIS en date des13, 15 juin et 7 décembre 2018, et du 27 juin 2019, prorogeant sa mission d'administrateur provisoire des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSÉES ;
Vu le rapport de gestion établi par Me [T], daté du 10 juillet 2019 ;
Vu l'ordonnance du président du tribunal de commerce de PARIS du 18 septembre 2019, précisant l'accord du président sur le prélèvement desdistes provisions d'honoraires en fonction des diligences effectuées, à charge pour Me [T] de lui en rendre compte à l'issue de sa mission ;
Vu la requête présentée par Me [T] ès-qualités, au président du tribunal de commerce de PARIS, aux fins de constater la fin de mission de l'administrateur provisoire et d'arrêter le montant de ses honoraires, et les factures de provision émises sur les relevés de diligences annexées à ladite requête ;
Vu l'ordonnance du président du tribunal de commerce de PARIS du 30 septembre 2019, ayant constaté la fin de la mission de Me [T] et arrêté le montant de ses honoraires conformément à ses ordonnances, notamment, des 27 décembre 2017, 27 mars 2018 et 18 septembre 2019, et aux provisions perçues ;
Vu la désignation, selon procès-verbaux d'assemblées générales du 5 novembre 2019, de M. [A] [U] en qualité de président des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO et LES ESPACES ROMEO GUERIN, et en qualité de gérant de la société SOVECA ELYSÉES ;
Vu l'ordonnance du président du tribunal de commerce de PARIS du 2 décembre 2019 ayant mis fin à la mission de la SELARL AJRS, prise en la personne de Me [M] [F] en qualité d'administrateur provisoire ;
Vu le recours formé le 4 février 2020 contre l'ordonnance précitée du 30 septembre 2019, par la société de DIFFUSION DES EBENISTES ROMEO (représentée par son président, M. [A] [U]), la société LES ESPACES ROMEO GUERIN (représentée par son président, M. [A] [U]), la société SOVECA ELYSEES (représentée par son gérant, M. [A] [U]) et M. [A] [U] aux fins de réviser la rémunération de Me [T] à 8 heures par mois à 450 euros l'heure pour l'ensemble des sociétés administrées, soit pour 18 mois de mission la somme de 64.800 euros, et d'ordonner à Me [T] le remboursement du trop perçu soit la somme de (326.574' 64.800 =) 261.774 euros sous astreinte de 250 euros par jour ;
Vu les ordonnances du président du tribunal de commerce de PARIS des 14 mai et 8 juin 2020 ayant de nouveau désigné la SELARL AJRS, prise en la personne de Me [M] [F] en qualité d'administrateur provisoire des trois sociétés ;
Vu les conclusions notifiées par RPVA le 9 septembre 2022, aux termes desquelles les sociétés de DIFFUSION DES EBENISTES COMPTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN, et SOVECA ELYSEES représentées par la société AJRS prise en la personne de Me [M] [F] demandent au premier président de la cour d'appel de :
- juger Me [Y] [T] mal fondé en sa demande de nullité de l'acte de saisine relatif au recours contre l'ordonnance du 30 septembre 2019,
- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'intérêt à agir de M. [A] [U],
- allouer aux concluantes le bénéfice de leurs précédentes écritures,
Y ajouter, statuer ce que de droit, au vu des pièces fournies par Me [T] sur la réalité des prestations et diligences fournies par lui et le montant des honoraires sollicité dans le cadre de ses missions d'administrateur provisoire des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSEES,
A titre subsidiaire, désigner l'expert qu'il plaira à Mme ou M. le premier président de désigner avec mission :
- d'entendre tous sachants,
- se faire communiquer toutes pièces,
- fournir toute explication permettant d'apprécier les diligences détaillées par Me [T] dans ses relevés communiqués en pièces N°12 et 13 ;
Vu les conclusions n°3 notifiées par RPVA le 9 octobre 2022, aux termes desquelles M. [A] [U] demande au premier président de la cour d'appel de :
- juger Me [Y] [T] mal fondé en sa demande de nullité de l'acte de saisine relatif au recours contre l'ordonnance du 30 septembre 2019,
- dire et juger Me [Y] [T] mal fondé en sa demande liée à l'irrecevabilité liée à l'absence d'intérêt à agir de M. [A] [U],
- allouer aux sociétés le bénéfice de leurs précédentes écritures ;
Y ajouter,
- statuer ce que de droit, au vu des pièces fournies par Me [T] sur la réalité des prestations et diligences fournies par lui et le montant des honoraires sollicité dans le cadre de ses missions d'administrateur provisoire des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSEES,
- en conséquence, réviser la rémunération de Me [T] à 7 heures 30 par mois à 450 euros l'heure pour l'ensemble des sociétés administrées, soit pour 18 mois de mission la somme de 60.750 euros,
- ordonner à Me [T] le remboursement du trop perçu soit la somme de 265.824 euros (326.574'60.750) sous astreinte de 250 euros par jour ;
Vu les conclusions n°3 notifiées par RPVA le 15 novembre 2022, aux termes desquelles Me [Y] [T], administrateur judiciaire, demande au visa des articles 31, 117, 714 et 715 du code de procédure civile, au premier président de la cour d'appel de :
- le recevoir en ses conclusions et le disant bien fondé,
- déclarer M. [A] [U] irrecevable en ses demandes,
- débouter M. [A] [U] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- débouter les sociétés DIFFUSION DES EBENISTES COMPTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSEES de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- confirmer en conséquence l'ordonnance querellée,
En tout état de cause,
- condamner M. [A] [U] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- condamner les sociétés DIFFUSION DES EBENISTES COMPTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSEES au paiement in solidum de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la validité du recours
La prétention tendant à la nullité du recours, initialement soutenue par Me [T] n'est plus soutenue au regard des pièces échangées en cours de procédure, en particulier le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire des actionnaires de la société LES ESPACES ROMEO-GUERIN en date du 5 novembre 2019, ayant notamment nommé M. [A] [C] président pour une durée de 6 mois renouvelable, à la suite du décès de [I] [U], survenu le [Date décès 3] 2018.
Il n'est plus contesté que M. [A] [U] était le représentant légal des trois sociétés à la date du recours exercé en leur nom par son intermédiaire (4 février 2020), pour avoir été leur représentant légal entre le 6 novembre 2019 et le 5 mai 2020, la société AJRS n'étant alors plus l'administrateur provisoire de ces sociétés.
Il convient d'en prendre acte.
Sur la fin de non recevoir soulevée par Me [T] ès-qualités, tirée du défaut d'intérêt à agir de M. [A] [U], à titre personnel, d'associé ou d'indivisaire
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L'article 123 de ce même code, modifié par le décret du 11 décembre 2019, entré en vigueur le 1er janvier 2020, donc applicable à la présente instance introduite postérieurement, dispose que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
En application de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
En application de l'article 32 de ce même code, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.
L'intérêt au succès ou au rejet d'une prétention au sens de ces dispositions s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice.
Enfin, il est constant qu'on peut avoir qualité pour agir en justice sans pour autant y avoir un intérêt, matériel ou moral.
En l'espèce, Me [T], ès-qualités, soutient que si M. [A] [U] justifiait d'un intérêt à agir en tant que président des trois sociétés aux côtés desquelles il a introduit le recours contre l'ordonnance du 30 septembre 2019 (étant alors président des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES ROMEO et LES ESPACES ROMEO GUERIN, et gérant de la société SOVECA ELYSEES), il ne justifie pas d'un intérêt à agir à titre personnel ; les seules titulaires de l'action et du présent recours sont les sociétés concernées par la mission d'administration provisoire confiée à Me [T] et par l'ordonnance en date du 30 septembre 2019 mettant fin à ladite mission.
M. [A] [U] réplique que la fin de non-recevoir doit être rejetée dès lors qu'il justifie d'un intérêt à agir et d'un droit à agir, à tout le moins en sa qualité de futur héritier, dès lors que :
- la succession de son père, [I] [U] est associée majoritaire, directement ou indirectement de chacune des trois sociétés,
- c'est à la suite d'un courrier du 22 janvier 2020, émanant de Me [L], lui ayant communiqué la copie de l'ordonnance du 30 septembre 2019, qu'il a exercé en urgence, parce que co-indivisaire, le présent recours au nom des trois sociétés et en son nom personnel ;
- son intérêt à agir légitime résulte de ce qu'il souhaite obtenir la reconstitution de l'actif successoral composé des titres des trois sociétés dont la valeur est impactée par les honoraires indus de Me [T] ;
- son action permet de prendre une mesure nécessaire à la conservation des biens indivis et à la
remise en état, financière, des biens indivis composés des titres des sociétés, au sens de l'article 815-2 du code civil.
La société AJRS, administrateur provisoire des trois sociétés, représentée par Me [F] s'en rapporte sur ce point.
Sur ce,
Il est constant que M. [A] [U] n'est pas l'auteur des requêtes ayant conduit à la désignation de Me [T], dont notamment celle du 28 décembre 2017, celle-ci ayant été déposée par l'expert-comptable du groupe.
En admettant que les qualités d'actionnaire ou d'indivisaire de M. [A] [U] lui donnent un droit à agir dans le cadre de la présente procédure, elles ne peuvent lui donner un intérêt à agir à titre personnel, s'agissant d'une procédure de contestation des honoraires de l'administrateur provisoire de chacune des trois sociétés du groupe, peu important sur ce point que les honoraires de Me [T] aient pu influencer la valeur des actions de M. [A] [U], ou celle des biens en indivision.
En effet, Me [T] n'est pas utilement contredit par M. [A] [U] au vu des pièces communiquées, lorsqu'il soutient que cette charge de rémunération a été supportée au cours des exercices 2018 et 2019, sans compromettre l'activité, ni l'actif net des sociétés, ce dernier étant déterminant pour la valorisation des titres de participation.
M. [A] [U] ne peut ainsi prétendre à un appauvrissement, ni soutenir l'urgence d'une mesure conservatoire et d'une remise en état financière sur le fondement de l'article 815-2 du code civil.
Son action personnelle, et par-là, l'ensemble de ses demandes, doivent donc être déclarées irrecevable, faute de justifier d'un intérêt à agir.
Sur la recevabilité et le bien fondé du recours
Il n'est pas contesté que les diligences concernant l'envoi simultané de la copie de la note exposant les motifs du recours à toutes les parties au litige principal, requises par l'article 715 du code de procédure civile sous peine d'irrecevabilité du recours, ont été accomplies.
En l'espèce, les sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSEES, représentées par la société AJRS en la personne de Me [F], font grief dans leur requête à l'ordonnance entreprise d'avoir retenu une durée de travail effectif excessive au regard des diligences véritablement entreprises par Me [T] pour chacune des sociétés du groupe, l'intervention de Me [T] étant une simple gestion de trésorerie, et non une mission complète d'administration provisoire et de management du personnel.
Me [F] expose plus précisément qu'il convient d'apprécier, indépendamment des résultats dont se prévaut Me [T], au vu des seules pièces fournies par ce dernier, la réalité des prestations fournies et diligences effectuées et de juger si le montant des honoraires sollicités dans le cadre de ses missions d'administrateur provisoire des trois sociétés est justifié.
Me [F] sollicite en tant que de besoin la désignation d'un expert afin de permettre à la juridiction d'apprécier si les honoraires perçus, rapportés au nombre d'heures travaillées, correspondent aux prestations fournies et aux diligences effectuées.
Me [T] réplique que la requête est mal fondée, de sorte que l'ordonnance entreprise doit être confirmée, dès lors que :
- le taux horaire de sa rémunération a été fixé par le président du tribunal de commerce de PARIS par ordonnance du 27 mars 2018, conformément aux honoraires usuellement pratiqués en matière de mandat civil, taux approprié à la taille du groupe, à ses ressources et aux difficultés de la mission, n'ayant au surplus pas sollicité d'honoraires de résultat ;
- sur les quatre sociétés du groupe ROMEO, deux avaient une activité nécessitant une implication quotidienne, à savoir les sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS et SOVECA ELYSEES ;
- les relevés d'heures pour ces deux sociétés établissent ses diligences à 475 heures pour la société DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS et à 237 heures pour la société SOVECA ELYSEES, sur une période de mandat courant du 21 décembre 2017 au 26 septembre 2019 soit 21 mois ou 92 semaines ;
- le nombre d'heures effectuées pour l'administration de la société DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS s'est élevé à 23 heures mensuelles (soit environ 5 heures par semaine) et pour l'administration de la société SOVECA ELYSEES à 11 heures mensuelles (soit environ 2 heures 30 par mois), ce qui correspond à un temps raisonnable et approprié ; le temps passé pour exercer son mandat ne s'est pas limité à sa seule présence physique sur place, il convient de tenir compte du temps passé dans son étude, de sorte que les prétendues attestations de témoins ou de salariés, invoquées par M. [A] [U], alléguant une présence sur place de deux fois par mois au siège desdites sociétés, sont délibérément réductrices, mais non conformes à la réalité du mandat, et au surplus non produites aux débats ;
- s'agissant des deux autres sociétés du groupe, LES ESPACES ROMEO GUERIN et ATELIER [I] [C], les diligences étaient pour chaque société de 2 heures par mois ;
- il a prélevé des honoraires à titre provisionnel (ce qui a été validé par l'ordonnance du 18 septembre 2019) pour la somme totale de 326.585 euros HT, ce qui correspond à une moyenne de 15.551 euros HT par mois pour une période de 21 mois, pour les quatre sociétés du groupe ; tous les prélèvements ont donné lieu à l'établissement d'une facture, remise en comptabilité ;
- M. [A] [U] a lui-même obtenu une rémunération brute mensuelle de 15.000 euros par mois pour la direction des sociétés du groupe, à répartir entre les différentes structures ;
- son intervention a permis le sauvetage des trois sociétés, qui appartiennent à un groupe dont le dirigeant et fondateur, ainsi que sa compagne également principale animatrice, ont brutalement cessé leurs fonctions, dans un contexte de conflit aigu entre les actionnaires en indivision, situation pouvant conduire à une cessation d'activité et une disparition du groupe ROMEO.
Sur ce,
Comme le font valoir les sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSEES, représentées par la société AJRS en la personne de Me [F], Maître [T] a indiqué, dans sa requête au président du tribunal de commerce de Paris, en date du 27 septembre 2019, aux fins de constater la fin de mission de l'administrateur provisoire et d'arrêter le montant de ses honoraires, que sur relevés de diligences effectuées sur une période de 18 mois (décembre2017-septembre 2019) le montant hors taxe des provisions d'honoraires perçues représentait 'pour chacune des sociétés en réelle activité, un montant mensuel moyen de 5.600 € hors taxes, correspondant à 38 heures de diligences mensuelles, soit environ 9 heures par semaine'.
Il précisait que le solde restant dû de ses honoraires était de zéro, au regard des provisions d'honoraires perçues en 2018 et 2019 pour les trois sociétés.
L'ordonnance subséquente, rendue par le président du tribunal de commerce de Paris, objet du présent recours, a constaté la fin de la mission de Me [T] et arrêté le montant de ses honoraires 'conformément à [ses] ordonnances susvisées et aux provisions perçues rappelées dans la [...] requête'.
Me [T] affirme avoir prélevé une somme totale de 326 585 euros HT à titre de provision
correspondant à une moyenne de 15 551 euros HT par mois sur une période de 21 mois, et ce pour les quatre sociétés du groupe ROMEO.
Le taux horaire servant de base au calcul des honoraires de Me [T] et le paiement par provisions qu'il a opéré en 2018 et 2019, validé par le président du tribunal de commerce de PARIS, dans le cadre de l'ordonnance entreprise n'étant pas remis en cause, ils sont considérés acquis en leur principe.
Sont en revanche contestés :
- la durée des diligences (les appelantes souhaitant retenir la période de 18 mois initialement visée dans la requête de Me [T], soit de décembre 2017 à septembre 2019, tandis qu'il revendique une durée de 21 mois dans ses dernières conclusions, correspondant à son mandat, courant du 21 décembre 2017 au 26 septembre 2019),
- et le nombre d'heures mensuelles (les appelantes souhaitant retenir dans leur recours contre l'ordonnance, une durée maximale de 8 heures par semaine, pour l'ensemble du groupe ROMEO, contre environ 9 heures par semaine revendiquées initialement, tandis que Me [T] revendique dans ses dernières conclusions une durée d'environ 5 heures par semaine (pour l'administration de la société DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS)+2 heures 30 par semaine (pour l'administration de la société SOVECA) + 2 heures par mois (pour l'administration de la société LES ESPACES ROMEO GUERIN), outre 2 heures par mois pour la société ATELIER [I] [C].
Concernant l'assiette de calcul des honoraires, au regard des ordonnances rappelées ci-dessus,
il convient de retenir une durée de 21 mois, correspondant à l'exercice du mandat de Me [T], qui a couru du 21 décembre 2017 au 26 septembre 2019.
S'agissant des diligences effectuées et plus précisément de la durée hebdomadaire de travail servant de base au calcul des honoraires de Me [T], celui-ci n'est pas utilement contredit lorsqu'il soutient qu'il a assuré la gestion quotidienne des sociétés du groupe, en relation avec ses salariés, son expert-comptable et ses conseils extérieurs, ainsi que ses fournisseurs, ses clients, les banques et les administrations concernées, et qu'il a ainsi passé des commandes, établi la paie des salariés, fait dresser les inventaires, établi les comptes annuels, tenu des assemblées, procédé au licenciement de certains salariés, effectué toutes les déclarations légales et fiscales, fait face à tous les imprévus que peut engendrer une activité commerciale, ce qui correspond à la mission confiée par les ordonnances du président du tribunal de commerce de Paris, en date du 28 décembre 2017, à savoir, notamment, en qualité d'administrateur provisoire des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSÉES, de 'gérer et administrer' chacune de ces sociétés 'avec les pouvoirs les plus étendus, conformément aux statuts et aux dispositions légales et usages du commerce'.
En effet, Me [T] verse notamment aux débats les relevés de diligences courant du 28 décembre 2017 à juillet 2019, une note à l'intention de Me [L], mandataire successoral, en date du 11 avril 2019, annexée au rapport sur la situation du groupe ROMEO qu'il lui a par la suite adressé (en date du 10 juillet 2019) faisant l'analyse des forces et faiblesses du groupe, et contenant des préconisations pour l'avenir compte tenu de l'exploitation déficitaire alors constatée, caractérisant ainsi les diligences invoquées.
L'effectivité des diligences accomplies par Me [T] est par ailleurs corroborée par les résultats obtenus, comme en atteste l'audit des comptes annuels clos au 31 décembre 2018 et 31 décembre 2019 des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSÉES (outre L'ATELIER [I] [C]), ainsi que l'analyse des comptes pour l'ensemble des sociétés sur la période du 1er janvier au 30 juin 2020 réalisé par le cabinet EXELMANS, désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris en date du 22 janvier 2021, sur requête de Me [F].
L'expert judiciaire avait, notamment, pour mission d'analyser les flux financiers, de recenser
d'éventuels manquements sur le plan fiscal et d'identifier d'éventuelles anomalies au regard
des lois et des usages.
Or, les conclusions du rapport de cet expert, remis à Me [F] le 22 janvier 2021 attestent que 'les comptes annuels sont bien tenus' et que 'le cabinet EXELMANS n'a pas relevé d'anomalie significatives sur les comptes de la période sous revue', selon le propre rapport de gestion sur les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2021, émanant de Me [F], concernant la société SOVECA ELYSÉES (page 26).
L'ensemble de ces éléments attestent tant de la durée de travail revendiquée, que de la réalité des diligences facturées par Me [T] dans le cadre de l'exercice de son mandat d'administrateur provisoire des sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSÉES, sans qu'il soit nécessaire de recourir à un expert judiciaire.
En conséquence, les sociétés appelantes, représentées par Me [F] ne peuvent qu'être déboutées de leur demandes et l'ordonnance entreprise sera confirmée.
Compte tenu des circonstances particulières du litige, chacune des parties supportera la charge des dépens par elle engagés et il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS
DECLARONS M. [A] [U] irrecevable en ses demandes, faute d'intérêt à agir ;
DEBOUTONS la société AJRS prise en la personne de Me [F], représentant les sociétés DIFFUSION DES EBENISTES CONTEMPORAINS ROMEO, LES ESPACES ROMEO GUERIN et SOVECA ELYSÉES de sa demande d'expertise judiciarie ;
CONFIRMONS l'ordonnance entreprise,
Y ajoutant,
DISONS n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DISONS que chacune des parties supportera la charge des dépens par elle engagés.
ORDONNANCE rendue par M. Julien SENEL, Conseiller, assisté de Mme Sonia DAIRAIN, greffière lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, Le Conseiller.