République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 09 Février 2023
(n° 31 , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/00222 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCOVO
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny RG n° 11-18-002030
APPELANTS
Monsieur [S], [V] [P] et Madame [I], [L], [D] [M] épouse [P]
[Adresse 5]
[Localité 9]
représentés par Me Marie DUPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1023
INTIMEES
[11] (146289550900023813503)
Chez [15]
[Adresse 19]
[Localité 4]
non comparante
[12] (découvert : 04194033932)
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 7]
non comparante
[14] (44541482371100 - 44542583589001)
CHEZ [13]
[Adresse 1]
[Localité 8]
non comparante
[16] CHEZ [21] (28945000135400-28979000487895 - 28996000302)
[Adresse 18]
[Localité 4]
non comparante
[17] CHEZ [21] (28911000096163)
[Adresse 18]
[Localité 4]
non comparante
SIP [Localité 20] (IR et TH 17)
[Adresse 3]
[Localité 20]
non comparante
[22] (3128926 ; 3877623)
[Adresse 2]
[Localité 6]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Décembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT, conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Muriel DURAND, présidente
Madame Laurence ARBELLOT, conseillère
Madame Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
ARRET :
- Défaut
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [S] [P] et Mme [I] [P] née [M] ont saisi la commission de surendettement des particuliers de la Seine-Saint-Denis qui a, le 4 mai 2018, déclaré leur demande recevable.
Le 30 juillet 2018, la commission a imposé des mesures de rééchelonnement des créances sur une durée de 58 mois, moyennant des mensualités de 1 606 euros, au taux d'intérêts maximum de 0,88%.
M. et Mme [P] ont contesté les mesures recommandées.
Par jugement réputé contradictoire en date du 10 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a :
- déclaré recevable le recours ;
- infirmé les mesures préconisées par la commission ;
- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement les créances du service des impôts de [Localité 20] à 3 832,69 euros, de la société [12] à 911,46 euros ;
- fixé la capacité mensuelle de remboursement de M. et Mme [P] à la somme de 1 600 euros ;
- rééchelonné le paiement des créances sur une durée de 56 mois, comprenant des mensualités de 1 277,56 euros du 1er octobre 2020 et 1er décembre 2020 et des mensualités de 1 591,56 euros du 1er janvier 2021 au 1er janvier 2025.
Le premier juge a relevé que le passif de M. et Mme est [P] était de 88,184,83 euros, que leurs ressources s'élevaient à la somme de 3 471,73 euros par mois pour des charges de 1 791,38 euros par mois soit une capacité de remboursement de 1 600 euros par mois.
Le jugement a été notifié à M. et Mme [P] le 21 juillet 2020.
Par déclaration adressée le 3 août 2020 au greffe de la cour d'appel Paris, M. et Mme [P] ont interjeté appel du jugement en estimant que le montant des mensualités était trop élevé.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 28 juin 2022. L'examen de l'affaire a été renvoyé au 6 décembre 2022 à la demande du conseil des appelants atteint du Covid.
A l'audience du 6 décembre 2022, M. et Mme [P] sont représentés par un avocat qui propose que les mensualités soient fixées en deçà de 1 000 euros et plutôt à 600 euros sur une durée de 84 mois.
Il explique qu'il est impossible au couple de régler 1 600 euros par mois alors que leurs charges ont augmenté avec des frais de santé et de mutuelle importants non pris en compte. Il estime que les ressources peuvent être fixées à 3 783 euros et que les charges sont proches de 3 000 euros par mois, faisant état d'une situation de santé dégradée de monsieur (pathologie cardiaque par suite de prise du mediator, protocole de soins avec soins dentaire et optiques) de185 euros de mutuelle par mois, de trois contrats prévoyance obsèques non pris en compte, des frais de voiture et de location et d'assurance d'un mobile-home qui leur sert de résidence de vacance.
Compte tenu des versements effectués, il propose d'actualiser les créances de [22] à 2 758,72 euros et 4 612,14 euros, de la société [16] à 2 324,11 euros, de [13] à 3 592,26 euros et 5 573,05 euros et de la société [11] à 3 670,28 euros en évoquant une somme de 1 171,92 euros qui n'aurait pas été prise en compte pour la société [17] dans le jugement de 2020.
Par courrier reçu au greffe le 13 mai 2022, la société [22] actualise ses créances à la somme de 5 430,44 euros et 3 005,50 euros.
Par courriers reçus au greffe les 13 mai et 18 juillet 2022, le pôle recouvrement du service des impôts des particuliers de [Localité 20] précise que M. et Mme [P] n'ont aucune dette fiscale.
Par courrier reçu au greffe le 2 juin 2022, la société [12], [Adresse 10] actualise sa créance à la somme de 619,06 euros.
Aucun créancier n'a comparu ni ne s'est fait représenter.
MOTIFS DE LA DÉCISION
À titre liminaire, il doit être rappelé que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les créanciers non comparants.
En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours exercé.
La bonne foi de M. et Mme [P] n'est pas contestée et n'est pas susceptible d'être remise en cause au vu des éléments dont la cour dispose. Il n'y a donc pas lieu de statuer spécialement sur ce point.
Sur l'actualisation des créances
-Les créances de la société [22] ont été fixées pour les besoins de la procédure aux sommes de 2 984,90 euros et 4 988,66 euros alors que la société [22] soutient dans son courrier du 10 mai 2022 être en possession de créances de 3 005,50 euros et de 5 430,44 euros.
Sur la première créance, les relevés de compte communiqués attestent de 4 paiements de 56,32 euros chacun en avril et mai 20211 soit une somme totale de 225,28 euros portant la créance à la somme de 2 759, 62 euros.
Sur la seconde créance, les relevés de compte communiqués attestent de 4 paiements de 94,13 euros chacun de janvier à avril 20211 soit une somme totale de 376,52 euros portant la créance à la somme de 4 612,14'euros.
-Les créances de la société [16] ont été fixées aux sommes de 2 405,68 euros, 2 843,42, et 5 967,61 euros. Le relevé de compte communiqué remonte au mois de mai 2018 soit à une période antérieure à la fixation de la créance et avant qu'un plan ne soit adopté par la commission ou le tribunal ; il n'y a donc pas lieu à opérer une quelconque déduction.
-Les créances de la société [14] ont été fixées aux sommes de 3 807,68 euros et 5 907,43 euros. Les relevés de compte communiqués attestent de 3 paiements de 71,84 euros chacun de janvier à mai 20211 soit une somme totale de 215,52 euros portant la créance à la somme de 3 592,16 euros. Sur la seconde créance, les relevés de compte communiqués attestent de 3 paiements de 111,46 euros chacun de janvier à avril 20211 soit une somme totale de 334,38 euros portant la créance à la somme de 5 573,05 euros.
-La créance de la société [11] a été fixée à la somme de 5 677,40 euros. Les relevés de compte communiqués attestent de 11 paiements entre janvier 2011 et avril 2022 soit une somme totale de 2 007,12 euros portant la créance à la somme de 3 670,28 euros.
-La créance de la société [17] a été fixée à la somme de 48 857,90 euros. Les appelants produisent un relevé de compte bancaire du 5 juin 2018 soit à une date antérieure à la fixation de la créance faisant état d'un versement au 10 mai 2018 à la société [17] d'une somme de 1 171,92 euros sans produire aucun autre élément, et alors qu'ils n'ont jamais émis de contestation sur ce point lors de la notification de l'état des créances. Ils sont donc mal venus dans leur contestation.
L'état du passif de 88 184,83 euros doit donc être actualisé à la somme totale de 85 026,01 euros en tenant compte des versements intervenus dans le cadre du plan.
Sur les mesures
Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :
1° Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ;
2° Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;
3° Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal;
4° Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.
L'article L.733-3 du même code énonce que la durée totale des mesures mentionnées à l'article L. 733-1 ne peut excéder sept années. Les mesures peuvent cependant excéder cette durée lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elles permettent d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale.
Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».
L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».
Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».
En application de ces textes, il incombe au juge de se référer aux éléments objectifs qui lui sont soumis, c'est-à-dire le rapport entre le montant des dettes et les revenus disponibles ou ceux prévisibles et de déterminer la part des revenus que le débiteur peut affecter au paiement de ses dettes au regard des éléments dont il dispose, en prenant en compte l'évolution prévisible des revenus du débiteur.
Le premier juge a rééchelonné le paiement des créances sur une durée de 56 mois, comprenant des mensualités de 1 277,56 euros du 1er octobre 2020 et 1er décembre 2020 et des mensualités de 1 591,56 euros du 1er janvier 2021 au 1er janvier 2025 permettant un apurement total du passif.
Les ressources ont été évaluées à 3 471,73 euros par mois comprenant les deux pensions de retraite et les charges à la somme mensuelle de 1 791,38 euros par mois comprenant le forfait de base de 751 euros, le loyer hors charges pour 491,93 euros, le forfait chauffage pour 109 euros, le forfait habitation pour 144 euros, la taxe d'habitation pour 5 euros, les frais de mutuelle pour 14,81 euros, les frais d'assurance d'un mobile-home pour 24,66 euros, le loyer du terrain pour le mobile-home de 210 euros et la cotisation de contrat de prévoyance obsèques pour 40,98 euros.
La capacité de remboursement a donc été fixée à 1 680,35 euros par mois.
Les appelants communiquent aux débats leur denier avis d'imposition sur les revenus 2021 faisant apparaître un revenu global annuel de 25 682 euros pour monsieur et de 19 723 euros pour madame soit selon leur propre calcul une moyenne mensuelle de 3 783,75 euros. Il doit donc être constaté que les ressources du couple sont en augmentation.
S'agissant des charges, ils font état d'un loyer de 694 euros alors que l'échéance du mois de novembre 2022 mentionne un loyer de base hors charge à prendre en compte de 439,96 euros pour l'habitation et de 56,51 euros pour le garage soit une somme totale de 496,47 euros qui a à juste titre été pris en compte par le premier juge. La somme de 11,50 euros versée en 2021 au titre de la redevance audiovisuelle n'a pas à être prise en compte puisque cette redevance est supprimée pour l'avenir. Le reste des charges d'assurance de voiture, de téléphonie sont incluses dans les forfaits. S'agissant des frais de santé, les frais de mutuelle ont été pris en compte pour 14,81 euros par mois alors qu'il est justifié par une attestation de la CPAMIF du 11 décembre 2021, que les cotisations à verser pour 2022 s'élèvent à 181,36 euros par mois pour le couple. S'agissant de la prévoyance obsèques, il a été retenu une somme mensuelle de 40,98 euros alors qu'il est justifié de versements de 54,64 euros à ce titre. Il est également justifié d'une somme mensuelle de 65,12 euros au titre de la prévoyance invalidité-décès.
Si les appelants invoquent des dépassements d'honoraires médicaux à prévoir (prothèse auditive, cataracte, frais d'optique, frais dentaires) ou d'avances à assumer liées à l'état de santé de monsieur nécessitant un suivi médical qu'ils chiffrent à 200 euros et à 504,96 euros, les pièces communiquées aux débats n'établissent pas suffisamment ces frais ni les remboursements éventuellement pris en charge par la mutuelle. Ainsi concernant une opération de la cataracte programmée, le devis indique un montant d'honoraires non pris en charge par la sécurité sociale de 600 euros outre 150 euros de frais d'anesthésie mais pouvant être remboursés par la mutuelle.
S'agissant des frais d'assurance et d'entretien de leur véhicule, ils évaluent leurs charges à 190 euros par mois soit 150 euros au titre de l'essence et 40 euros de frais d'entretien. Ces dépenses seront retenues à hauteur de 100 euros par mois, étant précisé que les appelants sont retraités et n'utilisent donc pas leur véhicule pour se rendre à leur travail. S'agissant du mobile-home, les frais d'assurance et de location d'un terrain ont été suffisamment pris en compte par le premier juge.
Les charges peuvent ainsi être fixées à une somme mensuelle de 2 892,25 euros soit une capacité de remboursement de 891 euros.
La situation de M. et Mme [P] a donc connu une évolution significative avec un alourdissement de leurs charges de sorte qu'il y a lieu de réexaminer leur situation. Le jugement est donc infirmé et le dossier renvoyé pour examen à la commission de surendettement de la Seine-Saint-Denis.
Le surplus des demandes est rejeté.
Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt par défaut et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :
Infirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré recevable le recours, fixé pour les besoins de la procédure de surendettement les créances du service des impôts de [Localité 20] à 3 832,69 euros et de la société [12] à 911,46 euros ;
Statuant de nouveau dans cette limite et y ajoutant,
Actualise les créances suivantes :
-société [22] aux sommes de 2 759, 62 euros et de 4 612,14 euros
-société [14] aux sommes de 3 592,16 euros et de 5 573,05 euros
-société [11] à la somme de 3 670,28 euros
Dit que le passif peut être fixé à la somme de 85 026,01 euros,
Renvoie l'examen du dossier à la commission de surendettement de la Seine-Saint-Denis,
Rejette le surplus des demandes,
Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE