Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRET DU 02 MARS 2023
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00640 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJPQ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Novembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/09096
APPELANTE
Madame [W] [V]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 89
INTIMÉE
SA CHRISTIAN DIOR COUTURE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente, rédactrice
Madame Nicolette GUILLAUME, présidente
Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée
Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [G] [Y] a été engagée le 11 octobre 1982 par la société Christian Dior Couture en qualité d'employée de manutention.
Elle devenait en 2007 agent de magasin de logistique.
La convention collective de la Couture parisienne était applicable à la relation de travail.
Le 30 novembre 2016, la salariée était licenciée.
Elle est brutalement décédée le 19 décembre suivant au cours de l'exécution de son préavis.
Au dernier état de l'emploi, la rémunération mensuelle brute moyenne était de 2 291,53 euros.
Par acte du 29 novembre 2018, Mme [V], fille de Mme [Y] et Mme [F], en leurs qualités d'ayants-droit de Mme [Y], ont saisi le conseil des prud'hommes de Paris le 29 novembre 2018 pour contester les conditions de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
Par jugement du 28 novembre 2019, cette juridiction a :
- fixé le salaire moyen mensuel brut de Mme [Y] à 2 291,53 euros,
- déclaré irrecevables, par défaut d'intérêt à agir, les demandes des ayants-droit de Madame [Y], en réparation de préjudices subis par la défunte du fait de son absence de formation, de la discrimination exercée à son égard du fait de son sexe et de son âge et du licenciement prononcé à son encontre,
- déclaré recevable la demande des ayants-droit de Mme [Y] en règlement de compléments de treizième mois ,
- débouté les ayants droits de leurs autres demandes,
- condamné les ayants-droit de Mme [Y] aux entiers dépens.
Par déclaration du 20 janvier 2020, Mme [V] ès qualités, a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie papier le 27 avril 2020, elle demande à la cour :
- d'infirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 28 novembre 2019,
statuant à nouveau,
- de déclarer recevable l'action introduite par les ayants-droit de Mme [Y] relativement à l'ensemble des chefs de demande,
- de fixer le salaire moyen à la somme de 2 291,53 euros,
- de condamner la société Christian Dior Couture à lui verser en qualité d'ayant-droit de Mme [Y] les sommes suivantes :
- 20 000 euros de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation de formation,
- 40 000 euros de dommages et intérêts au titre de la discrimination ou subsidiairement pour exécution déloyale du contrat de travail et de la convention collective,
-60 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-700 euros nets au titre de la reprise avance 13ème mois opérée en décembre 2016,
-882,97 euros de rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- de condamner la société Christian Dior Couture à lui verser en qualité d'ayant-droit de Mme [Y] la somme de :
- 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de fixer le point de départ des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes avec capitalisation,
- de condamner la société Christian Dior Couture aux entiers dépens y compris ceux d'exécution.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 12 novembre 2020, la société Christian Dior Couture demande à la cour :
- de confirmer le jugement rendu le 28 novembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Paris en ce qu'il a :
- déclaré irrecevables, par défaut d'intérêt à agir, les demandes des ayants droit de Mme [Y] en réparation de préjudices subis par la défunte du fait de son absence de formation, de la discrimination exercée à son égard du fait de son sexe et de son âge et du licenciement prononcé à son encontre,
- débouté les ayants-droit de Mme [Y] de la demande relative au treizième mois,
- débouté les ayants-droit de leurs autres demandes,
- condamné les ayants-droit de Mme [Y] aux entiers dépens,
en toute hypothèse,
- de juger irrecevable l'action engagée par Mme [W] [V],
- de rejeter l'intégralité des demandes formulées par Madame [W] [V],
- de condamner Mme [W] [V] à1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction faite au profit de la SELARL Lexavoue Paris-Versailles, prise en la personne de Maître Matthieu Boccon-Gibod.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 novembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 12 janvier 2023 pour y être examinée.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties devant la cour.
MOTIFS
I- sur la recevabilité des demandes,
Selon l'article 724 du code civil les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.
Le droit à demander l'indemnisation du préjudice subi pendant l'exécution du contrat de travail entre dans le patrimoine du vivant du salarié et peut donc, une fois celui-ci décédé, être exercé par ses héritiers, quel que soit le préjudice matériel ou moral dont il est demandé réparation.
Il en est de même du droit né de la rupture du contrat de travail, quand bien même le salarié n'a pas de son vivant lui même engagé l'action ou manifesté sa volonté de l'engager.
Mme [Y] est décédée le 19 décembre 2016 dans le cours de l'exécution de son préavis qui devait se terminer le 31 janvier 2017.
La société Christian Dior Couture ne conteste pas la qualité d'ayant droit de Mme [V] fille de la salariée et dont l'action a été initiée en cette qualité, le 29 novembre 2018 devant le conseil des prud'hommes de Paris.
Cette action est recevable dès lors que les postes d'indemnisation ou de rappels de salaire et d'indemnité de licenciement concernent des droits ou des biens entrés dans le patrimoine de Mme [Y] de son vivant et dont Mme [V] est saisie de plein droit en application de l'article 724 susvisé.
Le jugement entrepris doit en conséquence être infirmé et l'action intentée déclarée recevable dans toutes ses composantes.
II- au fond,
A) sur l'obligation de formation,
Il résultait de l'article 930-1 du code du travail tel qu'issu de la loi 2004-391 du 4 mai 2004, une obligation générale pour l'employeur d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Cette obligation a été reprise dans l'article L 6321-1 issu de la nouvelle codification du code du travail, et complétée pour aboutir dans la version applicable au litige telle qu'issue de la loi N° 2016-1088 du 8 août 2016 aux termes suivants :
'l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences , y compris numériques ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant par le plan de formation mentionné au 1° de l'article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d'obtenir une partie identifiée de certification professionnelle et visant à l'acquisition d'un bloc de compétences.'
Il est admis que l'employeur a l'obligation de veiller au maintien de la capacité du salarié à occuper un emploi, quand bien même ce dernier n'aurait-il formulé aucune demande de formation au cours de l'exécution de son contrat de travail.
Le manquement à ces obligations génère un préjudice distinct de celui né de la rupture du contrat de travail, qu'il appartient au juge du fond d'indemniser en fonction du préjudice subi.
Par ailleurs, en vertu des articles L 6323-1 et suivants du Code du Travail dans leur rédaction antérieure à la loi N° 2014-288 du 5 mars 2014 applicable à compter du 1er janvier 2015, tout salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée bénéficie chaque année d'un droit individuel à la formation (DIF) d'une durée de 20 heures et doit être informé chaque année de sa situation du total de ses droits.
La société Christian Dior Couture s'oppose à la demande de dommages-intérêts formée de ce chef à raison de manquements à ses obligations, en justifiant de ce que la salariée a été formée à deux reprises, pour une durée totale de 4h30 à une sensibilisation aux gestes et postures, et à la sécurité incendie au cours des trois dernières années de sa présence dans l'entreprise et en constatant qu'elle a été informée de ses droits individuels de formation par le biais de son bulletin de salaire de janvier 2015 sur lequel figure une mention spécifique à ce titre.
Cependant ces éléments ne permettent pas de considérer que l'employeur a respecté les obligations expressément mises à sa charge dans le domaine de la formation, tant en ce qui concerne les formations proposées ou dispensées qu'en ce qui concerne l'obligation d'information sur le crédit d'heures dont Mme [Y] bénéficiait.
En effet, la cour observe la très grande ancienneté de la salariée, supérieure à 34 ans, et la faiblesse du nombre d'heures de formation dispensées, ainsi que l'absence de toute trace de proposition formulée à l'intéressée pendant la durée de son contrat de travail, à l'exception des trois dernières années .
De même l'information sur le DIF a-t-elle été totalement défaillante dès lors qu'elle n'est justifiée qu'en 2015 et dans des termes suffisamment peu explicites pour qu'il puisse être considéré que la salariée n'était pas en mesure de faire effectivement valoir ses droits en la matière.
La réalité du préjudice subi du fait de ces manquements résulte du constat de la stagnation de la carrière de Mme [Y], laquelle, entrée en 1982 à l'âge de 27 ans dans l'entreprise en est sortie à 61 ans en n'ayant accédé seulement au niveau B du groupe 1 de la classification professionnelle, qui correspond au deuxième niveau le plus bas de la grille applicable, aucune initiative de l'employeur n'étant justifiée pour favoriser une meilleur progression.
Mme [Y] a ainsi perdu une chance dont la réparation doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Au regard des éléments versés aux débats, le préjudice subi doit être considéré comme indemnisé par l'octroi d'une somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.
B- sur le licenciement,
De l'article L 1232-1 il résulte que le licenciement pour cause personnelle doit être motivé par une cause réelle et sérieuse et en vertu de l'article L. 1235-1 du Code du Travail le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction aux vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il estime utile, le doute subsistant alors devant profiter au salarié.
Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement, n'incombe-t-elle pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
La lettre de licenciement dont les termes fixent les limites du litige fait grief à Mme [Y] des faits suivants: '(...), Nous avons constaté depuis un certain nombre de mois une détérioration sensible des rapports de travail entre vous et votre hiérarchie. Ces éléments trouvent leur origine dans la divergence de vue sur les orientations organisationnelles qui existe entre vous et votre manager, occasionnant des dysfonctionnements dans l'organisation opérationnelle de l'atelier et la livraison des commandes clientes.
Nous sommes donc amenés à prendre l'initiative de la rupture en vous notifiant par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.(...)'.
La société ne verse pas d'élément mettant la cour en mesure de procéder à l'analyse de la réalité et du sérieux des motifs retenus dans la lettre, rappelant que le licenciement a été prononcé pour permettre à la salariée de percevoir une indemnité plus conséquente que celle réservée au départ à la retraite, dès lors que dans le cadre de son entretien annuel, Mme [Y] avait relevé qu'elle était en fin de carrière et exprimé le souhait de prendre sa retraite, en sollicitant pour ce faire l'avis de la Caisse de Retraite sur sa situation et le bénéfice du régime réservé aux carrières longues, dont elle a appris qu'il ne lui était pas applicable.
Les motifs retenus pour prononcer la rupture du contrat de travail tels qu'exprimés dans la lettre de licenciement sont donc dénués de toute réalité.
A ce seul titre le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Il est sollicité de ce chef 60 000 euros en réparation du préjudice subi.
Mme [Y] était âgé de 61 ans et totalisait une ancienneté supérieure à 34 ans au moment de la rupture de son contrat de travail.
En application de l'article 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce dès lors que n'est pas contesté le fait que l'entreprise comptait plus de dix salariés, le montant de dommages-intérêts dûs de ce chef doit être fixé à 25 000 euros.
C- sur la discrimination liée à l'âge et au sexe,
L'article 1132-1 du Code du Travail inclus dans le chapitre 2 fixant les règles sur le principe de non-discrimination et inclus dans le titre III intitulé 'Discriminations', prohibe toute mesure discriminatoire directe ou indirecte du salarié, à raison notamment de son âge ou de son état de santé et l'article 1134-1 du même code aménage les règles de preuve pour celui qui s'estime victime de discrimination au sens du chapitre 2, l'intéressé devant alors seulement présenter 'des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte', la partie défenderesse devant 'prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination', et le juge formant 'sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.
A l'appui de la demande il est présenté les faits suivants:
- Mme [Y] n'a bénéficié en 34 ans de carrière que de très peu de périodes de formation, en ayant été 'régulièrement évincée' de celles-ci, ce que révèlent les rapports annuels de gestion du conseil d'administration dont il est tiré un tableau déterminant un taux de salariés ayant reçu une formation de 65% en 2010, 57,7% en 2014, 59,1% en 2015 et 58,4% en 2016, dont elle n'a donc pas fait partie, ce qui est 'sans aucun doute en lien tant de son sexe que de son âge'.
- Absence de recours pour Mme [Y], aux mesures et dispositifs prévus par les articles 4-1 et 4-2 de l'accord d'entreprise du 18 décembre 2009 visant les salariés âgés d'au moins 55 ans et travaillant dans des conditions de pénibilité pour lesquels il convient de réduire la charge physique et psychique de leur emploi.
Il est notamment fait référence sur point à l'entretien de dernière partie de carrière en vue de l'aménagement des conditions de travail dont Mme [Y] a été privée malgré la nature des tâches qui lui étaient confiées, nécessairement pénibles puisque de manutentions et organisées en 2x8.
Il est également renvoyé à un accord d'entreprise du 8 décembre 2011 et à l'entretien professionnel qu'il prévoit afin de faire le point sur le parcours professionnel et les projets professionnels à long terme du salarié, entretien qui n'a jamais été organisé à son bénéfice.
- son licenciement est une mesure liée à son âge dès lors que l'employeur prétend sans le démontrer qu'elle avait exprimé le souhait de partir à la retraite et que c'est pour répondre à cette demande et 'arranger' la salariée qu'elle a été licenciée, lui permettant ainsi de percevoir une indemnité de licenciement plus intéressante que l'indemnité de départ à la retraite,
- absence de réelle évolution de carrière sauf à l'ancienneté, soit à raison du coût de la vie comme le révèle la courbe du salaire brut moyen qui montre une faible progression du salaire très en rapport avec l'inflation.
Pris dans leur ensemble, ces éléments laissent présumer une discrimination liée à l'âge et au sexe.
Or l'employeur ne prouve pas que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, rien ne venant justifier l'absence d'entretiens professionnels dédiés à l'évolution de l'intéressée ni le prononcé d'un licenciement que l'employeur reconnaît lui même comme étant dénué de réel motif, seul l'âge de Mme [Y] et l'ancienneté de cette dernière venant expliquer la rupture dès lors que cette dernière selon l'employeur aurait exprimé la volonté de quitter l'entreprise, ce que ne confirme pas les pièces produites.
En réparation du préjudice ainsi subi, il est sollicité 40 000 euros.
La durée des manquements de l'employeur et leur gravité justifient l'octroi d'une somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts de du code de commerce chef.
D- sur les autres demandes,
1) rappel de treizième mois,
Le bulletin de salaire du mois de décembre 2016 mentionne l'allocation d'un treizième mois complet, soit 1 806,86 euros, dont est déduite la somme versée en juin 2016 sur ce même poste soit 931,91 euros représentant la moitié du treizième mois, laquelle figure dans les sommes à déduire.
Restait donc dû à Mme [Y] un solde de 931,91 euros dont l'employeur a déduit 700 euros dès lors qu'indépendamment de toute proratisation, une avance de ce montant a été accordée sur le solde du treizième mois en octobre précédent, le bulletin de salaire y faisant référence n'étant pas autrement contesté.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande formée de ce chef.
2) rappel d'indemnité de licenciement,
L'article 37 de la convention collective applicable prévoit que tout salarié ayant au moins un an d'ancienneté a droit à une indemnité de licenciement calculée comme suit :
- pour la tranche de un à dix ans: 1/5ème de mois par année d'ancienneté,
- pour la tranche au delà de dix ans: 2/5ème de mois par année d'ancienneté.
Il est aussi stipulé que lorsque le salarié licencié est âgé de plus de 55 ans et s'il justifie de dix années de présence dans l'entreprise l'indemnité de licenciement est majorée de 10%.
A ce titre il doit être alloué un solde de 882,97 euros sur la base d'une somme totale due selon calcul non contesté de 30 744,68 euros.
Le jugement doit être infirmé de ce chef et la société condamnée à verser cette somme.
Les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation en conciliation, et les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt, en application de l'article 1154 devenu l'article 1343-2 nouveau du code civil.
En raison des circonstances de l'espèce, il apparaît équitable d'allouer à Mme [V] ès qualités, une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.
Les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 nécessaire à l'exécution de la présente décision ne constituant pas des dépens afférents à l'instance au sens de l'article 695 du code de procédure civile, seul le juge de l'exécution est compétent pour trancher un litige sur ce point, la demande formée à ce titre devant dès lors être rejetée.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a:
- fixé le salaire moyen brut mensuel de Mme [Y] à 2 291,53 euros,
- rejeté la demande en paiement d'un rappel de treizième mois,
INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,
DÉCLARE RECEVABLE l'action de Mme [V] en qualité d'ayant droit de Mme [Y],
DIT le licenciement de Mme [Y] dénué de cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE la société Christian Dior Couture à verser à Mme [V] en qualité d'ayant droit de Mme [Y] les sommes de:
- 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né du manquement à l'obligation de formation,
- 4 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la discrimination liée à l'âge et au sexe,
- 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 882,97 euros à titre de solde d'indemnité de licenciement,
- 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel,
DIT que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation en conciliation, et que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
DIT que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt, en application de l'article 1154 devenu l'article 1343-2 nouveau du code civil,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes.
CONDAMNE la société Christian Dior Couture aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE