La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2023 | FRANCE | N°19/02458

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 31 mars 2023, 19/02458


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 31 Mars 2023



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/02458 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KRO



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Décembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 17/02055





APPELANTE

URSSAF PARIS - ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]<

br>
représentée par M. [L] [Z] en vertu d'un pouvoir général





INTIMEE

Société [7]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par M. [A] [S]





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dis...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 31 Mars 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/02458 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KRO

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Décembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 17/02055

APPELANTE

URSSAF PARIS - ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par M. [L] [Z] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

Société [7]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par M. [A] [S]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BUFFET, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Madame Natacha PINOY, Conseillère

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre

et par Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par l'Urssaf Ile de France à l'encontre d'un jugement rendu le 4 décembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, dans un litige l'opposant à la société [7].

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que, dans le cadre de la lutte contre le travail illégal, la gendarmerie de Pontoise a procédé au contrôle, le 13 avril 2016, de deux personnes affairées à distribuer des flyers dans des boîtes aux lettres sur la commune de [Localité 5] : MM. [F] [Y] et [J] [D] [G], qui ont déclaré travailler pour la société [8] ; que ces salariés n'ayant pas fait l'objet d'une déclaration préalable à l'embauche à la date du contrôle, les services de gendarmerie ont établi un procès-verbal pour travail dissimulé pour transmission au procureur de la République.

A la suite de l'exploitation de ce procès-verbal, l'Urssaf a adressé à la société [7] (la société), le 16 août 2016, une lettre d'observations, lui notifiant un redressement forfaitaire de 8.571 euros de cotisations et contributions calculées sur 25% du plafond annuel défini à l'article L.241-3 du code de la sécurité sociale par salarié dissimulé, tel que prévu par l'article L.242-1-2 du code de la sécurité sociale par salarié non déclaré, outre la majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé prévue par l'article L.243-7-7 du code de la sécurité sociale à hauteur de 2.143 euros.

Par courrier du 10 septembre 2016, la société [7] a émis ses observations. Si elle ne contestait pas le travail dissimulé reproché, elle faisait valoir qu'elle produisait des éléments de preuve faisant échec à l'application forfaitaire du montant des cotisations, produisant notamment les bulletins de paie des salariés contrôlés.

Par lettre du 2 novembre 2016, l'inspecteur du recouvrement de l'Urssaf a maintenu l'intégralité du redressement.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 28 décembre 2016, distribué le 2 janvier 2017, l'Urssaf a mis en demeure la société de procéder au règlement des cotisations et majoration complémentaire fixées par la lettre d'observations du 16 août 2016, outre des majorations de retard provisoires d'un montant de 634 euros.

La société a saisi, le 17 avril 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris d'un recours à l'encontre de la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable de l'Urssaf du 20 février 2017.

Par jugement du 4 décembre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a annulé le redressement notifié à la société, infirmé la décision de recours amiable du 20 février 2017, débouté l'Urssaf de ses demandes reconventionnelles et dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ce jugement a été notifié à l'Urssaf le 17 janvier 2019, laquelle en a interjeté appel par courrier recommandé avec avis de réception expédié le 18 février 2019, le 17 février 2019 étant un dimanche.

Aux termes de ses conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son représentant, l'Urssaf demande à la cour de :

- déclarer l'appel de l'Urssaf recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le redressement opéré au titre de l'infraction de travail dissimulé,

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'Urssaf de sa demande reconventionnelle en paiement,

- condamner reconventionnellement la société au paiement de la somme de 11.348 euros, se détaillant comme suit :

- 8.571 euros de cotisations,

- 2.143 euros de majoration de redressement,

- 634 euros de majorations de retard provisoires,

- condamner la société au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Urssaf fait principalement valoir qu'alors que la situation de travail dissimulé est incontestable, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations; que, pour faire échec à l'application de l'évaluation forfaitaire de la rémunération servant de base de calcul du redressement, l'employeur doit apporter la preuve non seulement de la durée réelle d'emploi du salarié non déclaré, mais encore du montant exact de la rémunération versée ; que l'Urssaf n'a jamais admis les bulletins de salaire produits par la société lors de la phase contradictoire qui ont été écartés par l'inspecteur du recouvrement puis par la commission de recours amiable qui a fait siennes les constatations de l'inspecteur ; que ces bulletins de salaire ne sauraient constituer des éléments objectifs de nature à établir la durée du travail et la rémunération des salariés, ceux-ci étant en contradiction avec les déclarations des personnes contrôlées par les services de gendarmerie ; qu'en toute hypothèse, la seule production des fiches de paye par l'employeur visant à rapporter la preuve contraire de l'évaluation forfaitaire ne saurait recevoir valeur probante ; que le recours au chiffrage forfaitaire de l'article L.242-1-2 du code de la sécurité sociale n'est nullement réservé aux cas les plus graves et les plus flagrants de travail dissimulé ; qu'enfin, la société n'a justifié d'aucun contrat de travail des salariés en question.

Représentée par son gérant, la société demande oralement la confirmation du jugement.

La société fait valoir pour l'essentiel que les deux salariés en cause avaient des contrats de courte durée, s'agissant de travail par intermittence ; que la société a été créée un mois avant le contrôle ; que les bulletins de paie ont été confiés à un cabinet extérieur en charge de la partie comptable et sociale ; qu'au démarrage de la société, son gérant n'était pas avisé de toutes les obligations sociales, notamment au regard des contrats de travail ; qu'elle estimait que les bulletins de paie suffisaient à attester la bonne tenue de ses obligations légales ; que ces bulletins sont corrélés au nombre d'heures effectives et aux missions confiées par les clients ; qu'au démarrage, la société n'avait pas de contrat de travail ; qu'à aucun moment, la société n'a eu l'intention de se soustraire à ses obligations.

En application de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions de l'Urssaf déposées à l'audience pour l'exposé de ses moyens.

SUR CE :

Aux termes de l'article L.8221-1 1°du code du travail, sont interdits (...) le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;

L'article L.8221-5 1°du code du travail, dans sa version applicable au litige, dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur, de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche.

L'Urssaf justifie que, le 13 avril 2016, la gendarmerie de [Localité 6] a procédé au contrôle de deux personnes MM. [G] et [Y], à [Localité 5], lesquels distribuaient des flyers dans les boîtes aux lettres. Il résulte du procès-verbal de saisine adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Pontoise que MM. [G] et [Y] ont déclaré effectuer depuis le matin même cette distribution de flyers pour le compte de la société [8] et qu'après vérification par l'Urssaf, ils n'avaient pas fait l'objet d'une déclaration préalable à l'embauche (pièce Urssaf n°17).

Il est constant que la société [8] identifiée par MM. [G] et [Y] est la socété [7], tandis que la situation de travail dissimulé n'est pas formellement contestée par la société intimée qui ne discute pas ne pas avoir procédé à la déclaration préalable à l'embauche de ces salariés.

Aux termes de l'article L.242-1-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, pour le calcul des cotisations et contributions de sécurité sociale et par dérogation à l'article L. 242-1, les rémunérations qui ont été versées ou qui sont dues à un salarié en contrepartie d'un travail dissimulé au sens des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail sont, à défaut de preuve contraire en termes de durée effective d'emploi et de rémunération versée, évaluées forfaitairement à 25 % du plafond annuel défini à l'article L. 241-3 du présent code en vigueur au moment du constat du délit de travail dissimulé. Ces rémunérations sont soumises à l'article L. 242-1-1 du présent code et sont réputées avoir été versées au cours du mois où le délit de travail dissimulé est constaté.

Il se déduit de ce texte que, pour le calcul des cotisations et contributions de sécurité sociale, les rémunérations versées ou dues à un salarié en contrepartie d'un travail dissimulé sont, à défaut de preuve contraire, évaluées forfaitairement et il incombe à l'employeur, pour faire obstacle à l'application de cette évaluation forfaitaire, de rapporter la preuve non seulement de la durée réelle d'emploi du travailleur dissimulé, mais encore du montant exact de la rémunération versée à ce dernier pendant cette période (Civ 2ème, 19 décembre 2013, n° de pourvoi 12-27.513, 23 janvier 2014, n° de pourvoi 12-28.552, 15 décembre 2016, n° de pourvoi 15-28.214).

En l'espèce, lors de la phase contradictoire, en réponse à la lettre d'observations de l'Urssaf, la société a communiqué (pièce Urssaf n°2) les bulletins de paie édités pour MM. [Y] et [G] pour les mois de mars 2016, avril 2016, mai 2016, juin 2016, juillet 2016, août 2016 et septembre 2016.

Mais, étant observé que les contrats de travail de ces salariés n'ont jamais été communiqués, ces seuls bulletins de paie, établis postérieurement au contrôle de l'Urssaf, ne sont corroborés par aucun élément extérieur d'origine comptable et sont donc insusceptibles de justifier de la durée réelle d'emploi des travailleurs dissimulés, du montant exact de la rémunération versée à ces derniers pendant la période contrôlée du 13 avril 2016.

Par conséquent, l'Urssaf était fondée à procéder à un redressement forfaitaire en application de l'article L.242-1-2 du code de la sécurité sociale, de sorte que le jugement sera infirmé.

Statuant à nouveau, il convient de condamner la société à payer à l'Urssaf les sommes de 8.571 euros au titre du rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, 2.143 euros au titre de la majoration de redressement complémentaire pour infraction au travail dissimulé de l'article L.243-7-7 du code de la sécurité sociale et 634 euros de majorations de retard.

Partie succombante, la société sera condamnée aux dépens et à payer à l'Urssaf 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DECLARE l'appel recevable ;

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 décembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société [7] à payer à l'Urssaf Ile de France la somme de 11.348 euros, se décomposant comme suit : 8.571 euros au titre du rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, 2.143 euros au titre de la majoration de redressement complémentaire pour infraction au travail dissimulé de l'article L.243-7-7 du code de la sécurité sociale et 634 euros de majorations de retard ;

CONDAMNE la société [7] aux dépens d'appel ;

CONDAMNE la société [7] à payer à l'Urssaf Ile de France 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/02458
Date de la décision : 31/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-31;19.02458 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award