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03/04/2023 | FRANCE | N°21/03429

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 03 avril 2023, 21/03429


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 03 AVRIL 2023



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03429 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDE7T



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Février 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2020045394



APPELANTE



MALAKOFF HUMANIS PREVOYANCE

Ayant son siége social

[A

dresse 2]

[Localité 3]



Prise en la personne de son représentant légal



Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753, ET Me Audrey BELMONT, avocat...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 03 AVRIL 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03429 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDE7T

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Février 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2020045394

APPELANTE

MALAKOFF HUMANIS PREVOYANCE

Ayant son siége social

[Adresse 2]

[Localité 3]

Prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753, ET Me Audrey BELMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020, avocat plaidant

INTIMEE

SELAFA MJA

N° SIRET : 440 672 509

En la personne de Maître Valérie Leloup-Thomas

Es qualité de liquidateur judiciaire de la Société TOBLER

N° SIRET : 578 204 497

en vertu d'un jugement du Tribunal de Commerce de Paris du 23 mars 2020

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ayant son siége social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, et Me Catherine SAINT GHISLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0099 avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Monsieur Jacques LE VAILLANT, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCEDURE

La société Tobler Sas (ci-après, « Tobler ») a souscrit le 13 octobre 2017 deux contrats auprès de la société Malakoff Mederic Prévoyance (ci-après, « Malakoff Prévoyance ») aux droits de laquelle est venue par la suite la société Malakoff Humanis Prévoyance dans le but d'assurer la couverture des frais de santé de ses salariés :

- le contrat n° M1 / N38305-0001-S à adhésion obligatoire,

- le contrat n° M1 / N38307-0001-S à adhésion facultative.

La société Tobler a été placé en redressement judiciaire par décision du tribunal de commerce de Paris en date du 9 octobre 2019, et cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 23 mars 2020.

La Selafa Mja en la personne de Me [J] [E] [Z] a été nommée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre du 25 mars 2020, le liquidateur judiciaire de la société a déclaré à la société Malakoff Prévoyance la rupture des contrats de travail des salariés et a demandé, sur le fondement de l'artícle L 911-8 du code de la sécurité sociale, le maintien de leur couverture sociale et la portabilité de leurs droits.

Le licenciement des salariés non protégés de la société Tobler a été notifié le 8 avril 2020 et celui des salariés protégés le 13 mai 2020.

Par courrier RAR du 30 octobre 2020, la société Malakoff Prévoyance a résilié les contrats de protection sociale au 31 décembre 2020 et a déclaré la fin des garanties à cette date.

Par acte d'huissier de justice en date du 20 octobre 2020 la Selafa Mja, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Tobler, a fait assigner la société Malakoff Prévoyance pour obtenir la portabilité à titre gratuit de la couverture santé et prévoyance des salariés licenciés pour une durée maximale de 12 mois à compter de la rupture du contrat de travail.

* * *

Vu le jugement prononcé le 10 février 2021 par le tribunal de commerce de Paris qui a statué comme suit :

- Ordonne à la société Malakoff Humanis Prévoyance de garantir, dans les conditions définies par l'article L.911-8 du code de la sécurité sociale, la portabilité à titre gratuit des régimes de santé et de prévoyance suivants :

Contrat n° M1/ N38305-0001-S, relatif aux frais de santé obligatoire pour l'ensemble du personnel ; et Contrat n° M1 / N38307-0001-S, relatif aux frais de santé facultatif pour l'ensemble du personnel, au bénéfice des salariés licenciés de la société Tobler bénéficiaires de ces contrats, représentés par le liquidateur judiciaire, ès qualités, et pour une durée maximum de 12 mois à compter de la rupture effective du contrat de travail de chacun des salariés concernés par les mesures de licenciement intervenues dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Tobler ;

- Déboute la Selafa Mandataires Judiciaires Associés « Mja », prise en la personne de Me [J] [E] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler de sa demande d'astreinte ;

- Ordonne à Malakoff Humanis Prévoyance de remettre à Selafa Mandataires Judiciaires Associés « Mja », prise en la personne de Me [J] [E] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler les conditions générales des contrats conclus entre Malakoff Prévoyance et la société Tobler, ainsi que les avenants éventuels, et déboute Selafa Mandataires Judiciaires Associés « Mja '', prise en la personne de Me [J] [E] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler de sa demande d'astreinte ;

- Déboute Selafa Mandataires Judiciaires Associés « Mja », prise en la personne de Me [J] [E] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler de sa demande de publication du présent jugement ;

- Déboute Malakoff Humanis Prévoyance de sa demande de paiement de cotisations au titre des salariés licenciés ;

- Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- Condamne Malakoff Humanis Prévoyance à verser la somme de 4000 euros à la Selafa Mandataires Judiciaires Associés « Mja », prise en la personne de Me [J] [E] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonne l'exécution provisoire du jugement.

- Condamne Malakoff Humanis Prévoyance aux dépens de l'instance,

Vu l'appel déclaré le 19 février 2021 par la société Malakoff Humanis Prévoyance,

Vu les dernières conclusions signifiées le 15 novembre 2022 par la société Malakoff Humanis Prévoyance,

Vu les dernières conclusions signifiées le 9 décembre 2022 par la société Mja , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler,

La société Malakoff Humanis Prévoyance demande à la cour de statuer comme suit :

A titre principal :

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a condamné Malakoff Humanis Prévoyance à maintenir la garantie de frais de santé aux anciens salariés de la société Tobler dans le cadre de la portabilité ;

En conséquence,

- Débouter la Selafa Mja de l'intégralité de ses demandes au titre du maintien de la garantie de frais de santé aux anciens salariés de la société Tobler ;

A titre subsidiaire :

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté Malakoff Humanis Prévoyance de sa demande de paiement des cotisations dues en contrepartie du maintien des contrats collectifs de frais de santé dans le cadre de la portabilité ;

En conséquence,

- Condamner la Selafa Mja au paiement des cotisations patronales et salariales au titre de la poursuite des contrats collectifs de frais de santé ;

En tout état de cause :

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté la Selafa Mja de ses demandes de fixation d'une astreinte et de publication de la décision à intervenir

- Condamner la Selafa Mja à verser à Malakoff Humanis Prévoyance la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La société Mja , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler, demande à la cour de statuer comme suit :

Vu les articles L. 911-8, L. 914-1 et L. 932-10 du code de la sécurité sociale, l'article L. 641-11-1 du code de commerce, les articles 1103, 1104 et 1228 du code civil et les anciens articles 1134 et 1184 du code civil, les articles L. 113-6 et L. 113-12 du code des assurances, l'article L. 221-8-1 du code de la mutualité, les articles 451, 514 et suivants du code de procédure civile, les articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

- Confirmer en intégralité le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 10 février 2021 sauf en ce qu'il a débouté le liquidateur judiciaire de sa demande d'astreinte au titre du maintien de la portabilité des garanties ;

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 10 février 2021 en ce qu'il a « débouté la Selafa Mandataires Judiciaires Associés « Mja », prise en la personne de Me [J] [E] [Z], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler de sa demande d'astreinte » au titre du maintien de la portabilité des garanties,

En conséquence, statuant à nouveau :

- Ordonner à Malakoff Humanis Prévoyance, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter à compter du prononcé de la décision à venir, de garantir la portabilité à titre gratuit des régimes de santé et de prévoyance suivants :

Contrat n°M1 / N38305'0001'S, relatif aux frais de santé obligatoire pour l'ensemble du personnel ; et Contrat n° M1 / N38307'0001'S, relatif aux frais de santé facultatif pour l'ensemble du personnel au bénéfice des salariés licenciés de Tobler bénéficiaires de ces contrats, représentés par le liquidateur judiciaire ès qualités, pour une durée maximum de 12 mois à compter de la rupture effective du contrat de travail de chacun des salariés concernés par les mesures de licenciement intervenues dans le cadre de la liquidation judiciaire de Tobler ;

- Se réserver la liquidation de l'astreinte susmentionnée ;

En tout état de cause :

- Rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de Malakoff Humanis Prévoyance

- Condamner Malakoff Humanis Prévoyance au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR

La société Malakoff Humanis Prévoyance dite ci-après société MHP fait valoir que la portabilité des garanties de frais de santé a été effective à compter de la cessation des contrats de travail jusqu'au 31 décembre 2020 mais a cessé à compter du 1er janvier 2021. La société MHP expose en effet que l'article 911-8 du code de la sécurité sociale qui garantit au salarié de bénéficier des avantages de la protection sociale complémentaire pendant une durée de 12 mois suivant la rupture de son contrat de son travail s'impose à l'employeur mais pas à l'assureur. Dans l'hypothèse d'un licenciement, la résiliation postérieure du contrat d'assurance qui n'est pas irrégulière ne peut engendrer la survie artificielle des garanties indépendamment du contrat qui leur sert de fondement.

A titre subsidiaire, la société MHP soutient que le tribunal ne pouvait pas lui ordonner de poursuivre l'exécution du contrat sans paiement corrélatif des primes qui en constitue la contrepartie.

Selon la Selafa MJA, ès qualités, le droit à portabilité défini par l'article 911-8 du code de la sécurité sociale est une disposition d'ordre public qui s'applique à tous les salariés. Dés lors que les contrats collectifs étaient en cours lors du licenciement et qu'ils n'étaient pas résiliés au jour de la demande de portabilité, le salarié doit en bénéficier, aucune condition relative à son financement n'étant exigée.

La selafa MJA, ès qualités, demande que, en complément au dispositif du jugement, la condamnation à garantie soit assortie d'une astreinte.

Ceci étant exposé, l'article 911-8 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

'Les salariés garantis collectivement, dans les conditions prévues à l'article L.99-1 contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par le régime d'assurance chômage, selon les conditions suivantes :

1° Le maintien des garanties est applicable à compter de la date de cessation du contrat de travail et pendant une durée égale à la période d'indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail ou, le cas échéant, des derniers contrats de travail lorsqu'ils sont consécutifs chez le même employeur. Cette durée est appréciée en mois, le cas échéant arrondie au nombre supérieur, sans pouvoir excéder douze mois ;

2° Le bénéfice du maintien des garanties est subordonné à la condition que les droits à remboursements complémentaires aient été ouverts chez le dernier employeur ;

3° Les garanties maintenues au bénéfice de l'ancien salarié sont celles en vigueur dans l'entreprise ; (...)'

Cet article est applicable aux salariés qui , ainsi que dans la présente espèce, ont été licenciés à la suite d'un jugement d'ouverture de liquidation judiciaire.

Les salariés non protégés ont été licenciés le 8 avril 2020 et les salariés protégés ont été licenciés le 13 mai 2020 à la suite de la liquidation judiciaire de leur employeur , la société Tobler, prononcée le 23 mars 2020. La durée de la portabilité est de 12 mois suivant la cessation du contrat de travail et la période litigeuse est celle postérieure au 31 décembre 2020, date de prise d'effet de la cessation de la garantie de la société MHP suite à son courrier de résiliation du 30 octobre 2020.

Si l'article l'article 911-8 du code de la sécurité sociale dont le contenu a été ci-dessus rappelé assure la protection des salariés licenciés, au jour de leur licenciement, le contrat d'asurance garantissant les droitsétant en vigueur, il résulte du courrier recommandé du 30 octobre 2010 adressé au liquidateur de la société Tobler que la société MHP, au visa de l'article L. 113.12 du code des assurances, a résilié le contrat au 31 décembre 2020.

Aucun texte ne prive l'assureur du droit de résilier le contrat au cours de la période de portabilité. L'assureur ne peut pas plus être tenu à garantie au- delà de la date de résiliation.

Aucune demande de nullité de la résiliation n'est présentée mais uniquement d'absence de portée sur les droits des salariés.

Il se déduit de la résiliation du contrat que l'assureur se trouve déchargé de toutes les obligations en relation avec le contrat et que le liquidateur de l'assuré ne peut pas lui opposer les garanties précitées devant bénéficier aux salariés licenciés.

La société MHP a pu résilier le contrat pendant la période de garantie et le liquidateur, ès qualité , est mal fondé à soutenir que l'assureur serait tenu au maintien des garanties pendant la période de 12 mois au motif que l'assurance était en vigueur au jour où les droits ont été acquis .

Le jugement déféré doit être infirmé et la Selafa MJA, ès qualités, doit être déboutée de ses demandes de maintien de la portabilité ainsi que du surplus de ses demandes .

Une indemnité doit être allouée à l'appelante sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement déféré ;

Statuant de nouveau :

DÉBOUTE la Selafa Mja , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler, de toutes ses demandes ;

CONDAMNE la Selafa Mja , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler aux entiers dépens ;

CONDAMNE la Selafa Mja , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Tobler à verser à la société Malakoff Humanis Prévoyance la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

S.MOLLÉ E.LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 21/03429
Date de la décision : 03/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-03;21.03429 ?
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