RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 14 Avril 2023
(n° 337, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/08559 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAN5H
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 18/03905
APPELANTE
SAS SOCIETE [7]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Gabriel RIGAL, avocat au barreau de LYON, toque : 1406 substitué par Me Nicolas BERETTI, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
MUTUELLE SOCIALE AGRICOLE DU SUD-AQUITAINE (MSA)
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par M. [U] [B] en vertu d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Février 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre
Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller
Madame Natacha PINOY, Conseillère
Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre et par Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par la société [7] d'un jugement rendu le 6 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Paris, dans un litige l'opposant à la MSA de Sud-Aquitaine.
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [T] [N] (l'assuré), salarié de la société [7] (la société), a adressé à la MSA de Sud-Aquitaine (la MSA) un certificat médical d'accident du travail/maladie professionnelle du 27 février 2015 pour un "déficit auditif supérieur à 35 db, audiogramme du 29 mai 2013, appareillé depuis fin 2013", ce certificat médical n'étant pas assorti d'un arrêt de travail; que, le 10 juin 2015, l'assuré a souscrit une déclaration de maladie professionnelle pour perte auditive, laquelle visait le certificat médical du 27 février 2015; que la maladie déclarée a été prise en charge au titre de la législation professionnelle ; que l'état de santé de l'assuré a été déclaré consolidé le 4 octobre 2017 avec séquelles ; que, le 9 janvier 2018, la MSA a notifié à la société une décision de la commission des rentes fixant, sur avis du médecin conseil, un taux d'incapacité permanente partielle de 18% pour hyperacousie constatée le 27 février 2015 ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable de la MSA, la société a formé un recours, le 4 septembre 2018, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, à l'encontre de la notification d'attribution du taux d'incapacité permanente partielle de l'assuré; que, par jugement du 6 juin 2019, le tribunal de grande instance de Paris a débouté la société de ses demandes, la condamnant aux dépens.
La date de notification du jugement à la société est inconnue ; la société a interjeté appel de cette décision par courrier recommandé avec avis de réception du 6 août 2019.
Aux termes de ses conclusions écrites soutenues oralement par son avocat, la société demande à la cour de :
- déclarer la société recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et prétentions,
A titre incident,
- commettre tout consultant qu'il plaira à la juridiction avec pour mission d'examiner sur pièces les éléments du dossier médical justifiant le taux d'IPP de 18% attribué à M. [T] [N] en conséquence de sa maladie professionnelle du 27 février 2015, d'en apprécier le bien-fondé et de se prononcer sur les éléments concourants à la fixation de ce taux,
- ordonner que la consultation prendra la forme d'une consultation orale qui sera présentée à l'audience que le tribunal fixera ou, s'il plaît à la juridiction, qu'elle prendra la forme d'une consultation écrite qui sera remise au greffe et communiquée au médecin désigné par l'employeur ainsi qu'au praticien conseil de la MSA,
- enjoindre à cette fin à la MSA ainsi qu'à son praticien conseil de communiquer au consultant ainsi désigné l'entier dossier médical de M. [T] [N] justifiant ladite décision,
- enjoinre à cette fin à la MSA ainsi qu'à son praticien conseil de communiquer au docteur [C] l'entier dossier médical de M. [T] [N] justifiant ladite décision,
- ordonner que les frais résultant de la consultation soient mis à la charge de la caisse nationale d'assurance maladie, conformément aux dispositions de l'article L.142-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l'article 61 de la loi n°2019-774 du 29 juillet 2019,
- A défaut, déclarer inopposable à la société [7] le taux de 18% attribué par la MSA à M. [T] [N] au titre de sa maladie professionnelle du 27 février 2015,
- En tout état de cause, infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 6 juin 2019,
- Condamner la MSA aux dépens.
Aux termes de ses conclusions écrites soutenues oralement par son représentant, la MSA demande à la cour de :
- à titre principal, confirmer le jugement prononcé le 6 juin 2019,
- subsidiairement, ordonner une expertise médicale avec mission de fixer le taux d'IPP à la suite de la maladie professionnelle déclarée le 10 juin 2015 par M. [N], dans les rapports entre la société et la caisse.
En application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l'audience pour l'exposé de leurs moyens.
SUR CE,
La société réclame, avant tout débat sur le fond, la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire sur pièces. Elle ne conteste ni le caractère professionnel de la maladie, ni la date de consolidation fixée par la MSA au 24 octobre 2017. Elle indique qu'elle n'a pas pu avoir accès aux pièces médicales du dossier et qu'elle a mandaté un médecin pour l'assister, le docteur [C], qui doit être associé à la mesure d'instruction pour apporter les éléments permettant à l'employeur d'apprécier l'effectivité du recours et l'établissement d'un débat contradictoire.
Rappelant qu'avant le 1er janvier 2019, il n'existait pas d'obligation légale pour la caisse de MSA de transmettre le rapport médical d'IPP au médecin désigné par l'employeur dans un litige sur le taux d'IPP, la MSA indique ne pas s'opposer à la réalisation d'une expertise, à la seule condition qu'elle soit ordonnée par la cour.
Selon l'article 143 du code de procédure civile, les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d'office, être l'objet de toute mesure d'instruction légalement admissible.
Le souci du respect du contradictoire impose la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise judiciaire sur pièces afin de donner tous éléments permettant de déterminer le taux d'incapacité permanente partielle attribué à l'assuré en raison de sa maladie professionnelle du 27 février 2015.
Il sera, dans ce cadre, enjoint à la MSA de transmettre le dossier médical ayant permis de déterminer le taux d'IPP de l'assuré à l'expert ainsi qu'au docteur [C], médecin conseil désigné par la société.
Les frais de l'expertise seront avancés par la société, qui a intérêt à la mesure.
L'ensemble des autres demandes seront réservées.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DECLARE l'appel recevable,
INFIRME le jugement rendu le 6 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Paris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
ORDONNE une expertise médicale sur pièces, et désigne pour y procéder :
Le docteur [J] [E]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Tél : [XXXXXXXX01]
Email : [Courriel 8]
DONNE mission à l'expert, après avoir pris connaissance de l'entier dossier médical détenu par le service médical de la MSA de Sud-Aquitaine,
- d'évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de M. [T] [N] imputable à sa maladie professionnelle du 27 février 2015, au regard notamment du barème indicatif d'invalidité en matière de maladies professionnelles, annexé au livre IV de la partie réglementaire du code de la sécurité social,
- de donner, de manière générale, toute information permettant d'apprécier le taux d'incapacité permanente partielle résultant de cette maladie,
DIT qu'il appartient au service médical de la MSA de Sud-Aquitaine de transmettre à l'expert et au docteur [C], médecin conseil de la société [7], sans délai, le dossier médical de M. [T] [N], et, de manière générale, tous documents utiles à la mission de l'expert,
DIT que l'expert devra communiquer un pré-rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits auxquels il devra répondre dans son rapport définitif dans le délai de six mois de sa saisine ;
DIT que la société [7] devra consigner avant le 16 juin 2023 à la régie de la cour la somme de 1.000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert ;
DIT qu'à défaut de paiement de la consignation à son échéance, la mesure d'expertise sera caduque ;
RESERVE l'ensemble des autres demandes,
RENVOIE l'affaire à l'audience de la chambre 6-12 en date du :
Vendredi 26 avril 2024 à 13h30
en salle Huot-Fortin, 1H09, escalier H, secteur pôle social, 1er étage,
DIT que la notification de la présente décision vaudra convocation des parties à cette audience.
La greffière La présidente