Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRET DU 20 AVRIL 2023
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/13163 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6ZA6
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Octobre 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F16/01771
APPELANTS
Monsieur [E] [M] en qualité d'administrateur judiciaire de la Société BOYERE LECHARTIER
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Sylvia FOURMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1247
Société BOYERE-LECHARTIER
[Adresse 7]
[Localité 6]
Représentée par Me Sylvia FOURMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1247
SCP [N] DAUDE en la personne de Me [W] [N] en qualité de mandataire judiciaire de la Société BOYERE LECHARTIER
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Sylvia FOURMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1247
INTIMES
Monsieur [H] [R], agissant en qualité d'époux veuf et ayant droit de Madame [Z] [R] née [P]
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représenté par Me Marie-béatrix BEGOUEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2080
Monsieur [C] [R] Monsieur [C] [R], agissant en qualité de fils et ayant droit de Madame [Z] [R] née [P]
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représenté par Me Marie-béatrix BEGOUEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2080
PARTIE INTERVENANTE
Association AGS CGEA IDF OUEST
N'ayant pas constitué avocat bien que la déclaration d'appel ait été signifiée à étude le 14 janvier 2019. La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à personne morale le 18 mars 2021.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Bérénice HUMBOURG, présidente de chambre,
Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre,
Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR.
ARRET :
- REPUTE CONTRADICTOIRE,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES
La société Boyère-Lechartier est une société d'expertise comptable qui employait plus de 10 salariés au 31 décembre 2015 et relevait de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et des commissaires aux comptes du 9 décembre 1974.
Mme [Z] [R] a été embauchée le 1er juillet 1995, par contrat de travail écrit à durée
indéterminée à temps partiel de 130 heures, par la SARL CAFAG en qualité de comptable, non cadre.
Le 6 octobre 2004, son contrat était transféré à la SASU Boyère-Lechartier.
Les relations de travail étaient régies par la convention collective nationale des Experts comptables.
Le 15 septembre 2015, la société Boyère-Lechartier informait sa salariée de sa volonté de fermer définitivement l'agence de [Localité 9] où elle était affectée. Elle lui proposait par ailleurs une modification de son contrat de travail pour motif économique en l'affectant sur son établissement de [Localité 10].
Le 29 septembre 2015, Mme [Z] [R] refusait d'être reclassée sur l'agence de [Localité 10], en
raison de l'éloignement géographique par rapport à son domicile.
Elle était convoquée à un entretien préalable par courrier du 6 octobre 2015 pour le 16 octobre suivant.
Le 13 octobre 2015, la société Boyère-Lechartier indiquait devoir reporter la date de l'entretien préalable à licenciement.
Par courrier du 30 novembre 2015, la société adressait une nouvelle convocation à la salariée pour un entretien pour le 10 décembre 2015.
Par courrier recommandé du 18 décembre 2015, Mme [Z] [R] s'est vu notifier son licenciement pour faute lourde.
Contestant le bien fondé de son licenciement, Mme [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris par requête du 17 février 2016.
Suite à son décès, M. [H] [R] et M. [C] [R], ses ayants droit, ont poursuivi la procédure.
Par jugement en date du 10 octobre 2018, le conseil de prud'hommes de Paris a:
-dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
-fixé la rémunération moyenne à 1.813,37 euros ;
-fixé l'ancienneté de feue Madame [Z] [R] au 1er juillet 1995 ;
-fixé la créance de M. [H] [R] et M. [C] [R], ès-qualités d'ayants-droit de Mme [Z] [R] à l'encontre de la SCP [N] Daudé, prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère Lechartier aux sommes suivantes:
3626.00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
362.60 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
8740.00 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
20000.00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
10000.00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
1000.00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat
3000.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné le remboursement à Pôle Emploi des allocations perçues ;
- ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement ;
-ordonné l'exécution provisoire de droit ;
- débouté M. [H] [R] et M. [C] [R], ès-qualités d'ayants-droit de Mme [Z] [R] du surplus des demandes ;
- débouté la partie défenderesse de sa demande reconventionnelle et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- déclaré le jugement opposable à l'AGS dans la limite de sa garantie ;
- ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de redressement judiciaire.
La société Boyère-Lechartier a interjeté appel par déclaration déposée par la voie électronique le 19 novembre 2018.
Le 18 mars 2021, Messieurs [H] et [C] [R], ayants-droit, mettaient en cause l'Association Unedic Délégation AGS CGEA IDF Ouest.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées par la voie électronique le 10 février 2021, la société Boyère-Lechartier, la SCP [N]-Daudé, mandataire judiciaire et Maître [E] [M], administrateur judiciaire demandent à la Cour de:
-recevoir la société Boyère-Lechartier, la SCP Brouad-Daudé, mandataire judiciaire de la société Boyère-Lechartier et Me [E] [M], administrateur judiciaire de la société Boyère-Lechartier en leurs écritures et les y déclarer bien fondés,
- infirmer le jugement rendu le 10 octobre 2018 par le conseil des prud'hommes de Paris en ce qu'il a :
dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
fixé la rémunération moyenne à 1 813.37 euros ;
-fixé l'ancienneté de feue Mme [Z] [R] au 1er juillet 1995 ;
-fixé la créance de M. [H] [R] et M. [C] [R] es qualités d'ayants-droit de Mme [Z] [R] à l'encontre de la SCP [N]-Daudé, prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère Lechartier aux sommes
suivantes :
- 3626.00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis;
- 362.60 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
- 8470.00 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
- 20 000.00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 10 000.00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
- 1 000.00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité et de résultat
- 3 000.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
ordonné le remboursement à Pôle Emploi des allocations perçues ;
ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement ;
-ordonné l'exécution provisoire de droit.
Et statuant à nouveau :
A titre principal :
- dire que le licenciement de Mme [R] est fondé sur une faute lourde,
En conséquence,
- débouter ses ayants droits de toutes demandes, fins et conclusions au titre de la
rupture du contrat de travail,
A titre subsidiaire :
- dire que le licenciement de Mme [R] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la créance de M. [H] [R] et M. [C] [R], es-qualités d'ayants droit de Mme [Z] [R] à l'encontre de la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier à la somme suivante :
- 20 000.00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la créance de M. [H] [R] et M. [C] [R], es-qualités d'ayants-droit de Mme [Z] [R] à l'encontre de la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier aux sommes suivantes :
- 10 000.00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
- 1 000.00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité et de résultat
- 3 000.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner les ayants droit de Mme [R] au paiement de la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- les condamner aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées par la voie électronique le 30 juillet 2021, les intimés demandent à la Cour de:
- juger irrecevable la pièce adverse numéro 9 ;
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 10 octobre 2018 en ce qu'il a:
requalifié le licenciement de Madame [Z] [R] en licenciement sans cause réelle et
sérieuse ;
constaté que la société Boyère-Lechartier était redevable de l'indemnité compensatrice
de préavis et des congés payés afférents ;
condamné la société Boyère-Lechartier à verser la somme de 10.000€ à Mme [Z] [R] pour manquement à son obligation de sécurité de résultat ;
constaté le préjudice moral subi par Madame [Z] [R];
- réformer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 10 octobre 2018 en ce qu'il a:
rejeté les demandes de Mme [Z] [R] au titre de son 13ème mois, de son rappel de
salaire et des congés payés afférents, de l'exécution déloyale du contrat de travail et des congés payés 2014/2015 ;
réduit les sommes demandées au titre des condamnations pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, pour l'indemnité conventionnelle de licenciement et pour la violation de l'obligation de sécurité de résultat ;
Et en conséquence,
A titre principal, compte tenu de la situation in bonis de la société appelante
- condamner la société Boyère-Lechartier à payer à M. [H] [R] et M.[C] [R], agissant en qualité d'ayants-droits de Mme [Z] [R] les sommes suivantes :
Rappel de prime de 13ème mois (reliquat) 591,25 €
Rappel de salaire (de 104 heures payées à 130h contractuels) 15.116,40 €
Congés payés sur rappel de salaire 1.511,64 €
Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat
de travail et non-respect du temps partiel 20.000€
Rappel d'indemnité de congés payés 2014/2015 (reliquat) 1.431,99 €
Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 50.000 €
Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) 4.466,54 €
Indemnité de congés payés sur préavis 446,65€
Indemnité légale de licenciement 11.053,49 €
Dommages et intérêt pour violation de l'obligation de sécurité de résultat 10.000 €
Article 700 du code de procédure civile : 6.000 €
-ordonner la remise par la société Boyère-Lechartier des documents de fin de contrat
(Attestation Pôle Emploi, certificat de travail) conformes;
-assortir les condamnations d'intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir,
-ordonner la capitalisation des intérêts;
- débouter la société Boyère-Lechartier de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
contraires aux présentes ;
-condamner la société aux entiers dépens, y compris les frais d'exécution éventuels de la décision à intervenir, lesquels seront recouvrés par Maître Marie-Béatrix Begouën du barreau de Paris,conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
A titre subsidiaire, si la procédure collective de la société Boyère-Lechartier est toujours
en cours :
-fixer au passif de la société Boyère-Lechartier en redressement judiciaire les créances de
M. [H] [R] et M. [C] [R] agissant en qualité d'ayants-droit de Mme
[Z] [R], suivantes :
Rappel de prime de 13ème mois (reliquat) 591,25 €
Rappel de salaire (de 104 heures payées à 130h contractuels) 15.116,40 €
Congés payés sur rappel de salaire 1.511,64 €
Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat
de travail et non-respect du temps partiel 20.000€
Rappel d'indemnité de congés payés 2014/2015 (reliquat) 1.431,99 €
Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 50.000 €
Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) 4.466,54 €
Indemnité de congés payés sur préavis 446,65€
Indemnité légale de licenciement 11.053,49 €
Dommages et intérêt pour violation de l'obligation de sécurité de résultat 10.000 €
Article 700 du code de procédure civile: 6.000 €
-ordonner la remise des documents de fin de contrat (Attestation Pôle emploi, certificat de travail) conformes à la décision à intervenir,
- débouter les appelants, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;
-déclarer opposable aux AGS l'arrêt à intervenir,
-condamner les AGS à garantir ces sommes,
-condamner les appelants aux entiers dépens de la procédure.
L'UNEDIC Délégation Ags Idf Ouest à laquelle la signification de déclaration d'appel et de conclusions a été effectuée par huissier le 18 mars 2021 n'a pas constitué avocat.
La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties à leurs conclusions conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'instruction a été déclarée close le 23 novembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la pièce n°9 produite par les appelants
Les intimés reprochent aux appelants de communiquer le rapport d'enquête réalisée par une société de détectives privés en faisant valoir qu'il s'agit d'un mode de preuve illicite attentatoire à leur vie privée.
Toutefois, il ressort de ce rapport que la filature opérée concernait un expert comptable que l'employeur soupçonnait de détournement de clientèle et non Mme [R]. Aucune atteinte à la vie privée ne peut par ailleurs être retenue dès lors qu'outre que Mme [R] n'était pas la personne suivie, les opérations et prises de photographies ont été menées de la voie publique.
Cette pièce ne sera en conséquence pas écartée des débats.
Sur le licenciement
Messieurs [R] font valoir en premier lieu que le licenciement de Mme feue [R] est dépourvu de cause réelle et sérieuse en ce qu'il n'a pas été notifié dans le délai d'un mois à compter de la date de convocation à l'entretien préalable.
Il ressort des articles L.1232-2 et L. 1332-2 du code du travail que la lettre de licenciement pour motif disciplinaire doit être notifiée dans le délai d'un mois après l'entretien préalable.
Le licenciement prononcé plus d'un mois après la tenue de l'entretien préalable est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
De même en cas de report de l'entretien préalable, il est de principe que le délai de notification peut être reporté dans le mois d'un entretien ultérieur lorsque ce report s'opère à la demande du salarié ou parce ce dernier est dans l'impossibilité de se présenter au premier entretien préalable. Le report à l'initiative de l'employeur n'a pas pour effet de décaler la date butoir de notification de la sanction et ainsi le délai de notification reste impératif, y compris en cas d'absence du salarié.
La charge de la preuve de l'existence d'une demande de report du salarié ou de l'impossibilité pour celui-ci de se présenter au premier entretien incombe à l'employeur.
En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [R] a été convoquée une première fois par un courrier recommandé en date du 6 octobre 2015 à un entretien devant se tenir le 16 octobre.
Par courrier en date du 13 octobre 2015, l'employeur lui indiquait ne pas pouvoir être présent et qu'une nouvelle convocation lui serait adressée. Par courrier recommandé en date du 30 novembre 2015, Mme [R] était finalement convoquée à un entretien préalable devant se tenir le 10 décembre 2015. Elle était licenciée pour faute lourde par courrier en date du 18 décembre 2015.
Il s'en évince que c'est donc à l'initiative de l'employeur que la convocation à l'entretien préalable au licenciement a été reportée.
Dans ces conditions, alors que le licenciement devait être notifié dans le mois de la première convocation soit au plus tard le 16 novembre 2015, sa notification tardive le 18 décembre 2015 équivaut à une absence de notification. Le licenciement est en conséquence irrégulier et dénué de cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera confirmé.
Sur les demandes salariales et indemnitaires
Sur le rappel de salaires et les congés payés afférents
En application de l'article L. 3123-6 du code du travail, le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit devant comporter les diverses mentions qu'il énonce.
L'exigence légale d'un écrit s'applique non seulement au contrat initial mais aussi à ses avenants modificatifs de la durée du travail ou de sa répartition même si ces avenants sont temporaires et prévus par une convention collective.
Il s'ensuit que la durée du travail hebdomadaire ou mensuelle devant figurer dans le contrat de travail à temps partiel ne peut être modifiée sans l'accord du salarié. L'acceptation du salarié doit être expresse et ne peut résulter de la seule poursuite de la relation de travail, ni de la réception sans contestation des bulletins de salaire.
En l'espèce, il est constant que le seul contrat de travail signé entre les parties, est celui conclu initialement le 1er juillet 1995 entre la société CAFAG et Mme [R] fixant à 130 heures le volume horaire mensuel de travail pour un emploi de comptable.
Les appelants font valoir que le volume horaire a été modifié à la demande de Mme [R] en 2004 et ce pour lui permettre d'occuper un second emploi.
Les intimés soutiennent pour leur part que les bulletins de paie font ressortir qu'elle était rémunérée en qualité de secrétaire comptable pour 104 heures au lieu de 130 heures. Ils sollicitent en conséquence un rappel de salaire au titre de 26 heures par mois au taux horaire de 16, 15 euros et ce durant trois ans.
Il est constant qu'aucun avenant au contrat de travail n'a été établi.
Il s'évince cependant des pièces versées que Mme [R] a été engagée en qualité de comptable par une autre entreprise à compter du 4 octobre 2004 pour un volume horaire de 6 heures par semaine, soit 24 heures par mois parallèlement à son activité professionnelle au sein de la société Boyère Lechartier.
Dans ces conditions, alors que la salariée n'a jamais contesté le nombre d'heures figurant sur les bulletins de salaire en conséquence de l'existence d'un second emploi et avait en conséquence convenu avec son employeur du nombre d'heures à effectuer, la demande de rappel de salaire n'est pas fondée.
Sur le treizième mois
Le salaire tel que reconstitué par les ayants-droit de la salariée, sur la base de 130 heures au lieu de 104 heures n'ayant pas été retenu, il ne sera pas fait droit à la demande au titre d'un rappel de 13 ème mois étant observé que la salariée a perçu au mois de juin 800, 55 euros et que l'employeur a réglé le 13 mars 2017 la somme de 756,08 euros au titre du reliquat.
Sur les demandes indemnitaires au titre du licenciement
le salaire tel que reconstitué par les ayants droit du salarié, sur la base de 130 heures au lieu de 104 heures n'ayant pas été retenu, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité de licenciement à la somme de 8740 euros, l'indemnité de préavis à la somme de 3626 euros outre les congés payés afférents, étant précisé que cette dernière somme doit s'entendre en brut.
Le licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvre droit, puisqu'il est intervenu avant le 23 septembre 2017 (date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 22 septembre 2017 modifiant l'article L1235-3 du code du travail) dans une entreprise comptant plus de 11 salariés, à des dommages et intérêts au moins égaux au salaire de ses six derniers mois.
Compte tenu de l'âge de Mme [R] (46 ans), de son ancienneté (20 ans), de son salaire ( 1813, 37 euros et les justificatifs d'indemnisation par Pôle Emploi postérieurement à son licenciement, il y a lieu de lui allouer la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du licenciement.
Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
En application de l'article L.1222-1 du code du travail, le contrat de travail est présumé exécuté de bonne foi, de sorte que la charge de la preuve de l'exécution de mauvaise foi dudit contrat incombe à celui qui l'invoque.
Messieurs [R] en qualité d'ayants droit de la salariée se prévalent de ce que celle-ci n'a eu aucune visite médicale, aucune surveillance de son temps de travail, et a été rémunérée en qualité de secrétaire comptable alors même qu'elle exerçait les fonctions de comptable.
Il ressort de l'analyse des bulletins de paie que Mme [R] a fait l'objet d'une sous qualification au regard de l'emploi de comptable qu'elle occupait. Par ailleurs, l'examen de ses bulletins de salaire révèle que son ancienneté n'a pas été reprise à la date du 1er juillet 1995, date de son contrat initial, mais a été arrêtée à la date du transfert de contrat.
Les intimés caractérisent ainsi le manquement de l'employeur à son obligation de loyauté en ce que Mme [R] a été rémunérée pour un emploi moins qualifié que celui pour lequel elle a été embauchée.
Si le défaut de surveillance des horaires ne peut prospérer au regard du rejet de la demande de rappel de salaires, la rémunération de la salariée à un taux horaire ne correspondant pas à l'emploi pour lequel elle a été embauchée caractérise le manquement de l'employeur. Le préjudice en résultant doit faire l'objet d'une indemnisation qui sera fixée à la somme de 3000 euros.
Sur l'indemnité de congés payés 2014/2015
Messieurs [R] sollicitent le versement d'un reliquat de congés payés 2014/2015 en se fondant sur la rémunération reconstituée.
Or, le salaire tel que reconstitué par les ayants droit du salarié, sur la base de 130 heures au lieu de 104 heures n'ayant pas été retenu, il ne sera pas fait droit à la demande au titre d'un rappel de congés payés.
Sur la demande de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation de sécurité et de défaut d'entretien professionnel
Il résulte des éléments d'appréciation que l'employeur a été défaillant dans le respect des dispositions des articles L 6315-1 et L 6321-1 du code du travail, dans leurs versions applicables au litige, ce dont se prévalent les ayants droit, la société n'ayant rien entrepris, aucune démarche durant la relation de travail pour veiller au maintien de la capacité de sa salariée à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies, ni organisé d'entretien professionnel permettant des vérifications en matière de suivi de formation et du bénéfice d'une progression salariale ou professionnelle.
En outre, le non respect de l'obligation de sécurité par l'employeur résulte du défaut partiel de visites médicales périodiques.
Il appartient désormais aux ayants droit de la salariée de démontrer le préjudice qu'ils invoquent, dont les juges du fond apprécient souverainement l'existence et l'étendue.
Or, Messieurs [H] et [C] [R], ayants droit de Mme [R], ne justifient aucunement d'un préjudice découlant du défaut d'organisation de la visite médicale d'embauche et du défaut d'entretien professionnel.
Ils seront en conséquence déboutés de cette demande.
Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral
Messieurs [R] sollicitent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a octroyé la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral. Ils soutiennent qu'il a été amplement démontré la déloyauté en vers Mme [R] non seulement au long de l'exécution de son contrat mais surtout à la rupture de celui-ci puisqu'elle a été dispensée de présence et privée de son emploi à compter du mois de juillet 2015 et qu'il aura fallu attendre jusqu'au mois de décembre 2015 qu'elle soit licenciée de manière vexatoire pour des motifs infondés et de manière la plus désagréable qui soit.
L'octroi de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant des circonstances brutales et vexatoires de la rupture nécessite, d'une part, la caractérisation d'une faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail qui doit être différente de celle tenant à son seul caractère abusif, ainsi que, d'autre part, la démonstration d'un préjudice distinct de celui d'ores et déjà réparé par les sommes allouées à ce titre.
Le seul fait de prononcer une mise à pied conservatoire et d'engager une procédure de licenciement pour faute grave ou lourde n'établit pas que les conditions de la rupture aient été brutales et vexatoires, l'employeur n'ayant fait qu'engager une procédure prévue par le code du travail, ce qui est exclusif de toute faute.
Les intimés ne démontrant pas l'existence d'une faute liée aux circonstances du licenciement, ni d'un préjudice distinct que celui déjà indemnisé au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse seront déboutés de cette demande.
Sur la garantie de l'AGS au regard de la situation de la société employeur
Il sera constaté que la société Boyère-Lechartier a bénéficié d'un plan de redressement et qu'elle est désormais in boni.
Les créances de Mme [R] puis de ses ayants-droit sont liées à la rupture de son contrat de travail et sont nées antérieurement à la procédure collective. Nonobstant l'adoption ultérieure d'un plan de redressement, les sommes dues par l'employeur restent soumises au régime de la procédure collective.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé les créances de Messieurs [R] à l'encontre de la SCP [N]-Daudé pris en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère Lechartier.
L'AGS pourra être tenue d'en effectuer l'avance à défaut de fonds disponibles de l'employeur. Le présent arrêt sera en conséquence déclaré opposable à l'AGS dans les limites prévues aux articles L 3253-1 et suivants du code du travail.
Sur les demandes accessoires
Il sera ordonné à la société Boyère-Lechartier de remettre à Messieurs [R] les documents sociaux rectifiés conformément aux dispositions du présent arrêt.
La SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier Boyère-Lechartier sera condamnée aux dépens d'appel et à verser à Messieurs [R] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le surplus des demandes sera rejeté.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
DECLARE la pièce n°9 produite par la la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier recevable,
CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé la créance de Monsieur [H] [R] et de M. [C] [R] es qualités d'ayants droit de Mme [Z] [R] à l'encontre de la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier à 20.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité et de résultat et les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et a ordonné la remise des documents sociaux sous astreinte;
L'INFIRMANT de ces chefs,
STATUANT à nouveau et y ajoutant,
FIXE la créance de M. [H] [R] et de M. [C] [R] es qualités d'ayants-droit de Mme [Z] [R] à l'encontre de la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier aux sommes suivantes:
30. 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
3000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail;
ORDONNE à la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier de remettre à M.[H] [R] et à M. [C] [R] es qualités d'ayants-droit de Mme [Z] [R] les documents sociaux conformes au présent arrêt;
DIT n'y avoir lieu à astreinte;
CONDAMNE la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier à verser à M. [H] [R] et à M. [C] [R] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE la SCP [N] Daudé prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SASU Boyère-Lechartier aux dépens;
DECLARE l'arrêt opposable à l'Unedic Délégation AGS CGEA IDF Ouest;
DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
La greffière, La présidente.