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20/04/2023 | FRANCE | N°19/09266

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 20 avril 2023, 19/09266


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 20 AVRIL 2023



(n° , 10 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09266 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CASKD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F18/00128







APPELANTE



SELARL [Y] [Z] prise en la personne de Me

[Y] [Z], en qualité de mandataire ad'hoc de Société BAB SAHRA

[Adresse 1]

[Localité 5]

N'ayant pas constitué avocat. Signification de l'assignation en reprise d'instance à per...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 20 AVRIL 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09266 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CASKD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F18/00128

APPELANTE

SELARL [Y] [Z] prise en la personne de Me [Y] [Z], en qualité de mandataire ad'hoc de Société BAB SAHRA

[Adresse 1]

[Localité 5]

N'ayant pas constitué avocat. Signification de l'assignation en reprise d'instance à personne morale (personne habilitée) le 22 septembre 2021.

INTIME

Monsieur [K] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Claude JULIEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D0505

PARTIE INTERVENANTE

Association AGS CGEA IDF EST

[Adresse 3]

[Localité 6]

N'ayant pas constitué avocat. Signification de l'assignation en intervention à personne morale (personne habilitée) le 20 septembre 2021.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, présidente de chambre,

Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre,

Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

M. [F] a été engagé par la société Bab Sahra par un contrat à durée indéterminée en date du 11 avril 2017, en qualité de Serveur, niveau I, coefficient 2.

La société Bab Shara emploie moins de 11 salariés.

La convention collective applicable est la convention collective nationale des Hôtels, Cafés

Restaurants.

Le salaire de base de M. [F] était fixé à la somme de 1.490,00 euros.

M. [K] [F] indique avoir été licencié sans préavis le mardi 19 septembre 2017 à 14 heures.

Il a saisi par requête reçue le 12 mars 2018 le conseil de prud'hommes de Longjumeau, lequel a par jugement en date du 3 juillet 2019:

- dit que M. [K] [F] est reconnu en qualité de salarié à compter du 10 mars 2017;

- dit que la SARL Bab Sahra, prise en la personne de son représentant légal, a licencié abusivement M. [K] [F];

-condamné la société Bab Sahra à payer à M. [F] les sommes suivantes :

- 5234,98 euros à titre des rappels de salaire du 10 mars 2017 au 19 septembre 2017;:

- 523,49 euros au titre des congés payés afférents;

- 100 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure;

- 8940 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive;

- 1490 euros au titre des indemnités compensatrices de préavis;

- 149 euros au titre des congés payés sur préavis;

-: 8940 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé;

- 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

-a débouté M. [K] [F] de ses demandes au titre :

- Des heures supplémentaires et congés payés afférents

- Défaut de visite d'information et de prévention

- Dommages et intérêts pour non respect des jours de repos hebdomadaire

- Dommages et intérêts pour non respect du temps de pause et du temps de repas

- ordonné à la Sarl Bab Sahra, prise en la personne de son représentant légal, la remise de l'attestation Pôle Emploi, du certificat de travail et des bulletins de salaire du 10/03/17 au 19/10/17;

-ordonné l'exécution provisoire sur le tout en application de l'article 515 du code de procédure civile compte tenu de la nature du litige;

- débouté la SARL Bab Sahra de sa demande reconventionnelle;

- condamné la SARL Baba Sahra, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux afférents aux actes et procédure éventuels de la présente instance ainsi que ceux d'exécution forcée par toute voie légale de la présente décision.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 16 septembre 2019, la société Bab Sahra demande à la Cour de :

Vu convention collective nationale des Hôtels, Cafés, Restaurants ;

Vu les dispositions de l'article L 1235-5 du Code du travail ;

-infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Longjumeau en ses points visés à la déclaration d'appel;

Y ajoutant,

-condamner M. [K] [F] à verser à la SARL Bab Sahra la somme de

1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner M. [K] [F] aux entiers dépens.

Par jugement en date du 9 décembre 2019, le Tribunal de commerce d'Evry a prononcé la liquidation judiciaire de la société Bab Sahra et a désigné en qualité de liquidateur la SELARL [Z] [Y], en la personne de Me [Y] [Z].

La société Bab Sahra a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 16 septembre 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 16 décembre 2021, M. [F] demande à la Cour de:

Vu les articles L.1232-2 et L.1232-6 du Code du travail

Vu les articles L. 1235-5 et L.1235-14 du Code du travail

Vu les articles 3121-18, L. 3131-1 et L. 3132-1 du Code du travail

Vu l'article R. 4624-10 du Code du travail

Vu l'article R. 4624-11 du Code du travail

Vu l'article L. 8221-5 du code du travail

Vu la Convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants (HCR) du 30 avril 1997.

Vu les pièces versées au débat,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté M. [F] des demandes suivantes:

Heures supplémentaires et congés payés afférents;

Défaut de visite d'information et de prévention;

Dommages et intérêts pour non respect des jours de repos hebdomadaires;

Dommages et intérêts pour non respect du temps de pause et du temps de repas;

Dommages et intérêts pour non respect de la durée quotidienne et hebdomadaire de travail

L'astreinte pour la remise des documents sociaux;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Bab Sahra pour les postes suivants :

Rappel de salaire du 10 mars au 19 septembre 2017;

Congés payés afférents;

Dommages et intérêts pour non respect de la procédure;

Dommages et intérêts pour rupture abusive;

Préavis et congés payés afférents;

Dommages et intérêts pour travail dissimulé;

Remise des documents sociaux;

Article 700 du code de procédure civile;

- infirmer le jugement dont appel sur le quantum de ces condamnations;

Par conséquent,

-fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Bab Sahra les sommes suivantes :

Rappel de salaire du 10.03.17 au 19.09.17 : 6 824,11 €

Congés payés sur rappel de salaire : 682,41 €

Paiement des heures supplémentaires : 16 723,82 €

Congés payés sur heures supplémentaires : 1 672,38 €

Dommages et intérêts pour non-respect de la procédure (1 mois) : 4 060,55 €

Dommages et intérêts pour rupture abusive (6 mois) : 24 363,30 €

Indemnité de préavis (1 mois) : 4 060,55 €

Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 406,05 €

Dommages et intérêts pour travail dissimulé article 8223-1 du Code du travail (6 mois) : 24 363,30 €

Défaut de visite d'information et de prévention d'embauche : 1 000 €

Dommages et intérêts pour non-respect de la durée quotidienne et hebdomadaire de travail : 5 000 €

Dommages et intérêts pour non-respect des jours de repos hebdomadaire : 5 000 €

Dommages et intérêts pour non-respect du temps de pause et du temps de repas : 5000 €

- ordonner la remise de l'attestation pôle emploi, certificat de travail, solde de tout compte bulletins de salaire du 10 mars 2017 au 19 octobre 2017 conformes à la décision à intervenir;

sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document ;

- déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS IDF EST;

- condamner la Société Bab Sahra à payer à M. [K] [F] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner la société Bab Sahra aux entiers dépens.

Par actes en date du 20 septembre 2021 et 22 septembre 2021, M. [F] a assigné en intervention et en reprise d'instance la société Bab Sahra représentée par son madataire ad hoc, Me [Y] [Z] et l'AGS IDF Est.

Me [Z] n'a ni constitué avocat ni déposé de conclusions.

Par courrier en date du 28 avril 2022, l'AGS IDF, qui n'a pas constitué avocat, a informé qu'elle ne serait ni présente ni représentée à l'audience.

La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties à leurs écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction a été déclarée close le 23 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera rappelé à titre liminaire que nonobstant le prononcé de la liquidation judiciaire de la société et bien que le liquidateur n'a pas constitué avocat, la cour demeure tenue par les conclusions valablement déposées par la société à une époque où elle était apte à se défendre par elle même.

Sur le rappel de salaire du 10 mars 2017 au 19 septembre 2017

M. [F] expose avoir été engagé non pas à compte du 11 avril 2017 comme le mentionne son contrat de travail mais à compter du 10 mars 2017. Il se prévaut de l'attestation de M. [U] indiquant qu'il aurait commencé à travailler le 10 mars 2017 et d'un chèque d'un montant de 200 euros qu'il lui a été remis par la société.

Cela étant, il résulte des dispositions de l'article 1779 du code civil que le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s'engage à travailler pour le compte d'une autre et sous sa subordination moyennant une rémunération.

En application de l'article L. 1221-1 du code du travail, ce lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui dispose du pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner le manquement de son subordonné.

L'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leurs conventions, mais se caractérise par les conditions de faits dans lesquelles s'exerce l'activité professionnelle. Ainsi la qualification de contrat de travail suppose réunis trois critères : une rémunération, une prestation de travail et un lien de subordination et il appartient à la partie qui se prévaut de l'existence d'un contrat de travail de démontrer la réunion de ces trois critères.

M. [F], pour étayer le fait que son emploi aurait débuté avant le 11 avril 2017 et plus précisément le 10 mars 2017, verse l'attestation de M. [U], salarié de l'entreprise, qui indique qu'il aurait commencé à travailler le 10 mars 2017, et un chèque d'un montant de 200 euros en date du 29 mars 2017 remis par la société.

L'employeur indique que cette somme de 200 euros correspondait à une aide versée à M. [F], qui a remplacé le 11 avril 2017 son cousin, M. [U].

Or, il ne peut être déduit ni de cette attestation ni de ce chèque que M. [F] fait la démonstration d'une relation de travail à compter du 10 mars 2017.

La date de début de la relation de travail retenue sera le 11 avril 2017.

M. [F] soutient qu'il n'a pas été réglé des salaires qui lui étaient dûs pendant la durée du contrat de travail.

Il appartient à l'employeur de démontrer la réalité du paiement des salaires, preuve qu'il ne rapporte pas à compter de juillet 2017 faisant valoir sans autre démonstration que le salarié aurait pris un congé sans solde et qu'il aurait perçu un total de 3186, 41 euros. Or, il lui appartient de prouver la réalité de ce congé sans solde et le versement des montants invoqués.

Par ailleurs, le salarié produit les relevés de chèque émis par la société faisant apparaître qu'il a reçu 300 euros le 20 avril 2017, 600 euros le 12 mai 2017, 1114, 16 euros le 5 juin 2017 et 330 euros le 4 octobre 2017.

Compte tenu de la date retenue pour le début du contrat de travail et de la date de la rupture au 19 septembre 2017, le jugement sera infirmé sur le montant du rappel de salaire alloué à M. [F] , qui sera fixé à la somme de 5 495,18 euros, outre les congés payés afférents.

Sur les heures supplémentaires

L'article L.3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d' heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d' heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d' heures supplémentaires , il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

A l'appui de sa demande, M. [F], qui réclame la somme de 16 723, 82 euros aux motifs qu'il aurait accompli 77 heures par semaine, produit outre son courrier de contestation du licenciement adressé à son employeur le 27 octobre 2017 où il évoque pour la première fois les heures supplémentaires, l'attestation de M. [U], lequel relate que M. [F] travaillait tous les jours du lundi au dimanche de 9 h à 15 heures et de 18 h à 23 heures et qu'il a lui même quitté l'entreprise car ses heures supplémentaires ne lui étaient pas payées.

Or, les termes de cette seule attestation en dehors de tout décompte n'apparaissent pas suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement

Au vu de ces éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande.

Sur le travail dissimulé

L'article L.8221-5 du code du travail énonce qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur:

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d' heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie';

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L.8223-1 du même code prévoit qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 2°du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d' heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Le caractère intentionnel ne peut pas se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

La société justifie de l'établissement d'un contrat de travail, de bulletins de salaire et de la déclaration d'embauche du salarié à compter du 11 avril 2017.

La Cour n'a pas retenu le début de la relation contractuelle antérieurement à cette date.

Ainsi la preuve de l'intention de l'employeur de détourner les règles sociales et fiscales en dissimulant le travail du salarié n'est pas rapportée.

Le salarié sera débouté de sa demande de ce chef et le jugement sera infirmé.

Sur le défaut de visite d'information et de prévention

En application de l'article R.4624-10 du code du travail, M. [F] devait bénéficier d'une visite d'information et de prévention dans un délai n'excédant pas trois mois à compter de la prise effective de son poste.

Il ressort des pièces versées que M. [F] n'a pas bénéficié de cette visite.

L'employeur réplique que la déclaration d'embauche vaut demande d'adhésion à un service de santé et de demande de visite auprès de la médecine du travail dont le défaut d'organisation ne lui incombe pas.

Il incombe par ailleurs au salarié de rapporter la preuve du préjudice consécutif à ce manquement.

Or, M. [F] se borne à se référer à un préjudice nécessaire mais ne justifie réellement d'aucun préjudice en lien avec le défaut de cette visite.

En conséquence, la Cour, confirmant le jugement déféré de ce chef, le déboute de sa demande.

Sur les dommages et intérêts pour non-respect de la durée quotidienne et hebdomadaire de travail

Le salarié sollicite la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Or, la demande au titre des heures supplémentaires n'ayant pas été retenue, il ne peut être fait droit à cette demande.

M. [F] sera débouté de cette demande.

Sur les dommages et intérêts pour non respect du temps de pause et du temps de repas

M. [F] prétend avoir travaillé de 9 h à 15 h et de 18 h à 23 heures sans pause.

L'employeur, auquel incombe la charge de la preuve du respect des temps de pause et de repas, ne démontre pas que le salarié aurait bénéficié, comme il l'affirme, de sa pause de repas. Cette preuve ne saurait résulter de l'existence d'une indemnité de repas.

Il convient en conséquence au vu des pièces versées de fixer au passif de la société la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts par voie de réformation du jugement déféré.

Sur les dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives au repos du salarié

M. [F] sollicite la condamnation de son employeur à lui verser la somme de 5000 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour non respect du droit au repos journalier obligatoire de 11 heures consécutives et de 24 heures au titre du repos quotidien.

Sa demande d'heures supplémentaires ayant été rejetée, M. [F] sera débouté de cette demande au titre du non-respect des dispositions relatives au repos.

Sur la rupture du contrat de travail

La démission est l'acte par lequel le salarié a fait connaître à l'employeur sa décision de rompre le contrat de travail. Elle peut être notifiée à tout moment et doit répondre à certaines conditions de fond et de forme.

En l'espèce, l'employeur indique que M. [F] ne s'est plus rendu sur son lieu de travail après une discussion au cours de laquelle il lui a demandé des précisions sur ses papiers d'identité. Il vise dans son bordereau de communication de pièces attaché à ses conclusions une lettre de démission qui n'a pas été transmise à la Cour.

Le conseil de prud'hommes a retenu dans sa motivation que la signature du courrier écrit valant selon l'employeur démission, signé et daté du 18 septembre 2017, comporte une signature qui n'est pas identique à celle relevée dans le courrier du salarié portant contestation de son licenciement et en a déduit que ce courrier n'avait pas été rédigé par M. [F].

Aucun élément apporté à hauteur de Cour ne permet de contredire la motivation retenue par les premiers juges.

Faute de lettre de licenciement, celui-ci doit par confirmation du jugement, être déclaré sans cause réelle et sérieuse.

Le salarié peut prétendre non seulement aux indemnités de rupture mais également à des dommages et intérêts à raison de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement .

L'entreprise ayant moins de onze salariés trouvent à s'appliquer l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable au litige, selon lequel 'ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives :

1° Aux irrégularités de procédure, prévues à l'article L. 1235-2 ;

2° A l'absence de cause réelle et sérieuse, prévues à l'article L. 1235-3 ;

3° Au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l'article L. 1235-4, en cas de méconnaissance des articles L. 1235-3 et L. 1235-11.

Le salarié peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi'.

La date du début de la relation étant fixée au 11 avril 2017, M. [F] avait une ancienneté de 5 mois et 9 jours.

Selon l'article L. 1234-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession.

Aux termes des dispositions de la convention collective applicable, la durée du préavis pour un employé ayant moins de 6 mois d'ancienneté est fixée à 8 jours.

Sur la base de salaire de 1480, 27 euros, l'indemnité sera fixée à la somme de 397, 33 euros outre les congés payés afférents. Le jugement sera infirmé.

Compte tenu de l'âge de M. [F] à la date de la rupture (46 ans), de sa faible ancienneté (5 mois) dans une entreprise de moins de onze salariés, de sa rémunération mensuelle de base (1480, 27 euros), et de l'absence d'élément sur sa situation professionnelle après la rupture du contrat de travail, il y a lieu de fixer à 1000 euros le montant de l'indemnité qui, en application de l'article L1235-3 du code du travail dans sa version en vigueur, réparera le préjudice causé par la rupture et de fixer au passif de la société Sarl Bab Sahra la créance correspondante.

Sur la demande relative au non-respect de la procédure

L'indemnisation prévue par l'article L.1235-2 du code du travail en cas d'inobservation de la procédure de licenciement peut se cumuler avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse si le salarié a moins de deux ans d'ancienneté ou s'il travaille dans une entreprise de moins de onze salariés.

En l'espèce, le salarié a été indemnisé de la perte de son emploi sur le fondement de l'article L.1235-5 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige dès lors qu'il ressort des pièces versées que la société comptait moins de onze salariés.

M. [F] indique que si l'employeur avait respecté la procédure, il aurait pu le convaincre de ne pas le licencier.

M. [F] dont la cour a retenu qu'il avait été licencié sans procédure et qui n'a pas bénéficié d'un entretien préalable et de l'assistance d'un conseiller du salarié est donc fondé à percevoir une indemnité au titre de la procédure irrégulière qui ne peut être supérieure à un mois de salaire en application de l'article L. 1235-2 du code du travail dans sa version applicable au litige..

La cour dit qu'au vu des élément de la cause, le préjudice résultant pour le salarié de l'inobservation de la procédure de licenciement doit être réparé, en infirmant le jugement, à la somme de 700 euros.

Sur la garantie de l'AGS IDF Est

L'AGS (CGEA) IDF devra faire l'avance des sommes allouées au profit de M. [F] dans les termes, limites et conditions prévues par les articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, étant rappelé que cette garantie ne pourra être mise en oeuvre que subsidiairement en l'absence avérée de fonds disponibles au sein de la société.

Sur les autres demandes

Le liquidateur devra remettre les documents sociaux conformes au présent arrêt sans qu'il y ait lieu à astreinte.

À hauteur d''appel, la Selarl [Z] es qualités, qui succombe en partie, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Les circonstances du litige et la situation de l'entreprise ne justifient pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a :

- dit que la S.A.R.L Bab Sahra, prise en la personne de son représentant légal, a licencié abusivement M. [K] [F];

- débouté M. [K] [F] de ses demandes au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, du défaut d'information et de prévention d'embauche, de dommages et intérêts pour non-respect des jours de repos hebdomadaire;

INFIRME le jugement déféré pour le surplus;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Bab Sahra les créances de M. [K] [F] aux sommes suivantes:

5495, 18 euros bruts à titre de rappel de salaire du 11 avril 2017 au 19 septembre 2017;

549, 51 euros bruts à titre de congés payés afférents;

500 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect du temps de pause et repas;

700 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement;

397, 33 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis;

39, 73 euros bruts à titre de congés payés afférents;

1000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

ORDONNE à Me [Y] [Z], en sa qualité de mandataire de la SARL Bah Sahra de remettre au salarié les documents sociaux conformes au présent arrêt;

DIT n'y avoir d'assortir cette remise d'une mesure d'astreinte;

REJETTE les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l' AGS -CGEA de IDF -EST dont la garantie joue à titre subsidiaire en l'absence de fonds disponibles et dans les limites et conditions fixées par les articles L.3253-8 à L.3253-13 et D.3253-1 à D.3253-5 du code du travail ;

CONDAMNE la Selarl [Z] [Y], prise en la personne de Me [Y] [Z], ès qualités de mandataire ad hoc de la société Bab Sahra aux dépens d'appel.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 19/09266
Date de la décision : 20/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-20;19.09266 ?
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