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22/05/2023 | FRANCE | N°22/06622

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 22 mai 2023, 22/06622


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 22 MAI 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06622 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSHG



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 02 Mars 2022 -TJ de CRETEIL RG n° 21/00378



APPELANTS



Monsieur [Z] [G]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 9]





Madame [R] [N]

née le [Dat

e naissance 3] 1971 à [Localité 10]

Domiciliés ensemble [Adresse 1]

[Localité 6]



Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Asssitée par Me Bertr...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 22 MAI 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06622 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSHG

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 02 Mars 2022 -TJ de CRETEIL RG n° 21/00378

APPELANTS

Monsieur [Z] [G]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 9]

Madame [R] [N]

née le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 10]

Domiciliés ensemble [Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Asssitée par Me Bertrand DE CAMPREDON de la SELARL GOETHE, avocat au Barreau de PARIS

INTIMEES

S.A.S. EDELIS

Ayant son siège social

[Adresse 5]

[Localité 7]

N° SIRET : 338 .434.152

Agissant en la personne de son Président en exercice, domicilié audit siège en cette qualité

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée par Me Armelle AMICHAUD-DABIN de la SELARL AAD Avocats Avocat au barreau de TOULOUSE, Avocat plaidant

S.A.S. IFB FRANCE

Ayant son siège social

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Représentée par Me Claire LITAUDON de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

Assistée par Me Olivier THEVENOT de la SELARL THEVENOT Avocat au barreau de TOULOUSE, Avocat plaidant, l59

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 Février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Edouard LOOS, Président dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCEDURE

Au mois de février 2003, par l'intermédiaire de la société IFB France, Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] ont signé un contrat de réservation préliminaire aux fins d'achat, en l'état futur d'achèvement, d'un bien immobilier situé dans la résidence du Vieux Port, à [Localité 11] (02), pour un montant de 90 000 euros TTC, auprès de la société 4M Promotion devenue Edelis, dans le but de réaliser un investissement immobilier leur permettant de défiscaliser les revenus de ce bien.

L'acte de vente en l'état futur d'achèvement a été conclu en la forme authentique par acte reçu par Me [W] [S] notaire à [Localité 12], le 3 juin 2003.

Le bien a été livré le 26 novembre 2003. Le premier bail a été signé le 14 janvier 2004 avec effet au 6 février 2004.

Par acte d'huissier de justice en date du 8 décembre 2020, Monsieur [G] et Madame [N] ont fait assigner les sociétés IFB France et Edelis, soutenant en substance qu'ils ont été démarchés par la société IFB France afin de procéder à un investissement immobilier locatif dans le cadre du régime fiscal 'Besson', mais que cette société, mandataire de la société Edelis, a manqué à ses obligations d'information et de conseil en majorant indûment le prix d'acquisition de l'immeuble, en n'attirant pas leur attention sur le faible rendement locatif de ce dernier dû à la mauvaise situation du marcher locatif de [Localité 11], en ne l'avertissant pas des risques de l'opération et en présentant celle-ci sous un jour favorable non conforme à la réalité.

* * *

Vu l' ordonnance prononcée le 2 mars 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil qui a statué comme suit :

- Déclare les demandes irrecevables comme prescrites,

- Condamne in solidum Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] aux dépens et à payer aux société Edelis et IFB France la somme de 500 (cinq cent) euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'appel déclaré le 30 mars 2022 par Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N],

Vu les dernières conclusions signifiées le 24 novembre 2022 par Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N],

Vu les dernières conclusions signifiées le 9 février 2023 par la société Edelis,

Vu les dernières conclusions signifiées le 5 août 2022 par la société IFB France,

Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] demandent à la cour de statuer comme suit :

Vu l'article 2224 du code civil, les articles 31 et 700 du code de procédure civile,

- Infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil du 2 mars 2022 (RG n° 21/00237) en ce qu'elle a :

Déclaré les demandes irrecevables comme prescrites,

Condamne les consorts [N] ' [G] aux dépens et à payer à la société Edelis France et la société IFB France, chacune, la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Et par conséquent,

Statuant à nouveau,

Sur l'incident :

A titre principal,

- Déclarer recevable l'action formée à l'encontre de la société Edelis en sa qualité de promoteur-vendeur de l'opération d'investissement,

- Déclarer recevable l'action formée à l'encontre de la société IFB France, structure de commercialisation et prescripteur de l'opération,

- Déclarer non prescrite l'action indemnitaire diligentée à l'égard des Consorts [N] - [G],

A titre subsidiaire,

- Déclarer que la société Edelis a manqué à son obligation de conseil à l'encontre de l'appelant,

- Déclarer recevables les appelants en leur action à l'encontre de la société Edelis pour avoir qualité à agir contre elle,

En tout état de cause :

- Condamner in solidum Edelis et IFB France au règlement de la somme de 2 000 euros au titre des disposition de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner les intimés aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué par la Selarl JRF & Associés représentée par Maître Stéphane Fertier conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

La société Edelis demande à la cour de statuer comme suit :

Vu les articles 2222 et 2224 du code civil, les articles 32 et 122 du code de procédure civile, l'ordonnance du 2 mars 2022 du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil,

Au principal,

- Juger que l'acte authentique de vente a été signé entre Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] et la société 4M Promotion le 3 juin 2003.

- Juger que Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] ont assigné la société Edelis par acte en date du 8 décembre 2020.

Par conséquent,

- Confirmer l'ordonnance rendue le 2 mars 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'elle a jugé irrecevables les demandes de Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N].

- La confirmer encore en ce qu'elle a condamné Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] au paiement de la somme de 500 euros au bénéfice de la Sas Edelis sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'incident.

A titre subsidiaire,

Si par extraordinaire la cour venait à considérer l'action de Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] non prescrite,

- Juger que Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] allèguent d'un défaut conseil reposant sur la simulation fiscale qui leur a été remise par IFB France.

- Juger que la Sas Edelis a donné mandat à IFB France de vendre les biens de la Résidence Vieux Port sans lui donner mandat de commercialiser le dispositif fiscal De Robien et d'établir la simulation fiscale.

Par conséquent, statuant à nouveau

- Infirmer l'ordonnance rendue le 2 mars 2022.

- Juger irrecevable pour défaut de qualité à agir l'action de Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] dirigée à l'encontre de la Sas Edelis.

- Confirmer l'ordonnance en ce que Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] ont été condamnés au paiement de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'Incident devant le Juge de la Mise en Etat.

En tout état de cause,

- Condamner in solidum Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la Selarl 2 H Avocats, en la personne de Maître Patricia Hardouin, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société IFB France demande à la cour de statuer commes suit :

Vu les dispositions des articles 122 et 789 du code de procédure civile,

- Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de Créteil du 2 mars 2022,

Ce faisant :

- Déclarer les demandes de Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] irrecevables, comme prescrites, les en débouter intégralement

- Condamner in solidum Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] à payer à la société IFB France une indemnité de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Claire Litaudon sur affirmation de son droit conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Y ajoutant,

- Condamner in solidum Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] à payer à la société IFB France une indemnité de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de l'appel dont distraction au profit de Maître Claire Litaudon sur affirmation de son droit conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Les consorts [N] - [G] soutiennent, au visa de l'article 2224 du code civil, que l'action n'est pas prescrite au motif que le point de départ de la prescription d'une action en réparation du préjudice constitué par la perte de chance de ne pas contracter est le jour de réalisation du dommage, soit en l'espèce, le jour du débouclage de l'opération. Les investisseurs ne peuvent avoir conscience des risques liés à l'opération qu'à la revente du bien puisque c'est à ce moment qu'ils découvrent que le produit de vente ne couvre pas les frais engagés dans l'opération. Ni les carences locatives, ni la baisse de loyers ne sont susceptibles de révéler ce déséquilibre négatif. L'omission d'informations sur les risques, renforcés par la surévaluation du bien immobilier, support de l'opération, est constitutive du manquement à l'obligation d'information et de conseil imputable aux intimées.

La société Edelis soutient en revanche, au visa de l'article 2224 du code civil, que l'action est prescrite aux motifs que le point de départ de la prescription est le jour de la conclusion du contrat de vente ou l'année de la première location respectivement pour la surévaluation du bien, le défaut d'information sur les risques, et pour le défaut d'information sur le contexte local. Il revenait aux requérants de se renseigner sur la valeur réelle du bien immobilier, sur la réalité du marché locatif et sur les risques encourus dès lors qu'il dispose d'une faculté de rétractation.

La société IFB France soutient, au visa de l'article 2224 du code civil, que l'action est prescrite aux motifs que le point de départ de la prescription concernant le potentiel locatif, la surévaluation du bien, le défaut d'information et la rentabilité économique de l'opération, est respectivement, la date de livraison du bien ou celle des carences locatives, la date du contrat de vente, les deux précédentes dates, et la date de la première carence locative. L'acquisition d'un bien immobilier dans une perspective de défiscalisation, dont sont exclues la revente du bien et la spéculation éventuelle, ne dispensent pas les investisseurs d'être diligents. Ce n'est donc pas le déséquilibre négatif entre le prix de revente et les frais engagés qui permet aux investisseurs d'apprécier la viabilité économique de l'opération.

Ceci étant exposé, l'article 2224 du code civil est ainsi rédigé :

'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'

La prescription quinquennale est également applicable à la demande fondée sur le dol sauf à préciser que, en application de l'article 1144 du code civil, le point de départ de l'action se situe au jour de la découverte du dol.

Concernant la surévaluation du bien immobilier au jour de son acquisition et l'état du marché locatif , il appartenait aux appelants de se renseigner sur l'estimation du bien immobilier et les perspectives locatives au jour de son acquisition le 3 juin 2003 . S'agissant du défaut d'information et de conseil et d'un préjudice fondé sur la perte de chance de ne pas contracter, le point de départ de la prescription se situe au jour de la conclusion du contrat soit le 3 juin 2003 . L'assignation ayant été délivrée le 8 décembre 2020, les demandes se trouvent ainsi prescrites sur ce fondement .

Concernant le grief relatif à l'impossibilité d'obtenir la rentabilité promise, il doit être relevé que les appelants ne se situent sur le terrain de la perte locative puisqu'ils admettent n'avoir connu que trés peu de désarrois locatifs.

Selon les appelants, le point de départ de la prescription devrait se situer au jour du débouclage de l'opération en février 2016 et au plus tard lorsqu'il a sollicité une estimationn de son bien le 4ème trimestre 2020.

Si le point de départ de la prescription peut être reporté au jour de la connaissance du principe du dommage et non nécessairement de son montant, les appelants ont adhéré au dispositif fiscal dit 'Loi Besson' prévoyant une durée de location de 9 années. Dans l'hypothèse même retenue par les appelants de report du point de départ de la prescription au jour du débouclage de l'opération, cette dernière se situerait à l'expiration du délai de 9 années suivant la première mise en location intervenue en janvier 2004. L'action introduite le 8 décembre 2020 se trouve ainsi prescrite .

Le point de départ de la prescriptin ne peut pas se situer au jour où l'investisseur décide de faire procéder à une estimation immobilière car il dépendrait d'une décision purement subjective et potestative.

L'ordonnance déférée doit ainsi être confirmée.

La cour n'estime pas devoir allouer une somme complémentaire aux intimées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME l'ordonnance déférée ;

REJETTE toutes atres demandes ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [Z] [G] et Madame [R] [N] aux dépens et accorde à maître Litaudon et à maître Hardouin, avocats, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

S.MOLLÉ E.LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 22/06622
Date de la décision : 22/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-22;22.06622 ?
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