Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRET DU 15 JUIN 2023
(n° 332, 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08506 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CANT3
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/03954
APPELANT
Monsieur [E] [H]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Aude SIMORRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0257
INTIMEE
Société AUREALYS
Ommatriculée au RCS de Paris sous le numéro 502 510 860
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Valérie BLOCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C1923
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Bérénice HUMBOURG, présidente de chambre
Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR
ARRET :
- CONTRADICTOIRE,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES
M. [H] a été embauché par la société Auréalys le 17 novembre 2014 en qualité d'auditeur junior par contrat à durée indéterminée à temps partiel. Par avenant du 30 octobre 2015, M. [H] est engagé auditeur à temps plein.
Les relations contractuelles entre les parties se sont terminées par une convention de rupture conventionnelle, la date de prise d'effet étant fixée au 7 avril 2017.
Estimant que son contrat n'avait pas été exécuté loyalement et que des heures supplémentaires lui restaient dues, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes qui par jugement en date du 14 juin 2019 :
-l'a débouté de l'ensemble de ses demandes;
-a reçu la société Auréalys en sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
-l'en a débouté;
-a condamné M. [E] [H] aux dépens.
Par déclaration notifiée par le RVPA le 25 juillet 2019, M. [H] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 15 février 2023, M. [H] demande à la cour de :
-infirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Paris en date du 19 juin 2019 en toutes ses dispositions;
Statuant de nouveau:
-condamner la société à lui verser une indemnisation pour exécution déloyale du contrat de travail: 10 000, 00 euros;
-condamner la société à lui verser un rappel de salaire sur les heures supplémentaires effectuées entre 2014 et le 1er septembre 2016:
9 782,00 euros et 978,00 euros de congés payés afférents qui suivent la répartition suivante:
pour 2014: 41 heures supplémentaires effectuées correspondant à la somme de 827, 00 euros et 82,00 euros de congés payés;
pour 2015: 174 heures supplémentaires effectuées correspondant à la somme de 3 444,00 euros et 344,00 euros de congés payés;
pour 2016: 212 heures supplémentaires correspondant à la somme de 5 511,00 euros et 551,00 euros de congés payés;
-condamner la société à lui verser une indemnité pour travail dissimulé: 20 880,00 euros;
condamner la société au titre de l'article 700 du code de procédure civile à lui verser la somme de 5 000,00 euros;
-débouter la société Auréalys de toutes ses demandes reconventionnelles en premier lieu comme irrecevables car présentées devant une juridiction non compétente pour statuer en second lieu et en tout état de cause comme non fondées en droit ni en fait;
-condamner la société aux entiers dépens;
-débouter la société de l'ensemble de ses demandes.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 28 novembre 2019, la société Auréalys demande à la cour de :
-confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il n'a pas statué sur la demande de la société présentée sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil, et en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'action abusive et de l'action 700 du code de procédure civile
-condamner en conséquence M. [H] au paiement d'une indemnité de 5 000 euros, sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil, en réparation du préjudice causé à la société Auréalys,
-condamner M. [H] au paiement de 4 000 euros pour action abusive;
-condamner M. [H] au paiement de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [H] de l'intégralité de ses demandes.
La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties à leurs conclusions conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
La clôture est intervenue le 22 févreir 2023.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l'irrecevabilité de la demande d'indemnisation au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail
Il convient préalablement de relever que la société Auréalys discute de l'irrecevabilité des demandes de M. [H] quant à l'exécution du contrat de travail en l'absence de remise en cause de la convention de rupture conventionnelle mais elle n'en tire pas la conséquence de l'irrecevabilité dans le dispositif de ses écritures.
Il n'y a donc pas lieu de statuer sur la fin de non-recevoir non reprise au dispositif de ses conclusions.
Sur l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle de la société Auréalys de condamnation de M. [H] sur le fondement de l'article 1240 et 1241 du code civil
En l'espèce, la société Auréalys sollicite la condamnation de M. [H] à lui verser une indemnité de 5000 euros sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil en réparation du préjudice moral pour avoir nui à la réputation de son employeur auprès d'un de ses clients les plus importants. Elle indique à cet égard que M. [H] a sollicité une salariée de l'un de ses plus gros clients afin de produire une attestation dont le contenu révèle à lui seul le dénigrement, ces faits constituant des actes de déloyauté qu'il convient de sanctionner.
M. [H] réplique que la demande se fonde sur des faits postérieurs au contrat de travail et est donc irrecevable.
Selon les dispositions de l'article L.1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes est compétent pour connaître des différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient. En application de ce texte, la compétence prud'homale ne peut s'étendre aux litiges concernant des faits postérieurs à la rupture du contrat de travail que s'ils trouvent leur source dans le contrat de travail et sont en relation directe avec lui.
Au soutien de sa demande au titre de l'exécution déloyale, M. [H] a communiqué une attestation qui a été établie à son profit par une salariée de l'AFPA. Dans ces propos, celle-ci fait état d'éléments dont elle aurait eu connaissance lorsque M. [H] était salariée de l'entreprise, c'est-à-dire des éléments en lien avec le contrat de travail liant M. [H] à la société Auréalys.
Le conseil de prud'hommes est par conséquent compétent.
En tout état de cause, la cour est compétente pour connaître de cette demande dans la mesure où, investie de la plénitude de juridiction, elle est la juridiction de second degré compétente en toute matière civile.
Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
Ainsi qu'il est dit à l'article L.1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Un manquement de l'une ou l'autre des parties à cette obligation d' exécution de bonne foi est de nature à caractériser une exécution déloyale du contrat de travail .
La bonne foi se présumant, c'est à celui qui invoque une exécution déloyale d'établir le manquement de l'autre partie à l' exécution de bonne foi du contrat de travail.
En l'espèce, M. [H] réclame la condamnation de son employeur à lui verser 10.000 euros selon les termes du dispositif de ses conclusions (5000 euros dans le corps de ses écritures) pour lui avoir confié principalement voire exclusivement des missions de contrôleur de gestion et non d'audit alors qu'il a été engagé en qualité d'auditeur.
Il se prévaut des termes du contrat de travail ainsi que de l'attestation de Mme [Y], salariée de la société et plus particulièrement chef de mission du Pôle Audit qui témoigne de ce qu'il avait été recruté pour le poste d'auditeur, qu' il a été appelé très rapidement en renfort sur le pôle d'expertise comptable et avait demandé à plusieurs reprises de réintégrer le pôle audit sans être entendu alors que la société recrutait d'autres collaborateurs pour le pôle audit. M. [G], également salarié de la société Auréalys, témoigne pour sa part de l'affectation de M. [H] dès son arrivée sur une mission différente de celle d'audit légal. Mme [B], assistante de direction de l'AFPA (association nationale pour la formation professionnelle des adultes), fait valoir qu'il revenait parfois sur l'objet principal de ses missions, à savoir l'audit social, mais que son employeur lui imposait de faire du contrôle de gestion et de l'appui comptable aux régions de l'AFPA.
Il en conclut que de par la limitation de son expérience professionnelle de l'audit social il a subi un préjudice professionnel.
L'employeur réplique que M. [H] n'a pas été affecté à des missions de contrôle , mission qui n'est pas assurée au sein de l'AFPA auprès duquel il a du intervenir, mais une mission d'expertise comptable relevant de la fiche 'ROME M1202 -audit et contrôle comptables et financiers'. Il souligne que le salarié a également exercé des missions d'audit social.
Il s'évince de la chronologie des faits rappelée dans le cadre de l'exposé du litige que M. [H] a été engagé après avoir exécuté un parcours d'alternance par la société Auréalys par contrat à durée indéterminée à temps partiel le 13 novembre 2014 en qualité d'auditeur junior.
Par avenant en date du 30 octobre 2015, il occupait à temps complet les fonctions d'auditeur.
La rupture conventionnelle du contrat est intervenue le 7 avril 2017.
Du tableau qu'il présente au soutien de sa demande au titre des heures supplémentaires, M. [H] détaille les missions qui lui ont été confiées, soit selon les calculs arrêtés par l'employeur 3600 heures, dont 2500 heures pour le client AFPA et 1100 heures affectés sur d'autres clients tels que Elearning, Innovalis etc pour des missions d'audit.
Il ressort des pièces versées aux débats que la société Auréalys, société d'expertise comptable et de commissariat aux comptes, a signé avec l'AFPA des lettres de mission le 27 mars 2015 et 7 novembre 2016 définissant son cadre d'intervention en appui à la cellule Expertise (cellule chargée de répondre aux diverses demandes des équipes régionales portant sur des problématiques comptables et d'effectuer toute analyse quantitative ou qualitative des différents états comptables de l'association), soit en appui et à en assistance dans le cadre des arrêtés comptables mensuels et trimestriels. Les lettres de mission conclus avec les autres clients prévoient des missions d'audit en ces termes: audit des comptes, validation des états financiers (lettre de mission avec E-learning), définition du scope d'audit, préparation des instructions d'audit ( lettre de mission avec Innovalis).
Il se déduit de ces éléments que si M. [H] a été majoritairement affecté à des missions d' expertise comptable auprès de l'AFPA durant la relation contractuelle dès son embauche le 17 novembre 2014 de 2 ans et 5 mois, il a également accompli des missions plus précisément qualifiées d'audit. Il ne peut s'en déduire la démonstration de l'exécution déloyale par l'employeur du contrat de travail, ce d'autant que le préjudice professionnel invoqué n'est pas démontré.
La déloyauté invoquée n'étant pas caractérisée, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] de sa demande à ce titre.
Sur le rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires
L'article L.3171-4 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
En l'espèce, M. [H] réclame des heures supplémentaires et complémentaires pour la période allant du mois de novembre 2014 au 7 avril 2017, soit sur les trois années précédant la rupture du contrat de travail intervenue le 7 avril 2017. Sa demande au titre de la période portant sur la période du 7 avril 2014 au 30 mai 2015 n'est en conséquence pas prescrite.
En premier lieu, M. [H] distingue plusieurs périodes:
-du 7 novembre 2014 au 1er octobre 2015 il n'est fait mention d'aucun forfait heure ;
-du 1er octobre 2015 au 1er septembre 2016 son contrat porte mention d'un forfait heure de 2028 heures;
- du 1er septembre 2016 à la rupture du contrat de travail le 7 avril 2017 le contrat prévoit l'application d'un forfait jour de 218 pour laquelle il ne formule pas de demande.
*Sur la nullité du forfait heure
Dans sa rédaction issue de la loi n°2008-789 du 20 août 2008 antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l'article L.3121-38 du code du travail dispose que " la durée du travail de tout salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois'.
Les conditions pour qu'une convention individuelle de forfait mensuel en heures soit valide sont cumulativement:
- l'accord du salarié et la rédaction d'une convention écrite;
- la détermination du nombre d'heures correspondant au forfait;
- une rémunération du salarié au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l'entreprise pour le nombre d'heures correspondant à son forfait, augmentée des majorations pour heures supplémentaires.
La fixation par le contrat de travail d'un nombre précis d'heures de travail avec une rémunération forfaitaire, caractérise la convention de forfait en heures.
La seule fixation d'une rémunération forfaitaire, sans détermination du nombre d'heures supplémentaires incluses dans cette rémunération, ne permet pas de caractériser une convention de forfait.
En l'espèce, le salarié demande à la cour de déclarer nulle la clause de forfait heures stipulée au contrat de travail signé le 30 octobre 2015, notamment en ce qu'aucune convention individuelle n'a été conclue, aucune modalité de suivi n'a été respectée et qu'il n'est pas démontré qu'elle s'applique à sa situation au regard des dispositions de la convention collective applicable.
L'employeur répond que le salarié n'explique nullement en quoi ces conventions de forfait prévues par la convention collective applicable seraient nulles.
En l'espèce, l'avenant au contrat de travail en date 30 octobre 2015 prévoit que " M. [H] sera soumis au forfait horaire de 2028 heures travaillées (soit une moyenne de 39 heures par semaine ) en application de l'article 8-1-2-7 de la convention collective des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes (3020).
Aux termes de 8.1.2.7 de la convention collective applicable, 'les cadres techniques classés niveau III, coefficient 330 (1) et les itinérants non cadres visés à l'article L. 212.15.3 du code du travail, qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps peuvent voir leur durée de travail fixée par convention individuelle de forfait établie sur une base annuelle en heures qui ne peut excéder, hors congés annuels légaux, jours fériés chômés et dimanches la durée correspondant à l'utilisation, dans les conditions définies par la loi, de la totalité du contingent d'heures supplémentaires tel qu'applicable, actuellement différent selon qu'il y a ou non modulation. Cette convention individuelle fixe le nombre d'heures auquel correspond la rémunération, étant ici rappelé que les heures au-delà de la durée légale sont des heures supplémentaires soumises à majoration.
Le salaire ainsi forfaité pour une durée déterminée ne peut être inférieur au salaire minimum correspondant à la qualification du salarié en tenant compte de la rémunération majorée, en application de l'article L. 212.5 du code du travail et des dispositions de la présente convention, de toutes les heures susceptibles d'être effectuées au-delà de la durée légale appréciée à l'année dans la limite de la durée contractuelle de travail. Le respect de cette dernière est contrôlé à partir d'un document établi mensuellement sur lequel le salarié déclare sa durée du travail du mois. Il répond à l'exigence de l'article D. 212.21 du code du travail tel que complété par le décret n° 2000-31 du 31 janvier 2000. Ce document est remis à l'employeur qui dispose d'un délai de 2 mois pour valider même tacitement le temps de travail effectif.
La durée journalière de travail ne peut dépasser 10 heures de travail effectif. Sur une semaine, la durée hebdomadaire ne peut excéder 48 heures sans pouvoir excéder 44 heures sur une période quelconque de 12 semaines consécutives. Sur une année, sauf disposition interne plus favorable, la durée annuelle de travail telle que fixée contractuellement sera répartie de façon à permettre la prise de 10 jours ouvrés supplémentaires de repos sur l'année, hors congés annuels et jours fériés. L'employeur et le salarié définissent en début d'année le calendrier prévisionnel de la prise des jours ou demi-journées de repos correspondants. A défaut de calendrier prévisionnel, ils déterminent au fur et à mesure la prise de ces repos. En cas de désaccord, chaque partie prend l'initiative de la moitié des jours de repos. Le relevé mensuel visé à l'alinéa précédent indique pour chaque jour le nombre d'heures de travail ou précise s'il y a eu repos ou autre absence.
La mise en oeuvre de l'article 8.1.2.7 doit être prévue, par écrit, au contrat de travail ou faire l'objet d'un avenant. A défaut d'avenant, les dispositions contractuelles antérieures continuent de s'appliquer dans le respect de la loi.
Dès que possible et au moins une fois par an, les parties examinent les éventuelles difficultés liées à l'application de cette convention individuelle. Le salarié a la possibilité, lors de cet examen annuel et sous réserve d'un préavis de 3 mois, de dénoncer l'avenant.
Les dispositions contractuelles antérieures à la convention individuelle de forfait en heures retrouvent alors application dans le respect de la loi ".
Force est de constater qu'aucune convention individuelle n'a été signée entre les parties et qu'aucun document ne vient soutenir qu'il y a eu un examen annuel. Enfin, la clause prévue à l'avenant au contrat de travail, qui a été appliquée du 30 octobre 2015 au 1er septembre 2016, ne comporte aucune mention relative à la détermination du nombre d'heures supplémentaires incluses dans la rémunération, le moyen de la société tiré du respect des dispositions conventionnelles étant inopérant.
En conséquence, la cour, en infirmant le jugement déféré, prononce la nullité de la convention de forfait mensuel en heures.
*Sur le rappel d'heures supplémentaires
Lorsqu'une convention de forfait en heures est invalidée, le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s'effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale de trente-cinq heures hebdomadaires ou de la durée considérée comme équivalente.
En application des articles L. 3121-22 puis L. 3121-28 du code du travail, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à majoration salariale.
Les heures effectuées au-delà de la durée légale de trente-cinq heures hebdomadaires sont des heures supplémentaires qui donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des 8 premières heures (de la 36ème à la 43ème incluse) et de 50% à partir de la 44ème heure.
En cas de nullité de la convention de forfait mensuel en heures, le salarié a le droit de réclamer la différence entre la rémunération due, compte tenu des heures supplémentaires effectuées, et le salaire forfaitaire versé.
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Le salarié réclame le paiement des heures supplémentaires pour la somme totale de 9782 euros qu'il a accomplies entre " 2014-soit le mois de novembre 2014- et le 1er septembre 2016 et qui correspondraient aux heures effectuées au-delà des 2028 heures prévues par le forfait ci-dessus annulé ainsi que celles effectuées en 2014 et 2016, soit 427 heures supplémentaires en dehors des 31, 20 heures prévues par son contrat initial à temps partiel puis 39 heures hebdomadaires.
Il insère au dispositif de ses écritures un décompte des heures supplémentaires effectuées soit pour l'année 2014 41 heures, pour l'année 2015 174 heures et pour l'année 2016 212 heures.
En outre, il verse aux débats:
- une attestation établie par des collègues de travail faisant état des heures supplémentaires effectuées (Mme [Y]) et l'amplitude horaire de M. [H] (M. [G]) ;
- une attestation d'une salariée d'un client (l'AFPA) qui indique qu'il a effectué des heures supplémentaires;
- des tableaux de reconstitution des heures de novembre 2014 à 2016 jour par jour à partir de bases de données (base de données de connexion au sein du logiciel de l'AFPA, base de données connexion windows à partir de son ordinateur et base de données sur ses heures d'envoi de mail).
Les tableaux produits répondent à l'exigence de précision permettant à l'employeur, sur qui repose l'obligation de contrôler le respect des durées maximales de travail journalières et hebdomadaires, des repos, ainsi que de l'équilibre entre la charge de travail et la vie personnelle, d'y répondre en apportant ses propres éléments.
La société Auréalys conteste la fiabilité des décomptes résultant du recoupement de données qui ne sont pas propres à la connexion ou au travail du salarié notamment aux motifs que plusieurs collaborateurs étaient à même dee travailler sur le logiciel du client AFPA. Elle produit des feuilles de temps faisant figurer le nombre d'heures travaillées du mois de novembre 2014 au 4 avril 2017.
M. [H] soutient que ces feuilles de temps servaient aux déclarations d'activité à effectuer auprès de l'employeur mais ont un caractère purement fictif.
Au vu des éléments communiqués par les parties, la Cour a la conviction que M. [H] a effectué des heures supplémentaires mais dans une moindre mesure de ce qu'il allègue, dès lors que les données de connexion au logiciel d'un client ouvert à d'autres collaborateurs et des heures de connexion sur son ordinateur ne permettent pas de caractériser l'accomplissement de toutes les heures supplémentaires évoquées, ce d'autant que les heures de pause ne sont pas prise en compte. Il sera relevé que le salarié réclame dans le dispositif de ses écritures un total d'heures supplémentaires par année renvoyant la Cour à son tableau (pièce n°4).
Les bulletins de salaire du 17 novembre 2014 à fin décembre 2014 et jusqu'au 1er novembre 2015 mettent en évidence qu'il a été rémunéré à hauteur 197, 45 heures, heures supplémentaires comprises (6, 40 heures en novembre 2014 et 13, 86 heures en décembre 2014), étant observé qu'il était rémunéré à hauteur de 135, 200 heures ( 121, 34 heures pour le calcul du salaire de base outre des heures supplémentaires) puis 169 heures à compter du 1er novembre 2015 ( 151, 67 heures au titre du salaire de base outre 17,33 heures supplémentaires).
Au regard des données chiffrées figurant dans ces tableaux, du recoupement des données chiffrées avec les heures rémunérées, en ce compris les heures supplémentaires, le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires sera arrêté de la façon suivante :
- pour 2014 270, 78 euros outre les congés payés afférents ;
- pour 2015 : 1379 euros outre 137,90 euros au titre des congés payés afférents ;
- pour 2016 : 1583 euros outre 158, 30 euros.
Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé
Selon l'article L. 8221-5 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1°/ soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2°/ soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3°/ soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Il revient au salarié de rapporter la preuve de l'élément intentionnel du travail dissimulé.
La dissimulation d'emploi prévue par l'article L. 8221-5 du code du travail, à l'occasion de l'omission d'heures de travail sur le bulletin de salaire, n'est caractérisée que si l'employeur a agi de manière intentionnelle.
M. [H] soutient que la société étant de petite taille et ne comptant que 4 associés et autant de salariés ne peut prétendre ne pas avoir eu connaissance de sa très grande amplitude horaire et ce notamment alors qu'il était censé être à temps partiel.
La seule preuve d'heures supplémentaires accomplies et non payées ne suffit pas cependant à établir la volonté de l'employeur de se soustraire à ses obligations légales et en particulier de dissimuler l'emploi de son salarié.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] de sa demande.
Sur les demandes reconventionnelles de la société Auréalys
Sur le fond, le dénigrement consiste à porter atteinte à l'image d'une entreprise ou d'un produit, désignés ou identifiables, afin de détourner la clientèle en usant de propos ou d'arguments répréhensibles, peu important qu'ils aient une base exacte, diffusés afin de toucher ses clients.
L'employeur reproche à M. [H] d'avoir fait établir une attestation par une salariée d'un de ses principaux clients. Cette salariée évoquait que " les missions confiées par l'AFPA à cette équipe comprenant M. [H] n'étaient pas le reflet de ce que lui vendait son employeur tant sur la durée de la présence à l'AFPA que sur les prestations professionnelles à effectuer. Lors de nos déjeuners [E] ([H]) revenait parfois sur l'objet principal de ses missions à savoir l'audit social mais ses employeurs lui imposaient de faire du contrôle de gestion et de l'appui comptable au régions de l'AFPA. Les missions d'audit de l'AFPA étaient confiées à un cabinet externe de commissaires aux comptes... ".
Il ne peut se déduire de ces propos que le témoin a procédé à un véritable dénigrement de la société Auréalys ou que M. [H] en versant une telle attestation dans le présent litige a porté atteinte à l'image de son employeur.
La demande sera en conséquence rejetée.
Sur les autres demandes
Eu égard à l'issue du litige, l'action intentée par le salarié n'est pas abusive. L'employeur sera débouté de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [H] les frais exposés dans le cadre de la présente instance et non compris dans les dépens. la Société Auréalys sera condamnée à payer à M. [H] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sa demande à ce titre sera rejetée.
La société Auréalys sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [E] [H] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ; l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens ;
CONFIRME le jugement pour le surplus ;
CONDAMNE la société Auréalys à payer à M. [E] [H] au titre du rappel de salaire pour heures supplémentaires les sommes suivantes :
- pour 2014 270, 78 euros brut et 27, 07 euros brut au titre des congés payés afférents ;
- pour 2015 : 1379 euros brut outre 137,90 euros brut au titre des congés payés afférents ;
- pour 2016 : 1583 euros brut outre 158, 30 euros brut.
CONDAMNE la société Auréalys à verser à M. [E] [H] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE la société Auréalys aux dépens de première instance et d'appel ;
DEBOUTE les parties de toute autre demande.
La greffière, La présidente.