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21/03/2024 | FRANCE | N°20/16889

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 21 mars 2024, 20/16889


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRET DU 21 MARS 2024



(n° /2024, 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 20/16889 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWAB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 mars 2020 - Tribunal judiciaire de Paris (Loyers commerciaux) - RG n° 16/14704





APPELANTES



Mme [M] [H] épouse [F]

Née le 19 avri

l 1958 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]



Mme [W] [A] épouse [H]

Née le 6 janvier 1923 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentées et assistées par Me Marc MANC...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRET DU 21 MARS 2024

(n° /2024, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 20/16889 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWAB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 mars 2020 - Tribunal judiciaire de Paris (Loyers commerciaux) - RG n° 16/14704

APPELANTES

Mme [M] [H] épouse [F]

Née le 19 avril 1958 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Mme [W] [A] épouse [H]

Née le 6 janvier 1923 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentées et assistées par Me Marc MANCIET de la SELEURL MBS Avocats, avocat au barreau de Paris, toque : W02

INTIMES

Me [U] [N]

Pris en sa qualité d'administrateur de la société JOGAYO, désigné en cette fonction par jugement rendu le 02/04/2019 par le tribunal de commerce de Paris.

[Adresse 7]

[Localité 6]

S.A.R.L. JOGAYO

Immatriculée au R.C.S. de Paris sous le n° 520 604 042

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

S.E.L.A.R.L. AXYME mandataire judiciaire de la société JOGAYO, prise en la personne de [I] [C], désigné en cette fonction par jugement rendu le 01/04/2019 par le tribunal de commerce de Paris et maintenu en cette fonction par jugement rendu le 11/03/2021 par le tribunal de commerce de Paris

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentés par Me Eric ALLERIT de la SELARL TAZE-BERNARD ALLERIT, avocat au barreau de Paris, toque : P0241

PARTIE INTERVENANTE

S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES, prise en la personne de Me [B] [U], pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société JOGAYO, nommé en cette fonction par ordonnance du tribunal de commerce de Paris en date du 31 mars 2021 en remplacement de Me [U] [N] lui-même nommé par jugement rendu le 11 mars 2021 par le tribunal de commerce de Paris.

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELARL TAZE-BERNARD ALLERIT, avocat au barreau de Paris, toque : P0241

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 octobre 2023, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Marie Girousse, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre

Mme Sandra Leroy, conseillère

Mme Marie Girousse, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, et par M. Maxime Martinez, greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Par deux actes sous seing privé du 7 décembre 2004, Madame [M] [F] née [H], Monsieur [J] [H] et Madame [W] [H] née [A], aux droits desquels se trouvent désormais Madame [M] [F] née [H], et Madame [W] [H] née [A], ont consenti deux baux à la société DARVET, aux droits de laquelle se trouve la société JOGAYO depuis le 11 mars 2010, portant sur des locaux à destination de 'bonneterie, draperie, soierie, lingeries, mercerie, confection, articles de [Localité 8], nouveautés, gros, demi-gros et détail, tailleur confection pour hommes et dames', dépendant d'un immeuble situé [Adresse 2]), pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2004 pour se terminer le 31 décembre 2012, l'un constitué de la première boutique à gauche de l'entrée de l'immeuble (lot 95) et de pièces situées à l'entresol (lots 9, 10 et 11) moyennant un loyer de 19.314 €, l'autre constitué par la deuxième boutique à gauche de l'entrée de l'immeuble (lot 1) et de deux pièces au sous-sol (lots 64 et 96) moyennant un loyer de 10.716 €. Ces baux se sont tacitement prolongés le 1er janvier 2013.

Par deux actes extrajudiciaires du 19 mars 2013, la société JOGAYO a sollicité le renouvellement de ces baux à compter du 1er avril 2013.

Après avoir signifié un mémoire préalable en fixation des loyers, par acte d'huissier du 7 octobre 2016, Madame [M] [F] née [H] et Madame [W] [H] née [A] ont assigné la société JOGAYO aux fins de voir fixer le loyer annuel en principal à compter du 1er avril 2013 à 70 000 euros pour la première boutique et à 34 000 euros pour la deuxième boutique, subsidiairement, voir ordonner une expertise.

Par jugement avant-dire droit en date du 7 mars 2017, le juge des loyers commerciaux a :

- constaté que par l'effet de la demande de renouvellement du 19 mars 2013, les baux concernant les locaux situés [Adresse 2]) se sont renouvelés à compter du 1er avril 2013,

- désigné Madame [Z] [T] en qualité d'expert aux fins de donner son avis sur la valeur du bail renouvelé,

- fixé le loyer provisionnel au montant du loyer contractuel en cours,

- ordonné l'exécution provisoire,

- réservé les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 2 avril 2019, le tribunal de commerce de Paris a ordonné l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Jogayo, désignant Maître [N] en qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance et la société AXYME en qualité de mandataire judiciaire.

L'expert a déposé son rapport au greffe le 12 avril 2019, concluant à :

- des loyers annuels plafonnés au 1er avril 2013 de 26.480,42 euros pour la première boutique et de 14.692,15 euros pour la seconde boutique,

- des valeurs locatives au 1er avril 2013 de 55.235 euros pour la première boutique et de 29.600 euros pour la seconde boutique,

- l'absence de démonstration d'une modification suffisamment notable des facteurs locaux de commercialité.

Par acte d'huissier du 18 décembre 2019, Madame [M] [F] née [H] et Madame [W] [H] née [A] ont assigné en intervention forcée Maître [U] [N], ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société JOGAYO, et Maître [I] [C], ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société JOGAYO.

Par jugement du 12 mars 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

- fixé à la somme annuelle de 26.480,42 euros, en principal, hors taxes et hors charges, le loyer du bail renouvelé de la première boutique à compter du 1er avril 2013 pour les locaux situés [Adresse 2] (lots 95, 9, 10 et 11), toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;

- fixé à la somme annuelle de 14.692, 15 euros, en principal, hors taxes et hors charges, le loyer du bail renouvelé de la seconde boutique à compter du 1er avril 2013 pour les locaux situés [Adresse 2] (lots 1, 64 et 96), toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- partagé les dépens incluant le coût de l'expertise judiciaire par moitié entre les parties.

Par déclaration du 23 novembre 2021, Madame [M] [H] et Madame [W] [H] ont interjeté appel du jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Par conclusions déposées le 26 mai 2023 Madame [M] [H] et Madame [W] [H], appelantes, demandent à la Cour de :

Déclarer Mesdames [H] recevables en leur appel et les y déclarant bien fondées ;

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

- fixer le loyer annuel en principal outre taxes, fournitures et prestations, à l'occasion du renouvellement des baux consentis à la société JOGAYO, à effet du 1er avril 2013 et pour une durée, sauf révision ultérieure, de neuf années entières et consécutives depuis cette date,

avec intérêts au taux légal sur les compléments échus et impayés à la somme de :

55.235 € HT/HC/an pour le bail de la boutique 1 (Lots 95,9,10 et 11)

29.600 € HT /HC/an pour le bail de la boutique 2 (Lots 1, 64 et 96)

- condamner la société JOGAYO à leur payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la société JOGAYO en tous les dépens qui comprendront notamment les frais et honoraires d'expertise.

Elles font notamment valoir qu'une étude effectuée par M. [R], expert judiciaire, du mois de décembre 2012, relève une modification notable des facteurs locaux de commercialité pour les boutiques d'équipement de la personne situées dans le périmètre circonscrit par les rues des Franc-Bourgeois, Saint-Antoine et Rivoli ; que l'expert a relevé un déplafonnement judiciaire 125 rue Saint-Antoine ; que les locaux objets de la présente instance se trouvent dans ce secteur ; qu'il y a donc une modification des facteurs de commercialité; que la réunion des locaux des deux baux a eu lieu pendant le cours des baux à renouveler et n'existait pas durant les baux précédents ; que cette réunion ne constitue pas une amélioration mais une modification des caractéristiques des locaux au sens des articles R. 145-3 et de L. 145-33 du code de commerce ; que même à retenir une simple amélioration, celle-ci devrait être prise en compte au titre du déplafonnement, dans la mesure où le bailleur a contribué à ces travaux par une franchise de loyer; que conformément à l'évaluation qui en a été faite par l'expert, les loyers de renouvellement doivent être fixés à 55.235 euros HT/AN pour la boutique 1 et 29.600 euros HT/AN pour la boutique 2.

Par conclusions déposées le 9 juin 2023, la société JOGAYO, intimée, demande à la Cour de :

Statuant sur le premier motif de déplafonnement tiré d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité :

- dire qu'à la lumière des différentes observations formulées par l'expert précédemment désigné par le premier juge, la décision entreprise a exclu, à bon droit, à l'emplacement considéré et au titre du commerce exploité dans les lieux loués, toute modification notable des facteurs locaux de commercialité, au regard des critères habituellement retenus par la jurisprudence et compte tenu des éléments de recoupement produits aux débats par les appelantes qui ne sont pas mieux fondées à exciper une étude réalisée par un expert qui n'apporte aucun élément probant et déterminant à la discussion dont l'emplacement des lieux loués fait l'objet, les déclarer en conséquence infondées en cette demande, les en débouter, en confirmant de ce chef la décision entreprise ;

Statuant sur le second motif de déplafonnement découlant de travaux réalisés par le preneur impliquant une modification des caractéristiques ou des améliorations apportées aux lieux loués :

- dire qu'indépendamment du fait que les appelantes n'ont pu établir ni pendant les opérations d'expertise, ni postérieurement, la date et les conditions dans lesquelles les travaux, dont elles entendent exciper, auraient été réalisés, il découle de la clause d'accession insérée dans les deux baux à renouveler, que le bailleur est fondé à solliciter, à l'occasion du départ du preneur, le rétablissement des lieux loués en leur état primitif, cette clause dite d'arasement, impliquant selon la jurisprudence, que les effets de l'accession se trouvent nécessairement reportés en fin de jouissance rendant ainsi irrecevable et infondé le second motif de déplafonnement invoqué à tort par les bailleresses ;

- les déclarer, en conséquence, infondées en leur appel, les en débouter et confirmer de ce chef, la décision entreprise qui a déterminé le prix exigible à l'occasion du renouvellement des deux baux commerciaux, en conformité avec les dispositions de l'article L. 145-34 du code civil et dans des conditions exclusives de tout déplafonnement ;

- déclarer en conséquence, l'intimée fondée à voir fixer le loyer dû en renouvellement selon le prix plafond, soit :

26.480,42€ HT pour la boutique n° 1 ;

14.692,15€ HT pour la boutique n° 2.

À titre infiniment subsidiaire, pour le cas où, par impossible, la juridiction saisie estimerait devoir accueillir favorablement les prétentions adverses :

- dire que la valeur locative des lieux loués, par application des dispositions de l'article L. 145-33 du code de commerce et des critères qui en découlent, selon la jurisprudence, en particulier en ce qui concerne l'incidence de la clause d'accession ne produisant effet qu'en fin de jouissance, ne peut excéder :

38.660€ HT pour la boutique n° 1 (lots n° 95, 9, 10 et 11) ;

20.270€ HT annuellement pour la boutique n° 2 (lots n° 1, 64 et 96).

- déclarer les appelantes infondées en leurs prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les en débouter ;

- condamner les appelantes, in solidum, au paiement d'une somme de 5.000€ (cinq mille euros) sur le fondement de ce texte, en raison des frais irrépétibles qui ont dû être exposés par l'intimée devant la Cour, outre les entiers dépens qui comprendront, notamment, les frais et honoraires d'expertise ;

- condamner solidairement Madame [M] [F] et Madame [W] [H] aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 23 avril 2021 la société Jogayo ainsi que la société AXYME, mandataire judiciaire maintenue par jugement du 11 mars 2021 et la SELARL AJASSOCIES, commissaire à l'exécution du plan nommé le 31 mars 2021 en remplacement de Maître [N], parties intervenantes, demandent à la Cour de :

- dire, qu'en l'état des clauses et conditions générales des baux à renouveler à effet du 1er avril 2013, les appelantes sont infondées à se prévaloir du bénéfice de l'accession, au titre de travaux d'aménagements intérieurs qui auraient été réalisés à l'instigation du preneur à une date et dans des conditions qui ne sont pas autrement précisées par les appelantes, ainsi que l'a relevé, à juste titre, le premier juge ;

- dire en conséquence, que les bailleresses sont infondées à exciper une augmentation de la commercialité des lieux au prétexte que leurs caractéristiques auraient été modifiées à l'initiative du preneur et ce, dans des conditions susceptibles d'entraîner le déplafonnement du loyer du bail renouvelé, selon les textes sus rappelé ;

- confirmer de ce chef la décision entreprise qui a estimé que les travaux, dont le bénéfice était revendiqué par les appelantes, s'avérait sans incidence sur le renouvellement du bail et en toute hypothèse dans des conditions exclusives de tout déplafonnement ;

- dire, de même, qu'à la lumière des différentes observations formulées par l'expert précédemment désigné par le premier juge, la décision entreprise a exclu, à bon droit, à l'emplacement considéré et au titre du commerce exploité dans les lieux loués, toutes modifications notables des facteurs locaux de commercialité au regard des critères habituellement retenus par la jurisprudence et compte tenu des éléments de recoupements produits aux débats par les appelantes, qui ne sont pas mieux fondées à exciper d'une étude réalisée par un expert et publiée antérieurement à la date d'effet du congé et, a fortiori aux opérations d'expertise.

- dire que le second motif de déplafonnement invoqué par les appelantes, en l'occurrence une modification notable des facteurs locaux de commercialité, ne peut être davantage établie dans des conditions de nature à entraîner le déplafonnement du loyer des deux baux renouvelés ;

déclarer, en conséquence, les appelantes infondées en leurs prétentions, les en débouter, en confirmant la décision entreprise qui, faisant droit aux demandes dont elle était saisie par l'intimée, a fixé par application de l'article L. 145-34 du code de commerce, le montant du loyer dû en renouvellement selon le prix plafond, soit :

26.480,42€ HT pour la boutique n° 1 ;

14.692,15€ HT pour la boutique n° 2.

- déclarer, en conséquence, Madame [M] [H], épouse [F] et Madame [W] [H], née [A], infondées en leur appel, les en débouter ;

À titre infiniment subsidiaire, pour le cas où, par impossible, la juridiction saisie estimerait devoir accueillir favorablement les prétentions adverses :

- dire que la valeur locative des lieux loués, par application des dispositions de l'article L. 145-33 du code de commerce et des critères qui en découlent, selon la jurisprudence, en particulier en ce qui concerne l'incidence de la clause d'accession ne produisant effet qu'en fin de jouissance, ne peut excéder :

38.660€ HT pour la boutique n° 1 (lots n° 95, 9, 10 et 11) ;

20.270€ HT annuellement pour la boutique n° 2 (lots n° 1, 64 et 96).

- déclarer les appelantes infondées en leurs prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les en débouter.

- condamner les appelantes, in solidum, au paiement d'une somme de 4.000 € (quatre mille euros) sur le fondement de ce texte, en raison des frais irrépétibles qui ont dû être exposés par l'intimée devant la Cour, outre les entiers dépens qui comprendront, notamment, les frais et honoraires d'expertise ;

- condamner solidairement Madame [M] [F] et Madame [W] [H] aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la SELARL Taze-Bernard Allerit, en la personne de Maître Eric Allerit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Ainsi que l'a relevé le jugement déféré, il ressort du rapport d'expertise et n'est pas contesté que les lieux loués dépendent d'un immeuble haussmannien en bon état apparent, ils correspondent à la réunion de deux boutiques mitoyennes formant une seule unité d'exploitation commerciale, bénéficiant d'un linéaire de façade d'environ 9m30, situés [Adresse 2] , au niveau de la rue des Etouffes, dans un secteur de bonne commercialité où se trouvent des boutiques de services (téléphonie, banques, optique...) dans un quartier central à la fois résidentiel, de bureau, très touristique et commerçant, bien desservi par les transports en commun, disposant de la présence de plusieurs parkings publics. L'expert précise que les locaux ne sont pas sur le meilleur trottoir de la rue de Rivoli ni sur le tronçon le plus recherché, le meilleur tronçon de la rue étant plus haut entre le BHV Marais et la rue du Louvre.

Il résulte des dispositions des articles L. 145-33 et L. 145-34 du code de commerce que le prix du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative mais que sa variation ne peut excéder la variation du loyer résultant de l'indice applicable à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux articles 1° à 4° du premier de ces textes, c'est à dire notamment des caractéristiques du local considéré (1°) et des facteurs locaux de commercialité (4°), une telle modification permettant de fixer le montant du loyer à la valeur locative si elle est supérieure au plafond. C'est au bailleur qui demande d'écarter le principe du plafonnement du loyer du bail renouvelé afin d'obtenir la fixation du loyer à la valeur locative, de prouver qu'il y a un motif de déplafonnement.

En l'espèce, selon l'expert, les loyers plafonnés s'élevaient au 1er avril 2013 respectivement à 26.480,42 € et 14.692,15 € alors qu'il estime les valeurs locatives respectivement à 55.235 € et 29.600 €. Il n'est pas discuté que la valeur locative excède le montant du loyer plafonné.

Les consorts [H] contestent le jugement déféré en ce qu'il a considéré qu'il n'y avait pas de motif de déplafonnement du loyer du bail renouvelé. Elles invoquent deux motifs de plafonnement, contestés par la locataire, l'un relatif à la modification des caractéristiques des locaux loués et leur amélioration aux frais du bailleur résultant de la réunion des locaux faisant l'objet des deux baux, l'autre relatif à la modification des facteurs locaux de commercialité.

Lorsque les travaux réalisés par le preneur au cours du bail expiré font accession en fin de bail au profit du propriétaire, selon les dispositions combinées des articles L. 145-33, L. 145-34, R. 145-3 et R. 145-8 du code de commerce s'ils modifient notablement les caractéristiques des lieux loués ils justifient le déplafonnement du prix du bail dès le premier renouvellement suivant et si ces modifications notables constituent des améliorations aux lieux loués, elles ne sont prises en considération pour la fixation du loyer du bail renouvelé dès le premier renouvellement que si le bailleur en a assumé la charge directement ou indirectement.

Chacun des contrats de bail en cause du 7 décembre 2004, renvoie au précédent contrat de bail à effet du 1er avril 1995 portant sur les mêmes locaux en précisant sous les titres:II Entretien-Travaux-Réparations et III Responsabilité-Recours : 'ces chapitres sont identiques à ceux figurant dans le bail à effet du 1er avril 1995". Or, les deux contrats de bail à effet du 1er avril 1995 stipulent au paragraphe 5° du I ENTRETIEN TRAVAUX ET REPARATIONS que le locataire aura l'obligation « de laisser à la fin du bail au propriétaire en toute propriété et sans indemnité, tous les changements, constructions, embellissements, installations nouvelles, adjonctions de cloisons, de canalisations et d'appareils divers qui auraient été fait, à moins que celui-ci ne préfère le rétablissement des lieux loués dans leur état primitif' ». Dès lors que cette clause s'applique à l'ensemble des travaux effectués par le preneur et que le renouvellement du bail est incompatible avec la remise des lieux dans leur état primitif, il s'en déduit que cette clause d'accession ne peut jouer qu'à la fin des relations contractuelles, c'est-à-dire à la fin de la jouissance des lieux par le locataire, de sorte que les modifications qu'il a pu y apporter restent sans incidence sur la fixation du montant du loyer lors du renouvellement.

Au surplus, ainsi que l'a relevé le jugement déféré, les bailleresses qui n'ont pas soulevé ce motif de déplafonnement lors des opérations d'expertise ne rapportent pas la preuve, dont elles ont la charge, que la réunion des lieux loués dont elles se prévalent, serait intervenue au cours du bail expiré, étant observé qu'il ressort de la description des lieux figurant dans les baux que le sous-sol objet du second bail n'est accessible que par la boutique objet du premier bail.

La modification des facteurs locaux de commercialité au sens de l'article R. 145-6 du code de commerce est notable si au cours du bail expiré sont intervenues des modifications ayant entraîné l'apparition d'un flux de chalands complémentaire significatif pour le commerce en cause, soit en l'espèce prêt-à-porter pour hommes. C'est au bailleur qui s'en prévaut qu'incombe la charge d'établir l'existence d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité pendant la durée du bail échu.

Il ressort des éléments du dossier et des observations de l'expert que durant la période du bail expiré, l'évolution de la population dans le 4ème arrondissement a été négative et l'évolution des catégories socio-professionnelles de cet arrondissement similaire à celle de la capitale; que de même, l'évolution de l'activité économique, similaire à celle de la capitale, n'est pas significative; que le volume de constructions nouvelles ou assimilées est trop faible pour avoir créé un flux de chalands ; que l'évolution de la fréquentation de la station de métro Saint Paul (+ 25,75 %) légèrement supérieure à celle de l'ensemble du réseau métropolitain liée à la politique de développement des transports en commun (+ 21,79%) n'est pas significative pour le commerce en cause si l'on considère que les locaux se trouvent à 200 mètres de cette station et n'en sont pas visibles et que le flux provenant du métro dessert d'autres sites très fréquentés (théâtres, musées, [Adresse 9]...) de sorte qu'une partie limitée de la chalandise est susceptible de passer devant les locaux en cause; que les locaux sont en dehors de la zone piétonnière fermée à la circulation automobile le dimanche depuis 2008; que si les locaux sont désormais dans la zone touristique internationale (ZTI) permettant une ouverture dominicale, la création de cette zone est postérieure à la date du renouvellement du bail; que le grand magasin BHV MARAIS est trop éloigné des locaux étudiés pour que ses transformations aient un impact sur leur commercialité étant souligné que sa plus importante rénovation s'est terminée en juin 2013 après la date du renouvellement; que le tronçon de la rue de Rivoli où sont situés les locaux en cause a évolué mais la qualité des enseignes nationales créées est équivalente à celles disparues, les grandes enseignes nationales étant d'ailleurs essentiellement sur l'autre trottoir ; que les locaux se situent à l'extérieur des rues les plus commerçantes du Marais qui ont connu l'arrivée d'enseignes emblématiques.

Les bailleresses se prévalent de l'étude publiée en décembre 2012 par les experts judiciaires [R] et [X], cependant cette étude circonscrit le secteur où se situent les décisions de déplafonnement pour les boutiques d'équipement de la personne, au périmètre des rues des Franc Bourgeois, Saint Antoine et Rivoli et ne cite aucun déplafonnement au titre de l'évolution des facteurs locaux de commercialité pour un commerce situé [Adresse 10] dans le tronçon où se trouvent les locaux en cause.

Elles se prévalent d'une référence citée par l'expert portant sur un déplafonnement pour modification des facteurs locaux de commercialité décidé par un arrêt du 3 novembre 2010. Cependant, il s'agit d'un renouvellement effectué en mars 2005, l'évolution prise en compte ne concerne donc pas la période du bail expiré le 31 mars 2013. De plus, l'activité et la situation ne sont pas comparables puisqu'il s'agit d'un commerce de café, bar, restaurant situé [Adresse 1].

En revanche, selon le rapport d'expertise, s'agissant d'un renouvellement effectué en 2008 relatif à un commerce de prêt à porter situé16 [Adresse 10], donc voisin du commerce en cause, le loyer a été plafonné dans un jugement du 16 mars 2012.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les consorts [H] ne rapportent pas la preuve d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité au regard du commerce considéré justifiant le déplafonnement du prix du loyer.

Le jugement déféré a considéré à juste titre qu'en l'absence de motif de déplafonnement du loyer le prix du loyer du bail renouvelé doit être fixé en application des règles du plafonnement soit un montant de 26.480,42 € pour la première boutique et 14.693,25 € pour la seconde boutique dus à compter du 1er avril 2013.

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions y compris celles relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes aux fins de voir 'dire' ou 'déclarer', lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions visant à confèrer un droit à la partie qui les requiert et ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Les consorts [H] qui succombent seront condamnées solidairement aux dépens de la procédure d'appel ainsi qu'à payer in solidum à la société JOGAYO la somme de 5.000 € au titre de ses frais irrépétibles relatifs à la procédure d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elles seront déboutées de leur demande fondée sur ce texte.

Les autres demandes seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 mars 2020 par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris (RG 16/14704) ;

Y ajoutant,

Déboute Madame [M] [F] née [H] et Madame [W] [H] née [A] de l'ensemble de leurs demandes ;

Condamne in solidum Madame [M] [F] née [H] et Madame [W] [H] née [A] à payer à la société JOGAYO la somme de 5.000 €en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

Condamne solidairement Madame [M] [F] née [H] et Madame [W] [H] née [A] aux dépens de la procédure d'appel dont distraction au profit de Maître Eric ALLERIT conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 20/16889
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;20.16889 ?
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