RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 7
ARRÊT DU 13 JUIN 2024
(n° , 17 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/11761 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CH5AF
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juin 2023 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 22/00200
APPELANT
EPFIF - ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D'ILE DE FRANCE
[Adresse 6]
[Localité 12]
représenté par Me Miguel BARATA du cabinet AARPI BARATA CHARBONNEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1185
INTIMÉS
Monsieur [C] [Z]
[Adresse 9]
[Localité 13]
représenté par Me Ajer DAHMANI de l'AARPI DAHMANI MOHSENZADEGAN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 173
non comparant
DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES
SEINE SAINT DENIS - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
Division Missions Domaniales
[Adresse 11]
[Localité 16]
représentée par Madame [H] [R], en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Hervé LOCU, Président
Madame Nathalie BRET, Conseillère
Madame Valérie DISTINGUIN, Conseillère
Greffier : Madame Dorothée RABITA, lors des débats
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.
***
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
M. [C] [Z] est propriétaire d'un bien immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 22], sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4], superficie de 83 m².
Il s'agit selon le jugement d'un immeuble composé de deux locaux commerciaux et de deux locaux à usage d'habitation, dont la consistance est contestée par l'EPFIF, qui retient des locaux commerciaux et des annexes.
M. [C] [Z] a adressé à la commune de [Localité 22] une déclaration d'intention d'aliéner ce bien au prix de 345'000 euros.
La commune de [Localité 22] a réceptionné cette déclaration le 27 avril 2022.
L'établissement public foncier d'Île-de-France (EPFIF) a exercé son droit de préemption par une décision du 20 juillet 2022 au prix de 189'000 euros.
M. [C] [Z] a refusé cette proposition par courrier le 2 août 2022, maintenant le prix indiqué dans la déclaration d'intention d'aliéner.
Par une requête et un mémoire introductif d'instance reçus le 8 août 2022, l'EPFIF a saisi le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny en vue de la fixation du prix du bien préempté.
L'EPFIF justifie avoir consigné le 30 août 2022 une somme de 36'000 euros auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations.
Il justifie également de la notification d'une copie du récépissé de consignation à la juridiction et au propriétaire dans le délai de 3 mois à compter de la saisine de la juridiction, conformément aux dispositions de l'article L 213-4 du code de l'urbanisme.
Par jugement contradictoire du 29 juin 2023, après transport sur les lieux le 1er février 2023, le juge de l'expropriation a :
'annexé à la décision le procès-verbal de transport du 1er février 2023 ;
'fixé à la somme de 346'637,50 euros en valeur occupée le prix d'acquisition du bien appartenant à M.[C] [Z] situé [Adresse 1] à [Localité 22], sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] ;
'condamné l'établissement public foncier d'Île-de-France (EPFIF) à payer à M.[C] [Z] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
'condamné l'établissement public foncier d'Île-de-France (EPFIF) aux dépens ;
'écarté l'exécution provisoire de la décision.
L'établissement public foncier d'Île-de-France a formé appel le 6 juillet 2023 en ce que le jugement a fixé à la somme de 346'637,50 euros en valeur occupée le prix d'aliénation des locaux d'activité préemptés situés [Adresse 1] à [Localité 22], édifiés sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] d'une superficie de 83 m², propriété de M. [Z], sur la base d'une surface totale de 126,05 m² et une valeur unitaire de 2 750 euros/m² en valeur occupée, rejeté les contestations soulevées par l'EPFIF et condamné l'EPFIF à payer à M. [Z] une indemnité d'un montant de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :
1/déposées au greffe par l'établissement public foncier d'Île-de-France le 3 octobre 2023 notifiées le 10 octobre 2023 (AR intimé du 2 octobre 2023 et AR CG du 12 octobre 2023) aux termes desquelles, il est demandé à la cour de :
confirmer le jugement en ce qu'il a :
'fixé la date de référence au 29 mars 2022,
'retenu une surface bâtie totale de 126,05 m²,
'écarté l'exécution provisoire ;
infirmer le jugement pour le surplus ;
statuant à nouveau des chefs infirmés,
-fixer le prix d'aliénation des locaux d'activité situés [Adresse 1] à [Localité 22], édifié sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] d'une superficie de 83 m², propriété de M. [Z], comme suit :
méthode d'évaluation : globale
surface totale : 126,05 m²
situation : occupé en totalité à titre commercial
valeur retenue : 1 500 euros/m² occupé
soit : 126,05 m² X 1 500 euros= 199'000 euros (VA)
'juger n'y avoir lieu application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ;
condamner M. [Z] a lui payer une indemnité de 2000 euros en cause d'appel sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner M.[Z] aux dépens d'appel.
2/ adressées au greffe par l'EPFIF le 25 mars 2024 notifiées le 27 mars 2024 (AR intimé du 2 avril 2024 et AR CG du 29 mars 2024) aux termes desquelles, il est demandé à la cour de :
confirmer le jugement en ce qu'il a :
'fixé la date de référence au 29 mars 2022,
'retenu une surface bâtie totale de 126,05 m²,
'écarté l'exécution provisoire ;
infirmer le jugement pour le surplus ;
statuant à nouveau des chefs infirmés,
-fixer le prix d'aliénation des locaux d'activité situés [Adresse 1] à [Localité 22], édifiés sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] d'une superficie de 83 m², propriété de M. [Z], comme suit :
méthode d'évaluation : globale
surface totale : 126,05 m²
situation : occupé en totalité à titre commercial
valeur retenue : 1500 euros/m² occupé
soit : 126,05 m² X 1 500 euros= 199'000 euros (VA)
'juger n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ;
-condamner M. [Z] a lui payer une indemnité de 2 000 euros en cause d'appel sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamner M. [Z] aux dépens d'appel.
3/adressées au greffe par le commissaire du gouvernement le 22 décembre 2023 notifiées le 19 janvier 2024 (AR appelant du 22 janvier 2024 et AR intimé signé mais non daté) aux termes desquelles, il est demandé à la cour de :
confirmer sur le principe les modalités de détermination des indemnités fixées par le juge de première instance sur la base d'un prix unitaire de 2 717 euros/m² soit une indemnité totale de dépossession fixée à 342 477,85 euros.
4/déposées au greffe par M.[Z], intimé, le 5 janvier 2024 notifiées le 18 janvier 2024 (AR appelant du 23 janvier 2024 et AR CG du 25 janvier 2024) aux termes desquelles, il est demandé à la cour de :
'déclarer l'EPFIF mal fondé en ses demandes,
'rejeter l'ensemble des demandes de l'EPFIF,
'confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
'condamner l'EPFIF à lui verser la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
'condamner l'EPFIF aux dépens d'instance.
5/adressées au greffe par M.[Z], intimé, le 16 avril 2024 notifié le 18 avril 2024 (AR appelant du 19 avril 2024, AR CG le 22 avril 2024) aux termes desquelles, il demande à la cour de :
-déclarer l'EPFIF mal fondé en ses demandes,
'rejeter l'ensemble des demandes de l'EPFIF,
'confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
'condamner l'EPFIF à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
'condamner l'EPFIF aux dépens d'instance.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
L'EPFIF expose que :
L'article 1 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris fixe un objectif de construire 70'000 logements géographiquement et socialement adaptés au sein de la région Île-de-France.
Le programme pluriannuel d'intervention (PPI), adopté par le conseil d'administration de l'EPFIF le 24 mars 2021 pour la période 2021-2025, fixe pour objectif prioritaire à l'EPFIF de contribuer à accélérer et augmenter la production de logements et d'agir en faveur du développement économique.
Le plan local d'urbanisme intercommunal a classé des parcelles en zone UMD, qui est une zone qui a vocation à accueillir des opérations destinées à la restructuration du secteur Quartier Prioritaire de la Ville (QPV) [Adresse 17]-[Adresse 19].
Une étude urbaine de ce quartier mandaté par l'Établissement Public Territorial [Adresse 23] Commune de mai 2014 envisage la requalification du secteur mentionné ci-dessus avec le développement d'un quartier mixte comprenant logements diversifiés, commerces et équipements.
Une convention pluriannuelle du projet de renouvellement urbain de [Localité 22] a été signée avec l'agence nationale de recouvrement urbain (ANRU) le 31 mars 2022.
Une convention d'intervention foncière a été conclue le 18 juin 2018 entre la commune de [Localité 22], l'établissement public territorial [Adresse 23] Commune et l'Établissement Public Foncier d'Île-de-France, avènementée une première fois le 16 juin 2022.
Dans le périmètre de ce secteur, se trouve un local d'activité situé au [Adresse 1] à [Localité 22], édifié sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] d'une superficie de 83 m², propriété de M.[Z].
L'EPFIF a préempté ce bien pour un prix total de 189 000 euros, occupé.
M. [Z] a refusé le prix d'aliénation proposé.
Le tribunal a retenu une surface utile totale de 126,05 m² et une valeur unitaire de 1 750 euros/m² SU.
La surface retenue n'est pas contestée puisque convenue entre toutes les parties après certificat de mesurage réalisé par un géomètre expert.
A sur les particularités de l'environnement de l'immeuble
Le bien situé [Adresse 1] à [Localité 22], qui comme le précise le tribunal est une rue résidentielle à sens unique, adjacente à la Nationale 1, grande avenue passante et commerçante.
Il s'agit d'une petite parcelle de seulement 83 m² entièrement immobilisée par un bâti R+1, sans parking ni cour privative, avec un accès unique sur la rue comprenant :
'au rez-de-chaussée : une boutique et un local à usage de restauration rapide non encore mise en service, avec chacun une entrée donnant sur la rue ;
'A l'étage légèrement mansardé accessible uniquement depuis la boutique : palier desservant, à gauche, deux pièces avec un WC et un lavabo, à droite, une grande pièce avec un WC et un lavabo.
L'ensemble a été restructuré et rénové, les travaux ne sont toutefois pas achevés, pour partie au rez-de-chaussée, mais aussi à l'étage.
L'immeuble est loué sur la totalité de sa surface à titre commercial en vertu d'un bail commercial signé le 13 avril 2021 (pièce n° 5).
S'agissant de l'environnement, si l'immeuble est situé à proximité de la N1, sa visibilité est très réduite depuis cette voie, à la fois à cause de sa faible hauteur par rapport aux immeubles voisins, mais également du fait de son environnement immédiat.
L'environnement commercial du bien n'est pas aussi favorable que retenu par le tribunal.
B sur les particularités de la consistance de l'immeuble
Il est produit des photographies prises lors de l'instruction de la DIA en juin 2022, rapportant la preuve que les deux pièces situées à l'étage constituaient des annexes de la surface commerciale du rez-de-chaussée.
Au cours du transport sur les lieux, il a pu être constaté que la pièce à l'étage, située à gauche de l'escalier montant, faisait l'objet de travaux (pièce n° 4).
L'immeuble ne pourra en aucun cas être considéré comme un bien à usage d'habitation, partielle, pour sa partie de combles à l'étage, et doit être évalué comme un local commercial disposant de pièces annexes :
'Il n'est pas conteste que la partie à l'étage constitue les combles ; or le code de la santé publique interdit de louer des combles aux fins d'habitation ;
'Il n'est pas raisonnable de considérer la pièce comme un logement, l'article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2022 relatif aux caractéristiques du logement décent imposant sept critères de décence d'un logement dont le 7e, imposant un « éclairement naturel suffisant » ; le transport sur les lieux a permis de constater que les pièces à l'étage ne disposaient d'aucune fenêtre, mais uniquement d'une petite lucarne sur la toiture qui ne permet pas de voir l'extérieur ; il en va de même sur la base du règlement sanitaire départemental de la Seine-Saint-Denis (pièce n° 11) ;
'M. [Z] a loué cette partie de l'immeuble dans le même bail commercial que celui accordé pour les surfaces commerciales situées au rez-de-chaussée, précisant même que cette partie à l'étage est « réservée au personnel » (pièce n° 5) ; les pièces à l'étage ne disposent d'aucun accès autonome par rapport au commerce situé au rez-de-chaussée ;
'le titre de propriété du 20 juin 2018 (pièce n° 12) démontre que les locaux constituent un garage, et qu'il a été illégalement transformé en local à usage commercial, avec « au-dessus un local annexe à usage d'habitation » ; les travaux étaient soumis à déclaration préalable de travaux, laquelle n'a jamais été déposée par M. [Z].
En conséquence, il n'y a pas lieu de tenir compte des travaux illicites réalisés par M. [Z] depuis son acquisition en 2018 ; il y a lieu de retenir la consistance d'un local commercial avec annexes au seul profit du locataire commercial ainsi qu'un abattement sur la valeur de ses locaux par rapport aux termes de comparaison.
C Sur l'état d'occupation de l'ensemble immobilier
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré le bien comme occupé mais infirmé en ce qu'il n'a pas été tenu compte de l'incidence de l'occupation à titre commercial, tant sur la nature des locaux que sur leur valeur.
En effet, l'abattement pour occupation qui est pratiqué de manière constante en la matière n'est pas lié à une obligation de relogement, qui n'existe pas au profit des commerçants, mais une obligation d'éviction aux fins de réalisation de l'objet d'intérêt général pour lequel le bien a été préempté, qui n'a pas été contesté.
D sur l'évaluation de l'ensemble immobilier
Le tribunal a rejeté à juste titre l'intégralité des références citées par le commissaire du gouvernement, à l'exception d'une seule et l'intégralité des références citées par M. [Z], communes à celle citée par le commissaire du gouvernement, à l'exception d'une seule.
1° sur les termes de comparaison du commissaire du gouvernement
Les cinq références du commissaire du gouvernement doivent être écartées.
2° sur les termes de comparaison de l'intimé
Les références de l'intimée doivent être écartées.
3° les termes de comparaison retenue par le tribunal et l'évaluation du prix d'aliénation par l'EPFIF
Il convient de confirmer le jugement qui a retenu deux références au [Adresse 7] et au [Adresse 8], mais sera infirmé en ce qu'il n'a pas tiré toutes les conséquences des observations formulées.
Il sera également infirmé en ce qu'il a retenu un terme de référence situé au [Adresse 5].
Les trois références retenues correspondent à la moyenne suivante :
(1 524 euros + 1 547 euros + 1 795 euros)/3= 1 622 euros/m² occupé.
Afin de tenir compte du fait que l'immeuble à évaluer :
'ne constitue pas réellement un immeuble mixte,
'ne comprend pas de vrais logements dans sa partie sous combles,
'ne dispose d'aucune superficie de terrains disponibles,
'ne dispose d'aucun accès distinct pour la partie située sous comble.
Il est demandé à la cour de retenir une valeur unitaire de 1 500 euros/m² occupé.
D sur l'article 700 du code de procédure civile
Le tribunal a condamné l'EPFIF à payer à M.[Z] une indemnité de procédure de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il ressort des dispositions du code de l'urbanisme que la saisine du juge de l'expropriation pour la fixation du prix d'aliénation de l'immeuble préempté découle du refus du propriétaire et de son acceptation que le prix soit fixé par cette juridiction, mais également d'une obligation réglementaire imposée au titulaire du droit de préemption s'il ne veut pas en perdre l'exercice.
Compte tenu de ces particularités, en application de l'alinéa 3 de l'article 700 du code de procédure civile, la cour devra dire n'y avoir lieu à application de ce texte, et réformer le jugement.
M. [Z] répond que :
A informations relatives au bien
1° situation et environnement du bien
Le bien est composé au rez-de-chaussée d'une boutique qui a fait l'objet de travaux récents et au premier étage de trois pièces, un coin cuisine, WC et une cabine de douche.
L'intégralité du bien se trouve en excellant état, les travaux d'aménagement ont été finalisés en décembre 2022 et des travaux de retouche et de finition sont en cours (pièce n° 5).
Le bien est situé en plein c'ur d'une zone urbaine très passante et se trouve à un emplacement stratégique très intéressant pour l'activité qui est exploitée à savoir la vente de produits alimentaires mais également la fourniture d'accessoires et de services de téléphonie.
En effet, le bien est à proximité du tramway ligne 11, de la ligne D du RER ainsi que la ligne 13 du métro parisien et bénéficie d'une accessibilité importante.
Par ailleurs, la rue du 8 mai 1945 est localisée dans le quartier centre mairie et se trouve sur la nationale 1 et l'autoroute A1 et est directement desservie par la nationale.
La surface totale du bien est de 126,04 m².
2° situation locative du bien
L'immeuble est loué, étant composé de locaux commerciaux et de locaux à usage d'habitation.
Lors du transport sur les lieux le 1er février 2023,un très bon état général a été retenu particulièrement au niveau des locaux commerciaux.
B évaluation du montant de l'indemnisation
L'ensemble des parties s'accordent à retenir qu'il y a une partie à usage commercial et une partie à usage d'habitation.
S'agissant de la configuration du bien estimé, il a été rénové totalement et restructuré.
Le juge de l'expropriation a rappelé que «l'EPFIF ne rapporte pas la preuve que les locaux à usage d'habitation situés au premier étage seraient indécents ou insalubres, étant observé qu'en tout état de cause, il ne relève pas du pouvoir du juge de l'expropriation de qualifier la décence ou la salubrité d'un logement ».
S'agissant de l'estimation du bien, il a proposé en première instance de retenir cinq termes d'immeuble de rapport entre février 2020 et février 2023 sur la commune de [Localité 22] dans un périmètre d'un km.
Il a investi toutes ses économies dans son bien après son achat afin de le rénover entièrement et il s'est endetté pour un montant de 45'000 euros, outre un prêt bancaire (pièces n° 8 et n° 9).
Il a proposé de retenir un prix au m² fixé à hauteur de 3100 euros correspondant à la moyenne de ces ventes.
Le juge de l'expropriation a recensé les facteurs de plus-value parmi lesquels :
'la monopropriété du bien, non divisé en lots et non soumis au régime de la copropriété des immeubles bâtis,
'le très bon état d'entretien du bien, entièrement rénové, quand bien même les travaux étaient toujours en cours sur une partie du rez-de-chaussée le jour du transport,
'la bonne situation géographique du bien, à proximité des transports, à l'angle de la N1 qui assure une bonne commercialité.
Il n'y a pas lieu comme demandé par l'EPFIF d'appliquer un abattement pour occupation, la moins-value pour occupation n'étant pas rapportée.
S'agissant des travaux il s'agit d'un défaut de déclaration préalable et non d'une absence de permis de construire.
Il convient donc de confirmer le jugement qui a évalué le bien à hauteur de 346'637,50 euros.
Sur l'article 700 du code de procédure civile, il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais exposés pour défendre ses intérêts en première instance et en cause d'appel.
Il convient donc de confirmer le jugement qui a condamné l'EPFIF à lui verser la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner à lui régler la somme de 4000 euros sur ce fondement en cause d'appel.
Le commissaire du gouvernement conclut que :
S'agissant de description du bien, suite aux travaux de rénovation et d'aménagement, il s'agit aujourd'hui d'un ensemble immobilier à usage d'activités d'habitation construit en R+1.
Il ressort des visites, des photographies produites et du jugement de première instance que le bien ne peut être considérée comme un local commercial disposant de pièces annexes.
Pour évaluer le bien, il convient de constater que les locaux d'habitation comprennent uniquement trois fenêtres de type VELUX, possédant 75 % de la surface avec une hauteur sous plafond inférieure à 1,80 m, ne disposant pas d'un accès autonome.
Le bien doit donc être comparé à des cessions d'immeubles mixtes, à usage commercial et d'habitation.
Il ne sera pas tenu compte de l'abattement pour occupation, puisqu'en matière de préemption, l'abattement pour occupation n'a pas lieu d'être du fait de l'absence d'obligation de relogement, le bien étant vendu en l'état.
Il est proposé quatre termes de comparaison pour une moyenne de 2 470 euros/m².
L'état d'entretien du bien est en très bon, il est donc proposé de retenir une valeur supérieure à la moyenne des transactions retenues comme termes de comparaison, ainsi qu'une majoration de 10 % prenant en compte l'absence d'accès indépendant aux locaux usages d'habitation et à l'aménagement du bien.
Il est donc proposé la valeur unitaire de 2 717 euros/m² soit un prix de 342'477,85 euros.
Il est donc demandé de confirmer le jugement pour cette somme.
SUR CE, LA COUR
- Sur la recevabilité des conclusions
Aux termes de l'article R 311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 - article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l'appel étant du 6 juillet 2023, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.
À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.
L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.
Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.
Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.
Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.
En l'espèce, les conclusions de l'EPFIF du 3 novembre 2023, du commissaire du gouvernement du 22 décembre 2023 et de M. [Z] du 5 janvier 2024 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.
Les conclusions de l'EPFIF du 25 mars 2024 sont de pure réplique à celles de M.[Z] et à celles du commissaire du gouvernement ne formulent pas de demandes nouvelles, sont donc recevables au-delà des délais initiaux.
Les conclusions de M. [Z] du 16 avril 2024 sont de pure réplique à celles de l'EPFIF et sont donc également recevables.
- Sur le fond
Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'il juge nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.
Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.
L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.
Aux termes de l'article L 211-5 du code de l'urbanisme, tout propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption peut proposer au titulaire de ce droit l'acquisition de ce bien, en indiquant le prix qu'il en demande. Le titulaire doit se prononcer dans un délai de 2 mois à compter de ladite proposition dont copie doit être transmise par le maire au directeur départemental des finances publiques.
À défaut d'accord amiable, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation selon les règles mentionnées à l'article L 213-4.
En cas d'acquisition, l'article L 213-14 est applicable.
Aux termes de l'article L 213-4 du code de l'urbanisme, à défaut d'accord amiable le prix d'acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment l'indemnité de remploi.
Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.
L'appel de l'EPFIF porte sur le montant du prix et sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le commissaire du gouvernement n'a pas formé appel incident; il sera noté cependant qu'il demande la confirmation du jugement dans le dispositif de ses conclusions pour un montant de 342 477,85 euros, alors que celui-ci a retenu la somme de 346 637, 50 euros.
S'agissant de la date de référence, le premier juge a retenu le plan local d'urbanisme intercommunal(PLUI) de [Adresse 23] commune approuvé le 29 mars 2022 plaçant le bien en zone UM.
L'EPFIF demandant la confirmation sur ce point, le jugement sera donc confirmé en ce sens.
S'agissant des données d'urbanisme, à cette date le bien est situé en zone urbaine dédiée aux constructions mixtes.
Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, le premier juge a retenu qu'il s'agit d'un ensemble immobilier à usage d'activités et d'habitation située [Adresse 1] à [Localité 22], sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] d'une superficie de 83 m².
Il a indiqué que l'ensemble immobilier, en R+1, est composé :
'au rez-de-chaussée :
'd'un local commercial à usage d'épicerie ;
'd'un local commercial à usage de réparation de téléphones ;
' à l'étage :
'd'un studio ;
'd'un appartement de type T2.
Il a souligné que cette rue est une rue résidentielle à sens unique, adjacente à la nationale 1, avenue passante et commerçante.
Il est desservi par :
'l'arrêt de tramway 5 « [Adresse 19] » situé à 2 minutes à pied,
'l'arrêt de tramway 11 : [Localité 22]-[Localité 24] », situé à 10 minutes à pied,
'l'arrêt de RER D « [Localité 22]-[Localité 24] », situé à 15 minutes à pied,
'le réseau de bus.
Il a indiqué qu'il ressort du procès verbal de transport que globalement, l'ensemble immobilier est en bon état d'entretien, particulièrement les locaux commerciaux ; que les peintures ont été refaites, que le sol est en bon état et que l'éclairage est intégré au plafond ; qu'une des pièces au rez-de-chaussée est en travaux et que les pièces à l'étage ne sont éclairées naturellement que par des fenêtres au plafond de type VELUX.
L'EPFIF souligne que la visibilité est réduite depuis cette voie, à la fois à cause de sa faible hauteur par rapport aux immeubles voisins, mais également du fait de son environnement immédiat, à savoir du parking des véhicules d'occasion et de la présence d'un garage de camion immédiatement voisin, qui procède à la réparation de camion volumineux à même la rue, et qui obstrue sensiblement la vue sur l'immeuble à évaluer ; que l'environnement n'offre que très peu de places de stationnement, la rue étant à sens unique, ne peut être empruntée à partir de la N1, ce qui limite l'intérêt de l'emplacement commercial.
M.[Z] répond que son bien est situé dans une zone urbaine très passante, un endroit stratégique intéressant pour l'activité qui y est exploitée, à savoir à proximité du tramway ligne 11, de la ligne D du RER ainsi que de la ligne 13 du métro parisien, et notamment de l'arrêt de bus '[Adresse 19]' qui permet d'accéder au RER D et à la station '[Adresse 19]' du tramway et que l'autoroute A1 est directement desservie par la nationale 1.
Le commissaire du gouvernement retient une situation géographique d'urbanisme favorable.
Il ressort du procès-verbal de transport sur les lieux et des pièces produites par les parties, que si la qualité de l'emplacement est à nuancer comme le démontrent les photographies produites par l'EPFIF en raison de la présence d'un parking de véhicules d'occasion et la présence d'un garage de camion à proximité, et du faible nombre de places de stationnement, il reste que celui-ci est favorable, étant situé en plein c'ur d'une zone urbaine très passante avec une accessibilité importante au niveau des transports, et en plein c'ur de la commune de [Localité 22], le bien étant à proximité du groupe scolaire Anatole France, du collège [18], d'un lycée et de deux universités [20] et [21],avec la présence de nombreux commerces, supermarché et restaurants dans un rayon d'un kilomètre.
Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.
S'agissant de la date à laquelle le bien doit être estimé, il s'agit de celle de la première instance, soit le 29 juin 2023.
Sur les surfaces
Il s'agit d'un ensemble immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 22], sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4], d'une superficie de 83 m².
Le premier juge a retenu la surface utile ressortant de l'attestation de surface versée aux débats par M. [Z], pour une surface totale de 126,05 m².
L'EPFIF demandant la confirmation, le jugement sera confirmé en ce qu'il a exactement retenu cette surface utile totale de 126,05 m².
- Sur la méthode
Le premier juge a retenu la méthode d'évaluation par comparaison, les parties s'accordant sur celle-ci.
Comme en première instance, les parties sont en désaccord sur la consistance du bien.
Le premier juge a retenu qu'il s'agit d'un ensemble immobilier à usage d'activités et d'habitation et a donc opéré une comparaison avec des cessions d'immeubles mixtes, à usage commercial et d'habitation.
Il a indiqué que l'EPFIF ne rapporte pas la preuve que les locaux à usage d'habitation situés au premier étage sont indécents et insalubres, étant observé qu'en tout état de cause, il ne relève pas du pouvoir du juge de l'expropriation de qualifier la décence et la salubrité d'un logement.
Il a cependant constaté qu'effectivement, les locaux à usage d'habitation :
'comprennent uniquement des fenêtres type VELUX, comme précisé dans le procès-verbal de transport, mais en nombre de trois, contrairement à ce qu'indique l'EPFIF,
'possèdent 75 % de leur surface avec une hauteur sous plafond inférieure à 1,80m, comme cela ressort de l'attestation de surface versée aux débats ;
'ne disposent pas d'un accès autonome donnant directement sur la rue ;
'sont actuellement donnés à bail à titre commercial.
Il a donc considéré que ces éléments de moins-value importants par rapport à des logements dits classiques conduisent à écarter la comparaison du bien évalué avec des immeubles de rapport uniquement constitués de logements et la comparaison par distinction selon l'usage commercial d'habitation des surfaces, les surfaces à usage d'habitation ne pouvant être utilement comparées à des cessions de logement.
L'EPFIF demande l'infirmation, en demandant de considérer que les deux pièces situées à l'étage constituent des annexes de surface commerciale du rez-de-chaussée.
M. [Z] demande la confirmation, mentionnant que son immeuble étant composé de locaux commerciaux et de locaux à usage d'habitation
Le commissaire du gouvernement produit des photographies en indiquant que le local ne peut être considéré comme un local commercial disposant de pièces annexes et il qu'il convient donc de le comparer à des cessions d'immeubles mixtes, à usage commercial et d'habitation.
Il relève que pour évaluer le bien, il convient de constater que les locaux d'habitation comprennent uniquement trois fenêtres type VELUX, possédant 75 % de leur surface avec une hauteur sous plafond inférieure à 1,80 m et ne disposent pas d'un accès autonome.
En matière de préemption la consistance du bien dont le prix doit être fixé s'apprécie à la date du jugement, soit à la date du 29 juin 2023.
Il ressort du titre de propriété du 20 juin 2018 produit par l'EPFIF (pièce n°12) que l'immeuble acquis est désigné comme suit :
« identification du bien
désignation
à [Localité 22] (Seine-Saint-Denis) [Localité 22], [Adresse 2],
un local à usage de garage.
Observation étant ici faite que par suite de travaux effectués par le vendeur sans autorisation préalable, la désignation est la suivante :
un immeuble comportant :
au rez-de-chaussée : un local commercial et un bureau.
À l'étage, deux pièces avec salle d'eau.
Disposition sur le changement d'usage de destination
changement destination-information
La destination caractérise ce pourquoi l'immeuble a été construit ou transformé.
L'article R151-27 du code de l'urbanisme énonce cinq destinations possibles, à savoir : l'exploitation agricole et forestière, l'habitation, le commerce et les activités de service, les équipements d'intérêt collectif et services publics, et enfin les autres activités des secteurs secondaires ou tertiaires. L'article R151-28 du même code subdivise ces cinq destinations en vingt sous-destination fixées par un arrêté du 10 novembre 2016.
En cas de changement de destination entre les destinations et sous destinations susvisées, il y a lieu à déclaration préalable, toutefois, si ce changement s'accompagne de travaux ayant pour objet la modification des structures porteuses ou la façade du bâtiment, il y a lieu à obtention d'un permis de construire.
Il n'y a pas de prescription applicable à l'usage régulier d'un immeuble, cet usage irrégulier pouvant constituer une infraction pénale continue.
Observations étant ici faites que le vendeur déclare que le bien présentement vendu constituait un garage, que par suite de travaux effectués par ce dernier sans autorisation comme il sera dit ci-après, le garage a été transformé en local à usage principal de commerce avec au-dessus un local annexe à usage d'habitation. Laquelle transformation est effectuée sans aucune autorisation de changement d'affectation obtenue de la mairie.
L'acquéreur déclare avoir été informé de cette situation dès avant ce jour par le notaire soussigné.
Malgré les avertissements quant à cette situation donnée par Me [E], l'acquéreur a souhaité persister dans son intention d'acquérir ledit bien.
L'acquéreur déchargeant maître [E] de toute responsabilité à cet égard, le requérant de signer en l'état et sans délai »
Il en ressort que le bien constitue un garage, et qu'il a été illégalement transformé en local à usage commercial, avec « au-dessus un local annexe à usage d'habitation », ce qui est reconnu par M.[Z] qui a déchargé le notaire de toute responsabilité sur ce point et qui reconnaît qu'il s'agit d'un défaut de déclaration préalable pour les travaux qu'il a réalisés, et non d'une absence de permis de construire.
En outre, si locaux au premier étage comprennent trois fenêtres de type VELUX, et non une comme indiqué par l'EPFIF, l'article L1331-23 du code de la santé publique impose un éclairement naturel suffisant, et le règlement sanitaire départemental de la Seine-Saint-Denis dans son article 28 8B dispose au sujet ' des caractéristiques des pièces affectées à l'habitation (pièce n° 11) que : deuxièmement l'éclairement naturel au sens des pièces principales doit être suffisant pour permettre, par temps clair, l'exercice des activités normales de l'habitation, sans recourir un éclairage naturel. À cet effet, la pièce était munie d'au moins une baie donnant sur un espace libre. Le prospect devant cette baie doit être au moins égal à 2 m. La position de sa surface transparente doit permettre la vue horizontale vers l'extérieur ».
Ce n'est donc pas le cas en l'espèce s'agissant uniquement de trois VELUX.
De plus, les locaux possèdent 75 % de leur surface avec une hauteur sous plafond inférieure à 1,80 m et ne disposent enfin pas d'un accès autonome, l'accès ne pouvant se faire qu'en passant par le local commercial.
Enfin, M. [Z] a loué cette partie de l'immeuble dans le même bail commercial que celui accordé pour les surfaces commerciales situées au rez-de-chaussée (pièce n° 5) précisant que cette partie à l'étage « est réservée au personnel » : « A l'étage: deux pièces avec salle d'eau ainsi qu'une pièce réservée au personnel », ce qui confirme que les pièces à l'étage ne disposent d'aucun accès autonome par rapport au commerce situé au rez-de-chaussée, ce qui démontre que l'étage ne peut être dédié qu'à l'occupant commercial du rez-de-chaussée.
En conséquence, le bien à évaluer ne peut être considéré comme un ensemble immobilier à usage d'activités et d'habitation, mais uniquement comme un local commercial disposant de pièces annexes.
Il n'y a pas lieu en outre de tenir compte des travaux réalisés par M.[Z] depuis son acquisition 2018, puisque ceux-ci ont été réalisés dans le cadre d'une modification de leur destination de façon illicite.
Le Jugement sera infirmé en ce sens.
- Sur la fixation du prix
La cour ayant jugé que le bien évalué n'est pas un ensemble immobilier à usage d'habitation activités et d'habitation, mais un bien à usage d'activités, disposant de pièces annexes, il n'y a pas lieu de retenir des cessions d'immeubles mixtes, à usage commercial et d'habitation, mais des cessions d'immeubles à usage commercial.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
Il convient d'examiner les références des parties.
L'EPFIF demandant le rejet des termes de comparaison de M.[Z] et du commissaire du gouvernement.
Il convient de les examiner, puis ensuite ceux proposés par l'EPFIF.
1° Les références de M. [Z]
Il reprend les cinq termes proposés en première instance à [Localité 22] avec les références cadastrales et de publication (pièce n°12) :
N° du terme
Date de vente
Adresse
Superficie/m²
Prix en euros
Prix en euros/m²
SU
année construction
I1
CG4
appelant 1
16 juillet 2021
[Adresse 7]
221
570'000
2579,19
1930
I2
CG3
15 octobre 2020
[Adresse 5]
232
740'000
3189,66
1900
I3
19 mai 2020
[Adresse 10]
231
660'000
2857,14
1932
I4
CG1
12 novembre 2021
[Adresse 3]
181
490'000
2707,18
1880
I5
4 2022
[Adresse 15]
131
515'000
3131,30
2000
moyenne
3100
Il sera tout d'abord relevé que M.[Z] propose en pièce 12, six ventes sélectionnées, mais qu'il ne propose pas la vente du 31 mars 2021 61, rue Parmentier, 223 m², 460 000 euros,pour un prix de 2062,78 euros/m², soit la valeur la plus basse des ventes.
I1 : Ce terme est proposé par toutes les parties, mais l'EPFIF demande d'appliquer un abattement de 30% pour occupation, ce bien étant libre et de 10% pour tenir compte des particularités.
Le bien est libre, sauf le logement situé au rez de chaussée.
Il y donc lieu d'appliquer l'abattement habituel, qui sera fixé à 20%, le bien n'étant pas entièrement libre.
Si ce bien comprend un accès autonome et un garage pour véhicules, il n'y a pas lieu cependant d'appliquer un abattement supplémentaire de 10%, mais d'en tenir compte comme élément de plus value par rapport au bien à évaluer.
La valeur retenue est donc de : 2 579 X 0,80=2 063 euros/m².
I2 : L'EPFIF verse l'acte de vente (pièce n°7) et demande d'adapter ce terme, qui est libre à 64% de la surface totale en appliquant un abattement de 25%.
Le tribunal a retenu une surface de 232 m² soit une valeur de 3189 euros/m².
Cependant, le commissaire retient une surface 361 m² et l'acte de vente mentionne 364,10 m², surface qui sera retenue.
Si 64% de la surface totale est libre, il n'y a pas lieu cependant d'appliquer un abattement de 25%.
Ce terme sera donc retenu pour une valeur de 2 032 euros/m².
I3 : L'EPFIF produit l'acte de vente(pièce n°10) et demande d'écarter ce terme.
Il ressort de l'acte de vente qu'il s'agit uniquement de logements et que le bâtiment ne contient aucun commerce.
Ce terme non comparable en consistance sera donc écarté.
I4 : I1 : L'EPFIF produit l'acte de vente(pièce n°8) démontrant que celle- ci ne porte pas sur un local commercial, mais sur trois lots d'appartement, trois caves et une terrasse.
Ce terme non comparable en consistance sera écarté
I5 : Le commissaire du gouvernement n'a pas repris ce terme en appel.
L'acte de vente établit qu'il s'agit d'un pavillon d habitation avec parkings, sans commerce.
Ce terme d'une consistance non comparable sera donc écarté.
2° Les références du commissaire du gouvernement
Outre les références déjà citées, le commissaire du gouvernement propose un terme CG2 avec les références de publication :
vente du 26 mai 2023, [Adresse 14], 252 m² SU, 635'000 euros, 2520 euros.
L'EPFIF demande d'écarter ce terme, la surface étant du double et les références de publicité n'étant pas complètes, la date de publication n'étant pas donnée.
Les références de publicité sont communiquées par le commissaire du gouvernement et il est exigé uniquement la date de la vente.
Si la surface est de 252 m², ce terme est récent, situé dans la même localité et de consistance comparable ; la différence de surface ne lui enlève pas sa pertinence et il sera donc retenu.
3° Les références de l'EPFIF
Outre le terme du [Adresse 7] déjà retenu, l'EPFIF propose le terme CG5, non repris par le commissaire du gouvernement en appel :
23 juillet 2020 : [Adresse 8], 122m², 210 000 euros, 1 721 euros.
Ce bien est en copropriété, donc non comparable en consistance juridique, il n'y donc pas lieu de le retenir, même en le majorant de 5%comme proposé par l'EPFIF.
Les références retenues correspondent à une moyenne de:
2 063+2 032+2 520=6 615 euros/3=2 205 euros/m² en valeur occupée.
Il y a lieu également de tenir compte des éléments suivants :
'des facteurs de moins-value attachée aux biens, à savoir l'absence d'accès indépendant aux annexes.
'Des facteurs de plus-value :
' bon état d'entretien du bien
' très bonne situation géographique du bien, situé à proximité du tramway et à l'angle de la N1, dans un quartier dynamique, ce qui assure une bonne commercialité.
Les éléments de plus-value étant plus importants que l'élément de moins-value, il convient de retenir une valeur supérieure à la moyenne, soit la valeur de 2300 euros/m².
Le prix est fixé comme suit : 2 300 euros X 126,05 m²= 289'915 euros en valeur occupée.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
- Sur l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande de débouter l'EPFIF de sa demande d'infirmation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de confirmer le jugement qui a condamné l'EPFIF à verse la somme de 3 000 euros à M. [Z] sur ce fondement.
L'équité commande de débouter l'EPFIF et M. [Z] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
- Sur les dépens
Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance.
M.[Z] perdant le procès sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevables les conclusions des parties ;
Statuant dans les limites de l'appel ;
Infirme partiellement le jugement entrepris ;
Fixe à la somme de 289'915 euros en valeur occupée le prix d'acquisition du bien appartenant à M. [C] [Z] situé [Adresse 1] à [Localité 22], sur la parcelle cadastrée section Z n° [Cadastre 4] ;
Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Déboute l'EPFIF et M. [Z] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [Z] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT