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03/07/2024 | FRANCE | N°22/12167

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 03 juillet 2024, 22/12167


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 03 JUILLET 2024



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12167 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGBWK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2022 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème

chambre 3ème section - RG n° 21/05167





APPELANTES



Madame [Y] [H] [B]

née le [Date naissance 5] 1939 à [Loca

lité 13]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Madame [G] [B]

née le [Date naissance 7] 1965 à [Localité 15]

[Adresse 14]

[Localité 4]



Madame [X] [B]

née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 15]

...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 03 JUILLET 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12167 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGBWK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2022 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème

chambre 3ème section - RG n° 21/05167

APPELANTES

Madame [Y] [H] [B]

née le [Date naissance 5] 1939 à [Localité 13]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Madame [G] [B]

née le [Date naissance 7] 1965 à [Localité 15]

[Adresse 14]

[Localité 4]

Madame [X] [B]

née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 15]

[Adresse 10]

[Localité 11]

Représentées par Me Bruno REGNIER de la SCP CAROLINE REGNIER AUBERT - BRUNO REGNIER, AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

INTIMÉE

S.A. SOCIETE GENERALE

[Adresse 6]

[Localité 12]

N° SIRET : 552 120 222

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié es-qualité audit siège

Représentée par Me Caroline MEUNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : K0126

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Vincent BRAUD,président

M. Marc BAILLY, président

MME Laurence CHAINTRON, conseillère chargée du rapport

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Vincent BRAUD, président, et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

Mmes [X] et [G] [B] sont les deux filles de Mme [Y] [H] épouse [B]. Mmes [Y] et [G] [B] sont titulaires d'un compte indivis ouvert dans les livres de la Société Générale le 3 janvier 2019 à la suite du décès de leur époux et père.

Mme [G] [B] dispose d'une procuration sur le compte de Mme [Y] [B] depuis le 1er mars 2019.

Les 17 et 24 septembre 2019, deux versements ont été effectués au crédit du compte pour un montant global de 92 000 euros.

Au mois d'avril 2020, Mme [G] [B] a été sollicitée par un individu indiquant travailler au sein de la Banque ING aux fins de réalisation d'opérations de trading.

Entre le 29 avril 2020 et le 28 mai 2020, elle a procédé à 9 virements pour un montant global de 25 590 euros au crédit d'un compte ouvert au Portugal auprès de la banque Montepio. Les quatre derniers virements d'un montant total de 12 593 euros ont été rejetés le 8 juin 2020.

les 17 et 18 juin 2020, Mme [G] [B] a souhaité procéder à 2 virements d'un montant de 4 000 euros chacun à destination d'un compte ouvert au Portugal auprès de la banque BPI, lesquels ont été annulés par la Société Générale qui a également refusé d'exécuter un virement le 23 juin 2020 en raison des risques de fraude identifiés.

Mme [G] [B] a tenté en vain de récupérer le montant des sommes qu'elle avait versées, s'élevant à 16 997 euros et a déposé plainte le 2 juillet 2020 auprès de la gendarmerie de [Localité 16] pour escroquerie.

Par lettre adressée le 9 juillet 2020, Mme [X] [B] a mis en demeure la Société Générale de lui rembourser la somme de 16 997 euros correspondant aux cinq virements litigieux non remboursés, estimant avoir été victime d'une escroquerie.

Par lettre adressée le 15 septembre 2020, les consorts [B] ont adressé une nouvelle mise en demeure à la Société Générale.

Par exploit d'huissier du 8 avril 2021, Mmes [B] ont fait assigner la SA Société Générale devant le tribunal judiciaire de Paris en responsabilité et en demande de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 19 mai 2022 le tribunal judiciaire de Paris a :

- débouté Mme [Y] [H] épouse [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] de l'ensemble de leurs demandes formées contre la société anonyme Société Générale ;

- condamné Mme [Y] [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] à payer à la société anonyme Société Générale la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [Y] [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] aux dépens.

Par déclaration remise au greffe de la cour le 29 juin 2022, Mme [Y] [H] épouse [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] ont interjeté appel de cette décision contre la SA Société Générale.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 septembre 2022, Mme [Y] [H] épouse [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] demandent à la cour de :

- les recevoir en leurs conclusions,

Y faisant droit,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Mme [Y] [H] épouse [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] de l'ensemble de leurs demandes formées contre la société anonyme Société Générale ;

- condamné Mme [Y] [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] à payer à la société anonyme Société Générale la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [Y] [B], Mme [X] [B] et Mme [G] [B] aux dépens ;

Statuant à nouveau :

- condamner la Société Générale à leur payer la somme de 16 997 euros,

- condamner la Société Générale à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 décembre 2022, la SA Société Générale demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- débouter Mmes [B] de leurs demandes formées à son encontre,

- condamner Mmes [B] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mmes [B] aux entiers dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024 et l'affaire fixée à l'audience du 21 mai 2024.

MOTIFS

Sur la responsabilité de la Société Générale

Mmes [B] font valoir, au visa des articles L. 133-23 du code monétaire et financier, de l'article L. 561-6 alinéa 2 du même code et de l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil, que la Société Générale a manqué à son devoir de vigilance et de mise en garde à leur égard et que le principe de non-ingérence s'arrête là où commencent les anomalies apparentes qui peuvent être d'ordre matériel ou intellectuel. Elles critiquent le jugement déféré en ce qu'il a retenu qu'elles ne rapportent pas la preuve que le compte bancaire au débit duquel les virements ont été effectués est un compte indivis alors qu'elles versent aux débats la convention de compte indivis. Elles font sommation à la banque dans le corps, mais non dans le dispositif, de leurs écritures, de communiquer l'exemplaire de la convention signée par les parties.

Elles exposent que :

- le compte bancaire au débit duquel les virements litigieux ont été effectués est un compte indivis ouvert en vue d'y placer un héritage de sorte que la banque devait être particulièrement vigilante sur les mouvements de fonds et l'accord éventuel de tous les indivisaires,

- ce compte n'a que très peu fonctionné depuis son ouverture,

- les montants en cause étaient très importants,

- les différents virements ont été opérés sur une période extrêmement courte pour un montant de 16 997 euros au profit de la société ING NV,

- les montants eux-mêmes, comme le fait que les RIB en cause étaient situés hors de France, auraient dû attirer l'attention de la banque,

- elles n'ont pas tardé à informer la banque de la situation car le troisième RIB a été reçu le 23 juin 2020 et dès le 26 juin 2020, Mme [X] [B] a demandé la restitution du montant des virements effectués.

En réponse aux arguments de la banque, elles allèguent que la fraude existe et la banque l'a elle-même reconnu en leur indiquant que le compte BPI était 'blacklisté'. Elles ont déposé plainte le 2 juillet 2020 et ont tenté à plusieurs reprises de récupérer les fonds auprès de la Société Générale.

La SA Société Générale fait valoir, à titre principal, que les appelantes ne rapportent pas la preuve de la fraude alléguée en l'absence de démarches pour tenter de récupérer les fonds, la simple production d'une plainte sans justificatif des suites données n'étant pas suffisante.

A titre subsidiaire, elle allègue que sa responsabilité n'est pas engagée dès lors qu'elle a exécuté les virements conformément aux instructions données par Mme [G] [B], le compte était provisionné et les ordres de virement dépourvus de vice apparent.

Selon les articles L. 133-21 et suivants du code monétaire et financier, aucune contestation n'est possible dès lors que les virements ont bien été autorisés par Mme [B] et que la banque s'est conformée à ses instructions, ce qui n'est pas contesté. Elle n'avait pas à vérifier l'opportunité des virements ou la régularité des opérations sous-jacentes. Par ailleurs, la banque est tenue à un devoir de non-immixtion et elle n'avait pas à vérifier la cause ou l'objet des paiements qui avaient été ordonnés par Mme [B]. En outre, les virements ne présentaient aucune anomalie apparente, ils étaient réguliers et ne procédaient d'aucune fraude, de sorte qu'elle n'avait pas à s'interroger sur la question de savoir si les fonds étaient virés dans le cadre d'une opération d'investissement frauduleuse. En toute hypothèse, aucun indice ne pouvait lui permettre d'identifier que les opérations s'inscrivaient dans le cadre d'un investissement frauduleux. Enfin le montant des virements n'avait rien de suspect, alors que le compte n'avait été ouvert que quelques mois auparavant, il présentait une provision suffisante et avait déjà enregistré des opérations de paiement pour des montants similaires. Par ailleurs, la banque n'était tenue à aucun devoir de conseil, de mise en garde ou d'alerte en sa qualité de prestataire de service de paiement dès lors qu'elle n'est pas intervenue pour conseiller ou commercialiser les placements financiers litigieux. L'argument tiré de l'obligation de lutte contre le blanchiment est inopérant. Elle s'est montrée particulièrement vigilante en refusant d'augmenter le plafond des virements autorisés et d'honorer les demandes de virements des 17, 18 et 23 juin 2020 sur les RIB identifiés comme suspicieux. Aucun grief ne peut lui être reproché au titre de la demande de rappel de fonds qu'elle n'avait pas l'obligation de faire. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude et les virements ont été ratifiés par Mmes [Y] et [X] [B] qui n'ont pas engagé d'action à l'encontre de Mme [G] [B] et ont, au contraire, agi de concert dans le cadre de cette procédure. Il n'est pas démontré que l'accord de l'ensemble des titulaires ait été nécessaire pour effectuer les opérations contestées.

Enfin, le préjudice au demeurant non justifié, découle de la légèreté blâmable de Mme [G] [B] qui a manqué de vigilance et de prudence dans la conduite de l'opération.

Comme l'a relevé à juste titre le tribunal, l'obligation de vigilance imposée aux organismes financiers en application de l'article L. 561-6 du code monétaire et financier a pour seule finalité la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et la victime d'agissements frauduleux ne peut se prévaloir de l'inobservation de cette obligation pour réclamer des dommages et intérêts à l'organisme financier (Com., 28 avr. 2004, n° 02-15.054 ; 21 sept. 2022, n° 21-12.335).

La responsabilité contractuelle de droit commun résultant de l'article 1231-1 du code civil n'est pas applicable en présence d'un régime de responsabilité exclusif.

Or, dans un arrêt du 16 mars 2023 (C-351/21, Beobank), la Cour de justice de l'Union européenne a interprété en ces termes les article 58, 59 et 60 de la directive no 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de paiement dans le marché intérieur :

« 37[...] le régime de responsabilité des prestataires de services de paiement prévu à l'article 60, paragraphe 1, de la directive 2007/64 ainsi qu'aux articles 58 et 59 de cette directive a fait l'objet d'une harmonisation totale. Cela a pour conséquence que sont incompatibles avec ladite directive tant un régime de responsabilité parallèle au titre d'un même fait générateur qu'un régime de responsabilité concurrent qui permettrait à l'utilisateur de services de paiement d'engager cette responsabilité sur le fondement d'autres faits générateurs (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, C-337/20, CRCAM, [...] points 42 et 46).

« 38 En effet, le régime harmonisé de responsabilité pour les opérations non autorisées ou mal exécutées établi dans la directive 2007/64 ne saurait être concurrencé par un régime alternatif de responsabilité prévu dans le droit national reposant sur les mêmes faits et le même fondement qu'à condition de ne pas porter préjudice au régime ainsi harmonisé et de ne pas porter atteinte aux objectifs et à l'effet utile de cette directive (arrêt du 2 septembre 2021, C-337/20, CRCAM, [...] point 45). »

Il s'ensuit que, dès lors que la responsabilité d'un prestataire de services de paiement est recherchée en raison d'une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée, seul est applicable le régime de responsabilité défini aux articles L. 133-18 à L. 133-24 du code monétaire et financier, qui transposent les articles 58, 59 et 60, paragraphe premier, de la directive du 13 novembre 2007, à l'exclusion de tout autre régime de responsabilité résultant du droit national (Com., 27 mars 2024, no 22-21.200).

En l'espèce, il est constant que les virements litigieux ont été autorisés et correctement exécutés. Dès lors que la responsabilité de la Société Générale n'est pas recherchée en raison d'une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée, Mmes [B] peuvent l'engager sur le fondement d'un régime de responsabilité autre que celui qui est prévu par les articles L. 133-1 et suivants du code monétaire et financier, et notamment sur le fondement du régime de droit commun de la responsabilité contractuelle.

Aussi bien l'article L. 133-5 du code monétaire et financier dispose-t-il que la responsabilité prévue aux sections 2 à 9 du présent chapitre ne s'applique pas lorsque le prestataire de services de paiement est lié par d'autres obligations légales prévues par des législations nationales ou communautaires.

En application de l'article 1147 ancien, devenu 1231-1, du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Sauf disposition légale contraire, la banque est tenue à une obligation de non-ingérence dans les affaires de son client, quelle que soit la qualité de celui-ci, et n'a pas à procéder à de quelconques investigations sur l'origine et l'importance des fonds versés sur ses comptes ni même à l'interroger sur l'existence de mouvements de grande ampleur, dès lors que ces opérations ont une apparence de régularité et qu'aucun indice de falsification ne peut être décelé (Com., 25 sept. 2019, no 18-15.965, 18-16.421). Ainsi, le prestataire de services de paiement, tenu d'un devoir de non-immixtion dans les affaires de son client, n'a pas, en principe, à s'ingérer, à effectuer des recherches ou à réclamer des justifications des demandes de paiement régulièrement faites aux fins de s'assurer que les opérations sollicitées ne sont pas périlleuses pour le client ou des tiers.

S'il est exact que ce devoir de non-ingérence trouve une limite dans l'obligation de vigilance de l'établissement de crédit prestataire de services de paiement, c'est à la condition que l'opération recèle une anomalie apparente, matérielle ou intellectuelle, soit des documents qui lui sont fournis, soit de la nature elle-même de l'opération ou encore du fonctionnement du compte.

En l'espèce les appelantes soutiennent vainement que la banque aurait dû se montrer particulièrement vigilante dès lors que le compte bancaire au débit duquel les virements litigieux ont été effectués est un compte indivis, de sorte que ces opérations nécessitaient l'accord de tous les indivisaires.

En effet, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, Mmes [B] ne justifient pas que le compte n° [XXXXXXXXXX09] (compte de particulier) à partir duquel ont été effectués les virements litigieux était un compte indivis dans la mesure où la convention de compte indivis au nom de Mmes [Y] et [X] [B], co-titulaires, qu'elles produisent, au demeurant non signée, comporte un numéro différent, à savoir n° [XXXXXXXXXX08] (pièce des appelantes n° 22). Par ailleurs, si elles évoquent un manquement de la banque dans la vérification du consentement de l'ensemble des titulaires du compte aux opérations litigieuses, la convention communiquée ne stipule pas une telle règle de fonctionnement du compte.

Le compte débité est un compte joint intitulé 'Mme ou Mme', qui fonctionne en principe selon la règle de la représentation mutuelle et il leur appartient donc d'établir la nécessité pour la banque d'obtenir le consentement de tous les co-titulaires, ce qu'elles ne démontrent pas.

Au demeurant, il est constant que Mme [G] [B] disposait d'une procuration donnée par Mme [Y] [B] pour faire fonctionner 'sur sa seule signature' le compte n° [XXXXXXXXXX09] au débit duquel ont été effectués les virements litigieux si bien que les ordres de virements ont été régulièrement donnés par Mme [G] [B].

Mmes [B] ne remettent pas en cause l'authenticité des virements effectués, mais entendent seulement obtenir réparation des préjudices qu'elles ont subis en raison de l'escroquerie dont elles soutiennent avoir été victimes.

Il ressort des relevés de compte versés aux débats par les appelantes pour la période concernée que les virements litigieux ne correspondent pas aux modalités de fonctionnement habituel du compte.

Toutefois, le solde du compte est demeuré créditeur à l'issue de chaque virement ordonné par Mme [G] [B]. Ces virements n'ont donc pas relevé d'une gestion patrimoniale incompatible avec les divers avoirs dont disposaient alors Mmes [B].

Le pays de destination, à savoir le Portugal, membre de l'Union européenne, n'était pas placé dans une zone à risque particulier.

Aucune anomalie apparente n'est donc caractérisée.

De surcroît, Mme [G] [B] est entrée en contact avec une personne inconnue qui s'est présentée comme travaillant pour la banque ING, lui a fait miroiter un revenu élevé prétendument garanti et fait signer une convention d'ouverture de compte à terme pour des opérations de 'Trading haute fréquence' (pièce n° 6), de sorte qu'elle s'est montrée particulièrement imprudente.

Il y a lieu de rappeler également que la banque n'est intervenue qu'en qualité de prestataire de services de paiement et gestionnaire de compte, de sorte qu'elle n'était tenue à aucune obligation de mise en garde ou de conseil et qu'en tout état de cause, il n'est pas démontré par Mmes [B] que la banque ait été informée de la nature des investissements effectués.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a considéré qu'en l'absence de faute de la Société Générale, sa responsabilité ne saurait être retenue et a débouté en conséquence Mmes [B] de l'intégralité de leurs demandes indemnitaires, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur l'existence ou non d'une escroquerie au préjudice des appelantes laquelle est contestée par la Société Générale.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les appelantes seront donc condamnées aux dépens.

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la Société Générale les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager dans la présente instance pour assurer la défense de ses intérêts. Elle sera par conséquent déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 19 mai 2022 ;

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [X] [B], Mme [G] [B] et Mme [Y] [H] épouse [B] aux entiers dépens d'appel ;

REJETTE toute autre demande.

* * * * *

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 22/12167
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;22.12167 ?
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