REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 03 JUILLET 2024
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12220 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGB4F
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Juin 2022 - tribunal de commerce de Paris - 6ème chambre - RG n° 2021027922
APPELANTE
S.A.R.L. ENTREPRISE GENERALE DE CLOTURES
[Adresse 7]
[Localité 3]
N° SIRET : 578 201 212
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Pierre TERRYN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0842, avocat plaidant
INTIMÉE
SCOP BANQUE POPULAIRE RIVES DE [Localité 6]
[Adresse 4]
[Localité 2]
N° SIRET : 552 002 313
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Vincent BRAUD, président
M. Marc BAILLY, président chargé du rapport
MME Laurence CHAINTRON, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Vincent BRAUD, président, et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
Par un bail commercial en date du 15 février 2019, la société à responsabilité limitée Entreprise générale de clôtures (ci-après « EGC ») a donné à bail à la société par actions simplifiée unipersonnelle MJ Staff (ci-après « MJS ») différents locaux commerciaux situés [Adresse 1], à [Localité 5]. Le loyer convenu était de 100 000 euros H.T. par an, réduit à 75 000 euros H.T. par an pour les trois premières années.
Le bail prévoyait qu'une caution bancaire d'un montant de 75 000 euros devait être remise dès la signature du bail, en garantie de la bonne exécution des obligations du preneur. Cette remise a bien eu lieu, la banque ayant délivré la caution étant la société anonyme Banque populaire rives de [Localité 6] (ci-après « la BANQUE POPULAIRE »).
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 16 septembre 2019, EGC a réclamé à MJS le règlement d'un loyer exigible au titre du mois de septembre 2019. Faute de voir ce loyer réglé, EGC a, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 25 septembre 2019, informé la BANQUE POPULAIRE de l'inexécution par MJS de ses obligations et mis en jeu la garantie bancaire délivrée par elle.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 4 octobre 2019, EGC a réclamé à MJS le règlement des loyers exigibles au titre des mois de septembre et d'octobre 2019. A la suite de cette mise en demeure, MJS a réglé son loyer de septembre 2019. Faute de voir le loyer exigible au titre du mois d'octobre 2019 réglé, EGC a, par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 25 septembre 2019 et réceptionné par la BANQUE POPULAIRE le 14 octobre 2019, informé la BANQUE POPULAIRE de l'inexécution par MJS de ses obligations et mis en jeu la garantie bancaire délivrée par elle.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 5 novembre 2019, EGC a réclamé à MJS le règlement des loyers exigibles au titre des mois d'octobre et de novembre 2019 et de la taxe foncière 2019. Faute de voir ces derniers réglés, EGC a, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 11 novembre 2019, informé la BANQUE POPULAIRE de l'inexécution par MJS de ses obligations et mis en jeu la garantie bancaire délivrée par elle.
Par acte extrajudiciaire en date du 2 décembre 2019, EGC a fait délivrer à MJS un commandement de payer la somme de 28 750 euros, correspondant au règlement des loyers exigibles au titre des mois d'octobre, de novembre et de décembre 2019 et de la taxe foncière 2019.
Par jugement en date du 23 janvier 2020, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de MJS avec désignation de la S.C.P. BTSG comme liquidateur, en la personne de Me [S] [I]. Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 5 février 2020, ce dernier a indiqué résilier le bail commercial consenti à MJS et solliciter la désignation d'un commissaire-priseur chargé de procéder à l'inventaire des actifs se trouvant dans les locaux loués et à leur réalisation.
EGC a obtenu le 3 juin 2020, après réalisation des actifs du locataire situés dans les locaux loués, la remise des clefs et la disponibilité des lieux.
EGC a procédé le 10 février 2020 à la déclaration de sa créance de 49 322,16 euros et demandé le même jour le règlement des impayés à la BANQUE POPULAIRE.
ECG a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Paris le 3 juillet 2020 et ce dernier, par ordonnance en date du 29 octobre 2020 a condamné la BANQUE POPULAIRE à payer, à titre de provision en exécution du cautionnement la somme de 22 821 euros représentant les loyers des mois d'octobre et novembre 2019 et février 2020 outre 4 071 euros de taxe foncière.
Par exploit d'huissier en date du 2 juin 2021, EGC a assigné la BANQUE POPULAIRE devant le tribunal de commerce de Paris afin de la voir notamment condamner au paiement d'une somme de 38 500 euros avec intérêt au taux légal à compter du 30 juillet 2020.
Par un jugement contradictoire du 16 juin 2022, le tribunal de commerce de Paris a :
-Débouté EGC de ses demandes principales et subsidiaires de condamnation de la BANQUE POPULAIRE à lui payer la somme de 38 500 euros avec intérêts ;
-Condamné la BANQUE POPULAIRE à payer à EGC la somme de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement ;
-Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
-Dit n'y avoir lieu à l'article 700 du code de procédure civile ;
-Dit que l'exécution provisoire est de droit ;
Par déclaration remise au greffe de la cour le 29 juin 2022, EGC a interjeté appel de cette décision contre la BANQUE POPULAIRE.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 septembre 2022, EGC demande à la cour, au visa de l'engagement de caution en date du 6 février 2019 et des articles 1104 et 1219 du code civil, de :
Infirmant le jugement du tribunal de commerce de Paris du 16 juin 2022 et statuant à nouveau,
-Dire et juger que la BANQUE POPULAIRE, en qualité de caution de MJS, est redevable des loyers impayés par cette dernière pour la période d'octobre 2019 à juin 2020, outre la taxe foncière, savoir au total 60 321 euros.
-S'entendre en conséquence condamner, après déduction de la somme de 22 821 euros payée en vertu de l'ordonnance de référé du 29 octobre 2020, la BANQUE POPULAIRE à payer à EGC la somme de 38 500 euros avec intérêt au taux légal à compter du 30 juillet 2020.
-Subsidiairement, par application des dispositions de l'article 1219 du code civil, s'entendre condamner la BANQUE POPULAIRE à payer à EGC la somme de 38 500 euros avec intérêt au taux légal à compter du 30 juillet 2020.
-Plus subsidiairement encore, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la BANQUE POPULAIRE, n'a pas exécuté de bonne foi son engagement de caution conformément aux dispositions de l'article 1104 du code civil, mais, élevant la condamnation en réparation du préjudice en résultant, s'entendre condamner la BANQUE POPULAIRE à payer à EGC la somme de 38 500 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement à intervenir.
-Condamner en toute hypothèse la BANQUE POPULAIRE à payer à EGC la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en faisant valoir :
- que la BANQUE POPULAIRE a été régulièrement informée de la défaillance de MJS par courriers recommandés avec accusés de réception successifs en date des 25 septembre 2019, « octobre 2019 », 11 novembre 2019 et 10 février 2020. La BANQUE POPULAIRE a, en outre, été informée par le liquidateur de la liquidation judiciaire de MJS, qui avait ses comptes bancaires ouverts auprès de la BANQUE POPULAIRE. Ainsi, EGC a rempli l'obligation prévu à l'acte de cautionnement, prévoyant au paragraphe « délais de mise en jeu » que « le bailleur dispose d'un délai d'un mois pour mettre en jeu la caution en cas d'échéance impayée ». D'une part, cette prescription consistait simplement à informer la BANQUE POPULAIRE de la défaillance de MJS, ce qu'EGC a fait à quatre reprises. D'autre part la mise en jeu de la caution « en cas d'échéance impayée » n'imposait pas une réitération à chaque impayé, dès lors que la notion d'échéance impayée est employée au singulier et que le loyer était payable mensuellement. Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la BANQUE POPULAIRE ne peut pas sérieusement soutenir ne pas avoir été informée de la défaillance du débiteur principal, dès le premier impayé, et de ne pas avoir été en mesure d'exercer tout éventuel recours possible contre ce dernier, d'autant qu'elle a aussi été informée du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société MJS. L'acte de cautionnement prévoit, par ailleurs, que l'engagement pourra être mis en jeu, en totalité ou par fraction, par courrier recommandé avec accusé de réception, dès qu'une sommation de payer adressée au preneur est restée sans effet. Cet ensemble de raisons interdit à la BANQUE POPULAIRE de refuser de prendre en charge les impayés qui n'auraient pas fait l'objet d'une information mensuelle par EGC. Cette dernière fait valoir que c'est dès lors à bon droit qu'elle fait valoir une créance de38 500 euros à l'encontre de MJS, opposable à la BANQUE POPULAIRE en sa qualité de caution,
- que c'est à tort que la BANQUE POPULAIRE invoque la disposition de l'acte de caution prévoyant que le présent engagement cessera de plein droit un mois après la date de résiliation ou de résolution du bail pour quelque cause que ce soit, pour soutenir qu'au vu de la lettre du liquidateur du 5 février 2020, son engagement de caution ne pouvait couvrir les loyers impayés d'avril, mai et juin 2020. Il ressort dudit courrier que la résiliation du bail était à effet de la date de remise des clefs, l'encombrement des locaux nécessitant une libération des lieux par le biais d'une remise des clefs différée. EGC n'ayant pu retrouver la jouissance de son bien préalablement à cette remise différée, les loyers impayés sont dus jusqu'en juin 2020, en vertu de l'acte de cautionnement,
- que la BANQUE POPULAIRE n'a pas donné suite à aucun des courriers qui lui ont été adressés et n'a pas payé quoi que ce soit au titre de son engagement de caution. La BANQUE POPULAIRE ne conteste pas pour autant avoir été régulièrement informée du défaut de paiement des loyers du débiteur principal pour les mois de septembre, « octobre » novembre 2019, et février 2020. Elle ne peut, non plus, contester avoir été informée du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de MJS en date du 20 janvier 2020. Ce faisant elle a méconnu son obligation essentielle, en violation de l'article 1219 du code civil, disposant qu'une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. Le tribunal a retenu de manière erronée que le principe de l'exception d'inexécution légitime ne concerne que les contrats synallagmatiques, alors que le cautionnement est un contrat unilatéral. Or, les dispositions de l'article 1219 du code civil figurent au sein du chapitre intitulé « les effets du contrat » et l'article 1100-1 du même code dispose que les actes juridiques conventionnels ou unilatéraux obéissent, en tant que raison, pour leur validité et leurs effets, aux règles qui gouvernent les contrats. L'article 1219 du code civil trouve ainsi à s'appliquer au cautionnement, qui est un acte unilatéral,
- qu'en vertu de l'article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. En l'espèce, la BANQUE POPULAIRE n'a répondu à aucun courrier sollicitant l'exécution par elle de ses obligations de caution, elle n'a fait état d'aucun empêchement justifiant une inexécution totale ou partielle de ses obligations et a tenté de limiter son obligation de paiement en faisant état d'une insuffisance d'information lorsqu'une procédure en référé a été intentée par EGC. Ainsi, la BANQUE POPULAIRE a manqué à son obligation de bonne foi dans l'exécution de ses obligations, alors qu'il lui incombait, à tout le moins, de répondre aux courriers qui lui étaient adressés et de payer en lieu et place du débiteur principal, sans attendre la procédure en référé intentée par EGC,
- que, du fait du manquement de la BANQUE POPULAIRE à la bonne foi dans l'exécution de son obligation de caution, elle a commis une faute dont le préjudice est égal au montant des loyers impayés n'ayant pas fait l'objet d'une information au mois le mois. Si le tribunal a fait droit à sa demande en appréciant son préjudice à la somme de 5 000 euros, une telle appréciation est insuffisante au cas d'espèce en ce que les manquements de la BANQUE POPULAIRE ont convaincu EGC de cesser de l'informer au mois le mois de la poursuite de la défaillance de MJS, ce qui l'a privée du paiement d'une somme de 38 500 euros au titre des impayés,
Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 novembre 2022, la BANQUE POPULAIRE demande à la cour de :
-Juger recevable et bien fondée la BANQUE POPULAIRE en son appel incident et, y faisant droit :
-Infirmer le jugement dont appel en ce que celui-ci a condamné la BANQUE POPULAIRE à payer à EGC la somme de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement.
-Statuant à nouveau, débouter EGC en toutes ses demandes, fins et conclusions.
-La condamner à rembourser à la BANQUE POPULAIRE la somme de 5 000 euros réglée en exécution du jugement infirmé.
-A titre subsidiaire, débouter EGC en son appel.
-En tout état de cause, débouter EGC en ses demandes formulées à l'encontre de la BANQUE POPULAIRE sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens, et condamner EGC à payer à la BANQUE POPULAIRE, au titre de la procédure de première instance, la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et sur le même fondement une somme identique au titre de la procédure d'appel.
La banque populaire fait valoir :
- que l'acte de cautionnement précise expressément que le bailleur (EGC), dispose d'un délai d'un mois pour mettre en jeu la caution, en cas d'échéance impayée, dès lors qu'une sommation de payer adressée au preneur (MJS), reste sans effet. EGC, bénéficiaire du cautionnement, est tenue de faire diligence pour informer le garant en cas d'échéance impayée, afin de permettre à BANQUE POPULAIRE (caution), de prendre toutes dispositions utiles à l'égard de son client (MJS). En l'espèce, EGC n'a pas respecté les conditions de mise en 'uvre de la garantie bancaire pour les mois de décembre 2019, janvier 2020, et pour les loyers postérieurs au mois de février 2020, puisqu'aucune réclamation n'a été adressée dans le délai d'un mois à la BANQUE POPULAIRE. EGC a uniquement respecté les conditions de mise en 'uvre de la garantie bancaire pour les mois d'octobre 2019, de novembre 2019, de février 2020, ainsi que pour la taxe foncière au titre de l'année 2019, déclarée au passif de MJS pour un montant de 4 071 euros. EGC est donc uniquement recevable et fondée en ses demandes à l'égard de la BANQUE POPULAIRE à concurrence de la somme de 22 821 euros, qui lui a d'ailleurs été réglée par cette dernière,
- qu'en vertu de l'article 1192 du code civil, les clauses claires et précises d'un contrat ne peuvent être interprétées à peine de dénaturation. En vertu de l'article 1190 du code civil, le contrat s'interprète contre le créancier et en faveur du débiteur. En l'espèce, EGC tente de dénaturer les clauses de l'acte de cautionnement en soutenant une argumentation selon laquelle la caution devrait régler au bénéficiaire de la garantie la totalité du montant de l'engagement alors même que le débiteur principal ne serait débiteur que d'une fraction. Les loyers impayés sont, par ailleurs, susceptibles de régularisation par MJS, comme cela fut le cas pour le mois de septembre 2019. Quand bien même EGC mettait en jeu la garantie de la BANQUE POPULAIRE, il ne pourrait que s'agir d'une demande de paiement au titre du ou des loyers impayés et pas de la somme de 75 000 euros, alors que le montant impayé par le locataire ne s'élevait qu'à la somme de 6 250 euros H.T., soit 7 500 euros T.T.C., le paiement de la totalité du montant de l'engagement pouvant aboutir à un enrichissement sans cause d'EGC. Par ailleurs, l'article 2290 du Code civil rappelle que le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses,
- que la société EGC prétend de manière erronée que le bail n'aurait pas été résilié par le liquidateur judiciaire le 5 février 2020, mais à l'occasion de la remise des clefs. Le courrier du liquidateur est cependant clair et fait état de la résiliation du bail à compter du 5 février 2020. Ainsi, il convient de considérer que le cautionnement a pris fin un mois plus tard, soit le 5 mars 2020. En tout état de cause, EGC n'a pas appelé la garantie de la BANQUE POPULAIRE dans le délai d'un mois pour les loyers exigibles à compter du 1er mars 2020,
- que le principe de l'exception d'inexécution légitime ne trouve à s'appliquer que dans le cadre de contrats synallagmatiques. Il est donc inapplicable au cautionnement, qui est un contrat unilatéral. Au surplus, si EGC soutient qu'elle aurait pu légitimement refuser d'exécuter son obligation tendant à appeler la caution de la BANQUE POPULAIRE dans la mesure où les mises en demeure adressées à la BANQUE POPULAIRE les 14 octobre 2019 et 11 novembre 2019 sont demeurées infructueuses, cela relèverait d'une tentative « d'ajout » au contrat de cautionnement d'une clause aux termes de laquelle la BANQUE POPULAIRE devrait régler les sommes réclamées dans un délai de quarante-cinq jours et, qu'à défaut, le bénéficiaire du cautionnement serait dispensé de toute réclamation à l'égard de la BANQUE POPULAIRE, laquelle ne serait donc plus informée de la défaillance du locataire et/ou de la régularisation totale ou partielle de la situation.,
- que dès les premières mises en demeure d'EGC adressées à MJS, elle s'est immédiatement rapprochée de cette dernière. Elle a ainsi pu apprendre, dès le mois d'octobre 2019, que le loyer du mois de septembre 2019 avait été réglé. Elle n'a reçu aucune réclamation après le 11 novembre 2019 de la société EGC et a ainsi légitimement considéré que les loyers pour les mois d'octobre et novembre 2019 avaient également été réglés par MJS,
- qu'elle n'a pas exécuté de mauvaise foi ses obligations. Il appartenait, au contraire, à EGC de respecter les conditions convenues et d'informer la BANQUE POPULAIRE de la défaillance de MJS. En l'espèce, EGC n'a formulé aucune réclamation à l'égard de BANQUE POPULAIRE pour les loyers exigibles à compter du 1er décembre 2019 et demeurés impayés par MJS. La BANQUE POPULAIRE fait ainsi valoir que c'est à tort qu'elle a été condamnée par le tribunal à payer à EGC la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024.
MOTIFS
Il résulte de la lecture du bail que, pendant les mois d'exécution litigieuse, le loyer était réduit à la somme de 75 000 HT euros annuels payable en douze mensualités exigibles d'avance, le premier jour de chaque mois.
Le cautionnement bancaire en date du 6 février 2019 comporte notamment les stipulations suivantes :
'1/ délai de mise en jeu
Le bailleur dispose d'un délai d'un mois pour mettre en jeu la caution en cas d'échéance impayée.
3/ Modalité de mise en jeu
Notre engagement pourra être mis en jeu, en totalité ou par fraction, par courrier recommandé avec accusé de réception, dès lors qu'une sommation de payer adressée au Preneur sera restée sans effet.'
La société ECG réclame le paiement :
- de 9 mois de loyers d'octobre 2019 à juin 2020 (6 250 HT x 9)= 56250 euros,
- outre une somme prorata temporis de : 4 071 euros,
- soit un total de 60321 euros,
- diminué de la somme réglée en exécution
de l'ordonnance de référé : 22821 euros,
- soit un total restant dû de : 38 500 euros.
La banque admet qu'elle est redevable des loyers d'octobre et novembre 2019 ainsi que du loyer du mois de février 2020 et de la taxe foncière au titre de l'année 2019, soit le quantum de sa condamnation par l'ordonnance de référé.
S'agissant des loyers des mois de décembre 2019 et janvier 2020, il ne peut qu'être constaté avec le tribunal que la société ECG ne s'est pas conformée aux stipulations claires de l'acte de cautionnement rapportées ci-dessus puisqu'elle ne justifie pas avoir, à la fois, vainement sommé sa débitrice de payer et avoir sollicité l'exécution du cautionnement dans le mois prévu au titre de ces échéances puisqu'aucune mise en demeure de la débitrice ne vise l'impayé du mois de décembre 2019 et qu'aucune demande en paiement n'a été faite à la caution pour le mois de janvier 2020.
L'acte de cautionnement stipule également que 'le présent engagement cessera de plein droit un mois après la date de résiliation ou de résolution du bail pour quelque cause que ce soit'.
Or, le bail a été résilié par le liquidateur judiciaire de la société MJ Staff par courrier du 5 février 2020, de sorte qu'aucune paiement trouvant sa cause dans un événement postérieur ne saurait être exigé de la caution qui ne s'est pas engagée à régler des indemnités d'occupation ou toute autre somme due postérieurement à cette résiliation du bail.
En conséquence, la société ECG doit être déboutée de ses demandes à ce titre en exécution du cautionnement.
Les parties ne déterminent pas avec précision la date à laquelle le loyer impayé du mois de septembre 2019 a été réglé mais il résulte d'une lettre de la société ECG, faussement datée du 25 septembre 2019 et en réalité du 25 octobre 2019 que ledit règlement était intervenu à cette date puisque, contrairement à la sommation précédente du 4 octobre par laquelle le paiement des loyers de septembre et d'octobre était réclamé, seul ce dernier l'était encore dans la deuxième lettre.
Outre que le cautionnement est un contrat unilatéral, le silence de la banque et le défaut de paiement rapide des sommes dues à la société ECG ne constituaient pas pour la société ECG un motif légitime pour se dispenser de ses obligations de sommation de la débitrice et d'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception à la caution dans le délai d'un mois compte tenu des stipulations claires de l'acte de cautionnement.
S'agissant de l'exécution de bonne foi par la banque de ses obligations de caution, il ne peut qu'être constaté qu'alors qu'elle reconnaît avoir été débitrice envers la société créancière des loyers du mois d'octobre et novembre 2019 (ainsi que de la taxe foncière) qui lui ont été réclamés les 25 octobre et 5 novembre 2019, du loyer du mois de février 2020 qui lui a été réclamé le 5 février 2020, elle n'a effectué aucun paiement ni ne justifie avoir répondu d'aucune manière à la société ECG qui lui a successivement adressé elle-même trois demandes puis deux nouvelles par le biais de son conseil en sollicitant sa réaction, se contentant de défendre à l'assignation en référé du mois de juillet 2020 jusqu'à l'ordonnance du 29 octobre suivant.
Si le défaut de paiement d'une somme d'argent est, en principe, réparé à suffisance par l'allocation d'intérêts légaux de retard comme sollicité également par la société ECG à compter de la mise en demeure du 30 juillet 2020, c'est à juste titre, en l'espèce, que le tribunal a alloué les dommages-intérêts auxquels la Banque Populaire a été condamnée compte tenu du préjudice distinct que constitue pour une société cautionnée par une banque le complet silence gardé par cette dernière quant à l'exécution des obligations dont elle se reconnait pourtant redevable.
En conséquence de ce qui précède, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Il y a lieu de condamner la société Banque Populaire Rives-de [Localité 6], qui succombe en son appel incident, aux dépens ainsi qu'à payer à la société Entreprise Générale de Clôtures la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Banque Populaire Rives-de [Localité 6] à payer à la société Entreprise Générale de Clôtures la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Banque Populaire Rives-de [Localité 6] aux dépens d'appel.
* * * * *
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT