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09/08/2024 | FRANCE | N°24/00441

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 12, 09 août 2024, 24/00441


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 12





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT





ORDONNANCE DU 09 AOUT 2024



(n° 441 , 5 pages)







N° du répertoire général : N° RG 24/00441 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJZ3Q



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Juillet 2024 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/02387



L'audien

ce a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 08 Août 2024





COMPOSITION



Nathalie RECOULES, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du premier président de...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 09 AOUT 2024

(n° 441 , 5 pages)

N° du répertoire général : N° RG 24/00441 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJZ3Q

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Juillet 2024 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/02387

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 08 Août 2024

COMPOSITION

Nathalie RECOULES, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du premier président de la cour d'appel de Paris,

assisté de Damien GOVINDARETTY, greffier lors des débats et de la mise à disposition de la décision

APPELANT

Monsieur [R] [S] [B] (Personne faisant l'objet de soins)

néle 01 Janvier 2024

demeurant SDC

Actuellement hospitalisé au Ghu [Localité 2] Psychiatrie et Neurosciences site [3]

comparant, assisté de Me Karim ANWAR, avocat commis d'office au barreau de Paris, et de Mme [D], interprète en langue Arabe Saoudien

INTIMÉ

M. LE DIRECTEUR DU GHU [Localité 2] PSYCHIATRIE ET NEUROSCIENCES

Site [3], demeurant [Adresse 1]

non comparant, non représenté,

MINISTÈRE PUBLIC

Représenté par Mme PERRIN, avocate générale,

Comparante,

Faits et procédure

Il ressort du certificat médical initial d'admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent (article L3212-1-Il-2 CSP) établi par le 23 juillet 2024 à 17h27 que M. [R] [S] [B] se présente lors de son examen comme « méfiant, décrivant des hallucinations acoustico verbales. Sourires immotivés, mauvais contact visuel. Peu d'étayage sur son parcours, difficultés d'échanges et de nombreux barrages et fading. Anosognosie des troubles, nécessité d'une hospitalisation pour évaluation et mise en route d'un traitement psychotrope. Ces troubles rendent impossible le consentement du patient. Son état représente un péril imminent pour sa santé. En l'impossibilité d'obtenir une demande de tiers, il impose des soins psychiatriques immédiats en application de l'article L3212-1-II-2 du Code de la sante publique. »

Au vu de ce certificat, le directeur de l'établissement a pris une décision d'admission en soins psychiatriques le 22 juillet 2024.

Le certificat médical de 24 heures relève que le patient est « originaire du Soudan, arrivé en France depuis quelques jours dans un contexte de voyage pathologique. On note dans ses antécédents la notion d'une probable hospitalisation en psychiatrie sans plus d'informations sur son parcours de soins.

A l'entretien ce jour, réalisé en arabe soudanais, on retrouve un contact méfiant et étrange, un discours pauvre et provoqué avec des réponses laconiques, un vécu délirant de persécution associée à une activité hallucinatoire, une désorganisation psychique avec des rires immotivés, fading et barrage, une thymie basse avec des idées suicidaires passives sans velléités de passage à l'acte, des troubles du sommeil.

Altération manifeste du jugement ne permettant pas un consentement durable aux soins, nécessité de poursuivre les soins psychiatriques sous contrainte en hospitalisation complète et continue pour exploration diagnostique, mise en place d'un traitement adapté et une surveillance continue.

Le certificat médical de 72 heures constate les mêmes troubles que notés dans le précédent certificat et ajoute « par ailleurs une discordance idéo-affective avec des rires immotivés et une absence totale de conscience du caractère pathologique des troubles. Devant la non-adhésion aux soins et l'anosognosie des troubles, il est nécessaire de maintenir les soins psychiatriques sous contrainte en hospitalisation complète et continue pour adaptation thérapeutique et surveillance médicale optimale. »

Au vu de ces éléments, le directeur de l'établissement a, par décision du 25 juillet 2024, maintenu l'admission en soins psychiatriques.

Par requête du 25 juillet 2024, le directeur d'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris pour que la poursuite de la mesure soit ordonnée.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris, par ordonnance en date du 31 juillet 2024, au vu des certificats médicaux établis et de l'avis motivé rendu par le psychiatre de l'établissement en date 29 juillet 2024 faisant état d'un « entretien ce jour réalisé en arabe soudanais retrouve un patient de contact étrange avec une présentation négligée, le discours est désorganisé avec des néologismes et paralogismes, des barrages et un fading, il verbalise des idées délirantes de thématiques multiples, notamment de persécution, avec adhésion totale et une forte participation affective, il présente par ailleurs des attitudes d'écoute, des bizarreries du comportement et une discordance idéo-affective avec des rires immotivés. Le patient est dans le déni total des troubles avec une altération manifeste du jugement et une opposition active aux soins, il est donc nécessaire de maintenir les soins psychiatriques sous contrainte en hospitalisation complète et continue pour adaptation thérapeutique avec une surveillance continue » a rejeté les irrégularités soulevées, accueilli la requête et ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète sans consentement.

Le conseil de M. [R] [S] [B] a interjeté appel de l'ordonnance aux termes de ses écritures remises au greffe le 31 juillet 2024.

A l'audience de ce jour, M. [R] [S] [B] a été entendu en ses observations.

Son conseil a développé les moyens développés au soutien de sa déclaration d'appel et soulève in limine l'irrégularité de la procédure motifs pris :

de l'absence de mention de l'identité du patient sur les certificats médicaux et les décisions d'admission et de maintient en soin psychiatriques sans consentement ;

du défaut de présence d'un interprète  ;

de l'absence de notification des décisions d'admission et de maintien ;

et sollicite en conséquence, à titre principal, l'annulation de l'ordonnance dont appel et la main-levée de la mesure d'hospitalisation complète et, à titre subsidiaire, l'annulation de la mesure de contention.

SUR CE,

L'office du juge judiciaire implique un contrôle relatif à la fois à la régularité de la décision administrative d'admission en soins psychiatriques sans consentement et au bien-fondé de la mesure, en se fondant sur des certificats médicaux.

Il résulte de l'article L. 3216-1 du code de la santé publique que l'irrégularité affectant une décision administrative de soins psychiatriques sans consentement n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en fait l'objet. Il appartient donc au juge de recherche, d'abord, si l'irrégularité affectant la procédure est établie, puis, dans un second temps, si de cette irrégularité résulte une atteinte aux droits de l'intéressé.

Sur le moyen pris de de l'absence de mention de l'identité du patient :

Il ressort des pièces de la procédure que,jusqu'à sa comparution devant le juge des libertés et de la détention, l'appelant n'a volontairement fourni aucune information ni document permettant de l'identifier de sorte que la même mention portée, sur le premier certificat et ceux des 24 heures et des 72 heures, ainsi que sur la décision d'admission en date du 22 juillet 2024 et la décision de maintien en date du 25 juillet 2024, de M. [Z] Deuxmjllevingtquantreurgun a permis, contrairement à ce qui est soutenu, de l'identifier plus certainement que la seule mention de « X ».

Au demeurant, M. [Z] Deuxmjllevingtquantreurgun se disant [R] [S] [B] ne conteste pas qu'il s'est bien agi de lui tout au long de cette procédure de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a rejeté le moyen soulevé par motifs pertinents auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte et l'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sur le moyen pris du défaut de présence d'un interprète lors de la notification des décisions d'admission et de maintien

Le conseil de l'appelant soutient que M.[Z] Deuxmjllevingtquantreurgun se disant [R] [S] [B] n'a été assisté d'aucun interprète lors de la notification des décisions d'admission et de maintien en hospitalisation sous contrainte, que ses droits ne lui ont pas été traduits, que lorsqu'il a été assisté d'un interprète lors de l'établissement des certificats des 24 heures et des 72 heures et devant le premier juge il a pu donner son identité et s'exprimer de sorte que l'absence d'interprète lors des certaines phases de la procédure lui a nécessairement causé grief.

C'est par motifs pertinents auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte que le premier juge a relevé que le certificat des 24 heures et 72 heures mentionne que le patient a été informé de manière adaptée à son état de la décision et qu'il a été en mesure de faire valoir ses observations dans une langue qu'il comprend.

Contrairement à ce que soutient l'appelant le défaut de notification des décisions résulte de ce qu'il a refusé de signer les décisions d'admission en soins psychiatriques et de maintien de l'hospitalisation .

Au demeurant, aucun grief n'est caractérisé par l'appelant de sorte que l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a rejeté le moyen soulevé de ce chef.

Sur le moyen pris de l'absence de notification des décisions d'admission et de maintien ;

L'article L. 3211-3 du code de la santé publique dispose notamment que, « Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne hospitalisée doit être respectée et sa réinsertion recherchée.

Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L.3212-4, L.3212-7, L.3213-1 et L.3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L.3211-12-5, L.3212-4, L.3213-1 et L.3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état. »

Comme vu précédemment, les notifications ont été opérées et le patient a refusé de signer, de sorte que ce moyen sera rejeté.

Sur le fond

Aucun moyen n'est soutenu au fond par le conseil de l'appelant.

En toute hypothèse, le certificat médical de situation parvenu le 8 août 2024 fait état des éléments suivants « le contact reste étrange avec des rires immotivés, une présentation négligé, le discours est peu cohérent avec fading et barrages, mettant en avant un syndrome délirant et thématique multiples notamment de persécution et d'illusions de sosies, avec une adhésion totale. Il décrit, par ailleurs, des hallucinations acoustico-verbal avec une réticence à en livrer le contenu[...]. Devant l'absence totale de conscience du caractère pathologique des troubles et l'opposition aux soins, il est est nécessaire de maintenir les soins psychiatriques sous contrainte en hospitalisation complète et continue pour adaptation et surveillance continue ».

Aussi, c'est par motifs pertinents auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte au vu des constats ci-dessus, que le premier juge a considéré qu'il convenait de maintenir la mesure de soins sans consentement au regard des troubles du comportement de M. [Z] Deuxmjllevingtquantreurgun se disant [R] [S] [B] qui, lors de son audition devant la cour, a confirmé être toujours sujet à des hallucinations acoustico-verbales et refusé les soins dont l'état médical constaté atteste de la nécessité.

L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle ordonnée la poursuite de la mesure.

PAR CES MOTIFS 

Le délégué du premier président, statuant en dernier ressort, par décision réputée contradictoire mise à disposition au greffe,

Rejette les moyens d'irrégularité de la procédure soulevées en cause d'appel ;

Confirme l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris le 22 juillet 2024 en toutes ses dispositions ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.

Ordonnance rendue le 09 AOUT 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le 09 août 2024 par fax / courriel à :

X patient à l'hôpital

ou/et ' par LRAR à son domicile

X avocat du patient

X directeur de l'hôpital

' tiers par LS

' préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

X Parquet près la cour d'appel de Paris


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 24/00441
Date de la décision : 09/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-09;24.00441 ?
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