Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2024
(n° / 2024, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17506 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIN6A
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 17 octobre 2023 - Cour d'Appel de PARIS - RG n° 20/12470
PARTIES DEMANDERESSES:
Monsieur [P] [T]
Né le [Date naissance 4] 1975 à [Localité 10] (94)
De nationalité française
Demeurant [Adresse 2]
[Localité 6]
S.A.S. HADAR CONSULTING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 831 906 789,
Dont le siège social est situé [Adresse 5]
[Localité 7]
Représentés et assistés de Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075,
PARTIE DÉFENDERESSE:
Monsieur [O] [M]
Né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 9]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 3]
[Localité 8]
Représenté et assisté de Me Laurent-Haim BENOUAICH de la SCP BBO, avocat au barreau de PARIS, toque : R057,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Sophie MOLLAT, présidente de chambre,
Madame Alexandra PELIER-TETREAU, conseillère.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE:
MM.[M] et [T] sont les associés de la SAS Hadar Consulting. M.[T] en est le président.
Par jugement du 29 juillet 2020, le tribunal de commerce de Paris a débouté M.[M] de ses demandes de dissolution de la société Hadar Consulting, de désignation d'un administrateur judiciaire pour y procéder et en dommages et intérêts, a débouté également M.[T] de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de M. [M], condamné M. [M] aux dépens et à payer à M.[T] une indemnité procédurale de 2.000 euros.
M.[M] a relevé appel de cette décision le 27 août 2020 et a conclu au fond le 24 novembre 2020.
Dans le cadre d'un premier incident, M.[M] a soulevé l'irrecevabilité de 'l'appel incident' formé dans les conclusions de M.[T] et de la société Hadar Consulting du 22 février 2021. Par ordonnance du 7 septembre 2021, le conseiller de la mise en état y a fait droit, au motif que les intimés n'avaient pas sollicité l'infirmation en tout ou partie du jugement dans le dispositif de leurs conclusions du 22 février 2021.
La présente cour, statuant sur déféré par arrêt du 11 janvier 2022, infirmant l'ordonnance du conseiller de la mise en état, a rejeté la fin de non recevoir soulevée par M.[M] considérant qu'en l'absence de mention dans le dispositif des conclusions d'intimés d'une demande d'annulation ou d'infirmation de la disposition du jugement relative au rejet de la demande de dommages et intérêts de M.[T], ce chef du jugement n'avait pas été déféré à la cour, l'absence d'une telle mention n'étant pas sanctionnée par l'irrecevabilité d'un appel incident à le supposer formé.
Le 18 avril 2023 M. [T] et la société Hadar Consulting ont notifié de nouvelles conclusions au fond dans le dispositif desquelles ils demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté leur demande de dommages et intérêts.
A la suite de ces conclusions, M. [M] a, le 24 mai 2023, diligenté un nouvel incident devant le conseiller de la mise en état tendant à voir juger irrecevable l'appel incident formé le 18 avril 2023.
Par ordonnance du 17 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré l'incident recevable, jugé irrecevable l'appel incident formé le 18 avril 2023 par M. [T] et la société Hadar Consulting, condamné ces derniers aux dépens de l'incident et à payer à M.[M] une indemnité procédurale de 1.000 euros et débouté M. [T] et la société Hadar Consulting de leur demande en paiement fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi, le conseiller de la mise en état a retenu qu'il résultait du précédent déféré que les écritures du 22 février 2021 des intimés n'avaient pas valablement saisi la cour d'appel d'un appel incident, que si les intimés dans leurs nouvelles écritures au fond du 18 avril 2023 s'étaient mis en conformité avec la règle de procédure énoncée par la Cour de cassation le 17 octobre 2020 en demandant l'infirmation du rejet par les premiers juges de leur demande de dommages et intérêts, cette mise en conformité et l'appel incident qui en découlait étaient postérieurs au délai de trois mois courant à compter des premières écritures de l'appelant, l'inobservation de ce délai étant sanctionné par l'irrecevabilité de l'appel incident.
Par requête du 30 octobre 2023, M. [T] et la société Hadar Consulting ont déféré cette ordonnance à la cour, lui demandant de les dire recevables et bienfondés en leur déféré, y faisant droit, réformer l'ordonnance du 17 octobre 2023, déclarer irrecevable et malfondé l'appelant en sa demande d'irrecevabilité de l'appel incident, le débouter de ses prétentions, fins et conclusions et le condamner à leur payer 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le déféré a été fixé à l'audience du 18 mars 2024.
Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 13 mars 2024, M.[M] demande à la cour de juger M. [T] mal fondé en son déféré, confirmer l'ordonnance entreprise et condamner solidairement M. [T] et la société Hadar Consulting à lui payer une indemnité procédurale de 2.000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.
SUR CE,
Au soutien de leur déféré, M. [T] et la société Hadar Consulting exposent que:
- l'irrecevabilité de l'appel incident soulevée par M. [M] se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 11 janvier 2022 rendu sur un premier déféré, l'absence de demande d'infirmation dans le dispositif de conclusions portant appel incident n'étant pas sanctionnée par une quelconque irrecevabilité
- qu'aucune sanction ne saurait être appliquée dès lors que l'appel est antérieur à la jurisprudence de la Cour de cassation du 17 septembre 2020 et à sa déclinaison pour l'appel incident par arrêt du 1er juillet 2021, seule la date de l'appel principal étant à prendre en compte pour l'application de la jurisprudence de la Cour de cassation, qu'ainsi, il importe peu que l'appel incident ait été régularisé par voie de conclusions du 22 février 2021 postérieures à l'arrêt de la Cour de cassation du 17 septembre 2020.
M. [M], défendeur au déféré, réplique que l'arrêt ayant statué sur le premier déféré a considéré que la cour n'avait pas été saisie d'un appel d'incident de sorte qu'elle ne pouvait le déclarer irrecevable, que s'agissant de la sanction édictée par la Cour de cassation dans son arrêt du 17 septembre 2020, il a conclu pour la première fois le 24 novembre 2020 soit postérieurement à l'arrêt du 17 septembre 2020, donc en connaissance de la jurisprudence, de sorte que les intimés ont pleinement pu bénéficier du droit à un procès équitable voulu par la jurisprudence, que les conclusions d'appelant ayant été signifiées le 24 novembre 2020, et l'arrêt de la Cour de cassation étant du 17 septembre 2020, c'est en toute connaissance de la jurisprudence de la Cour de cassation que M.[T] disposait d'un délai de 3 mois à compter du 24 novembre 2020 pour conclure, de sorte que son appel incident formé le 18 avril 2023 est irrecevable.
Il est constant que dans leurs conclusions notifiées le 18 avril 2023, M.[T] et la société Hadar Consulting ont bien sollicité l'infirmation de la disposition du jugement les ayant déboutés de leur demande de dommages et intérêts et ont de ce chef formé un appel incident. L'arrêt rendu sur déféré le 11 janvier 2022 dans le cadre du premier incident a jugé que les conclusions d'intimé n'avaient pas saisi la cour d'un appel incident sur ce chef du jugement que l'appelant principal n'avait pas davantage remis en cause. L'autorité de la chose jugée qui s'attache à cette décision rend irrecevable tout réexamen de cette question.
Dans le cadre du présent déféré, la cour est appelée à se prononcer uniquement sur la recevabilité de l'appel incident formé par les intimés dans leurs conclusions notifiées le 18 avril 2023 postérieurement à l'arrêt du 11 janvier 2022 qui se rapportait à la recevabilité d'un appel incident prétendument formé par des conclusions du 22 février 2021.
Aucune décision ne s'étant prononcée sur la recevabilité de l'appel incident formé par conclusions du 18 avril 2023, avant l'ordonnance entreprise, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt du 11 janvier 2022 ne fait aucunement obstacle à ce que le conseiller de la mise en état et à suite la cour sur déféré examinent la recevabilité de l'appel incident formé le 18 avril 2023.
Ce nouvel incident ne peut donner lieu à réexamen de la décision prise relativement au premier incident, qui a définitivement jugé que les conclusions des intimés du 22 février 2021 n'avaient pas saisi la cour d'un appel incident sur la disposition du jugement ayant débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts.
Au cas présent, le débat ne saurait utilement porter sur la sanction applicable en cas d'absence dans le dispositif des conclusions des intimés d'une demande d'annulation ou d'infirmation d'une disposition du jugement et sur l'application de la jurisprudence de la Cour de cassation issue de l'arrêt du 17 septembre 2020, dans la mesure où il n'est pas contesté que dans le dispositif de leurs conclusions objet du litige, notifiées le 18 avril 2023, les intimés ont expressément sollicité l'infirmation de la disposition du jugement ayant rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [T]. Est donc inopérant, le moyen des demandeurs au déféré tendant à voir juger que pour l'application de la jurisprudence de la Cour de cassation issue de l'arrêt du 17 septembre 2020, seule doit être prise en compte la date de l'appel principal.
C'est en l'espèce au regard de l'application de l'article 909 du code de procédure civile que doit être appréciée la recevabilité de l'appel incident formé par les conclusions notifiées le 18 avril 2023.
Selon l'article 909 du code de procédure civile, 'L'intimé dispose à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former le cas échéant appel incident ou appel provoqué'.
Ces dispositions s'appliquant aux appels formés à compter du 1er septembre 2017, régissent la procédure d'appel, qui a été engagée par M. [M] suivant déclaration du 27 août 2020.
Ce n'est que par leurs conclusions notifiées le 18 avril 2023, que M. [T] et la société Hadar Consulting ont relevé appel incident, soit bien au-delà du délai de 3 mois après les conclusions au fond notifiées par M. [M] le 24 novembre 2020.
Il s'ensuit qu'en application de l'article 909 du code de procédure civile, l'appel incident formé par conclusions du 18 avril 2023 est irrecevable.
L'ordonnance du 17 octobre 2023 sera confirmée en toutes ses dispositions.
Y ajoutant, la cour condamnera in solidum M. [T] et la société Hadar Consulting aux dépens du déféré, mais déboutera les parties de leurs demandes en paiement d'indemnité procédurale au titre des frais exposés en déféré.
PAR CES MOTIFS,
Confirme l'ordonnance en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne in solidum M. [T] et la société Hadar Consulting aux dépens du déféré,
Déboute les parties de leur en paiement d'une indemnité procédurale au titre du déféré.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
La présidente,
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT