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04/09/2024 | FRANCE | N°21/09940

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 04 septembre 2024, 21/09940


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024





(n°2024/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09940 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEYFG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Octobre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° F19/00656





APPELANTE



Madame [E] [N]

[Adresse

1]

[Localité 3]

Représentée par Me Samya BOUICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0479



INTIMEE



S.A.S. PARC DES FELINS

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie-sophi...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024

(n°2024/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09940 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEYFG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Octobre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° F19/00656

APPELANTE

Madame [E] [N]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Samya BOUICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0479

INTIMEE

S.A.S. PARC DES FELINS

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie-sophie ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0026

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, Président de formation,

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Philippine QUIL

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre, et par Gisèle MBOLLO, greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE :

La société le Parc des Félins a engagé Mme [N] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 4 juillet 2016 en qualité 'd'animalière-animatrice'.

Dans le courant du 1er trimestre 2018, Mme [N] a demandé une rupture conventionnelle, que l'employeur n'a pas acceptée.

Plusieurs échanges ont ensuite eu lieu entre Mme [N] et le directeur concernant les conditions de travail.

Mme [N] a été en arrêt de travail à compter du 02 mars 2018.

Le 6 septembre 2018, Madame [E] [N] a été déclarée inapte à son poste de travail par le médecin du travail.

Par lettre notifiée le 20 septembre 2018, Mme [N] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 2 octobre 2018.

Mme [N] a été licenciée pour inaptitude par lettre notifiée le 5 octobre 2018.

Le 2 août 2019, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Meaux pour contester le licenciement et former des demandes de rappels de salaires et de dommages-intérêts.

En dernier lieu elle a formé les demandes suivantes :

«- Prononcer la nullité du licenciement de Madame [N] compte tenu du harcèlement moral subi

- Dommages-intérêts pour licenciement nul 18 164,04 Euros

- Dire et juger que le licenciement de Madame [N] est sans cause réelle et sérieuse

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

à titre subsidiaire 5 297,85 Euros

- Indemnité de licenciement légale 465,00 Euros

- Indemnité compensatrice de préavis 3 027,34 Euros

- Congés payés afférents 302,73 Euros

- Dommages-intérêts au titre du préjudice moral distinct subi 15 000,00 Euros

- Dommages-intérêts au titre de la violation de l'obligation de sécurité de résultat et de prévention par l'employeur 15 000,00 Euros

- Article 700 du code de procédure civile 3 500,00 Euros

- Condamner la société LE PARC DES FELINS aux intérêts de retard sur les condamnations à caractère salarial prononcées à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes

- Capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343-2 du Code civil

- Ordonner la remise d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi conformes à la décision à intervenir

- Exécution provisoire (art. 515 du code de procédure civile)

- Entiers dépens

Demande reconventionnelle

- Article 700 du code de procédure civile 3 000,00 Euros»

Par jugement du 25 octobre 2021, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes a rendu la décision suivante :

«DIT que le licenciement de Madame [E] [N] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

DEBOUTE Madame [E] [N] de l'intégralité de ses demandes ;

DEBOUTE la SAS LE PARC DES FELINS de sa demande relative à l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Madame [E] [N] aux entiers dépens.»

Mme [N] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 06 décembre 2021.

La constitution d'intimée de la société le parc des félins a été transmise par voie électronique le 18 janvier 2022.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 7 mars 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, Mme [N] demande à la cour de :

«Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau :

A TITRE PRINCIPAL :

Prononcer la nullité du licenciement de Madame [N] compte tenu du harcèlement moral subi,

En conséquence,

Condamner la société LE PARC DES FELINS au paiement de la somme de 18 164,04 euros à titre dommages et intérêts pour licenciement nul,

A TITRE SUBSIDIAIRE :

Dire et juger que le licenciement de Madame [N] est sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

Condamner la société LE PARC DES FELINS au paiement de la somme de 5 297,85 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

EN TOUT ETAT DE CAUSE, SUR LES AUTRES DEMANDES :

Condamner la société LE PARC DES FELINS au paiement des sommes suivantes :

- Indemnité compensatrice de préavis : 3 027,34 euros,

- Congé payés afférents : 302,73 euros,

- Dommage et intérêts au titre de la violation de l'obligation de sécurité de résultat et de prévention par l'employeur : 15 000 euros,

- Dommages et intérêts au titre du préjudice moral distinct subi : 15 000 euros,

- Article 700 du Code de procédure civile : 3 500 euros,

Condamner la société LE PARC DES FELINS aux intérêts de retard sur les condamnations à caractère salarial prononcées à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes,

Ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil,

Condamner la société LE PARC DES FELINS aux entiers dépens,

Ordonner la remise d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi conformes à la décision à intervenir. »

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 31 mai 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, la société le parc des félins demande à la cour de :

'- Débouter Madame [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Meaux en toutes ses dispositions, et y ajoutant,

- Condamner Madame [N] à payer à la Société la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du ncpc ainsi qu'aux entiers dépens.'

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 26 mars 2024.

L'affaire a été appelée à l'audience du 27 mai 2024.

MOTIFS

Sur le harcèlement moral

L'article 1152-1 du code du travail dispose que :

'Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.'

En application de l'article L. 1154-1 du code du travail, alors applicable, il incombe au salarié qui l'invoque de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Dans cette hypothèse, il incombera à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme [N] expose que le parc zoologique était constitué de deux sites distincts séparés par une route : le parc des félins sur lequel se situait les locaux de la direction et de l'équipe des vétérinaires et l'extension 'Terre ses singes' dans lequel elle exerçait. Elle produit le dossier de création de l'extension, qui est séparée du parc principal.

Mme [N] indique que le nombre d'animaliers était insuffisant sur le site Terre des Singes et produit les carnets journaliers de liaison qui indiquent que certains jours elle a été la seule animalière titulaire présente, avec des stagiaires ou des vétérinaires. Plusieurs attestations de personnes qui ont travaillé sur le site ou y ont suivi une formation confirment ce fait et précisent que le personnel n'était pas en nombre suffisant pour assurer la sécurité des salariés et des visiteurs.

Mme [N] expose qu'elle a exercé d'autres missions que celles qui étaient prévues : la formation du personnel, la gestion de l'équipe, le suivi et la gestion des stocks, des protocoles et animations. Elle indique avoir subi une surcharge de travail. Les attestations produites confirment qu'elle exerçait ces différentes missions.

Mme [N] a sollicité une rupture conventionnelle, qui a été refusée. Le directeur a répondu par courrier du 21 mars 2018 qu'elle avait la possibilité de démissionner.

Mme [N] a écrit à son employeur le 20 avril 2018 pour rappeler l'existence de dysfonctionnements dans le parc en raison d'un sous-effectif (sous-effectif) et des nombreuses tâches qui n'étaient pas prévues à son contrat de travail. Le directeur y a apporté une réponse circonstanciée.

Le conseil de Mme [N] a écrit à l'employeur le 22 juin 2018 pour rappeler la situation.

La société Le Parc des félins a répondu par courrier du 29 juin 2018.

Mme [N] a subi des douleurs nécessitant un suivi par un ostéopathe et par un psychologue. Elle a été en arrêt de travail du 02 au 09 mars 2018. Elle a été arrêtée par son médecin à compter du 30 avril 2018 qui a indiqué 'anxiété majeure burn out'.

Mme [N] a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude par courrier du 05 octobre 2018.

Ces éléments démontrent que des signalements relatifs aux conditions de travail ont été effectués, et que la réalité de problèmes de santé est établie. Cependant, pris dans leur ensemble ils ne laissent pas supposer l'existence d'un harcèlement.

La demande de nullité du licenciement doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'absence de cause réelle et sérieuse

Mme [N] fait valoir à titre subsidiaire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'inaptitude étant en lien avec le manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur.

L'article L. 4121-1 du code du travail dispose que 'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adéquation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.'

L'article L.4121-2 du contrat de travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2012-954 du 6 août 2012, dispose que:

« L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs. »

Il résulte de ces textes que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Toutefois, l'employeur ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un manquement à son obligation de sécurité, a pris les mesures immédiates propres à les faire cesser.

Mme [N] produit plusieurs attestations de salariés qui indiquent que le personnel animalier était en nombre insuffisant pour assurer la sécurité du personnel et des visiteurs au regard de la configuration des lieux et de la nécessité d'assurer des animations régulières, ce qui avait pour conséquence que l'un des deux animaliers présents sur le site était occupé pendant celles-ci.

Une salariée en poste à l'accueil, Mme [Z], indique que l'enclos des singes nécessitait une surveillance constante, que Mme [N] avait signalé que le nombre de personnes était insuffisant pour la sécurité, ce qui est resté sans effet sur l'effectif des soigneurs animaliers alors que celui de la partie commerciale avait augmenté. Mme [B], qui a exercé comme agent animalier, confirme que Mme [N] avait vainement signalé le sous-effectif et le manque de personnel qualifié dans l'enclos des singes, qu'elle s'occupait également de la formation des membres de l'équipe, de la gestion et de l'organisation.

Mme [M], qui a exercé comme 'soigneur/animatrice', atteste que Mme [N] était la seule personne expérimentée dans la partie Terre des Singes, qu'elle accomplissait de nombreuses fonctions d'organisation et de gestion et avait signalé les conséquences du manque d'effectif quant à la sécurité du personnel et du public. Mme [M] indique avoir subi des attaques des animaux, à deux reprises, alors qu'elle était seule, et qu'aucune note de service ou protocole n'ont été mis en place après celles-ci. Elle ajoute que Mme [N] n'a pas toujours été dotée en vêtements de travail, de pantalon, et qu'aucun aménagement n'a été mis en place pour tenir compte des épisodes de grand froid ou de canicule.

Les carnets de liaison indiquent à plusieurs reprises que Mme [N] était la seule titulaire exerçant dans l'enclos, avec un stagiaire. Mme [P], qui a accompli un stage dans l'entreprise, atteste avoir été seule avec Mme [N], à plusieurs reprises.

Des demandes d'entretien formées par Mme [N] sont mentionnées sur les carnets de liaison.

La société Le Parc des félins justifie avoir acquis un dispositif de liaison radio le 09 juin 2016. Il n'y a pas d'explication quant à l'absence de fourniture de pantalons de travail à Mme [N].

La société Le Parc des félins produit le registre des accidents du travail, qui indique un très faible nombre d'accident, notamment sur la partieterritoire des singes.

Le cahier de liaison indique que plusieurs salariés sont intervenus lors de l'accident subi par un autre animalier le 25 mai 2018 et que le lendemain des mesures ont été prises à l'égard de l'animal agressif, deux salariés s'étant déplacés vers l'animal en cause. La salariée qui a subi l'agression atteste que plusieurs personnes sont intervenues lors de l'agression et qu'il n'y a pas eu d'autre incident. Il résulte des termes de cette attestation qu'il n'y avait qu'un seul autre salarié présent dans l'enclos des singes au moment de l'accident

Aucune mesure relative aux conditions climatiques, pendant les périodes de grand froid ou de fortes chaleurs, n'est justifiée dans l'entreprise.

La société Le Parc des félins ne justifie pas avoir donné suite aux demandes d'entretien formalisées par Mme [N] sur les cahiers de liaison. Le seul entretien qui est établi est relatif à la demande de rupture conventionnelle.

Alors que Mme [N] démontre par plusieurs attestations avoir fait remonter à son employeur ses préoccupations relatives aux conditions de travail et de sécurité, bien avant sa demande de rupture conventionnelle, aucune mesure pérenne relative à la sécurité sur le site Terre des singes, distinct du lieu principal, n'est justifiée.

Le nombre d'intervenants titulaires présents sur le site n'a pas été modifié par l'employeur. Seule la présence ponctuelle de personnel, ou de stagiaires, pour pallier des absences résulte des éléments produits.

Les incidents n'ont pas été suivis de mesure concrète de prévention prise par l'employeur.

Le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité est caractérisé.

Les arrêts de travail qui ont précédé l'avis d'inaptitude, qui indiquent des motifs d'anxiété et de burn out, sont en lien avec l'absence de mesure prise par l'employeur pour assurer la sécurité de sa salariée et ont participé à l'inaptitude de la salariée. Le fait que Mme [N] a travaillé un nombre d'heures inférieur à celui prévu au contrat de travail, soutenu par l'intimée ne fait pas disparaître le lien entre l'inaptitude constatée par le médecin du travail et le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Le licenciement est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les conséquences financières

Mme [N] est fondée à demander l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le salaire mensuel de Mme [N] était de 1 513,67 euros. Compte tenu du salaire que Mme [N] aurait perçu si le préavis de deux mois avait été accompli, la société Le Parc des félins doit être condamnée à lui payer la somme de 3 027,34 euros outre celle de 302,73 euros au titre des congés payés afférents.

Mme [N] avait une ancienneté de deux années complètes au moment du licenciement. Il n'est pas discuté que l'effectif de l'employeur était d'au moins onze salariés. Le montant de l'indemnité prévue par l'article L.1235-3 du code du travail doit être compris entre trois mois et trois mois et demi.

La société Le Parc des félins doit être condamnée à payer à Mme [N] la somme de 4 800 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé de ces chefs.

En application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail la société Le Parc des félins doit être condamnée à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage payées entre le jour du licenciement et le jugement, dans la limite de six mois.

Il sera ajouté au jugement.

Le préjudice subi par Mme [N] résultant du manquement à l'obligation de sécurité sera réparé par la condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Mme [N] ne justifie pas d'un préjudice moral distinct, qui ne serait pas réparé par les montants alloués, et doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts formée à ce titre.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les intérêts

Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les dommages et intérêts alloués à compter de la présente décision.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée selon les dispositions de l'article 1343-2 du code civil par année entière.

Sur la remise des documents

La remise d'un bulletin de paie récapitulatif, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision est ordonnée.

Sur les dépens et frais irrépétibles

La société Le Parc des félins qui succombe supportera les dépens et sera condamnée à verser à Mme [N] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes sauf en ce qu'il a débouté Mme [N] de sa demande de nullité du licenciement, d'indemnité pour licenciement nul et de dommages-intérêts pour préjudice moral,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Le Parc des félins à payer les sommes suivantes à Mme [N] :

- 3 027,34 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 302,73 euros au titre des congés payés afférents,

- 4 800 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

Ordonne à la société Le Parc des félins de rembourser au Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [N] , du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de six mois des indemnités versées,

Dit que les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les dommages-intérêts alloués à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts selon les dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Ordonne la remise d'un bulletin de paie récapitulatif, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision,

Condamne la société Le Parc des félins aux dépens,

Condamne la société Le Parc des félins à payer à Mme [N] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/09940
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;21.09940 ?
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