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17/01/2023 | FRANCE | N°18/00782

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 17 janvier 2023, 18/00782


CD/CD



Numéro 23/00165





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 17/01/2023







Dossier : N° RG 18/00782 - N° Portalis DBVV-V-B7C-G26G





Nature affaire :



Revendication d'un bien immobilier









Affaire :



[Y] [Z],



[C] [Z]





C/



[K] [G],



[X] [G],



[R] [G],



[S] [G],



Commune [Localité 10]
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Grosse délivrée le :



à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 17 Janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévue...

CD/CD

Numéro 23/00165

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 17/01/2023

Dossier : N° RG 18/00782 - N° Portalis DBVV-V-B7C-G26G

Nature affaire :

Revendication d'un bien immobilier

Affaire :

[Y] [Z],

[C] [Z]

C/

[K] [G],

[X] [G],

[R] [G],

[S] [G],

Commune [Localité 10]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 17 Janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 22 Novembre 2022, devant :

Madame DUCHAC, Présidente, magistrate chargée du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Madame de FRAMOND, Conseillère

assistées de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes.

Les magistrates du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur [Y] [Z]

né le 03 octobre 1942

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 8]

Madame [C] [Z]

née le 12 janvier 1946

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 8]

Représentés et assistés de Maître CAMBOT de la SELARL CABINET CAMBOT, avocat au barreau de PAU

INTIMES :

Monsieur [K] [G]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 8]

Représenté et assisté de Maître WATTINE, avocat au barreau de BAYONNE

Madame [X] [H] épouse [K] [G]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 8]

Madame [R] [G]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 8]

Madame [S] [G]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 8]

Intervenantes volontaires au soutien de Monsieur [K] [G]

Représentées et assistées de Maître WATTINE, avocat au barreau de BAYONNE

Commune [Localité 10]

prise en la personne de son Maire, domicilié en cette qualité

[Adresse 11]

[Localité 8]

Représentée et assistée de Maître MIRANDA de la SELARL CABINET ETCHE AVOCATS, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 22 JANVIER 2018

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

RG numéro : 14/02179

FAITS ET PROCEDURE

Vu le jugement contradictoire rendu le 22 janvier 2018, dans un litige opposant les époux [Y] et [C] [Z], demandeurs, à M. [K] [G] et la commune de [Localité 10], défendeurs, relatif à la propriété d'une parcelle cadastrée YA n° [Cadastre 1] consistant en un chemin reliant la RD 396 à la maison des époux [Y] et [C] [Z] ainsi qu'à une servitude de passage sollicitée par M. [K] [G] sur cette parcelle ;

Ce jugement a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. [G],

- déclaré recevable l'action en revendication engagée par les époux [Z],

- rejeté la demande de M. [G] visant à dire que l'acte de vente dressé par Maître [P], notaire, en date du 18 novembre 1971 est entaché d'une erreur matérielle,

- déclaré les époux [Z] propriétaires de la parcelle cadastrée section YA n° [Cadastre 1] d'une consistance de 200 m², consistant en un chemin reliant la maison des époux [Z] à la [Adresse 15], aux droits duquel se trouve la commune de [Localité 10] selon l'acte authentique en date du 24 septembre 1991,

- dit que la décision vaudra titre de propriété après publication au service de la publicité foncière par le notaire instrumentaire choisi pour réaliser les formalités, aux frais avancés des époux [Z] mais supportés définitivement par la commune de [Localité 10] et M. [G] et les condamne, in solidum, à les rembourser,

- déclare M. [G] titulaire d'une servitude de passage sur le chemin cadastré section YA n° [Cadastre 1] appartenant aux époux [Z] et visant à relier les logements édifiés à l'arrière de la propriété de M. [G] à la route départementale 936,

- rejeté la demande des époux [Z] tendant à voir fermer l'accès créé par M. [G] sur le chemin litigieux,

- rejeté les demandes en dommages et intérêts formulées tant par les époux [Z] que par M. [G],

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Vu la déclaration d'appel régularisée le 9 mars 2018 par les époux [Z], intimant Monsieur [K] [G]. Ils critiquent le jugement en ce qu'il a :

- déclaré M. [G] titulaire d'une servitude de passage sur le chemin cadastré section YA n° [Cadastre 1] leur appartenant et visant à relier les logements édifiés à l'arrière de la propriété de M. [G] à la route départementale 936,

- rejeté leur demande tendant à voir fermer l'accès créé par M. [G] sur ledit chemin ainsi que leur demande visant à l'octroi de dommages et intérêts,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'assignation en intervention forcée délivrée le 25 juillet 2018 par M. [K] [G] contre la COMMUNE DE [Localité 10].

Suivant ordonnance rendue le 15 novembre 2018, le juge de la mise en état a procédé à la jonction des deux instances.

Vu les conclusions d'intervention volontaire en date du 20 juillet 2018 de Mme [X] [H] épouse [G], Mme [R] [G] et Mme [S] [G], au soutien de M. [K] [G], en qualité de propriétaires indivises suite à un acte de donation partage du 19 juin 2014, la parcelle YA n° [Cadastre 2] ayant fait l'objet d'une division pour donner lieu aux parcelles YA n° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6].

Vu l'arrêt avant dire droit rendu le 16 mars 2021 par lequel la cour a ordonné une mesure de médiation.

Les parties n'étant pas parvenues à un accord, l'affaire est revenue devant la cour.

Vu l'arrêt avant dire droit rendu le 20 septembre 2022, auquel il est renvoyé pour l'exposé des prétentions des parties, par lequel la cour a :

- révoqué l'ordonnance de clôture,

- ordonné la réouverture des débats et enjoint aux consorts [G] de s'expliquer sur leur qualité à former appel incident :

* de dispositions du jugement (recevabilité et fond) relatives au droit de propriété sur la parcelle YA n° [Cadastre 1] qu'ils n'ont à aucun moment revendiqué ;

* de dispositions relatives à une erreur matérielle qui serait contenue dans l'acte authentique de vente en date du 18 novembre 1971 auquel ils sont tiers ;

- renvoyé la cause et les parties à l'audience du 22 novembre 2022 et dit que la clôture sera fixée au 16 novembre 2022,

- réserve les dépens et les frais.

Suivant leurs conclusions en date du 10 novembre 2022, sur la réouverture des débats, les consorts [G] demandent :

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance en date du 22 janvier 2018 en tant qu'il a, au titre de l'article 682 du code civil, « déclaré M. [G] titulaire d'une servitude légale de passage sur le chemin cadastré YA [Cadastre 1] » (le fonds servant) et « visant à relier l'arrière de la propriété de M. [G] à la route départementale n° 936 »,

- de confirmer le jugement précité, en tant qu'il a par voie de conséquence « rejeté la demande des époux [Z] tendant à voir fermer l'accès » à la propriété de M. [G] sur ce chemin,

- de débouter les époux [Y] [Z] de l'ensemble de leurs demandes et prétentions formées en appel dans le cadre de la présente instance,

- de les débouter notamment de leur demande subsidiaire tendant à solliciter la condamnation de M. [G] à leur verser 75 000 € d'indemnité au titre de l'article 682 du code civil, s'agissant d'une prétention nouvelle formée en appel, en violation de l'article 564 du code de procédure civile et par voie de conséquence irrecevable ;

- de réformer le jugement en tant qu'il a institué une servitude légale de passage au profit seulement « de Monsieur [G] ».

- de juger que la servitude légale de passage prévue par l'article 682 du code civil revêt un caractère réel (droit immobilier et non droit personnel) et qu'il a y a donc lieu de déclarer que la parcelle YA [Cadastre 1] déclarée propriété des époux [Z] supportera en qualité de fonds servant une servitude légale de passage au profit de la parcelle jadis cadastrée YA n° [Cadastre 2], unité foncière désormais cadastrées section YA n° [Cadastre 3], YA [Cadastre 4], YA [Cadastre 5] et YA [Cadastre 6] (fonds dominants) actuelles propriétés des consorts [K], [X], [W] [S] et [R] [G] ;

- de dire et juger que l'arrêt à intervenir tiendra lieu de titre de constitution de servitude de passage en vue de sa publication au fichier immobilier.

Subsidiairement

- de réformer le jugement entrepris en tant qu'il a omis de statuer sur la demande reconventionnelle formée par M. [G] au titre de l'article L 162-1 du code rural et forestier.

Statuant à nouveau,

- de juger que la voie ou chemin desservant les propriétés des consorts [G] et des époux [Z], est un chemin d'exploitation au sens des articles L 162-1 et suivants du code rural et forestier et qu'ainsi la propriété de Monsieur [G] dispose légalement d'un libre accès sur ce chemin d'exploitation,

- de réformer le jugement en tant qu'il a rejeté les demandes de M. [G] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamner les époux [Y] [Z] à verser à M. [K] [G] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 3 000 € au titre des frais de procédure exposés en première instance.

A titre subsidiaire

- Sur la question préjudicielle à renvoyer au Juge administratif, de dire et juger que la question de l'appartenance au domaine public de la commune de [Localité 10] de la parcelle formant la voie de desserte dont la propriété est revendiquée par les époux [Z] est susceptible de porter atteinte au principe -d'ordre public- d'intangibilité et d'inaliénabilité du domaine public posé par l'article L 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;

- de dire qu'il y a donc lieu de renvoyer au Juge administratif et en premier lieu au Tribunal administratif de Pau, qui sera saisi à l'initiative de la partie la plus diligente, la question préjudicielle suivante :

« La parcelle propriété de la commune de [Localité 10] qui constitue l'assiette d'un ouvrage de voirie (non numéroté au plan cadastral en vigueur) qui dessert les propriétés de Consorts [G] à [Localité 10] (parcelles YA n° [Cadastre 3], YA [Cadastre 4], YA [Cadastre 5] et YA [Cadastre 6]) et la propriété des Epoux [Z] (parcelle YA [Cadastre 7]) relève-t-elle ou non du domaine public de la commune de [Localité 10] par nature inaliénable et imprescriptible au sens de l'article L 3111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques ' »

En tout état de cause

- de déclarer recevable l'intervention volontaire des Mesdames [X], [R] et [S] [G] au soutien de M. [K] [G], leur époux et père, avec lequel elles sont propriétaires indivis de la propriété cadastrée section YA n° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6] à [Localité 10] (ex. YA n° [Cadastre 2]) ;

- de condamner les époux [Z] à verser aux Consorts [G] la somme de 3 000 € au titre des frais de procédure exposés dans le cadre de la présente instance d'appel ;

- de condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Wattine, avocat au barreau de Bayonne.

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 15 novembre 2022, les époux [Y] et [C] [Z], appelants, demandent à la cour :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré les époux [Y] et [C] [Z] propriétaires de la voie d'accès à leur domicile anciennement cadastrée D [Cadastre 9],

- de constater qu'aucun acte translatif de propriété n'a privé les époux [Y] et [C] [Z] de la propriété de la voie d'accès anciennement cadastrée D [Cadastre 9],

- de constater qu'aucune juste et préalable indemnité n'a été allouée aux époux [Y] et [C] [Z] en compensation de la prétendue perte de propriété de la voie d'accès et de l'ensemble des réseaux qui y sont déployés,

- de constater, le cas échéant, que les époux [Y] et [C] [Z] se sont comportés comme des propriétaires de cette voie d'accès depuis 1971,

- de constater que la propriété [G] est desservie par la voie publique et n'est donc pas en situation d'enclave ;

- de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* déclaré M. [K] [G] titulaire d'une servitude de passage sur le chemin cadastré YA n° [Cadastre 1] appartenant aux époux [Y] et [C] [Z] et visant à relier les logements édifiés à l'arrière de la propriété de M. [K] [G] à la route départementale 936,

* rejeté la demande des époux [Y] et [C] [Z] tendant à voir fermer l'accès créé par M. [K] [G] sur le chemin cadastré YA n° [Cadastre 1] leur appartenant,

* rejeté la demande de dommages et intérêts des époux [Y] et [C] [Z],

* dit n'y avoir pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner les consorts [G] à la fermeture de l'accès qu'ils ont illégalement créé sur la voie privée des époux [Y] et [C] [Z] et à la remise en état des lieux dans un délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir sous peine d'une astreinte de 150 € par jour de retard,

- de condamner les consorts [G] à payer aux époux [Y] et [C] [Z] une somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la création illégale d'un accès sur leurs fonds, à l'atteinte porté à leur bien et à l'utilisation de leur passage,

- de débouter la commune de [Localité 10] et les consorts [G] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire le fonds [G] était considéré comme en situation d'enclave,

- de dire et juger que les consorts [G] devront entretenir le chemin en cause et fixer l'indemnité due par les consorts [G] aux époux [Y] et [C] [Z] en contrepartie de cette servitude de passage à la somme de 75 000 €,

- de dire et juger que cette somme portera intérêt au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir sur le fondement des articles 1231-6 et 1343-2 du code civil,

- de condamner les consorts [G] et la commune de [Localité 10] au paiement d'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans le corps de leurs écritures ils soulèvent l'irrecevabilité de la demande de question préjudicielle et prennent acte de ce que les consorts [G] ne contestent plus la disposition du jugement déclaré les époux [Y] et [C] [Z] propriétaires de la parcelle litigieuse.

La commune de [Localité 10] n'a pas conclu suite à la réouverture des débats.

Suivant ses dernières conclusions déposées le 22 novembre 2021, la commune de [Localité 10], demande à la cour de :

- confirmer dans sa totalité le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 22 janvier 2018 sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la commune de [Localité 10] de condamnation in solidum des consorts [G] et des époux [Y] et [C] [Z] à lui verser une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner in solidum les consorts [G] et les époux [Y] et [C] [Z] à verser à la commune de [Localité 10] la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d'appel,

- de rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires aux présentes écritures.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 novembre 2022.

MOTIFS

L'intervention volontaire de Mme [X] [H] épouse [G], Mme [R] [G] et Mme [S] [G] sera déclarée recevable.

La cour rappelle que le litige opposant les parties portait devant le premier juge sur :

- la propriété de la parcelle YA n° [Cadastre 1], revendiquée avant les dernières écritures de la commune par les époux [Y] et [C] [Z], d'une part, par la commune de [Localité 10], d'autre part ;

- à titre subsidiaire, si la propriété est reconnue aux époux [Y] et [C] [Z], sur la servitude de passage du fonds des consorts [G] sur cette parcelle.

En ce qui concerne la propriété de la parcelle YA n° [Cadastre 1], le litige concerne la commune de [Localité 10] et les époux [Y] et [C] [Z] qui la revendiquaient.

Le tribunal a jugé que les époux [Y] et [C] [Z] sont propriétaires de la parcelle litigieuse.

Si la commune de [Localité 10] a dans un premier temps fait appel incident de cette disposition, aux termes de ses dernières écritures en date du 22 novembre 2021, elle ne revendique plus la propriété de la parcelle YA n° [Cadastre 1] et demande à la cour de confirmer le jugement, y compris de ce chef.

Suite à la réouverture des débats, les consorts [G] ne viennent plus critiquer la propriété de la parcelle YA n° [Cadastre 1] qu'ils n'ont jamais revendiqué. Ils ne demandent plus la rectification d'erreur matérielle de l'acte authentique du 18 novembre 1971 auquel ils ne sont pas parties, ni leurs auteurs.

La cour le constatera.

Par conséquent, la discussion devant la cour ne porte plus que sur la question de la servitude demandée par les consorts [G].

Sur la servitude de passage

Les demandes des consorts [G] sont fondées sur l'état d'enclave de leur fonds.

Le premier juge a retenu l'état d'enclave et reconnu une servitude au profit du fonds [G], sur la parcelle YA n° [Cadastre 1] appartenant aux époux [Y] et [C] [Z], visant à relier les logements édifiés à l'arrière de la propriété de M. [K] [G] à la route départementale D 936, au motif que constitue une utilisation normale nécessitant une desserte accrue le projet de construction de logement sur un terrain constructible et conforme à la réglementation d'urbanisme.

Suivant les dispositions de l'article 682 du code civil, 'le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner'.

L'état d'enclave suppose que soit constatée une nécessité qui s'apprécie sur l'ensemble de la parcelle et non au regard de chacune des constructions qui y ont été édifiées par les propriétaires.

La parcelle YA n° [Cadastre 2] (devenue YA n° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6]) est située en bordure de la route départementale D 936. La façade de la maison de M. [K] [G] se trouve en bordure de cette route, légèrement en retrait, de sorte que des véhicules peuvent stationner devant.

M. [K] [G] a fait édifier pour ses enfants des logements à l'arrière de sa propriété. Ce sont ces habitations, situées à l'arrière de la propriété des consorts [G] qu'ils arguent d'être enclavés.

La parcelle anciennement YA n° [Cadastre 2] a une destination d'habitation. La maison d'origine dispose d'un large accès à la voie publique, la RD 936 qu'elle longe sur toute sa façade, disposant entre la façade et la route de places de stationnement des véhicules. Un passage piéton existe par ailleurs sur le côté de cette maison, vers l'arrière et vers les constructions nouvellement édifiées.

Ainsi, la parcelle, prise dans son ensemble, ne se trouve pas enclavée, le simple souci de commodité pour l'accès à l'arrière de la maison ne suffit pas à caractériser cet état.

En construisant des logements et parkings à l'arrière du bâtiment d'origine, M. [K] [G] s'est enclavé lui-même et ne peut dès lors prétendre à un droit de passage pour enclave légale.

Par suite, la nouvelle utilisation de la partie arrière de la parcelle, précédemment à usage de jardin, ne constitue pas une utilisation normale du fonds puisque l'accès avec un véhicule suppose le passage sur la parcelle voisine.

Les autorisations d'urbanisme avancées par les consorts [G] sont inopérantes s'agissant de l'appréciation de l'état d'enclave, puisqu'elles sont données 'sous réserve des droits des tiers'.

Les consorts [G] font état de la servitude dite par destination du père de famille, faisant état de ce que le chemin litigieux, traversait une propriété appartenant aux auteurs des consorts [G]. Cependant, ils ne justifient pas de ce que la division de la propriété initiale, antérieure au lotissement communal ait été réalisée par leur auteur.

De plus, le règlement du lotissement énonce que le chemin litigieux (ancienne parcelle D [Cadastre 9]) n'avait vocation qu'à desservir le lot n° 12.

Les conditions des articles 693 ou 694 ne sont pas réunies.

Enfin, le passage en litige ne constitue pas un chemin d'exploitation au sens de l'article L162-1 du code rural.

En effet, le passage en cause n'a pas pour vocation de communiquer entre les fonds riverains mais au contraire de desservir seulement le lot appartenant aux époux [Y] et [C] [Z] depuis la voie publique.

Par conséquent, les consorts [G] ne sont pas fondés à solliciter une servitude de passage sur la parcelle YA n° [Cadastre 1] au profit des parcelles YA n° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6] (anciennement YA n° [Cadastre 2]), propriété des consorts [G]. Le jugement dont appel sera donc réformé.

Par suite, les consorts [G] devront fermer l'accès qu'ils ont aménagé depuis leurs fonds sur le passage YA n° [Cadastre 1], dans un délai de trois mois à compter du présent arrêt, sous astreinte de 50 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée.

Dès lors qu'il est mis fin à l'atteinte au droit de propriété, les époux [Y] et [C] [Z] ne justifient pas d'un préjudice distinct. Ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

Sur la demande subsidiaire des consorts [G]

Elle est formée, à titre subsidiaire, suite à l'arrêt avant dire droit, sur une question qui n'était pas posée par la cour aux consorts [G].

La question préjudicielle constitue une exception de procédure qui en application de l'article 74 du code de procédure civile doit être soulevée avant toute défense au fond.

Cette exception, soulevée par les intimées en cause d'appel, postérieurement à leurs écritures au fond, de surcroît sur un arrêt avant dire droit qui ne les interrogeait pas de ce chef, doit être déclarée irrecevable.

Sur les demandes annexes

Les consorts [G] supporteront les dépens d'appel et de première instance, réformant la décision dont appel.

Au regard de l'équité, ils seront condamnés à payer aux époux [Y] et [C] [Z] et à la commune de [Localité 10], la somme de 3 000 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, avant dire droit,

Dans la limite de sa saisine,

Vu les arrêts avant dire droit des 16 mars 2021 et 20 septembre 2022 ;

Déclare recevable l'intervention volontaire de Mme [X] [H] épouse [G], Mme [R] [G] et Mme [S] [G],

Constate que les consorts [G] ne forment plus de demande :

- au titre de la propriété de la parcelle YA n° [Cadastre 1], le litige ayant opposé sur cette question les époux [Y] et [C] [Z] et la commune de [Localité 10],

- au titre de la rectification d'erreur matérielle de l'acte authentique du 18 novembre 1971 auquel ils sont tiers,

Rappelle que dans le dernier état des conclusions de la commune de [Localité 10] et des époux [Y] et [C] [Z], les dispositions du jugement qui ont :

- déclaré les époux [Z] propriétaires de la parcelle cadastrée section YA n° [Cadastre 1] d'une consistance de 200 m², consistant en un chemin reliant la maison des époux [Z] à la [Adresse 15], aux droits duquel se trouve la commune de [Localité 10] selon l'acte authentique en date du 24 septembre 1991,

- dit que la décision vaudra titre de propriété après publication au service de la publicité foncière par le notaire instrumentaire choisi pour réaliser les formalités, aux frais avancés des époux [Z] mais supportés définitivement par la commune de [Localité 10] et M. [G] et les condamne, in solidum, à les rembourser,

ne sont plus critiquées devant la cour,

Confirme le jugement de ces chefs,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes en dommages et intérêts formulées tant par les époux [Z] que par M. [G],

Réforme le jugement en ce qu'il a :

- déclaré M. [G] titulaire d'une servitude de passage sur le chemin cadastré section YA n° [Cadastre 1] appartenant aux époux [Z] et visant à relier les logements édifiés à l'arrière de la propriété de M. [G] à la route départementale 936,

- rejeté la demande des époux [Z] tendant à voir fermer l'accès créé par M. [G] sur le chemin litigieux,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Statuant à nouveau,

Dit que les conditions des articles 682, 693, 694, L 162-1 du code rural ne sont pas réunies,

Déboute les consorts [G] de leur demande tendant à se voir reconnaître une servitude de passage sur le chemin cadastré section YA n° [Cadastre 1],

Fait injonction à M. [K] [G], Mme [X] [H] épouse [G], Mme [R] [G] et Mme [S] [G] de fermer l'accès qu'ils ont aménagé depuis leurs fonds sur le passage YA n° [Cadastre 1], dans un délai de trois mois à compter du présent arrêt, sous astreinte de 50 € par jour de retard, pendant une période de trois mois à l'issue de laquelle l'astreinte pourra être liquidée,

Déclare irrecevable l'exception de question préjudicielle formée par les consorts [G] dans leurs écritures du 10 novembre 2022,

Condamne M. [K] [G], Mme [X] [H] épouse [G], Mme [R] [G] et Mme [S] [G] in solidum à payer aux époux [Y] et [C] [Z] et à la commune de [Localité 10], la somme de 3 000 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel et en première instance,

Condamne M. [K] [G], Mme [X] [H] épouse [G], Mme [R] [G] et Mme [S] [G] in solidum aux dépens d'appel et de première instance, dont distraction au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande.

Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Carole DEBON Caroline DUCHAC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18/00782
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;18.00782 ?
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