ARRET No
R.G : 05/01975
M.H.P./R.B.
X...
C/
Y...
INFIRMATION
COUR D'APPEL DE POITIERS
3ème Chambre Civile
ARRET DU 04 JUILLET 2007
APPELANT :
Monsieur Michel X...
né le 25 Avril 1944 à PONS (17)
...
17800 PONS
représenté par la SCP PAILLE & THIBAULT, avoués à la Cour
assisté de Me Sylvie Z..., avocat au barreau de SAINTES
Suivant déclaration d'appel du 23 Juin 2005 d'un jugement rendu le 5 Avril 2005 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINTES.
INTIME :
Monsieur Jean-Baptiste Y...
né le 23 Février 1934 à PONS (17)
...
17800 PONS
représenté par la SCP MUSEREAU & MAZAUDON, avoués à la Cour
assisté de Me Romuald A..., Collaborateur de Me Laurence A..., avocats au barreau de SAINTES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Chantal MECHICHE, Présidente,
Madame Marie-Hélène PICHOT, Conseiller,
Monsieur Thierry RALINCOURT, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier, présent uniquement aux débats,
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
DEBATS :
A l'audience publique du 03 Avril 2007,
La Présidente a été entendue en son rapport,
Les Conseils des parties ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour être mise à disposition des parties au greffe le 06 Juin 2007, puis prorogé au 4 juillet 2007,
Ce jour, a été rendu, contradictoirement et en dernier ressort, l'arrêt dont la teneur suit :
ARRET :
Statuant sur appel régulièrement interjeté par Michel X... d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINTES du 5 avril 2005 qui a :
- débouté Michel X... de sa demande tendant à faire constater l'irrecevabilité de l'action pétitoire du demandeur,
- déclaré Jean-Baptiste Y... propriétaire du vestibule du rez de chaussée de la maison d'habitation situées aux CHARTRES, commune de PONS,
- dit que Michel X... devra libérer ledit vestibule de sa personne, ses biens et tous occupants de son chef,
- dit n'y avoir lieu à ordonner de mesure d'instruction complémentaire,
- dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Vu les dernières conclusions de Michel X... du 20 mars 2007 qui demande à la Cour de :
- déclarer irrecevables les demandes de Jean-Baptiste Y...,
- dire que le vestibule est la copropriété de Messieurs X... et Y...,
- subsidiairement, constater l'existence d'une prescription acquisitive sur le vestibule à son bénéfice,
- encore plus subsidiairement, dire que Michel X... bénéficie d'un droit de passage dans le vestibule pour accéder à l'escalier,
- condamner Jean-Baptiste Y... à lui payer 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- condamner le même à lui payer 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Vu les dernières conclusions de Jean-Baptiste Y... du 22 janvier 2007 qui demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter Michel X... de ses demandes, le condamner à lui payer 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Vu l'ordonnance de clôture du 28 mars 2007,
Par donation partage du 29 septembre 1920, Xavier Y... et Marie-Madeleine B... ont partagé leurs biens entre leurs deux fils François-Baptiste Y... et Pierre-François Y....
Deux lots avaient été constitués et , entre autres biens, François -Baptiste Y... a reçu la partie Est d'une maison de maître située aux CHARTRES, commune de PONS alors que son frère Pierre-François Y... recevait la partie Ouest de cette maison.
Jean-Baptiste Y..., fils de François-Baptiste Y..., est devenu propriétaire du lot de son père dans la maison d'habitation au décès de ses parents, suivant acte de partage passé le 9 septembre 1972.
Par acte du 2 décembre 1976, Michel X..., petit fils de Pierre-François Y..., a reçu de sa mère ce qui avait été le lot de son grand père dans la maison.
Le litige entre les deux parties porte sur la propriété d'une pièce qu'elles appellent, dans les actes de procédure et les conclusions, le "vestibule", soit une pièce située au pied de l‘escalier sur laquelle donnent les portes des deux salles à manger ainsi que la porte d'entrée de la façade confrontant le jardin.
Jean-Baptiste Y... a saisi le Tribunal de Grande Instance de SAINTES afin de voir reconnaître son droit de propriété sur cette pièce , droit contesté par Michel X... qui estime partager la propriété avec son voisin..
La juridiction de première instance a donné satisfaction à Monsieur Y....
Michel X... a interjeté appel de cette décision et, devant la Cour, les parties ont repris l'exposé de leurs moyens respectifs.
Sur la recevabilité de l'action de Jean-Baptiste Y...
Michel X... soutient à l'appui de son action que, faute par Jean-Baptiste Y... de justifier de la publication de l'acte introductif d'instance à la Conservation des Hypothèques, son action, qui porte sur la contestation d'un droit de propriété immobilier constaté dans un acte régulièrement publié, doit être déclarée irrecevable.
Jean-Baptiste Y... fait valoir que l'action qu'il a intentée ne fait pas partie des demandes soumises à publication. Subsidiairement, il indique avoir fait publier l'assignation à la Conservation des Hypothèques le 18 octobre 2004.
Il résulte des articles 28 et 30 du Décret du 4 janvier 1955 que seules les demandes en justice tendant à obtenir la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort sont soumises à publication au Bureau des Hypothèques du lieu d'implantation des immeubles.
L'action introduite par Jean-Baptiste Y... est une action en revendication de propriété. Elle ne fait pas partie des actions pour lesquelles la publication de l'assignation est obligatoire.
La demande de Jean-Baptiste Y... est recevable et le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la propriété du vestibule
Michel X... fait valoir à l'appui de son action que :
- l'acte de propriété de Jean-Baptiste Y... comprend un vestibule mais ce terme est ambigu,
- son propre acte de propriété renvoie expressément à celui de sa mère, du 15 septembre 1958 comportant donation de ses parents et indiquant que Pierre-François Y... a donné à sa fille "une maison..ayant cuisine, chambre et souillarde , vestibule et escalier",
- il est donc fondé à se prévaloir comme Jean-Baptiste Y... d'une propriété sur le vestibule,
- il a fait réparer à ses frais la porte d'entrée et il a fait effectuer à cet endroit des travaux de peinture,
- sa mère entreposait des meubles dans cette pièce,
- l'acte de 1920 dispose que l'escalier est commun et donc le vestibule, qui sert à y accéder, l'est aussi, ainsi que l'indiquent les attestations qu'il fournit,
- la donation partage de 1920 a réalisé une attribution à chacun des frères en parfaite symétrie et celle -ci serait rompue si le vestibule était reconnu propriété exclusive de Jean-Baptiste Y...,
- subsidiairement, ses auteurs ont prescrit pour son compte,
- encore plus subsidiairement, un droit de passage jusqu'à l'escalier doit lui être reconnu,
Jean-Baptiste Y... soutient que :
- l'acte de 1920 place le vestibule dans le lot de son grand-père alors qu'il décide autrement pour l'escalier,
- les actes avancés par Michel X... sont en contradiction avec cet acte auquel il convient de se référer puisqu'il est commun aux parties,
- l'acte de 1920 est clair et n'est pas susceptible d'interprétation,
- c'est par tolérance que l'appelant, et non sa mère, a entreposé ses meubles dans cette pièce,
- il a participé à l'entretien du couloir autant que l'appelant,
- Michel X... a fait peindre le vestibule, cela ne signifie pas qu'il en est propriétaire,
- il entrepose seul des objets dans le placard sous l'escalier car seul celui-ci est commun,
- les attestations produites par Michel X... sont de complaisance et doivent être écartées,
En application de l'article 544 du Code Civil, pour déterminer la propriété d'un bien, les juges doivent examiner les titres respectifs des parties.
Il est admis que, lorsqu'il existe un acte commun aux parties à la revendication immobilière, les stipulations de cet acte doivent prévaloir sur les énonciations des actes postérieurs concernant chaque lot.
En l'espèce, Michel X... et Jean-Baptiste Y..., venant aux droits de leurs auteurs, se partagent une maison dite "de maître" qui a appartenu à leurs grands parents Xavier Y... et Marie-Madeleine B....
Suivant les termes d'une donation partage du 29 septembre 1920, les époux C... ont divisé en deux lots leur maison, chaque lot comprenant, au rez de chaussée et aux étages, la moitié de la surface habitable. L'escalier et les paliers ont été déclarés communs.
Chacun des fils a reçu un lot et l'a transmis à ses ayants droits.
Il convient donc de se référer exclusivement aux dispositions de l'acte commun qui a fixé les droits respectifs des parties sur la chose, soit la donation partage du 29 septembre 1920.
La composition du lot no1 est rédigée ainsi qu'il suit :" la partie levant de la maison de maître...comprenant ; au rez de chaussée une grande pièce, un vestibule, au nord un bâtiment de servitude..., au premier étage une chambre à coucher, au deuxième étage une autre chambre avec grenier au dessus, comme séparation des deux lots un escalier qui part du rez de chaussée et qui monte au grenier, ledit escalier sera commun entre les deux lots".
Pour le lot no2, l'acte prévoit qu'il se compose de :"la partie couchant de la maison de maître .., comprenant au rez de chaussée une grande pièce, une cuisine, au premier étage une chambre avec grenier au dessus, comme séparation des deux lots, un escalier..ledit escalier sera commun entre les deux lots".
La Cour relève que la donation a attribué à chaque lot une propriété identique en superficie et en volume à celle de l'autre.
La volonté des donateurs était de partager de façon symétrique les biens, ainsi la maison elle même a-t'elle été divisée en deux, horizontalement et verticalement.
Chaque lot, au terme de cet acte, a bénéficié de deux pièces au rez de chaussée.
Cette répartition se retrouve dans la consultation du plan actuel du rez de chaussée de la maison des CHARTRES qui montre que chacune des parties dispose d'une pièce dénommée salle à manger donnant sur le jardin et d'une seconde pièce intitulée cuisine située à l'arrière et disposant d'une porte par laquelle chaque famille entre et sort privativement.
On retrouve donc la grande pièce dans chacun des lots, soit la salle à manger, et l'autre pièce, intitulée cuisine pour le lot no2 , et pour l'autre lot, appelée avant vestibule et qui est devenue cuisine.
La Cour, s'en tenant aux termes précis de l'acte de 1920, constate donc que le "vestibule" attribué en 1920 au lot no1 est devenu la cuisine de ce lot et n'est pas la pièce revendiquée par Michel X....
Les parties ont défini l'objet de leur litige comme étant la propriété exclusive ou commune de la pièce qui ouvre sur le jardin et dans laquelle l'escalier prend naissance, qu'ils dénomment " vestibule", et qui de fait est actuellement la seule pièce du rez de chaussée à répondre à la définition précitée.
Cette pièce n'est attribuée privativement à aucun bénéficiaire dans l'acte de 1920.
Cet acte prévoit que l'escalier est commun aux deux lots.
L'accès à cet escalier ne peut se faire que par la pièce dénommée vestibule qui a été nécessairement comprise dans l'emprise de l'escalier et qui est donc indivise.
En pratique, la Cour note qu'il ressort des attestations de Francine D..., Jean-Michel et Nathalie X... que dans les années précédant le litige cette pièce ne faisait pas l'objet d'une occupation privative de la famille Y... mais était d'usage commun au même titre que l'escalier.
L'usage antérieur qui en a été fait correspond aux termes de l'acte initial.
Il y a donc lieu de considérer que la pièce revendiquée est, comme l'escalier, commune aux deux lots et propriété indivise de chacun des deux propriétaires.
Chacune des parties ayant utilisé indivisément cette partie de la maison pour rejoindre les étages lui appartenant privativement, il ne peut être invoqué aucune prescription acquisitive à titre privatif.
S'agissant d'une pièce indivise, tout fondement sur une servitude de passage est inopérant.
Le jugement de première instance sera infirmé.
Sur les dommages et intérêts
Michel X... sollicite la condamnation de Jean-Baptiste Y... à lui payer la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Il n'apporte cependant pas la preuve que l'intimé à fait dégénérer en abus son droit de faire valoir en justice ses prétentions.
Il sera débouté de sa demande.
Il n'apparaît pas équitable de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au bénéfice de Michel X....
Chacune des parties prendra en charge ses propres dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
INFIRME le jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINTES du 5 avril 2005,
statuant à nouveau,
DIT que la pièce revendiquée par Michel X..., située au pied de l'escalier et comportant une porte donnant sur le jardin à l'avant de la maison des CHARTRES, commune de PONS (17), est la propriété indivise, au même titre que l'escalier, des deux lots établis lors de la donation partage du 29 septembre 1920,
DEBOUTE Jean-Baptiste Y... et Michel X... du surplus de leurs demandes,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
CONDAMNE Jean-Baptiste Y... et Michel X... à prendre en charge chacun leurs propres dépens de première instance et d'appel.
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Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile,
Signé par Madame Chantal MECHICHE, Présidente et Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,