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27/11/2007 | FRANCE | N°07/01070

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 27 novembre 2007, 07/01070


YD/AF













COUR D'APPEL

DE POITIERS



Chambre Sociale



ARRET DU 27 NOVEMBRE 2007







ARRET N 677



AFFAIRE N : 07/01070



AFFAIRE : Yves X... C/ MSA MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE, D.R.A.F. PAYS DE LOIRE NANTES









DEMANDEUR



Monsieur Yves X...


...


53260 ENTRAMMES

Comparant en personne lors de l'audience

assisté de Me Jacques DESBOIS (avocat au barreau de LAVAL)





Suivant déclaration de saisine du 16 Mars 2007 après arrêt de la Cour de Cassation du 31 janvier 2007 cassant et annulant l'arrêt rendu par la Cour d'Appel d'ANGERS le 25 JANVIER 2005 sur appel d'un jugement du 22 MARS 2004 rendu par le Conseil de Pr...

YD/AF

COUR D'APPEL

DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 27 NOVEMBRE 2007

ARRET N 677

AFFAIRE N : 07/01070

AFFAIRE : Yves X... C/ MSA MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE, D.R.A.F. PAYS DE LOIRE NANTES

DEMANDEUR

Monsieur Yves X...

...

53260 ENTRAMMES

Comparant en personne lors de l'audience

assisté de Me Jacques DESBOIS (avocat au barreau de LAVAL)

Suivant déclaration de saisine du 16 Mars 2007 après arrêt de la Cour de Cassation du 31 janvier 2007 cassant et annulant l'arrêt rendu par la Cour d'Appel d'ANGERS le 25 JANVIER 2005 sur appel d'un jugement du 22 MARS 2004 rendu par le Conseil de Prud'Hommes de LAVAL.

DEFENDEUR

MSA MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE

76 boulevard Lucien Daniel

53082 LAVAL CEDEX 9

Représentée par Me LANDAIS, avocat suppléant Me Gervais OUTIN (avocat au barreau de LAVAL)

D.R.A.F. PAYS DE LOIRE NANTES

Service Régional de l'inspection du travail

12 rue Menou - B.P 23523

44000 NANTES

Non comparante ni représentée lors de l'audience.

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Président : Yves DUBOIS, Président

Conseiller : Isabelle GRANDBARBE, Conseiller

Conseiller : Jean Yves FROUIN, Conseiller

Greffier : Christine PERNEY, Greffier uniquement présente lors des débats.

DEBATS :

A l'audience publique du 16 Octobre 2007,

Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.

Vu les conclusions écrites du Ministère Public,

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 20 novembre 2007, puis prorogé au 27 novembre 2007,

Ce jour a été rendu contradictoirement et en dernier ressort, l'arrêt suivant :

ARRET :

Monsieur X... est salarié de la Caisse de Mutualité Sociale Agricole de la Mayenne puis de celle de Mayenne, Orne et Sarthe depuis octobre 1967. Il y occupe des fonctions d'informaticien avec actuellement la qualification d'administrateur réseau et système. Il est également représentant du personnel depuis l974 et délégué syndical CFDT, secrétaire du comité d'entreprise depuis plusieurs années et délégué national auprès de la Fédération Nationale des Caisses de Mutualité Sociale Agricole.

Le 23 Octobre 2002, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution de son contrat de travail.

Par jugement du 22 Mars 2004, le Conseil des Prud'hommes de Laval a condamné la M.S.A. au paiement d'une somme de 3.500 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination sur l'évolution de la carrière et de la rémunération, mais a débouté le salarié de ses autres demandes.

Statuant par Arrêt du 25 Janvier 2005 sur l'appel de Monsieur X..., la Cour d'Appel d'Angers a rejeté l'ensemble de ses prétentions.

Cette décision a été cassée et annulée en toutes ses dispositions par Arrêt de la Cour de Cassation du 31 Janvier 2007.

Monsieur X... a régulièrement saisi la Cour d'Appel de céans, désignée comme Cour de renvoi, pour voir condamner la M.S.A. à lui payer la somme de 63.339,69 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale et celle de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par voie d'appel incident, la Caisse de Mutualité Sociale Agricole Mayenne - Orne - Sarthe entend voir débouter Monsieur X... de ses demandes et réclame la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles.

La Direction Régionale de l'Agriculture et de la Forêt des Pays de la Loire ne s'est pas présentée ni fait représenter, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 7 Mai 2007.

L'affaire a été communiquée au Ministère Public qui s'en rapporte.

MOTIFS

Vu, développées oralement à l'audience, les conclusions reçues au Greffe les 9 Août et 15 Octobre 2007 pour l'appelant et le 8 Octobre pour l'intimée.

Monsieur X... soutient que le déroulement de sa carrière a été entravé en raison de son activité syndicale, qu'il a été en butte à divers abus de l'employeur et même privé de certains droits liés à l'exercice de ses mandats. Il fonde sa demande sur la violation par la M.S.A. des dispositions des articles L 122-45 et L 412-2 du Code du Travail ainsi que de l'article 11-3 de la Convention Collective des employés de M.S.A.

Concernant son déroulement de carrière et l'attitude de l'employeur à son égard, l'appelant souligne qu'il n'a pas bénéficié normalement de changements d'échelon entre 1974 et 2000, ni depuis cette année-là, et que l'attribution de celui qu'il a obtenu en 2000 a été retardée sans motif. Il affirme avoir été pénalisé lors de l'application d'une nouvelle grille de classification, puis au moment de la fusion des Caisses de Mutualité Sociale Agricole de la Mayenne, de l'Orne et de la Sarthe, ainsi qu'à l'occasion de l'attribution de certains postes ou de promotions. Il estime que le non respect par l'employeur, à certaines époques, d'obligations conventionnelles concernant la périodicité d'attribution d'échelons ou l'organisation des entretiens d'évaluation, n'est pas la conséquence de simples négligences mais traduit bien à son égard une attitude discriminatoire et abusive, qui s'est également manifestée par un contrôle illicite de son activité. Enfin, il dénonce le défaut de mise en oeuvre en ce qui le concerne d'un plan individuel d'adaptation tel que prévu par la Convention Collective, malgré l'importance de ses mandats.

La M.S.A. justifie par la production de tableaux comparatifs de ce que l'évolution du classement indiciaire de Monsieur X... a été au moins égale à celle des salariés dont la situation est comparable.

Un premier tableau permet de comparer la progression de 22 salariés engagés à la même époque que l'appelant et à des coefficients proches ; il en résulte que l'évolution indiciaire de Monsieur X... s'est située dans la moyenne jusqu'en 1990 mais sensiblement au-dessus de la moyenne à partir de cette date et de manière constante jusqu'en 2007. La même constatation s'impose à l'examen d'autres tableaux récapitulant pour les salariés de même niveau que l'appelant en 2000 les conditions de mise en oeuvre d'une nouvelle classification des emplois à l'époque et l'évolution ultérieure des classements indiciaires.

Monsieur X... estime que ces comparaisons ne sont pas pertinentes, le premier tableau concernant des salariés qui ont suivi des filières très différentes et les autres des salariés avec des anciennetés très variables. Il considère que seule peut être comparée à la sienne la carrière de Monsieur A..., qui a pratiquement la même ancienneté que lui, un coefficient proche à l'embauche et des fonctions similaires, mais dont la classification et la rémunération ont évolué à partir de 1990 de manière beaucoup plus favorable. Il note également une différence sensible avec Monsieur B..., qui exerce selon lui la même activité mais a une ancienneté de dix ans inférieure à la sienne.

En premier lieu cependant, les éléments de comparaison proposés par la M.S.A. permettent une appréciation objective dès lors qu'ils concernent des personnels de même niveau en début de carrière dont on peut vérifier qu'ils ont bénéficié de possibilités d'évolution comparables quelles qu'aient été les "filières" suivies par les uns et les autres en fonction des mutations technologiques et des réorganisations successives des services.

Ces mêmes éléments, dont il résulte que l'appelant n'a nullement été pénalisé en termes de déroulement de carrière par rapport à l'ensemble de ses collègues, sont de nature à rendre inopérants ses arguments tirés de l'insuffisance du nombre d'attributions d'échelons, de l'irrégularité des entretiens individuels et de certains refus de promotions. Au demeurant, l'on ne peut apprécier la régularité de l'avancement indiciaire en fonction de la seule périodicité des attributions d'échelons puisque lorsqu'elles interviennent les promotions s'y substituent, et si l'on ajoute les promotions aux attributions d'échelons (pièce 72 du dossier de la M.S.A.), le rythme des augmentations indiciaires dont a bénéficié Monsieur X... est très proche de la périodicité "idéale" de trois ans qu'il indique. Le délai le plus long entre deux attributions d'échelon se situe entre 1995 et 2000; c'est également la période au cours de laquelle les entretiens individuels annuels n'ont pas eu lieu. La M.S.A. justifie toutefois de ce qu'au cours de cette période ses services, et spécialement l'encadrement, ont été accaparés à la fois par une "migration informatique" importante et par la mise en oeuvre d'un projet de Convention Collective, de sorte que l'organisation des entretiens individuels annuels instaurés fin 1995 a été différée pour l'ensemble du personnel (pièces 70 et 71), ce qui exclut toute discrimination à l'égard de Monsieur X.... Concernant celui-ci, dès la fin de cette période délicate l'employeur a satisfait à ses obligations conventionnelles puisqu'un entretien d'évaluation a eu lieu au début de l'année 2000 et qu'une attribution d'échelon a été accordée au mois de Mai de cette même année; contrairement à ce que soutient l'appelant, la M.S.A. n'était nullement tenue de lui attribuer cet échelon au début de l'année, et l'Inspecteur du Travail a lui-même vérifié que cette décision avait été prise pour des raisons objectives. L'employeur a encore justifié par des raisons objectives, tenant aux observations du nouveau supérieur hiérarchique de Monsieur X... à l'occasion de l'entretien individuel annuel de Décembre 2006, le fait que le passage au 2ème degré du niveau 5 ait eu lieu au bout de 18 mois et non d'un an comme l'exigeait l'appelant, sachant que le délai maximum prévu par la Convention Collective est de 3 ans et qu'à la suite du transfert de l'essentiel de son service sur un autre site en 2005 Monsieur X... avait été reclassé sans changement de lieu de travail dans un emploi d'Administrateur Réseau et Systèmes avec promotion au niveau 5 (cadre), ce qui rendait parfaitement légitime le souhait de l'employeur de vérifier l'adaptation au poste.

Les autres incidents dénoncés par Monsieur X... ne peuvent être non plus considérés comme révélateurs d'un comportement abusif ou discriminatoire de la part de l'employeur, compte tenu des explications et justifications apportées par celui-ci. Il en est ainsi de la contestation par le salarié de sa nouvelle classification lors de la mise en place de la grille conventionnelle en 2000, sachant que cette classification a été revue à la suite de ses observations, du refus de passage au second degré en 2002, justifié par l'avis très circonstancié du chef de service, ainsi que des faits qualifiés par l'appelant de "surveillance de son activité": il s'agissait en réalité d'une vérification de l'établissement des fiches de suivi de l'espace disque sur un serveur. Le simple pointage de ces fiches à fin de contrôle de l'effectivité du suivi ne pouvait constituer une surveillance illicite de l'activité de Monsieur X..., ne serait-ce que parce que leur tenue ne lui incombait pas exclusivement.

Il convient d'examiner en second lieu les causes de la différence d'évolution de carrière entre Monsieur X... et Monsieur A..., mais non entre Monsieur X... et Monsieur B... dont le parcours professionnel n'est pas comparable puisque le second, qui travaillait au sein de la Caisse de Mutualité Sociale Agricole de la Sarthe avant la fusion, avait le statut de cadre depuis 1986, exerçait les fonctions d'adjoint au chef d'exploitation depuis 1994 et avait accepté d'aller travailler pendant deux ans à Alençon pour la mise en place de la fusion.

Il est indéniable en revanche que le parcours professionnel de Messieurs X... et A... est pratiquement similaire puisqu'engagés à la même époque à un niveau équivalent ils ont eu le même avancement indiciaire jusqu'en 1993, et qu'ils ont exercé longtemps des fonctions similaires dans le domaine informatique.

C'est à partir de 1993 que, Monsieur A... ayant été nommé "chef de salle", sa classification et sa rémunération ont été supérieures à celles de Monsieur X.... Celui-ci soutient à la fois que le rejet de sa candidature au profit de celle de son collègue en 1993 était arbitraire, et que la différence de classification et donc de rémunération qui s'en est suivie a été tout aussi injustifiée, puisqu'il n'existe selon lui aucune différence de niveau de fonction.

Cependant, les éléments produits par la M.S.A. démontrent que, si les fonctions des deux salariés sont demeurées proches, la nomination de Monsieur A... au poste de chef de salle et la différence de classification et de rémunération qui s'en est suivie ont été et demeurent justifiées par des raisons objectives étrangères à l'exercice par Monsieur X... de ses mandats syndicaux et représentatifs.

Ainsi, il n'est pas contesté que le choix du titulaire du poste de chef de salle a été effectué entre trois candidats, et pas seulement entre Monsieur X... et Monsieur A.... De plus, tant les descriptifs des postes que les écrits successifs du chef de service, supérieur hiérarchique des deux salariés, démontrent la pertinence du choix de Monsieur A... et de la différence de classification, que ce soit pour des raisons de compétence technique (Monsieur X... ne maîtrisait pas la connaissance du câblage et du réseau, il était moins efficace sur les problèmes complexes) ou pour des raisons tenant aux qualités professionnelles, sachant que le manque de motivation de l'appelant a été constaté à différentes époques de même qu'une certaine insuffisance relationnelle, ce qui n'en faisait pas le meilleur candidat pour un poste qui comportait une mission essentielle de coordination, et ce qui explique également qu'il ne pouvait pas remplacer Monsieur A... dans toutes ses fonctions, alors que l'inverse était prévu.

Il reste à rechercher si, comme le soutient Monsieur X..., la M.S.A. a manqué à son obligation de mettre en oeuvre un plan individuel d'adaptation pour tenir compte du temps passé à l'exercice de ses mandats.

Aux termes des articles 11 à 11-3 de l'avenant no1 de révision de la Convention Collective signé le 9 Février 2001 le plan individuel d'adaptation est destiné à permettre aux représentants syndicaux et aux représentants du personnel de bénéficier de bilans de compétences, de formations syndicales et professionnelles, et à l'employeur de s'assurer que l'évolution de leur situation individuelle ne présente pas d'anomalie par rapport à celle des autres salariés relevant de la même catégorie professionnelle.

Il est précisé à l'article 11-1 que les dispositions relatives au plan individuel d'adaptation s'appliquent aux délégués syndicaux, aux représentants syndicaux au comité d'entreprise, aux membres élus du comité d'entreprise, du C.H S.C.T. et de la délégation unique du personnel ainsi qu'aux délégués du personnel, investis, en tant que titulaires, d'un ou plusieurs mandats, et utilisant, pour exercer ce ou ces mandats, leurs crédits d'heures pour une durée supérieure ou égale à un quart de la durée légale du temps de travail. Cette condition de durée s'apprécie chaque année, au 1er septembre à partir de l'examen du premier semestre. Sont également pris en compte dans le calcul de la durée susmentionnée l'exercice des mandats nationaux et l'utilisation de crédits de jours nationaux visés à l'article 10-1, 2o).

À juste titre, la M.S.A. considère au vu du texte susvisé que la durée à prendre en compte est uniquement celle correspondant aux crédits d'heures et de jours nationaux utilisés par le salarié, mais non, par exemple, le temps passé en réunion avec l'employeur sur convocation de celui-ci.

Dès lors, les décomptes présentés par les parties permettent de conclure que Monsieur X... n'a jamais réuni depuis 2001 les conditions pour bénéficier d'un plan individuel d'adaptation.

Au demeurant, il ne prétend pas avoir jamais été lésé dans le domaine de la formation et de l'adaptation à l'emploi, et les développements ci-dessus montrent qu'il a eu un déroulement de carrière exempt de toute discrimination liée à l'exercice de ses mandats.

Il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris et de débouter Monsieur X... de ses demandes.

Enfin, il est équitable de ne pas faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris et,

Statuant à nouveau,

Déboute Monsieur Yves X... de ses demandes.

Déboute la Caisse de Mutualité Sociale Agricole Mayenne Orne Sarthe de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Condamne Monsieur X... aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé et signé par Monsieur Yves DUBOIS, Président de Chambre, assisté de Madame Annie FOUR, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Numéro d'arrêt : 07/01070
Date de la décision : 27/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Laval


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-27;07.01070 ?
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