Ordonnance n° 45
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20 Octobre 2022
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No RG 22/01433 -
No Portalis DBV5-V-B7G-GR3D
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[C] [Z]
C/
[G] [D]
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Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DE LA PREMIÈRE PRÉSIDENTE
Contestation d'honoraires d'avocat
Rendue le vingt octobre deux mille vingt deux
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt deux septembre deux mille vingt deux par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente de la cour d'appel de POITIERS, assistée de Madame Inès BELLIN, greffier, lors des débats.
ENTRE :
Madame [C] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 4]
non comparante, ni représentée
DEMANDEUR en contestation d'honoraires,
D'UNE PART,
ET :
Maître [G] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparant en personne
DEFENDEUR en contestation d'honoraires,
D'AUTRE PART,
ORDONNANCE :
- Contradictoire
- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- Signée par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par lettre enregistrée le 4 février 2022, Madame [C] [Z] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Poitiers d'une contestation des honoraires facturés par Maître [G] [D].
Par décision du 4 mai 2022, le bâtonnier a taxé les honoraires de Maître [G] [D] à la somme de 600 euros hors taxes, soit 720 euros toutes taxes comprises.
La décision du bâtonnier a été notifiée à Madame [C] [Z] le 13 mai 2022, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 4 juin 2022.
L'affaire a été appelée à l'audience du 22 septembre 2022.
Bien que régulièrement convoquée, Madame [C] [Z] n'a pas comparu à l'audience et n'était pas non plus représentée.
Madame [C] [Z] expose, à l'appui de son recours, avoir confié la défense de ses intérêts à Maître [K] [I] dans le cadre d'un litige prud'homal, ce dernier ayant transféré son dossier à Maître [G] [D] à la suite de sa démission du barreau de Poitiers.
Elle indique avoir perdu confiance en son avocat, Maître [G] [D], et avoir confié la défense de ses intérêts à un autre avocat.
Elle fait valoir que les honoraires réclamés par Maître [G] [D] sont excessifs au regard des diligences accomplies.
Madame [C] [Z] expose encore qu'aucune convention d'honoraires n'a été régularisée à la suite du transfert de son dossier et que son avocat ne l'a pas tenue informée du montant de ses honoraires.
Maître [G] [D], présent à l'audience, expose que le dossier de Madame [C] [Z] lui a été transféré par son confrère, Maître [K] [I], et qu'il était convenu un honoraire de 837 euros correspondant au restant des honoraires couverts par la protection juridique de Madame [C] [Z] pour la seule plaidoirie du dossier.
Il fait valoir que le travail accompli dans le dossier s'est révélé plus important que prévu pour satisfaire aux demandes de sa cliente.
Maître [G] [D] indique avoir facturé à Madame [C] [Z] un honoraire de 600 euros hors taxes sur la base d'un taux horaire de 125 euros hors taxes et avoir minoré le nombre d'heures de travail.
Il sollicite la condamnation de Madame [C] [Z] à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à une amende civile de 50 euros pour procédure abusive.
MOTIFS
Sur la recevabilité :
Sur la convention d'honoraires:
Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.
En l'espèce, le recours de Madame [C] [Z] est recevable et régulier en la forme.
Sur le fond :
Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret no91-1197 du 27 novembre 1991.
Il résulte de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971.
En l'espèce, il est constant que malgré le transfert du dossier à Maître [G] [D] par Maître [K] [I], il ressort des échanges de mails que Madame [C] [Z] a donné mandat à Maître [G] [D] pour intervenir dans le cadre de la procédure prud'homale l'opposant à son employeur.
Aucune convention d'honoraires n'a été signée par les parties.
Sur la responsabilité de l'avocat :
Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.
Sur les diligences accomplies:
Au regard des éléments versés aux débats, Maître [G] [D] justifie notamment avoir étudié le dossier de Madame [C] [Z], s'être entretenu avec elle lors de rendez-vous téléphoniques, avoir échangé de nombreux mails avec sa cliente, rédigé de nouvelles conclusions et assuré la représentation de Madame [C] [Z] devant le conseil des prud'hommes lors des audiences de mise en état des 12 octobre et 9 novembre 2021.
Ces diligences ont été facturées selon demande d'honoraires no20 340/2022 en date du 6 janvier 2022 d'un montant de 600 euros hors taxes, soit 720 euros toutes taxes comprises, sur la base d'un taux horaire de 125 euros hors taxes.
En l'espèce, il y a lieu de constater, à la lecture du courrier de saisine du bâtonnier, que Madame [C] [Z] ne contestait pas les diligences accomplies par Maître [G] [D] dans son dossier, qu'elle estimait alors à 4 heures de travail.
Les honoraires facturés par Maître [G] [D] correspondent à moins de 5 heures de travail ce qui n'a rien d'excessif compte-tenu du travail réalisé dans le dossier de Madame [C] [Z].
Ainsi, il apparaît que la facturation appliquée est parfaitement justifiée au regard des diligences accomplies et n'excède pas les tarifs habituellement pratiqués.
En conséquence, la décision du bâtonnier sera confirmée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Succombant à la présente instance Madame [C] [Z] sera condamnée à payer Maître [G] [D] la somme de 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la demande de condamnation à une amende civile pour procédure abusive :
Maître [G] [D] n'établit pas que Madame [C] [Z] aurait formé un recours contre la décision du bâtonnier par malveillance manifeste ou avec une légèreté blâmable caractérisant un abus du droit d'ester en justice.
En conséquence, la demande de Maître [G] [D] tendant à la condamnation de Madame [C] [Z] à une amende civile de 50 euros pour procédure abusive sera rejetée, aucun abus du droit d'ester en justice n'étant caractérisé à son encontre.
Sur les dépens :
L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Succombant à la présente instance, Madame [C] [Z] en supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Gwenola Joly-Coz, première présidente, statuant publiquement et par décision contradictoire,
Déclarons le recours de Madame [C] [Z] recevable et régulier en la forme ;
Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 4 mai 2022 ;
En conséquence,
Taxons à la somme de 720 euros toutes taxes comprises les honoraires dus par Madame [C] [Z] à Maître [G] [D] ;
Enjoignons à Madame [C] [Z] de verser à Maître [G] [D] la somme de 720 euros toutes taxes comprises ;
Disons ne pas y avoir lieu au prononcé d'une amende civile ;
Condamnons Madame [C] [Z] à payer à Maître [G] [D] une indemnité de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons Madame [C] [Z] aux dépens.
La greffière, La première présidente,