MHD/PR
ARRET N° 703
N° RG 20/00700
N° Portalis DBV5-V-B7E-F7IW
[G]
C/
URSSAF POITOU-CHARENTES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 janvier 2020 rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de POITIERS
APPELANT :
Monsieur [B] [G]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non comparant, ni représenté
INTIMÉE :
URSSAF POITOU-CHARENTES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
et dont l'adresse de correspondance est :
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Laurent BENETEAU substitué par Me Anaëlle RABALLAND de la SCP BENETEAU, avocats au barreau de LA CHARENTE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, les parties ou leurs conseils ne s'y étant pas opposés, l'affaire a été débattue le 28 septembre 2022, en audience publique, devant :
Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente qui a présenté son rapport
Madame Valérie COLLET, Conseiller
Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente
Madame Valérie COLLET, Conseiller
Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT
ARRÊT :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, et par Madame Patricia RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur [B] [G] - qui exerce une activité de masseur kinésithérapeute - dispose d'un compte travailleur indépendant et d'un compte praticien auxiliaire médical ouverts auprès de l'Urssaf Poitou-Charentes, laquelle a émis à son encontre quatre contraintes qui lui ont été signifiées le 07 septembre 2016 et qui sont datées respectivement des :
- 29 août 2016 pour une somme de 4.929 € correspondant aux cotisations et majorations de retard restant dues au titre du 4 e trimestre 2015 et du 2 ème trimestre 2016 pour son compte travailleur indépendant,
- 5 septembre 2016 pour une somme de 2.457 € correspondant aux cotisations et majorations de retard restant dues au titre du 1 er trimestre 2016 pour son compte praticien auxiliaire médical,
- 05 septembre 2016 pour une somme de 1.146 € correspondant aux cotisations et majorations de retard restant dues au titre du 1 er trimestre 2016 pour son compte travailleur indépendant,
- 10 octobre 2016 pour une somme de 1.046 € correspondant aux cotisations et majorations de retard restant dues au titre du 3 e trimestre 2016 pour son compte travailleur indépendant.
Par requêtes des 20 septembre et 25 octobre 2016, Monsieur [B] [G] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Poitiers aux fins d'opposition à ces quatre contraintes.
Le 1er janvier 2019, conformément à la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXI ème siècle, l'affaire a été transférée au Pôle social du tribunal de grande instance de Poitiers qui est ensuite devenu à compter du 1er janvier 2020, le Pôle social du tribunal judiciaire de Poitiers lequel, par jugement du 31 janvier 2020, a :
- ordonné la jonction des trois affaires 18/413, 18/414 et 18/415 sous le premier numéro ;
- déclaré recevable le recours formé par Monsieur [B] [G] ;
- déclaré irrecevable pour forclusion l'opposition à contrainte du 5 septembre 2016 pour un montant de 2.457 € concernant le 1er trimestre 2016 (compte auxiliaire médical) ;
- débouté Monsieur [B] [G] de l'ensemble de ses demandes ;
- validé les contraintes et mises en demeure signifiées par l'Urssaf de Poitou-Charentes ;
- condamné Monsieur [B] [G] à payer à l'Urssaf de Poitou-Charentes la somme de 4.639 € (quatre mille six cent trente-neuf euros), concernant les 4 ème trimestre 2015 et 2 ème trimestre 2016, outre les frais de signification au titre des contraintes signifiées le 7 septembre 2016 ;
- condamné Monsieur [B] [G] à payer à l'Urssaf de Poitou-Charentes la somme de 1.146 € (mille cent quarante-six euros) concernant le 1er trimestre 2016 (compte travailleur indépendant) ;
- condamné Monsieur [B] [G] à payer à l'Urssaf de Poitou-Charentes la somme de 712 € (sept cent douze euros), concernant le 3ème trimestre 2016, outre les frais de signification, au titre de la contrainte signifiée le 13 octobre 2016 ;
- donné acte à l'Urssaf de Poitou-Charentes du fait que la contrainte signifiée le 7 septembre 2016 pour un montant de 2.457 € est soldée suite à régularisation des revenus 2016 de Monsieur [B] [G] ;
- condamné Monsieur [B] [G] à payer à l'Urssaf de Poitou-Charentes l'ensemble des frais de signification ;
- condamné Monsieur [B] [G] à payer à l'Urssaf de Poitou-Charentes la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC au titre des frais irrépétibles engagés à l'instance ;
- rappelé qu'en application de l'article R 133-3 du code de la sécurité sociale, la décision du tribunal, statuant sur opposition, est exécutoire de droit à titre provisoire et qu'en application de l'article R 133-6 les frais d'exécution restent à la charge du débiteur ;
- rejeté les autres demandes de chacune des parties ;
- condamné Monsieur [B] [G] aux entiers dépens.
Par lettre recommandée avec accusé de réception, adressée au greffe de la cour le 3 mars 2020, Monsieur [B] [G] a interjeté appel - nullité de cette décision.
***
Par arrêt avant dire droit en date du 20 janvier 2022, la cour d'appel de Poitiers a notamment ordonné la réouverture des débats pour l'audience se tenant devant la chambre sociale de la cour d'appel de Poitiers le 13 avril 2022 à 9 heures 15 aux fins d'assignation de Monsieur [B] [G] par l'Urssaf Poitou - Charentes pour cette date.
Le 13 avril 2022, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 28 septembre 2022 à la demande de Monsieur [B] [G] qui avait téléphoné au greffe le matin de l'audience pour indiquer qu'il avait des problèmes de santé l'empêchant de déférer à sa convocation.
Par acte d'huissier en date du 12 août 2022, Monsieur [B] [G] a été assigné - selon les dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile - à son domicile professionnel - à la requête de l'URSSAF Poitou - Charentes pour comparaître à l'audience du 28 septembre 2022 à 9 heures 15.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
1 ) - Monsieur [B] [G] ' qui s'était vu signifier, par acte d'huissier du 12 octobre 2021, délivré selon les modalités de l'article 658 du code de procédure civile, les conclusions et les pièces de l'organisme social et qui a été régulièrement assigné ' n'a pas sollicité de dispense de comparution, ne comparaît pas et ne se fait pas représenter.
2 ) - Par conclusions reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, l'Urssaf Poitou - Charentes demande à la cour de :
- déclarer l'appel-nullité irrecevable,
- subsidiairement
- déclarer l'appel non soutenu, en l'absence de conclusions régularisées par Monsieur [B] [G],
- confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions,
- rectifier l'erreur matérielle entachant le jugement attaqué et ajouter au dispositif :
« condamne Monsieur [B] [G] à payer une somme de 300 € à titre d'amende civile, sur le fondement de l'article R 144-10 al.5 du code de sécurité sociale ».
- débouter Monsieur [B] [G] de toutes ses demandes fins ou conclusions plus amples ou contraires aux présentes,
- y ajoutant,
- en tout état de cause,
- condamner Monsieur [B] [G] à une amende civile de 2.000 €,
- condamner Monsieur [B] [G] au paiement des sommes de :
° 3.000 € au titre de dommages et intérêts,
° 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dans l'hypothèse où les condamnations prononcées ne seraient pas réglées spontanément et où l'exécution forcée serait confiée à un huissier de justice,
- dire que les sommes retenues par ce dernier en application du décret n° 2007-774 du 10 mai 2007 portant modification du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 relatif au tarif des huissiers, devront être supportées par Monsieur [B] [G], en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI,
Sur la recevabilité de l'appel en nullité :
L'appel nullité ' création jurisprudentielle qui permet de demander à la cour d'appel d'annuler une décision dès lors que la voie de l'appel n'existe pas ' n'est recevable qu'à une double condition cumulative :
- l'absence de toute autre voie de recours,
- l'existence d'un excès de pouvoir consistant pour le juge à méconnaître l'étendue de son pouvoir de juger.
L'appel nullité ouvert en cas d'excès de pouvoir n'est pas une voie de recours autonome.
L'appel nullité est à distinguer de l'appel annulation du jugement, tel que prévu par les articles 542 et 562 du code de procédure civile, qui désigne l'appel tendant à l'annulation d'un jugement indépendamment de tout appel et sans qu'il soit forcément recouru à l'excès de pouvoir.
En l'espèce, Monsieur [G] a indiqué dans sa déclaration d'appel : "Je fais appel nullité du jugement du 31 janvier 2020 du tribunal judiciaire, pôle social de Poitiers contre l'Urssaf Poitou Charentes." ; "l'appel de nullité est de droit quand sont portées des atteintes graves aux droits fondamentaux. Tel est le cas, le tribunal ayant fait preuve d'une partialité systématique à l'avantage de mon adversaire en refusant d'appliquer les dispositions européennes et les lois françaises qui les ont transposées, violant ainsi les dispositions de la Constitution française et la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui donnent à tout justiciable le droit à un tribunal impartial."
Or, l'impartialité du tribunal est un principe fondamental de la procédure qui en application du principe qui vient d'être rappelé ne peut caractériser, en cas de violation, un excès de pouvoir.
Au cas particulier, la cour observe en outre que Monsieur [G] a improprement qualifié son recours d'appel-nullité dans la mesure où il se borne, dans sa déclaration d'appel, à demander l'annulation du jugement en raison de la partialité du tribunal sans évoquer un quelconque excès de pouvoir et alors même qu'il a interjeté appel dans les conditions de l'appel aux fins d'annulation ou réformation.
Il convient en conséquence de dire que Monsieur [G] a interjeté un appel aux fins d'annulation du jugement en application des articles 542 et 562 du code de procédure civile et que ce recours est parfaitement recevable.
Sur l'appel non soutenu :
Le litige dont la cour se trouve saisie concerne une procédure sans représentation obligatoire, soumise aux dispositions des articles 931 à 949 du code de procédure civile.
La procédure étant orale, les parties sont tenues de comparaître pour informer la cour de leurs moyens d'appel.
Il en résulte que comme Monsieur [G] ne comparaît pas à l'audience du 28 septembre 2022 alors qu'il a été régulièrement assigné pour cette dernière audience, la cour - qui ne se trouve saisie d'aucune critique de la décision déférée - confirme en conséquence le jugement prononcé par le pôle social du tribunal judiciaire de Poitiers le 31 janvier 2020.
Sur la rectification de l'erreur matérielle affectant le dispositif de première instance :
En application de l'article 462 alinéa 1 du code de procédure civile qui prévoit que les erreurs affectant un jugement peuvent être rectifiées par la juridiction à laquelle il est déféré, il convient de faire droit à la demande formée par l'URSSAF aux fins de rectification de l'erreur matérielle entachant le dispositif du jugement en ce que la condamnation du cotisant à une amende civile de 300€ en application de l'article R 144-10 alinéa 5 du code de la procédure civile qui figure dans la discussion du jugement n'a pas été reprise dans le dispositif de celui - ci.
Sur les demandes incidentes de l'URSSAF de Poitou-Charentes
¿ Sur l'amende civile :
Selon l'article 32-1 du code de procédure civile, 'celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés' sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
En l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer une amende civile à hauteur d'appel en application de l'article 32-1 du code de procédure civile dans la mesure où aucun élément n'est versé permettant d'établir que l'appelant est à l'origine d'autres procédures de même nature, présentant un caractère manifestement abusif.
¿ Sur les dommages intérêts
En application de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Les demandes formées par Monsieur [B] [G] devant le premier juge sont certes dépourvues de fondement sérieux et il se garde bien de les reprendre devant la cour d'appel.
Cependant, l'URSSAF n'établit pas précisément le préjudice qui en résulte pour elle dans la mesure où elle se borne à expliquer en substance qu'en raison du comportement procédural de Monsieur [B] [G], elle est entravée dans l'exercice de sa mission.
En conséquence, il convient de la débouter de ses demandes de dommages intérêts.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dépens doivent être supportés par Monsieur [B] [G] qui succombe dans ses prétentions.
***
Il n'est pas inéquitable de condamner Monsieur [B] [G] à verser à l'Urssaf Poitou Charentes une somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
***
La charge des frais d'exécution forcée est régie par les dispositions d'ordre public de l'article L111-8 du code de procédure civile d'exécution.
Le juge du fond ne peut donc pas statuer sur le sort de ces frais par avance.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
Déclare recevable l'appel formé par Monsieur [G] aux fins d'annulation du jugement prononcé par le pôle social du tribunal judiciaire de Poitiers le 31 janvier 2020,
Constate que l'appel n'est pas soutenu,
Confirme le jugement prononcé par le pôle social du tribunal judiciaire de Poitiers le 31 janvier 2020 ;
Y ajoutant,
Rectifie l'omission matérielle qui entache le dispositif du jugement précité,
En conséquence,
Dit qu'il est inséré en page 7 dudit jugement entre les paragraphes 6 et 7 le paragraphe suivant :
' Condamne Monsieur [B] [G] à une amende civile de 300€ sur le fondement de l'article R 144-10 alinéa 5 du code de sécurité sociale,'
Dit que la présente décision rectificative sera mentionnée sur la minute et les expéditions du jugement rectifié,
Déboute l'URSSAF Poitou - Charentes de sa demande en dommages intérêts formée à hauteur d' appel,
Dit n'y avoir lieu à amende civile à hauteur d'appel,
Condamne Monsieur [B] [G] à verser à l'Urssaf Poitou Charentes la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que le sort des frais d'exécution forcée est fixé par les dispositions de l'article L 111-8 du code de procédure civile d'exécution,
Condamne Monsieur [B] [G] aux dépens.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,