Ordonnance n° 52
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15 Décembre 2022
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No RG 22/02042 -
No Portalis DBV5-V-B7G-GTPL
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[B] [N]
C/
[H] [X], avocat associé de la SCP [X]- VEYRIER-LE LAIN- BARROUX-VERGER
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Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT
Contestation d'honoraires d'avocat
Rendue le quinze décembre deux mille vingt deux
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt octobre deux mille vingt deux par Monsieur Didier DE SEQUEIRA, président de chambre, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d'appel de POITIERS, assisté de Madame Inès BELLIN, greffier, lors des débats.
ENTRE :
Monsieur [B] [N]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Comparant en personne
DEMANDEUR en contestation d'honoraires,
D'UNE PART,
ET :
Maître [H] [X], avocat associé de la SCP [X]-VEYRIER-LE LAIN-BARROUX-VERGER
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Gilles BABERT, avocat au barreau de POITIERS
DEFENDEUR en contestation d'honoraires,
D'AUTRE PART,
ORDONNANCE :
- Contradictoire
- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- Signée par Monsieur Didier DE SEQUEIRA, président de chambre agissant sur délégation de la première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Par lettre enregistrée le 9 février 2022, Monsieur [B] [N] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers d'une contestation des honoraires facturés par Maître [H] [X].
Par décision en date du 7 juin 2022, le bâtonnier a fixé les honoraires de Maître [H] [X] à la somme de 3 714 euros toutes taxes comprises.
La décision du bâtonnier a été notifiée à Monsieur [B] [N] le 16 juin 2022, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 7 juillet 2022.
L'affaire a été appelée à l'audience du 20 octobre 2022, à laquelle Monsieur [B] [N] a comparu en personne.
Monsieur [B] [N] expose avoir confié la défense de ses intérêts ainsi que ceux de ses trois s?urs à la SCP [X] 1927, dans le cadre d'un litige les opposant à leur frère concernant la vente d'un bien en indivision.
Il indique que le dossier avait initialement été confié à Maître Jean-Pierre COSSET et que Maître Florent BACLE en a repris la charge fin 2017 à la suite du départ à la retraite de Maître Jean-Pierre COSSET.
Il indique qu'il était prévu d'engager une action sur le fondement de l'article 815-5 du code civil pour obtenir la vente du bien indivis à défaut d'accord. L'ensemble immobilier objet du litige, constitué d'une Chapelle, intéressait la commune de [Localité 5], laquelle a alors proposé un prix de 100 000 euros net vendeur, accepté par les héritiers à l'exception de leur frère. Maître [H] [X] a pris la suite de Maître Florent BACLE dans la gestion de son dossier, en septembre 2020, alors-même qu'il était aussi le conseil de la commune de [Localité 5]. Monsieur [B] [N] déplore l'existence d'un conflit d'intérêt avec la commune de [Localité 5] et soutient que le défaut d'avancement de la procédure aurait permis de privilégier les demandes de la municipalité pour aboutir à une procédure d'expropriation.
Il indique que Maître [H] [X] s'est dessaisi du dossier à l'annonce de la procédure d'expropriation, la veille de l'audience.
Monsieur [B] [N] indique avoir réglé la somme de 4 314 euros en règlement des honoraires de la SCP [X] et avoir subordonné le maintien des honoraires versés à la finalisation de l'action au titre de l'article 815-5 code civil.
Il sollicite la condamnation de Maître [H] [X] à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Il indique cependant qu'il n'a jamais contesté les honoraires facturés par son avocat.
Maître [H] [X] déclare s'être dessaisi du dossier des consorts [N] au regard de la défiance manifestée par ses clients. Il indique que Monsieur [B] [N] a signé une première convention d'honoraires le 13 octobre 2017 fixant le taux horaire avocat à 200 euros hors taxes et le taux horaire secrétariat à 115 euros hors taxes, et une deuxième convention d'honoraires, le 18 juin 2019, fixant le tarif horaire de l'avocat à 210 euros hors taxes et tarif horaire secrétariat à 120 euros hors taxes. Cinq factures ont été émises en rémunération des diligences accomplies, pour un montant totale de 3 595 euros hors taxes, soit 4 314 euros toutes taxes comprises.
Il fait valoir que la procédure de taxation d'honoraires n'a pas pour objet de trancher la responsabilité de l'avocat auquel le client reprocherait un manquement aux règles déontologiques, de sorte que la présente juridiction ne serait saisie que de la question relative à la rémunération de l'avocat au titre des diligences accomplies.
Il soutient que Monsieur [B] [N], n'ayant pas contesté la facture du 8 janvier 2018 devant le bâtonnier, il est aujourd'hui irrecevable à le faire devant la juridiction du premier président.
S'agissant des factures no62631 et 64819 des 2 décembre 2020 et 8 juin 2021, il indique qu'elles ont été émises après services rendus, ce qui ne permettrait pas d'en faire la réduction ni d'en ordonner le remboursement.
Quant aux honoraires provisionnels facturés à hauteur de 2 100 euros selon factures provisionnelles no51803, 53182 et 56068 des 8 janvier 2018, 29 mai 2018 et 24 avril 2019, Maître [H] [X] expose qu'ils sont parfaitement justifiés au regard des diligences accomplies sur la période de janvier 2018 à avril 2019 et correspondent à 10h50 de travail à raison d'un taux horaire de 200 euros hors taxes.
Maître [H] [X] sollicite en conséquence la confirmation de l'ordonnance de taxe du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 7 juin 2022.
MOTIFS
Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.
En l'espèce, la décision du bâtonnier a été notifiée à Monsieur [B] [N] le 16 juin 2022, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 7 juillet 2022.
Le recours de Monsieur [B] [N] est donc recevable et régulier en la forme.
Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret no91-1197 du 27 novembre 1991.
Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client lié au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.
Il s'en suit que Monsieur [B] [N] n'est pas fondé à invoquer des manquements, fautes ou erreurs que son conseil aurait commis, pour prétendre tant à une minoration des honoraires qu'a fortiori à l'allocation de dommages et intérêts.
En conséquence, il convient de le déclarer irrecevable en sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de Maître [H] [X].
Il résulte de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971.
En l'espèce, il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que la SCP [X] a été mandatée par les consorts [N] dans le cadre d'un litige les opposant à leur frère concernant la vente d'un bien en indivision.
Une première convention d'honoraires a été signée par Monsieur [B] [N] le 13 octobre 2017 laquelle fixe le taux horaire avocat à 200 euros hors taxes et le taux horaires secrétariat à 115 euros hors taxes.
Une deuxième convention d'honoraires a été signée par Monsieur [B] [N] le 18 juin 2019, laquelle fixe le tarif horaire de l'avocat à 210 euros hors taxes et le tarif horaire secrétariat à 120 euros hors taxes.
Au regard de la jurisprudence constante en matière de contestation d'honoraires, il n'appartient pas au juge de l'honoraire de remettre en cause le principe et le montant de l'honoraire accepté et payé par le client après service rendu.
La SCP DROUINEAU a émis deux factures pour prestations accomplies :
une facture no 62631 en date du 2 décembre 2020 d'un montant de 895 euros hors taxes, soit 1 074 euros toutes taxes comprises, relative aux prestations suivantes :
instruction du dossier suivi depuis le 24 avril 2019 (2.5h)
échanges et entretiens téléphoniques : non comptabilisés
reprise de l'instruction, examen des conclusions présentées par [B] [N] le 30 novembre 2020 et analyse des pièces (1h)
temps de secrétariat et frais administratifs (1h)
une facture no64819 en date du 8 juin 2021 d'un montant de 600 euros hors taxes, soit 720 euros toutes taxes comprises, relative aux prestations suivantes :
instruction du dossier depuis le 3 décembre 2020
échanges et entretiens téléphoniques : non comptabilisé
recherches de jurisprudence
rédaction des conclusions en réponse.
Il est établi que ces factures ont été acceptées par Monsieur [B] [N] après service rendu et réglées en totalité, de sorte que les honoraires ainsi payés ne peuvent être remis en cause.
La SCP DROUINEAU a également facturé des honoraires provisionnels. Ainsi, trois factures de provisions ont été émises, les 8 janvier 2018, pour un montant de 500 euros HT, 29 mai 2011, pour 1 000 euros HT et 24 avril 2019 d'un montant de 600 euros HT, soit un montant total de 2 100 euros HT. Il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que la SCP DROUINEAU justifie des diligences suivantes :
la rédaction d'un projet d'assignation en avril 2018,
le traitement de 118 correspondances ;
quatre entretiens téléphoniques avec le client.
Les honoraires ainsi facturés correspondent à 10 heures 30 de travail sur la base d'un taux horaire conventionnel de 200 euros hors taxes.
En l'état de ces éléments, et au vu des pièces produites et des explications apportées par les parties, il convient de considérer que c'est à juste titre que le bâtonnier, prenant en considération les diligences accomplies par le cabinet [X], a estimé que la rémunération réclamée par l'avocat était justifiée.
En conséquence, l'ordonnance du bâtonnier sera confirmée et la réclamation de M. [N] rejetée.
Sur les dépens :
L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Succombant à la présente instance, Monsieur [B] [N] en supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Didier DE SEQUEIRA, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,
Déboutons Monsieur [B] [N] de l'ensemble de ses demandes ;
Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 7 juin 2022 ;
Condamnons Monsieur [B] [N] aux dépens.
Le greffier, Le délégué de la première présidente,