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28/02/2023 | FRANCE | N°21/01310

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 28 février 2023, 21/01310


ARRÊT N° 71



N° RG 21/01310



N° Portalis DBV5-V-B7F-GIDH















S.A.R.L. RAVALEMENT

DE FRANCE 17



C/



[J]

[S]





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2023







Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 mars 2021 rendu par le Tr

ibunal Judiciaire de LA ROCHELLE





APPELANTE :



S.A.R.L. RAVALEMENT DE FRANCE 17

N° SIRET : 445 343 718

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]



ayant pour avocat postulant Me Daniel CHARCELLAY de la SELARL MINAUD CHARCELLAY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT



ayant pour avoc...

ARRÊT N° 71

N° RG 21/01310

N° Portalis DBV5-V-B7F-GIDH

S.A.R.L. RAVALEMENT

DE FRANCE 17

C/

[J]

[S]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 mars 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE

APPELANTE :

S.A.R.L. RAVALEMENT DE FRANCE 17

N° SIRET : 445 343 718

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

ayant pour avocat postulant Me Daniel CHARCELLAY de la SELARL MINAUD CHARCELLAY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me Estelle ROY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMÉS :

Monsieur [D] [J]

né le 09 Mai 1985 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

ayant pour avocat postulant Me Vincent LAGRAVE de la SCP LAGRAVE JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me Damien MADOULÉ, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

Madame [G] [S]

née le 07 Juin 1988 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

ayant pour avocat postulant Me Vincent LAGRAVE de la SCP LAGRAVE JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me Damien MADOULÉ, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHELLE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

[G] [S] et [D] [J] ont, selon devis en date du 18 juillet 2018 accepté le 3 août 2018, confié à la société Ravalement de France 17 la réalisation d'un enduit sur la façade de la maison d'habitation dont ils sont propriétaires, située à [Localité 2]. Le montant des travaux était de 6.506,50 € toutes taxes comprises.

La facture de travaux n° 201809243 est en date du 19 septembre 2018. Elle est du montant du devis.

[G] [S] et [D] [J] ont réglé partiellement cette facture, la somme de 1.951,95 € demeurant impayée en raison de l'apparition de fissures sur la façade de l'immeuble.

Par ordonnance du 16 avril 2019, le tribunal d'instance de La Rochelle a sur la requête de la société Ravalement de France 17 enjoint à [G] [S] et [D] [J] de payer la somme de 1.951,95 € précitée. Par courrier reçu au greffe le 10 juillet 2019, [G] [S] et [D] [J] ont formé opposition à cette ordonnance.

Par jugement avant-dire droit du 16 décembre 2019, le tribunal d'instance de La Rochelle a déclaré l'opposition recevable et a ordonné une expertise confiée à [P] [F]. Le rapport de l'expert est en date du 10 juin 2020.

La société Ravalement de France 17 a postérieurement maintenu sa demande en paiement. Elle a soutenu que la garantie de parfait achèvement ne pouvait pas recevoir application, les travaux ayant été exécutés selon les règles de l'art, les désordres ayant eu pour cause l'usure normale de l'ouvrage ou son usage et une chute du maître de l'ouvrage. Elle a ajouté que le risque de fissuration de l'enduit était prévu part le DTU et qu'elle en avait averti ses clients.

[G] [S] et [D] [J] ont à titre principal soutenu que la demanderesse était tenue sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, les désordres ayant été signalés 14 jours après l'exécution des travaux. Ils ont demandé paiement de la somme de 6.743 € en réparation de leur préjudice matériel et de celle de 3.250 € en réparation de leur préjudice moral. Ils ont subsidiairement fondé leurs prétentions sur la responsabilité contractuelle de la demanderesse ayant selon eux manqué à son obligation de résultat, n'ayant pas exécuté les travaux dans les règles de l'art et ayant manqué à son devoir d'information et de conseil.

Par jugement du 15 mars 2021, le tribunal judiciaire (anciennement tribunal d'instance ) de La Rochelle a statué en ces termes :

'-CONDAMNE la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] la somme de SIX-MILLE-SEPT-CENT-QUARANTE-TROIS EUROS (6.743 euros) ;

-DÉBOUTE Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] de leur demande au titre de leur préjudice moral ;

-CONDAMNE in solidum Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] à payer à la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17 la somme de MILLE-NEUF-CENT-CINQUANTE ET UN EUROS ET QUATRE-VINGT-QUINZE CENTIMES (1.951,95 euros) ;

-ORDONNE la compensation des sommes dues entre les parties, et CONDAMNE après compensation la société RAVALEMENT DE FRANCE 17, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] la somme restant due de QUATRE-MILLE-SEPT-CENT-QUATRE-VINGT-ONZE EUROS ET CINQ CENTIMES (4.791,05 euros) ;

-CONDAMNE la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] la somme de MILLE-DEUX-CENTS EUROS (1.200€) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-CONDAMNE la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise'.

Il a considéré que le courrier en date du 28 septembre 2018 par lequel les maîtres de l'ouvrage avaient signalé les fissures de l'enduit et un oubli de surface constituait un procès-verbal de réception avec réserves, à la date duquel courait le délai de la garantie de parfait achèvement. Il a rappelé que cette garantie était due, peu important la gravité du désordre et la faute de l'entrepreneur. Il a évalué, par référence au rapport d'expertise judiciaire, à 6.743 € le coût de reprise des désordres.

Il a rejeté la demande d'indemnisation d'un préjudice moral, non démontré.

Il a fait droit à la demande en paiement de la société Ravalement de France 17, les travaux ayant été exécutés.

Il a ordonné la compensation de ces créances entre elles.

Par déclaration reçue au greffe le 22 avril 2021, la société Ravalement de France 17 a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 24 décembre 2021, elle a demandé de :

'Vu les dispositions des articles 1103 et suivants du Code Civil,

[...]

' Confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE du 15 mars 2021 en ce qu'il a condamné in solidum Monsieur [J] et Madame [S] à payer à la société RAVALEMENT DE FRANCE 17 la somme de 1 951,95 € TTC,

' Confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE du 15 mars 2021 en ce qu'il a débouté Monsieur [J] et Madame [S] de leur demande au titre du préjudice moral,

' Réformer le jugement du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE du 15 mars 2021 en ce qu'il a :

- Condamné la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] la somme de 6.743 €,

- Ordonné la compensation des sommes dues entre les parties et condamné après compensation la société RAVALEMENT DE FRANCE 17 prise en la personne de son représentant légal à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J], la somme restant due de 4.791,05 €,

- Condamné la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17 prise en la personne de son représentant légal à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] la somme de 1.200 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile,

- Condamné la SARL RAVALEMENT DE FRANCE 17 prise en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

' En conséquence, statuant à nouveau :

- Débouter Monsieur [J] et Madame [S] de leurs demandes, fins et conclusions, y compris au titre du préjudice moral

- A titre subsidiaire, ordonner la compensation entre les sommes dues par Monsieur [J] et Madame [S] au titre du solde de la facture de la société RAVALEMENT DE FRANCE 17 et celles pour lesquelles celle-ci viendrait à être condamnée.

- Condamner in solidum Monsieur [J] et Madame [S] à payer à la société RAVALEMENT DE FRANCE 17 la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Condamner in solidum Monsieur [J] et Madame [S] aux entiers dépens comprenant ceux de l'Injonction de payer, de la procédure de première instance, de l'expertise judiciaire et de la procédure d'appel'.

Elle a contesté être tenue sur le fondement de la garantie de parfait achèvement. Elle a soutenu que cette garantie ne s'étendait pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage de l'ouvrage. Elle a ajouté qu'il résultait du DTU 26.1 et du rapport d'expertise que les fissures étaient inhérentes à l'enduit appliqué sur lattis en raison des mouvement de la structure et du support. Selon elle, l'expert n'avait pas relevé un défaut d'étanchéité de l'enduit et avait considéré que les fissures étaient de nature esthétique. Elle a maintenu que les travaux avaient été exécutés dans les règles de l'art.

Elle a exclu le caractère décennal des désordres, les fissures n'étant pas infiltrantes et leur imputabilité n'étant pas établie. Elle a ajouté avoir effectué deux passes et que la finition par un enduit taloché et non gratté était sans incidence.

Elle a contesté avoir manqué à son obligation de conseil, ayant fait mention de la fragilité de ce type d'enduit. Elle a exposé qu'elle n'avait pas été associée au choix du procédé et qu'en raison des préconisations de l'architecte des bâtiments de France, il n'y avait pas d'autre alternative que la pose d'un 'Negralto' (treillis métallique) supportant de l'enduit. Selon elle, [G] [S] et [D] [J] n'avaient pas suivi ses instructions d'éviter toute contrainte sur l'enduit.

Elle a conclu au rejet de la demande d'indemnisation d'un préjudice moral.

Elle a maintenu sa demande en paiement du solde de facture.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 7 octobre 2021, [G] [S] et [D] [J] ont demandé de :

'Vu l'article 1792-6 du code civil,

Vu l'article 1231-1 du code civil,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'ensemble des pièces du dossier,

[...]

- Confirmer le jugement du Tribunal Judicaire (Judiciaire) de LA ROCHELLE du 15 mars 2021 sauf en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande d'indemnisation du préjudice moral d'un montant de 3 250 € ;

- Réformer le jugement du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE du 15 mars 2021 en ce qu'il n'a pas fait droit à a (la) demande d'indemnisation du préjudice moral des consorts [S]-[J] et en conséquence condamner la société RAVALEMENT DE France 17 au paiement de la somme de 3 250 € ;

- Condamner la société RAVALEMENT DE France 17 au paiement des dépens de la présente instance ;

- Condamner la société RAVALEMENT DE France 17 au paiement d'un montant de 3 000 € au titre des frais irrépétibles'.

Ils ont maintenu être fondés à se prévaloir de la garantie de parfait achèvement. Selon eux, l'appelante ne pouvait pas invoquer l'usure de l'ouvrage pour s'exonérer, les fissures étant apparues une quinzaine de jours après l'achèvement des travaux. Ils ont ajouté que les travaux avaient été réalisés à une période où le treillis métallique n'avait pas subi de contrainte thermique. Selon eux, le caractère esthétique des fissures était inopérant et ne permettait pas d'écarter la garantie invoquée.

Ils ont maintenu leur demande d'indemnisation d'un préjudice moral.

Ils ont subsidiairement soutenu que l'appelante avait engagé sa responsabilité contractuelle. Ses fautes seraient selon eux, d'avoir accepté le support alors que l'ossature bois n'était pas totalement sèche, d'avoir manqué à son obligation de conseil en n'ayant pas alerté sur le risque de fissures et en ayant manqué à son obligation de résultat.

Il ont précisé ne pas avoir contesté être redevable du solde de facture, conservé à titre de garantie.

L'ordonnance de clôture est du 6 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A - SUR LES DÉSORDRES

1 - sur les travaux

L'expert a décrit en page 3 de son rapport les travaux rélisés. Il a indiqué que :

'Mr [J] et Mme [S] habitent une maison au [Adresse 1]. Ils en sont propriétaires.

La maison est une bâtisse de village en pierres, sur 2 niveaux, avec une extension en façade Est sur le rez de chaussée, et qui est réalisée en parpaings. En 2017, ils déposent un permis de construire pour réaliser une surélévation de l'extension en rez de chaussée, en façade Est.

Le projet est conçu en ossature bois, avec la prescription émise par le service instructeur des Bâtiments de France, de réaliser des enduits extérieurs grattés fins.

Mr [J] et Mme [S] font appel pour les enduits, à Ravalement de France 17, sur les conseils du charpentier qui réalise l'ossature bois.

[...]

Pour les façades de cette surélévation, le devis présente une façon d'enduit gratté (enduit PRB 6000R) sur support de marque Nergalto. C'est un support métallique en acier galvanisé, avec doublage papier, fixé sur l'ossature bois, et sur lequel l'enduit est appliqué directement'.

En pages 4 à 6 du rapport, il a exposé que :

'La surélévation est réalisée en ossature bois fixée sur le bâtiment existant maçonné à rez de chaussée.

Des panneaux OSB sont fixés à la verticale sur l'ossature.

Un film pare-pluie est fixé et des tasseaux bois posés à la verticale. Ainsi, lors de la fixation des trames de Nergalto, il est créé une lame d'air entre l'enduit et la façade bois.

Les bandes de Nergalto sont fixées sut (sur) l'ossature bois afin de recevoir l'enduit :

L'enduit est taloché après avoir été projeté sur la façade Nord'.

2 - descriptif des désordres

En page 9 de son rapport, l'expert a indiqué que :

'Des fissures sont visibles à divers endroits de la façade, notamment des fissures horizontales. Ce ne sont pas seulement des micro-fissures ; certaines étant d'une épaisseur au delà de 1 mm'.

Ces fissures ont été constatées sur l'ensemble des façades de l'extension. S'agissant de la façade de l'extension côté rue, il a précisé en page 12 que : 'Les fissures correspondent aux endroits des jonctions entre plaques de Nergalto'.

3 - causes

L'expert a indiqué en page 17 de son rapport que :

'Comme le montrent les photos précédentes, nous constatons diverses fissures correspondant au droit de toutes les jonctions de bandes de Nergalto et à l'ossature du bâtiment.

Dans le DTU 26.1, concernant les enduits, il est indiqué dans le chapitre 10, 10.1 Conception, que: « l'enduit appliqué sur lattis métallique subit les mouvements de la structure et de son support. Etant rigide par nature, il pourra donc présenter des fissures en cas de forte déformation ».

Dans le cas présent, les déformations évoquées concernent l'ossature bois, dont les éléments ont dû sécher après mise en oeuvre et recouvrement par le film et les lattis métalliques.

L'ossature d'accrochage de l'enduit (Nergalto) :

Elle a été posée entre le 7 et le 14 Septembre 2018 .

Les bandes de Nergalto ont été mises en oeuvre et posées à l'horizontale sur les façades selon prescriptions du fabricant Les bandes ont une largeur de 60cm et une longueur de 2 50m

Aux angles, il est observé la pose de baguettes d'angle.

Lors de nos recherches sur les conséquences de mise en oeuvre de ce produit (bandes de Nergalto), nous apprenons que des fissures peuvent apparaitre'.

En réponse aux dires des parties, l'expert a conclu en page 19 de son rapport que :

'Le Nergalto reste un matériau relativement souple. Aussi, le fait d'appuyer une échelle sur l'enduit de façade peut l'endommager et fissurer l'enduit, mais l'impact devrait montrer des fissures émanant de la surface d'appui de l'échelle et les fissures apparaitraient depuis cette zone, or dans le cas qui nous concerne, les fissures sont visibles au droit des jonctions de bandes de Nergalto et ce sur l'ensemble des façades de l'extension.

[...]

Le fait de fixer les volets n'est pas la cause des fissures, sinon, elles émaneraient des axes de fixation des gonds ou autres éléments fixés sur les façades.

En conclusion, à ce stade, nous évoquons l'hypothèse suivante :

- L'ossature bois a séché d'une part, et d'autre part, les bandes de Nergalto se sont quelque peu dilatées avec la chaleur, puis, lors du séchage de l'enduit, les bandes se sont rétractées créant des fissures.

L'entreprise a respecté la mise en oeuvre du produit enduit en projection, mais les matériaux de diverses natures ont travaillé et cela a créé des fissurations. De plus, elle a réalisé une finition talochée non demandée.

L'enduit demandé étant gratté, il aurait do être réalisé en 2 passes distinctes; la 1ère couche servant de « tampon ».

L'entreprise n'a donc pas respecté la demande d'enduit gratté dans sa mise en oeuvre'.

Les causes des fissurations sont ainsi cumulativement les mouvements de la structure en bois de l'élévation lors de son séchage et la dilatation du treillis métallique sous l'effet de la chaleur.

B - SUR LES DEMANDES DE T. [S] ET T. [J]

1 - sur la garantie de parfait achèvement

L'article 1792-6 du code civil dispose que :

'La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.

Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné.

En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant.

L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement.

La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage'.

Le premier juge a considéré en page 4 du jugement que :

'En l'espèce, il ressort des éléments de la procédure que les consorts [J] et [S] ont constaté des fissures sur l'enduit ainsi qu'un oubli de surface dans les 15 jours suivant la fin des travaux effectués sur la façade de leur maison. Ils ont ainsi, par lettre en date du 28 septembre 2018, demandé à l'entreprise de reprendre les malfaçons sous 8 jours. Ce courrier constitue un procès-verbal de réception des travaux avec réserves'.

Nul n'a contesté que ce courrier valait procès-verbal de réception avec réserves au sens de l'article 1792-6 précité. Outre les fissurations, les maîtres de l'ouvrage ont notifié 'un oubli de surface où l'ossature bois apparaît encore'.

L'appelante a achevé les travaux d'enduisage le 14 septembre 2018. Les fissures ont été signalées par courrier en date du 28 septembre 2018. Elles sont ainsi apparues sur l'extension deux semaines après l'achèvement des travaux

Cette chronologie et le rapport d'expertise ne permettent pas de les imputer à l'usure normale ou l'usage du bâtiment.

Les agissements du maître de l'ouvrage allégués par l'appelante ne sont pas établis. Au surplus, l'expert n'en a pas retrouvé les traces sur l'enduit qui n'auraient pas manqué d'être présentes.

Les fissures n'ont de plus pas une cause extérieure.

Il s'ensuit, ces désordres ayant réservés à la réception, que l'appelante est tenue sur le fondement de la garantie de parfait achèvement.

Cette garantie incombe à l'entrepreneur, quand bien même l'expert aurait-il indiqué en page 19 de son rapport que : 'Les microfissures ne sont pas, à ce jour, infiltrantes. Elles sont d'ordre esthétique, mais pourraient devenir infiltrantes si elles s'élargissaient surtout du fait qu'elles sont verticales et non horizontales pour la plupart'.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé de ce chef.

Les manquements de l'appelante à ses obligations de conseil, d'information et de résultat ne sont allégués qu'à titre subsidiaire par les intimés.

2 - sur le préjudice

a - sur le coût de reprise des désordres

L'expert judiciaire a conclu en page 19 de son rapport que :

'Il peut être remédié à ce phénomène, en déposant l'enduit ainsi endommagé et en le reprenant avec un dégrossi préalable, soit une première couche bien distincte qui servira de couche intermédiaire avec la structure bois. Il ne faut pas faire la couche d'enduit de finition juste après le dégrossi afin que celui-ci sèche bien et prenne les déformations éventuelles.

Le cout de cette reprise est estimé à :

Dépose enduit actuel et évacuation 960.00 € HT

Enduit gratté en 2 passes 3850.00 € HT

Baguettes d'angle 420.00 € HT

Protection, échafaudage, nettoyage 900.00 € HT

Total HT: 6130.00 € HT

Soit avec TVA 10%, total TTC: 6743.00 €'.

L'appelante ne conteste pas l'évaluation du coût de reprise des désordres, mais le bien fondé de la proposition de l'expert proposant de refaire l'enduit ainsi qu'elle l'avait réalisé.

La structure bois nécessite que soit conservé le treillis métallique supportant l'enduit. Les causes des fissures sont, non l'existence de ce treillis mais les conditions de réalisation de l'enduit, apposé sur une structure bois qui n'avait pas achevé de sécher et un treillis qui s'est dilaté.

La réalisation d'un enduit gratté et non taloché sur ce treillis, dans les règles de l'art et avec un intervalle de temps entre le dégrossi et l'enduit de finition, est de nature à mettre fin aux désordres.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a condamné l'appelante à payer à ses cocontractants la somme de 6.743 € précitée.

2 - sur un préjudice moral

Les intimés ont vu l'enduit extérieur de l'extension se fissurer aussitôt achevé. L'appelante n'a pas procédé à la reprise des désordres à laquelle elle était tenue. Les maîtres de l'ouvrage pouvaient craindre jusqu'aux opérations d'expertise un défaut d'étanchéité de la façade. Ils auront à supporter le désagrément des travaux de reprise de l'enduit. Ils ont dû subir les tracas de la procédure judiciaire.

Ces circonstances caractérisent un préjudice moral des intimés qui sera réparé par l'attribution de la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera pour ces motifs infirmé de ce chef.

C - SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT DE L'APPELANTE

Les intimés ne contestent pas rester redevable de la somme de 1.951,95 €.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné la compensation de cette créance avec celle des intimés.

La société Ravalement de France 17 demeure redevable de la somme de 5.791,05 € (6.743 + 1.000 - 1951,95). Le jugement sera en conséquence réformé en ce qu'il a retenu une somme de 4.791,05 € n'incluant pas l'indemnisation du préjudice moral.

D - SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a équitablement apprécié l'indemnité due sur ce fondement par l'appelante.

Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits des intimés de laisser à leur charge les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit à leur demande formée de ce chef pour le montant ci-après précisé.

E - SUR LES DÉPENS

La charge des dépens d'appel incombe à l'appelante.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du 15 mars 2021 du tribunal judiciaire de La Rochelle sauf en ce qu'il :

'DÉBOUTE Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] de leur demande au titre de leur préjudice moral ;

CONDAMNE après compensation la société RAVALEMENT DE FRANCE 17, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [G] [S] et Monsieur [D] [J] la somme restant due de QUATRE-MILLE-SEPT-CENT-QUATRE-VINGT-ONZE EUROS ET CINQ CENTIMES (4.791,05 euros)' ;

et statuant à nouveau de ce chefs d'infirmation,

CONDAMNE la société Ravalement de France 17 à payer à [G] [S] et [D] [J] la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts, avec intérêts de retard au taux légal à compter du jugement ;

CONDAMNE après compensation des créances entre elles la société Ravalement de France 17 à payer à [G] [S] et [D] [J] la somme de 5.791,05 €, avec intérêts de retard au taux légal à compter du jugement ;

CONDAMNE la société Ravalement de France 17 à payer en cause d'appel à [G] [S] et [D] [J] pris ensemble la somme de 1.800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Ravalement de France 17 aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01310
Date de la décision : 28/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-28;21.01310 ?
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