Première Chambre B
ARRÊT No
R.G : 06/03360
S.C.I. ADJ
C/
CRCAM - CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MORBIHAN
Confirme la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
POURVOI No F 0810709 du 18/01/2008 (nos réf CA RENNES : pourvoi no6/2008-B1)RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Françoise SIMONNOT, Président,
Mme Rosine NIVELLE, Conseiller,
Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Conseiller,
GREFFIER :
Patricia IBARA, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 18 Septembre 2007, Mme Rosine NIVELLE, Conseiller, entendue en son rapport.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 08 Novembre 2007 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
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APPELANTE :
Société ADJ, société civile immobilière,
15 rue des Vallées
56580 ROHAN
représentée par la SCP GUILLOU & RENAUDIN, avoués
assistée de Me PARIS, avocat
INTIMÉE :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MORBIHAN,
Avenue de Keranguen
BP 205
56956 VANNES CEDEX 9,
représentée par son Président du conseil d'administration en son agence :
4 Place de la Mairie
BP 9
56580 ROHAN
représentée par la SCP BAZILLE J.J. & GENICON S., avoués
assistée de Me LEHUEDE, avocat
EXPOSE DES FAITS-PROCÉDURE-OBJET DU RECOURS
Pour financer l'achat de locaux à usage commercial, Jean-Marc B... et Dominique C... épouse B... en leur qualité d'associés de la SCI ADJ ont souscrit le 17 janvier 2003 un prêt auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Morbihan d'un montant de 256 950 euros ; ils se sont portés cautions de ce prêt et ont déclaré adhérer auprès de la CNP et de PREDICA, assureurs groupe du Crédit Agricole, à une assurance décès invalidité.
Postérieurement à la régularisation de l'acte notarié la CNP a fait parvenir à Jean-Marc B... un questionnaire médical et une demande d'informations complémentaires auxquels il ne donnera pas suite.
Sur ordre de la compagnie d'assurance la banque cessera de prélever les cotisations d'assurance à compter du mois de novembre 2003 et ordonnera le remboursement des cotisations perçues.
Par acte introductif d'instance en date du 1er avril 2004, la SCI ADJ a fait assigner la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Morbihan aux fins de la voir condamner à toute disposition pour voir acquise l'assurance décès concernée.
Par jugement en date du 4 avril 2006, le Tribunal de Grande Instance de Vannes a déclaré son action recevable mais infondée et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ;
La même décision déboutait le Crédit Agricole de sa demande de dommages et intérêts et condamnait la SCI ADJ à payer à ce dernier la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La SCI ADJ a interjeté appel de cette décision.
Elle demande à la Cour, aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 28 février 2007 de la déclarer recevable et ayant qualité pour agir ;
- de dire et juger que le bénéfice de l'assurance a été acquis à la SCI ADJ à compter du 17 janvier 2003 ;
- de constater qu'à cette date le Crédit Agricole a accordé le prêt sans réserve et libéré les fonds ;
- de le condamner à supporter toute indemnité qui serait due aux termes du contrat CNP ;
- de le condamner au paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre 5000 euros au titre des frais irrépétibles.
Dans ses écritures en date du 22 mars 2007, la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Morbihan conclut à l'irrecevabilité de l'action de la SCI ADJ et en tous les cas à la confirmation de la décision critiquée.
Elle demande en outre la condamnation de la société appelante à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision déférée et aux conclusions régulièrement signifiées par les parties ;
MOTIFS DE LA COUR
Sur la recevabilité de l'action de la S.C.I. ADJ
Considérant que l'action en justice est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, l'intérêt à agir n'étant pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action ;
Considérant qu'en l'espèce la S.C.I. ADJ a fait l'acquisition le 17 janvier 2003 d'un ensemble immobilier à usage industriel ou artisanal ;
Que, pour financer cet achat ainsi que des travaux sur l'immeuble, elle a souscrit le même jour un prêt notarié auprès du Crédit Agricole du MORBIHAN d'un montant de 256 950 euros ;
Considérant que ce prêt était garanti par la caution personnelle et solidaire des associés Jean-Marc B... et Dominique C... épouse B..., le privilège du prêteur de deniers, une hypothèque de premier rang sur l'immeuble acquis et une assurance décès IAD et ITT à 100% sur la tête de Jean-Marc B... et à 50% sur la tête de Dominique POCHAT épouse B..., ceux-ci ayant adhéré le 2 janvier 2003 au contrat d'assurances collectives souscrit par le Crédit Agricole auprès de la CNP et de PREDICA ;
Considérant qu'en novembre 2003 la CNP a fait savoir au Crédit Agricole que Jean-Marc B... n'était en fait pas assuré ;
Considérant que l'assurance en question a été souscrite par les époux B..., non pas en leur qualité de caution mais en leur qualité d'associés de la S.C.I. ADJ ; que l'assurance figure en effet au paragraphe 4 du chapitre "garanties" de l'acte de prêt et n'est en aucune façon reliée à leurs qualités de caution personnelle ;
Considérant que la S.C.I. ADJ a donc bien un intérêt personnel à agir afin de protéger cette garantie qui, le cas échéant, lui permettra de voir régler les échéances du prêt ;
Que le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point ;
Sur le fond
Considérant qu'il n'est pas contesté que l'assurance est définitivement acquise en ce qui concerne Dominique POCHAT épouse B... ;
Considérant, en ce qui concerne Jean-Marc B..., que la S.C.I. ADJ reproche à la Caisse Régionale de Crédit Agricole du MORBIHAN d'avoir commis une faute en débloquant les fonds au moment de la signature des actes notariés et alors qu'un questionnaire de santé pouvait toujours être envoyé aux assurés conformément aux conditions générales de l'assurance ;
Qu'elle lui reproche également d'avoir fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat en ne l'avisant pas de la décision de la compagnie d'assurance de ne plus assurer Jean-Marc B... ;
Qu'elle estime en conséquence que le Crédit Agricole devra le cas échéant se substituer à l'assureur ;
Mais considérant que la S.C.I. ADJ, en sa qualité d'emprunteur ne conteste pas avoir signé le cahier des charges annexé à la minute de l'acte notarié qui précise : "Le bénéfice de cette assurance est acquis à L'EMPRUNTEUR dans les conditions prévues au bulletin individuel de demande d'admission à compter de la signature de l'acte de prêt authentique.
Toutefois lorsqu'un questionnaire de santé est exigé par l'assureur, la garantie n'est accordée que sous conditions suspensives du résultat favorable du contrôle médical" ;
Considérant que la SCI ADJ, qui connaissait donc les conditions d'obtention de l'assurance, a néanmoins accepté de contracter le prêt dès le 17 janvier 2003 et a accepté sans réserve le déblocage des fonds, nonobstant l'aléa existant relatif à un éventuel questionnaire médical ;
Considérant par ailleurs que le Crédit Agricole n'était partie ni à l'acte de vente, ni au contrat d'assurance qui ne concernait que Jean-Marc B... et la CNP, cette dernière n'étant pas appelée à la cause ;
Considérant que Jean-Marc B..., en sa qualité d'associé (ou futur associé) de la SCI ADJ avait rempli le 2 janvier 2003 une demande d'adhésion qui a été annexée à la minute du notaire et par laquelle il certifiait que le prêteur (le Crédit Agricole) lui avait remis un exemplaire des conditions générales et particulières, valant notice d'assurance, et dont il attestait en même temps avoir pris connaissance ;
Considérant qu'il est précisé dans cette notice d'assurance : "Pour adhérer à l'assurance, vous devez compléter un questionnaire de santé et pouvez, avant toute décision, être appelé à vous prêter à un contrôle médical à la demande de l'assureur ou être invité à produire par correspondance copie des documents se rapportant à votre état de santé" ;
Considérant ainsi que le défaut de réponse de Jean-Marc B... au questionnaire de santé que lui a adressé la CNP, défaut de réponse qui n'est aucunement contesté ni remis en cause par Jean-Marc B..., qui au demeurant n'a pas été appelé à la présente instance, ne peut être imputé à faute à la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Morbihan ;
Considérant qu'il convient en conséquence de confirmer la décision critiquée, étant observé que la SCI ADJ a été informée de la décision de la CNP par un courrier de la banque en date du 25 novembre 2003 ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais irrépétibles qu'elle a exposés en cause d'appel et qu'il y a lieu en conséquence de condamner la SCI ADJ à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Morbihan la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Considérant que succombant en son recours la SCI ADJ supportera les dépens de première instance et d'appel ;
DÉCISION
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme la décision critiquée,
Condamne la SCI ADJ à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Morbihan la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne la SCI ADJ aux dépens de première instance et d'appel, ceux-ci pouvant être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,