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10/01/2008 | FRANCE | N°07/01355

France | France, Cour d'appel de Rennes, 10 janvier 2008, 07/01355


Huitième Chambre Prud'Hom



ARRÊT No08

R. G : 07 / 01355

POURVOI No 13 / 2008 du 10 / 03 / 2008 Réf T 0841103



Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE

C /

Mme Marie-Thérèse X...




Confirmation

Copie exécutoire délivrée
le :

à :



REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 JANVIER 2008



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Monique BOIVIN, Président,
Madame Marie-Hélène L'HEN

ORET, Conseiller,
Monsieur François PATTE, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Novembre 20...

Huitième Chambre Prud'Hom

ARRÊT No08

R. G : 07 / 01355

POURVOI No 13 / 2008 du 10 / 03 / 2008 Réf T 0841103

Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE

C /

Mme Marie-Thérèse X...

Confirmation

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 JANVIER 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Monique BOIVIN, Président,
Madame Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller,
Monsieur François PATTE, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Novembre 2007
devant Monsieur François PATTE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience du 10 Janvier 2008, date indiquée à l'issue des débats

****

APPELANTE et intimée à titre incident :

l'Association de SOINS ET SERVICES A DOMICILE prise en la personne de son représentant légal

...

29140 ROSPORDEN

représentée par Me Pierre DUGUE, Avocat au Barreau de BREST

INTIMEE et appelante à titre incident :

Madame Marie-Thérèse X...

...
KERNEVEL

29140 ROSPORDEN

comparante en personne, assistée de Me Kellig LE ROUX substituant à l'audience Me Frédéric BUFFET, Avocats au Barreau de RENNES

Vu le jugement rendu le 9 février 2007 par le Conseil des prud'hommes de QUIMPER (départage) qui a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X... aux torts de l'Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE avec effet au 24 septembre 2005, et condamné celle-ci à verser à l'intimée :
§ 22. 242,96 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral
§ 18. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement illicite
§ 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Vu l'appel formé par l'Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE le 28 février 2007,
Vu les conclusions déposées le 31 août 2007, reprises et développées à l'audience par l'Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE,
Vu les conclusions déposées le 5 novembre 2007, reprises et développées à l'audience par Mme X... ;

LES FAITS

Mme X... a été embauchée le 14 octobre 1988 en qualité de secrétaire aide comptable par le Comité d'Aide aux Personnes Agées de la Région de Rosporden (CAPAD) devenu l'Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE.
Elle a été élue déléguée du personnel suppléante en avril 2003.
A partir du 28 novembre 2003 Mme X... a été placée en arrêt de travail continu. A l'issue de deux visites de reprise des 3 juin et 17 juin 2005 elle a été déclarée « inapte au poste dans des conditions proposées ». Saisi d'une demande d'autorisation de licenciement, l'Inspecteur du travail l'a refusée.
S'estimant victime d'une situation de harcèlement moral Mme X... a saisi la juridiction prud'homale le 15 septembre 2005, aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail.
En cours de procédure, Mme X... était convoquée à nouveau, par courrier du 3 novembre 2005, à un entretien préalable au licenciement fixé au 14 novembre suivant. Après consultation du CE le 17 novembre 2005 l'Association a sollicité à nouveau l'autorisation de procéder au licenciement. Cette autorisation a été accordée le 5 décembre 2005.
Mme X... a été licenciée pour inaptitude, impossibilité de reclassement et d'aménagement du poste de travail par lettre du 14 décembre 2005.
La Cour se réfère au jugement et aux conclusions pour un exposé détaillé des faits, des demandes et des moyens invoqués par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que par requête du 14 septembre 2005 Mme X... a saisi le Conseil de prud'hommes d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts et griefs de l'Association ;
Considérant qu'elle a été licenciée le 14 décembre 2005 après autorisation de l'Inspecteur du travail délivrée le 5 décembre 2005 ; que l'action ayant été engagée avant la mise en œ uvre du licenciement, il convient d'apprécier en premier lieu si elle est fondée, nonobstant le fait que le licenciement ultérieur, éventuellement inopérant, ait été autorisé par l'Inspecteur du travail ;
Considérant que Mme X... reproche à son employeur les faits de harcèlement auxquels se seraient livrés certaines de ses collègues (Mmes B..., D... et Mlle A...), et à la suite desquels il n'a pas été pris de mesure concrète en dépit de l'enquête entamée le 11 décembre 2003 ; qu'elle sollicite la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, assortie d'une réparation pour licenciement illicite et à titre subsidiaire pour inexécution fautive des obligations contractuelles, outre des dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
Sur le harcèlement moral
Considérant qu'aux termes de l'article L 122-49 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que toute rupture du contrat de travail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit ;
Qu'aux termes de l'article L 122-51 il appartient au chef d'entreprise de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements visés à l'article L 122-49 ;
Qu'aux termes de l'article L 122-52, en cas de litige relatif à l'application de l'article L 122-49, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Considérant que Mme X... verse aux débats, notamment, les attestations de Mmes F... (aide à domicile), Y... (auxiliaire de vie), Z... (aide à domicile), C... qui s'accordent sur les points suivants :
-les relations avec Mme B... (sa responsable) D... (fille de Mme B...) et A... se sont dégradées à partir du moment où Mme X... a intégré le syndicat CGT du CAPAD au début de l'année 2003 et a été élue en avril 2003,
-Mme F... a constaté à partir de cette époque une dégradation physique ; elle ajoute que Mme X... était en pleurs quand elle lui téléphonait car sa responsable l'accusait d'agir contre elle de concert avec les aides à domicile
-dans des locaux exigus, la porte du bureau de Mme
X...
a été enlevée pendant ses congés et son téléphone retiré pour être attribué à une nouvelle employée, ce qui facilitait la surveillance permanente de ses visites et de ses conversations
-Mme X... n'a plus été conviée aux réunions de délégués du personnel à partir de son arrêt maladie
-avant 2003 les relations entre Mme B... et Mme X... étaient amicales (attestation Y...)
-c'est à partir de 2003 que les dossiers ont été mis sous clef, interdisant à Mme X... d'y avoir accès, contrairement au passé, lors des permanences du samedi où elle était seule ;
Considérant qu'il n'est pas contesté qu'elle a été placée en arrêt de travail à partir du 28 novembre 2003 pour un syndrome anxio-dépressif nécessitant un suivi psychiatrique ; qu'en janvier 2005 Mme X... était toujours sous traitement ;
Que le courrier du docteur G... fait état de troubles du sommeil et d'un état dépressif sérieux, mais aussi de l'isolement qu'elle ressentait lorsque ses collègues jetaient les papiers sur son bureau sans lui donner d'instruction, et du fait qu'elle se sentait épiée en permanence
Considérant que Mme X... produit aussi plusieurs autres attestations d'intervenantes à domicile se plaignant de relations très difficiles avec l'équipe administrative ;
Qu'en conséquence, Mme X... établit indiscutablement des faits qui laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral ;
Considérant qu'en cause d'appel l'employeur apporte des éléments de réponse :
Qu'ainsi, dans sa lettre du 11 décembre 2003 Mme X... a précisé à la nouvelle direction de l'Association que le CAPAD n'était pas visé et que la dirigeante n'était pas concernée par ses accusations ; cependant par application de l'article L 122-51 du code du travail l'employeur était tenu de prendre les dispositions propres à faire cesser les agissements répréhensibles, et ces propos ne l'exonérent pas de ses obligations ;
Considérant que l'Association invoque aussi une restructuration et la nécessité de recruter une secrétaire comptable (Mme H...) entre le 2 décembre 2002 et le 30 avril 2003) afin de résorber un retard de facturation, ainsi que le fait qu'elle devait partager les locaux exigus (attestation E... du 5 juillet 2007) ;
Mais considérant que les délégués du personnel n'ont jamais été informés du réaménagement et de la réorganisation dont il est fait état en 2007, et que s'il peut se concevoir qu'une porte soit enlevée pour faciliter les allées et venues, il n'est apporté aucune explication convaincante au fait qu'on ait retiré à la salariée son téléphone pour le confier à la nouvelle venue (l'explication de l'employeur n'est pas pertinente et confirme même qu'on faisait tout pour qu'elle travaille sans être dérangée par les appels), qu'elle n'avait d'ailleurs plus librement accès aux dossiers, contrairement à ce qui était le cas avant avril 2003 ;
Qu'enfin il n'est apporté ni démenti ni réponse au fait que les collègues du service administratif avaient totalement changé de comportement depuis son élection en avril 2003 ;
Considérant enfin qu'à l'issue de l'enquête diligentée en décembre 2003 l'employeur a conclu qu'il n'existait qu'une mésentente entre salariées, et n'a envisagé que des mesures de façade (proposition d'un reclassement opérationnel, placement sous l'autorité hiérarchique d'une autre personne avec laquelle elle n'avait pas eu de difficultés) sans changement réel de fonction ; qu'en agissant de la sorte l'Association a persisté dans la négation du problème au lieu de prendre les mesures correctrices qui lui incombaient ;
Considérant dans ces conditions que la preuve du harcèlement moral dont Mme X... a été victime est rapportée, et qu'en violation des articles L 122-49 et L 122-51 du code du travail il convient de confirmer les dommages-intérêts alloués par les premiers juges ;
Que pour les mêmes raisons, les manquements invoqués par Mme X... à l'appui de sa demande en résiliation judiciaire étant établis, il convient de confirmer les dommages-intérêts pour licenciement illicite qui lui ont été accordés ;
Considérant que, succombant, l'Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE sera condamnée aux dépens ;

DECISION
PAR CES MOTIFS

La Cour
Confirme le jugement du 09 février 2007
Vu l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Condamne l'Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE à verser 2. 000 euros à Mme X... au titre de l'appel
Condamne l'Association aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 07/01355
Date de la décision : 10/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Quimper


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-10;07.01355 ?
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