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17/04/2013 | FRANCE | N°12/00008

France | France, Cour d'appel de Rennes, Juridiction du premier prÉsident, 17 avril 2013, 12/00008


COUR D'APPEL DE RENNES

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

No de minute : 5

No de dossier : 12/00008

O R D O N N A N C E

Décision en premier ressort rendue par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2013 par Monsieur Philippe JEANNIN, Premier Président près la cour d'appel de RENNES, assisté lors des débats en date du 20 Février 2013 par Madame Pascale JEGOU, Greffière en chef,

REQUERANT :

Monsieur Kamel Y...

né le 5 juillet 1983 à Djerba (Tunisie)

de nationalité tunisienne

Chez Me LEUDET

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non comparant, représenté par Me Emmanuelle LEUDET, avocat au barreau de NANTES

EN PRESENCE DE :

Madame l'Agent...

COUR D'APPEL DE RENNES

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

No de minute : 5

No de dossier : 12/00008

O R D O N N A N C E

Décision en premier ressort rendue par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2013 par Monsieur Philippe JEANNIN, Premier Président près la cour d'appel de RENNES, assisté lors des débats en date du 20 Février 2013 par Madame Pascale JEGOU, Greffière en chef,

REQUERANT :

Monsieur Kamel Y...

né le 5 juillet 1983 à Djerba (Tunisie)

de nationalité tunisienne

Chez Me LEUDET

...

44000 NANTES

non comparant, représenté par Me Emmanuelle LEUDET, avocat au barreau de NANTES

EN PRESENCE DE :

Madame l'Agent Judiciaire du Trésor

Sous-direction du droit privé

6 rue Louise Weiss

75073 PARIS CEDEX 13

Représentée par Me BILLAUD, Avocat à la Cour

ET :

le ministère public, représenté en la personne du procureur général,

Rappel des faits et de la procédure.

Monsieur Kamel Y..., représenté par son conseil, a présenté requête le 11juin 2012 sur le fondement des articles 149 et suivants du code de procédure pénale, aux fins d'indemnisation au titre de la détention provisoire qu'il a subie du 29 mai 2011 au 27 janvier 2012, après avoir bénéficié à cette date d'une décision définitive de non lieu rendue par l'un des juges d'instruction de Nantes des chefs d'agressions sexuelles et dégradations de biens, cette même décision le renvoyant devant le tribunal correctionnel de Nantes des chefs de violation de domicile , recel de vol, séjour irrégulier et port d'arme de la 6ème catégorie.

Par jugement en date du 27 février 2012, Kamel Y... a été condamné pour les trois infractions ci-dessus spécifiées à la peine de six mois d'emprisonnement assortie d'une interdiction du territoire français pendant trois ans.

Estimant qu'il a subi pendant trois mois une détention provisoire injustifié en raison de la décision de non lieu dont il a bénéficié pour les faits qualifiés agressions sexuelles, il sollicite en réparation du préjudice subi:

- au titre du préjudice moral une somme de 10.560 €, l'intéressé invoquant au-delà des conséquences ordinaires de la privation de liberté qu'il s'agissait d'une première incarcération avec un traumatisme aggravé, s'agissant de'un ressortissant étranger qui n'était que depuis quelques mois sur le territoire français. Il ajoute qu'il doit être également tenu compte de la vétusté et des mauvaises conditions d'hygiène de la maison d'arrêt de Nantes, particulièrement surpeuplée et de l'inquiétude qui a pu être la sienne quant à la peine encourue pour un délit d'agression sexuelle et violences sur mineur dont il se savait innocent.

- Bénéficiant de l'aide juridictionnelle, il sollicite en outre la condamnation de l'agent judiciaire de l'Etat, au paiement à son conseil de la somme de 1.500 € en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve pour cette dernière de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Madame l'agent judiciaire de l'Etat, ne conteste pas le droit à indemnisation de Kamel Y... à raison d'une durée injustifiée de détention provisoire de trois mois. Elle soutient par contre que le montant d'indemnisation sollicité par le requérant au titre du préjudice moral doit être minoré alors que les causes d'aggravation invoquées apparaissent sans fondements. Elle souligne que si le requérant a vécu sa détention comme une injustice, le premier président n'est pas juge du bien fondé ou non du placement en détention provisoire. Elle ajoute qu'aucune preuve de l'aggravation de l'état psychologique liée à la vétusté de l'établissement ou aux conditions de détention n'est rapportée et qu'au contraire une partie de la détention était justifiée, ce qui doit conduire à limiter le choc psychologique et par conséquent l'indemnisation de ce préjudice moral pour lequel elle offre 3.900 €.

Elle sollicite que la somme réclamée au titre des frais irrépétibles soit rapportée à de plus justes proportions.

Monsieur le procureur général, qui indique que la durée de la détention provisoire ouvrant droit à indemnisation est de deux mois et vingt neuf jours, reprenant pour le reste une argumentation similaire à celle de l'agent judiciaire de l'Etat, estime que l'indemnisation du préjudice moral doit être limitée à 1.000 € et qu'il convient de débouter Kamel Y... sa demande au titre des frais irrépétibles.

CECI ETANT EXPOSE: Nous, premier président,

Sur la recevabilité de la requête.

En la forme :

Considérant qu'ayant fait l'objet d'une procédure de comparution immédiate renvoyée ensuite devant l'un des juges d'instruction du Tribunal de grande instance de Nantes, Kamel Y... a été mis en examen des chefs de violation de domicile, dégradations d'un bien appartenant à autrui, recel de vol, agressions sexuelles sur mineure de 15 ans, violences n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail sur mineure de quinze ans, port d'arme de 6ème catégorie et entrée ou séjour irrégulier d'un étranger en France.

Considérant que, détenu provisoirement à compter du 14 juin 2011 et jusqu'au 27 février 2012 date de sa comparution devant le tribunal correctionnel de Nantes devant lequel il avait été renvoyé des chefs de violation de domicile, recel de vol, port d'arme prohibée de 6ème catégorie et infraction à la législation sur les étrangers, Kamel Y... a bénéficié d'une décision définitive de non lieu en date du 27 janvier 2012 pour les autres délits pour lesquels il avait été mis en examen;

Considérant que se fondant sur cette décision pour présenter sa requête en indemnisation de la détention provisoire qu'il a subie, celle-ci est recevable en la forme pour avoir été déposée le 11 juin 2012 , soit dans le délai légal de six mois suivant la date à laquelle l'ordonnance de non lieu partiel comme les dispositions du jugement de condamnation sont devenues définitives .

Au fond:

Considérant, que Kamel Y... a subi une détention provisoire du 29 mai 2001 au 27 février 2012, soit pendant 8 mois et 29 jours;

Considérant que n'ayant jamais été condamné avant l'affaire pour laquelle il avait été placé en détention provisoire, et qu'ayant été condamné après décision définitive de non lieu partiel et renvoi devant le tribunal correctionnel pour des infractions pour lesquelles le quantum maximum de la peine d'emprisonnement encourue n'excédait pas cinq ans, la détention provisoire subie ne pouvait excéder quatre mois en application de l'article 145-1, alinéa 1, du code de procédure pénale;

Que, par ailleurs, la condamnation prononcée à l'encontre de Kamel Y... a été l'emprisonnement pour une durée de six mois;

Considérant en conséquence que Kamel Y... est recevable à obtenir indemnisation de la détention provisoire subie au-delà de la durée excédant quatre mois outre la fraction de la détention accomplie au-delà de cette durée au titre de l'exécution de sa peine, soit au total pour 2 mois et 29 jours;

- Sur le montant de l'indemnisation;

Considérant que les paramètres suivants doivent être pris en compte pour évaluer le préjudice moral subi par M. Y... à raison de la durée de la détention indemnisable;

Que le requérant était de nationalité tunisienne, âgé de 28 ans au moment des faits, célibataire et déclaré comme étant sans domicile fixe;

Qu'il s'agissait de son premier séjour en prison mais que l'appréciation du choc carcéral, toujours plus important lors d'une première incarcération, ne peut être pris en considération que de façon minorée , alors que les six premiers mois de la détention provisoire ont été justifiés et couverts par le quantum de la peine prononcée pour les infractions dont le requérant a été déclaré coupable; que dès lors, la partie injustifiée de la détention n'a commencé qu'à l'issue de ces six premiers mois à une date où le choc carcéral initial se trouvait plus atténué;

Considérant que si Monsieur Y... allègue n'avoir été sur le territoire français que depuis quelques mois, cette circonstance ne saurait aggraver le préjudice moral subi alors qu'il ressort des pièces de la procédure annexées que celui-ci s'exprimait en français sans interprète ce qui est élément qui exclut de prendre en compte comme facteur particulièrement isolant sa situation d'étranger dont il ne saurait se prévaloir alors que sa présence sur le territoire français n'était couverte par aucun titre régulier;

Considérant qu'au vu des éléments qui précèdent l'indemnisation du préjudice moral subi par M. Y... sera fixée à 4.200 €;

- Sur les frais irrépétibles

Considérant que M. Y... bénéficie de l'aide juridictionnelle totale accordée par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Rennes en date du 15 juin 2012;

Qu'il n'apparaît pas que l'équité commande au vu des circonstances de la cause de faire application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à supporter directement la charge de frais irrépétibles que le bénéficiaire aurait exposés s'il n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle;

PAR CES MOTIFS :

Statuant par décision contradictoire rendue par mise à disposition au greffe de la cour,

Vu les articles 149, 149-1 à 149-4, 150, R 26 et suivants du code de procédure pénale,

- En la forme, déclarons recevable la requête en indemnisation formée par M. Kamel Y...;

- Au fond, condamnons le Trésor Public à verser à Kamel Y... la somme de 4.200 Euros (QUATRE MILLE DEUX CENTS EUROS) en réparation de son préjudice moral;

- Rejetons toutes autres demandes;

- Condamnons le Trésor public aux dépens.

Le greffier en chef Le Premier Président

Pascale JEGOU Philippe JEANNIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Juridiction du premier prÉsident
Numéro d'arrêt : 12/00008
Date de la décision : 17/04/2013
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2013-04-17;12.00008 ?
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