1ère Chambre
ARRÊT N° 105
R.G : 12/08452
Mme [I] [Z] épouse [O]
C/
Me [E] [P]
Mme [H] [Z]
M. [D] [U]
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 MARS 2015
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Xavier BEUZIT, Président,
Monsieur Marc JANIN, Conseiller,
Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller, entendue en son rapport
GREFFIER :
Madame Marlène ANGER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 27 Janvier 2015
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 10 Mars 2015, date indiquée à l'issue des débats.
****
APPELANTE :
Madame [I] [Z] épouse [O]
née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Dominique TOUSSAINT de la SELARL TOUSSAINT DOMINIQUE, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉS :
Maître Hélène LASCEVE-CATHOU
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Amélie AMOYEL-VICQUELIN de la SELARL AB LITIS-SOCIETE D'AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Assisté de Me Thierry CABOT de la SELARL EFFICIA, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
Madame [H] [Z]
née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 1] (50) [Localité 1]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Isabelle CELERIER de la SELARL CELERIER, avocat au barreau de RENNES
Monsieur [D] [U]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Thomas NAUDIN, avocat au barreau de RENNES
*****
Vu l'arrêt avant dire droit rendu par cette cour le 08 avril 2014, auquel il convient de se référer pour l'exposé du litige.
Par actes du 02 mai 2014, Madame [O] a appelé à la cause Maître [P] et Monsieur [D] [U].
Par conclusions du 24 juillet 2014, Monsieur [U] a indiqué que la déclaration ISF 2005 de Monsieur [Q] [Z] ainsi que l'acte du 03 novembre 2003 désignant le bénéficiaire de chacun des contrats ont été remis à Madame [O] lors de la réunion qu'il avait organisé le 27 juillet 2007 en son cabinet avec Maître [P], en présence de Monsieur [X] [Z] et de son conseil Maître [V] notaire à [Localité 5] et de Maître [T] notaire à Saint Malo et conseil de Madame [O] ; lors de cette réunion, non seulement les quatre contrats d'assurance vie ont été évoqués mais des documents en faisant expressément état ont été remis à Madame [O].
Par conclusions du 25 juillet 2014, Maître [P] a confirmé les explications de Monsieur [U].
Par conclusions du 07 novembre 2014, Madame [O] a contesté la véracité des affirmations de Monsieur [U] et de Maître [P], en mettant en exergue qu'elles n'étaient confirmées par aucun écrit ; elle a par ailleurs contesté que la transaction du 14 octobre 2010 ait pu porter sur la consistance et la valeur de la masse successorale. Elle a par conséquent sollicité que la cour :
infirme le jugement déféré,
la déclare recevable dans sa demande de partage complémentaire des capitaux des contrats d'assurance vie et subsidiairement, prononce la rescision du partage transactionnel du 14 octobre 2010,
dise que Madame [Z] devra rapporter à la succession de son mari les primes versées au titre des quatre contrats d'assurance vie avec intérêts de droit à compter de l'ouverture de la succession et capitalisation,
dise que les actifs figurant dans les livres de la Banque Cantonale Bernoise devront faire l'objet d'un partage complémentaire,
dise que Madame [Z] ne peut prétendre à aucune part sur les contrats d'assurance vie sauf le contrat SOGECAP et sur l'intégralité des capitaux figurant dans les livres de la Banque Cantonale Bernoise ainsi que sur le véhicule de Ténerife,
dise que Madame [Z] devra une indemnité de jouissance de 300 euros par mois concernant le véhicule de Ténérife, du décès jusqu'à la vente du véhicule,
désigne Maitre [F] pour procéder à l'établissement d'un acte de partage complémentaire et subsidiairement, en cas de rescision, d'un nouvel acte de partage,
condamne Madame [Z] au paiement d'une indemnité d'occupation de 800 euros par mois pour l'immeuble de [Adresse 5] à compter du 14 octobre 2010,
dise qu'elle-même n'est pas redevable des charges liées à la propriété de l'appartement de [Adresse 5] mais simplement de celles relatives à l'occupation de l'appartement,
déboute Madame [Z] de sa demande en paiement de la somme de 3.070,64 euros au titre de frais relatifs à l'appartement de [Adresse 5],
condamne Madame [Z] au paiement de la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamne Madame [Z] aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de distraction pour ceux dont il a été fait l'avance.
Par conclusions du 16 décembre 2014, Madame [H] [Z] a sollicité que la cour :
confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [O] de sa demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation pour la propriété de Ténérife,
infirme le jugement et condamne Madame [O] à lui payer la somme de 3.070,64 euros représentant la moitié de toutes les dépenses qu'elle a exposées pour la mise en vente de la propriété et le paiement des impôts et des charges,
déclare irrecevable comme nouvelle en appel la demande de Madame [O] relative aux comptes de la Banque Cantonale Bernoise, et subsidiairement, dise que Madame [O] doit se voir appliquer la peine du recel successoral sur ces fonds,
confirme le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les prétentions de Madame [O] relatives aux contrats d'assurance vie et à sa demande de partage complémentaire,
subsidiairement dise que les actes du 03 novembre 2003 constituent des dispositions testamentaires régulières et opposables,
déboute Madame [O] de sa demande subsidiaire tendant à voir qualifier les assurances vies de donations rapportables, ou de voir reintégrer les primes à l'actif successoral,
la déboute de toute prétention concernant le recel qu'elle invoque,
confirme le jugement en ce qu'il l'a condamnée à lui payer la somme de 4.000 euros de frais irrépétibles de première instance et l'a condamnée aux dépens,
la condamne au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
la condamne aux dépens avec droit de distraction.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, la cour rappelle que Monsieur [Z] est décédé le [Date décès 1] 2005 (et non le 19 novembre 2006 comme indiqué par erreur dans l'arrêt du 08 avril 2014) et qu'il en résulte que les dispositions de la loi du 23 juin 2006 ne sont pas applicables à sa succession.
D'autre part, la disposition ayant débouté Madame [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive n'est pas critiquée, et de ce fait est confirmée.
Sur la demande de partage complémentaire des fonds se trouvant sur les contrats d'assurance-vie :
Seules étant applicables les dispositions de l'ancien article 887 du code civil, les prétentions de Madame [O], ainsi que la Cour l'a rappelé dans l'arrêt avant dire droit, ne peuvent s'analyser que comme une demande de rescision, un dol étant invoqué par l'appelante, de surcroît pour un montant supérieur à l'actif net partagé dans l'acte du 14 octobre 2010.
En l'espèce, la cour considère que ce dol n'est pas démontré face aux conclusions de Maître [P] et de Monsieur [U] selon lesquelles toutes les pièces relatives aux contrats d'assurance-vie ont été remises à Madame [O] lors du rendez-vous qui s'est tenu le 28 juillet 2007 dans les bureaux de Monsieur [U].
En effet, ce rendez-vous s'est tenu en présence de Maître [T], notaire, conseil de Madame [O], de Maître [V], notaire, conseil de son frère Monsieur [X] [Z], et de Monsieur [X] [Z].
Dès lors, Madame [O] avait des moyens de preuve à sa disposition pour contredire les conclusions de Maître [P] et de Monsieur [U], moyens qu'elle n'a pas mis en 'uvre alors que repose sur elle la charge de la preuve.
D'autre part, si Madame [O] ne pouvait demander des renseignements sur des contrats dont elle ignorait l'existence, elle savait que Madame [Z] détenait les avis d'impositions des années ayant précédé le décès de Monsieur [Z].
Dès lors, compte tenu des termes de son assignation du 23 décembre 2008 (déjà cités dans l'arrêt avant dire droit du 08 avril 2014), la transaction signée le 14 Octobre 2010 impliquait nécessairement qu'elle ait eu communication des documents dont elle savait qu'ils étaient en la possession de Madame [Z] et pouvait lui permettre d'apprécier la consistance de la masse partageable.
Il en résulte que Madame [O], en signant la transaction du 14 octobre 2010, a reconnu avoir eu communication des déclarations ISF de Monsieur [Z] et par conséquent, de la déclaration ISF de 2005 sur laquelle est mentionnée les contrats d'assurance litigieux et le montant du capital placé sur chaque contrat.
En conséquence, le dol n'est pas démontré et le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de Madame [Z] relatives aux contrats d'assurance vie.
Sur les fonds se trouvant sur les comptes de Banque Cantonnale Bernoise :
Quoique nouvelle en appel, la demande est recevable comme connexe à la demande de partage complémentaire présentée en première instance.
Il n'est démontré par aucune des parties que l'existence de ces fonds ait été connue de l'autre avant la signature de l'acte de partage du 14 octobre 2010 et il en résulte que les accusations mutuelles de recel auxquelles elles procèdent sont infondées.
Il convient donc de constater que ces fonds ont été omis dans le partage, et par application des dispositions de l'article 887 ancien, d'ordonner un supplément de partage, pour lequel sont désignés conjointement Maître [P] et Maître Fallon-Piriou.
Sur la propriété et la voiture de Tenerife :
Aux termes de l'acte de partage du 14 octobre 2010, l'appartement de Ténérife est resté en indivision entre les parties, Madame [O] ayant donné mandat à Madame [Z] d'effectuer les démarches nécessaires à sa mise en vente.
Pour autant, une telle procuration n'impliquait pas l'attribution de la jouissance exclusive de l'appartement à Madame [Z] durant le temps nécessaire à la vente.
Or, Maître [F], en 2011, a demandé deux fois à Maître [P] de lui transmettre un jeu de clefs de l'appartement, ce à quoi Maître [P] a fini par répondre qu'elle considérait que le mandat donné à Madame [Z] impliquait que lui était accordée la jouissance de la maison.
Il est donc démontré que Madame [O] n'a jamais reçu de jeu de clefs de l'appartement et dans ces conditions, Madame [Z] doit être considérée comme en ayant eu la jouissance exclusive depuis le partage.
Dès lors, Madame [Z], par application des dispositions de l'article 815-9 du code civil, est redevable d'une indemnité à l'indivision, de la date du 15 octobre 2010 à celle à laquelle elle remettra un jeu de clefs à Madame [O].
L'indemnité de 800 euros par mois réclamée par Madame [O] est en rapport avec la valeur de l'appartement et il est fait droit à sa demande (sous réserve de versement de l'indemnité à un compte d'indivision).
De la même façon, l'indivision doit supporter les charges de cet appartement avancées par Madame [Z] ; cette dernière sera toutefois déboutée de sa demande des charges relatives au véhicule, qui ne figure pas dans l'acte de partage et dont elle ne démontre pas qu'il ait fait partie de la succession de Monsieur [Q] [Z] ; de la même façon, Madame [O] est déboutée de toute demande relative à ce véhicule, sur lequel aucune précision n'a été donnée à la cour par l'une ou l'autre des parties.
D'autre part, il est fourni un décompte en français (pièce 79) puis de très nombreuses pièces en espagnol, non traduites, sans aucune explication du passage des pièces espagnoles au décompte français ; dès lors, la cour ne peut vérifier les comptes présentés par Madame [Z].
Il sera dit dans ces circonstances que l'indivision a la charge de rembourser à Madame [Z] toutes les sommes avancées par elle depuis l'acte de partage et relatives aux impôts de toute nature liés à la propriété et à l'occupation du bien, aux abonnements d'électricité et d'eau, à l'assurance du bien et aux charges de copropriété.
Il appartiendra ensuite aux parties d'établir un compte en rappelant que toute indivisaire a droit à sa part annuelle dans les bénéficies, déduction faite des charges qui lui sont opposables.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Chacune des parties succombant partiellement, l'équité conduit à dire qu'elles garderont à leur charge leurs propres frais irrépétibles et dépens, de première instance comme d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les prétentions de Madame [O] relatives aux contrats d'assurance-vie souscrits par Monsieur [Q] [Z] et en ce qu'il a débouté Madame [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
L'infirme pour le solde ;
Statuant à nouveau :
Condamne Madame [H] [Z] à payer à l'indivision [Z]-[O] une indemnité d'occupation de 800 euros par mois du 15 octobre 2010 jusqu'à ce qu'il soit remis à Madame [O] un jeu de clefs de l'appartement de Ténérife ;
Condamne l'indivision [Z]-[O] à rembourser à Madame [H] [Z] les charges avancées par elle pour la conservation de l'appartement de Ténérife, soit les impôts de toute nature liés à la propriété et à la conservation du bien, les abonnements d'électricité et d'eau, l'assurance du bien et les charges de copropriété ;
Renvoie les parties à l'établissement d'un compte de l'indivision et rappelle que tout indivisaire a droit à sa part annuelle dans les bénéfices déduction faite des charges qui lui sont opposables ;
Déboute les parties de leurs prétentions relatives à un véhicule automobile se trouvant à Ténérife ;
Y ajoutant :
Ordonne le partage complémentaire des fonds se trouvant sur les comptes ouverts au nom de Monsieur [Q] [Z] dans les livres de la Banque Cantonale Bernoise ;
Désigne Maître [P] et Maître Fallon-Piriou pour y procéder, sous le contrôle de Monsieur le Président du tribunal de grande instance de Rennes avec faculté de délégation ;
Dit que chacune des parties gardera à sa charge ses propres dépens et frais irrépétibles, de première instance comme d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT